PATHOLOGIES NEUROMUSCULAIRES - L’ÉVOLUTION DES CONNAISSANCES
DOSSIER
Neurologies • Avril 2012 • vol. 15 • numéro 147 143
- une évolution par poussées est
volontiers évocatrice d’un proces-
sus inflammatoire, mais peut aussi
se rencontrer dans certaines neu-
ropathies métaboliques (porphy-
ries, mais aussi maladie de Fabry,
maladie de Tangier) ;
- enfin, axiome incontournable,
une neuropathie récente et ra-
pidement évolutive sans cause a
priori, impose un bilan complet
et parfois rapide, allant parfois
jusqu’à la biopsie de nerf.
• Si l’aréflexie est quasi constante,
il est important d’en préciser l’éten-
due en la corrélant au déficit sensi-
tif ou moteur constaté. En eet, une
aréflexie diuse présente d’emblée
ou contrastant avec un déficit foca-
lisé, voire uniquement distal, est un
indice très important pour suspec-
ter un processus non longueur-dé-
pendant comme on peut l’observer
dans les ganglionopathies ou les
polyradiculonévrites chroniques
(PRNc) par exemple.
• Si la plupart des neuropathies
sont sensitives et motrices, cer-
taines ont une présentation uni-
quement ou quasi exclusivement
sensitive ou motrice, caractéris-
tique fondamentale dans certains
cadres syndromiques voire étiolo-
giques.
Par exemple, une neuropathie sy-
métrique motrice aiguë évoque
une forme axonale motrice pure
de syndrome de Guillain et Barré
(avec anticorps antigangliosides
de type IgG, souvent précédée
d’une infection à Campylobacter
jejuni), ou une porphyrie.
• En cas d’installation progressive,
une participation proximale
symétrique “pseudomyopa-
thique” se rencontre dans cer-
taines PRNc, alors qu’une forme
motrice pure asymétrique fait
classiquement discuter une neu-
ropathie multifocale à blocs de
conduction. Inversement, une
neuropathie exclusivement sen-
sitive (2) ore au clinicien deux
orientations possibles. Soit elle
est symétrique et distale, et cette
présentation se rencontre dans
de nombreuses situations étio-
logiques ; par contre, une forme
asymétrique ou non longueur-dé-
pendante est un pattern très évo-
cateur d’une neuronopathie sen-
sitive ou ganglionopathie (8), plus
rarement d’une multineuropathie
sensitive.
• Une neuropathie ataxiante
constitue un cadre très particu-
lier. Elle s’observe plus volontiers
dans les neuropathies ayant une
composante sensitive profonde
prédominante, associée parfois à
un tremblement. Trois diagnostics
doivent être évoqués en première
ligne : PRNc sensitive, gangliono-
pathie ou neuropathie avec anti-
MAG. L’électroneuromyogramme
(ENMG) va alors occuper une
place déterminante. Dans certains
cas, l’ataxie ne sera pas sensitive
mais cérébelleuse et l’association
“neuropathie et syndrome céré-
belleux” ouvre un champ étiolo-
gique très particulier (3).
• Si le déficit sensitif touche ex-
clusivement les petites fibres avec
hypoesthésie thermoalgique isolée
(4), la présentation est trompeuse
car l’aréflexie est absente. Elle est
de répartition plus volontiers lon-
gueur-dépendante avec troubles
sensitifs quadridistaux (sauf dans
la forme neuronopathique décrite
par Gorson et al.) (5). Parfois, cette
atteinte des petites fibres est asso-
ciée à une dysautonomie qu’il faut
systématiquement rechercher à
l’interrogatoire : diarrhées chro-
niques, troubles génito-sphinc-
tériens, fluctuations tensionelles.
Si elle peut évoluer ensuite vers
une atteinte plus globale des
fibres sensitives, un tel début se
rencontre sous nos contrées dans
un cadre assez restreint d’étiolo-
gies : diabète, amylose, syndrome
de Gougerot-Sjögren, maladie de
Fabry… Pour cette dernière, une
accentuation des symptômes sen-
sitifs subjectifs aux changements
de température est très évocatrice.
• Si les douleurs sont fréquentes
au cours des neuropathies, elles
constituent rarement un indice
diagnostique en soi. Par contre,
leur absence est inhabituelle dans
certains cadres étiologiques : gan-
glionopathies paranéoplasiques,
neuropathies des petites fibres,
certaines neuropathies toxiques…
• Certaines neuropathies s’accom-
pagnent d’une atteinte des nerfs
crâniens. Elle est classique dans
le syndrome de Guillain-Barré
(paralysie faciale en particulier)
et parfois rencontrée au cours de
certaines PRNc. L’existence de
troubles oculomoteurs est évo-
catrice du CANOMAD (chronic
ataxic neuropathy, ophthalmople-
gia, IgM paraprotein, cold aggluti-
nins and disialosyl antibodies), des
mitochondriopathies ou du syn-
drome de Miller-Fisher. Une dys-
phagie ou une dysphonie est aussi
décrite dans le SANDO (sensory
ataxic neuropathy with dysarthria
and ophthalmoparesis) ou le CA-
NOMAD. Enfin, une hypoesthésie
faciale est parfois associée à cer-
taines neuropathies du syndrome
de Gougerot-Sjögren, mais peut
aussi s’observer au cours d’une
ganglionopathie.
CARACTÉRISTIQUES
EXTRINSÈQUES DE LA
NEUROPATHIE
Un examen général et neurolo-
gique complet sont impératifs
dans la démarche diagnostique