pourquoi y-a-t-il dans certaines situations en phase terminale

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UNIVERSITE DE RENNES 1
Faculté de Médecine
_____________________________________________________________________
Mémoire
en vue du Diplôme Inter-Universitaire de
Soins Palliatifs et Accompagnement
Session 2008 - 2010
Pourquoi y a-t-il dans certaines situations en phase
terminale confusion entre anxiolyse et sédation ?
KEESMANN Kirsten Greth
Médecin
Guideur : GHNASSIA Corinne
Pharmacien
Présenté et soutenu le 10 juin 2010
1
REMERCIEMENTS
Aux patients et aux familles
qui nous enseignent pour peu que l‟on veuille bien se laisser guider.
A l’ensemble des soignants
qui ont participé à cette enquête et nous apprennent au quotidien la formidable
aventure humaine qu‟est le soin et l‟accompagnement
A Corinne Ghnassia
guideur enthousiaste et patiente, elle m‟a accompagnée tout au long de ce
travail avec ses conseils avisés et sa disponibilité, sans oublier la joie de
vivre, l‟amour de la langue française et les fou-rires…
A Vincent Morel
pour ses conseils précieux
et à toute l’équipe de l’enseignement de DIU de Soins Palliatifs et Accompagnement
pour la qualité de l‟enseignement apporté et la richesse des débats suscités
A Marielle, Agnès, Florence et Patrice
pour leurs conseils, leur soutien et leur savoir faire avec un travail
passionnant et enrichissant à leur côté au quotidien
A Emilie et Sylvie
Pour leur aide logistique et leur disponibilité
2
A Cécile et Sonia
pour leur patiente, leur soutien et leur compréhension
A ma famille
Qui m‟a soutenu et accompagné malgré la distance
A mes amis
Pour leur soutien moral et leur présence
I dedicate it to Corine
sans laquelle je ne serais pas ici aujourd‟hui
an meinen Vater
und « an die Musik »
3
“Do not go gentle into that good night,
Old age should burn and rave at close of day ;
Rage, rage against the dying of the light”
Dylan Thomas
« …serein… »
4
SOMMAIRE
I . INTRODUCTION
09
I-1 Pourquoi un travail sur le sujet
09
I-2 Architecture du document
12
II . CADRE CONCEPTUEL
13
II-1 Anxiété et anxiolyse
13
II-1.1 Pourquoi parler d‟anxiolyse ?
13
II-1.2 De quel apaisement parle-t-on?
13
II-1.3 Comment pouvons-nous diagnostiquer cette anxiété ?
15
II-1.4 Quels sont les signes cliniques pouvant faire évoquer une anxiété ?
16
II-1.5 Existe-t-il des causes ou des facteurs favorisant l‟anxiété qui méritent
d‟être identifiés ?
17
II-1.6 L'anxiété de qui ?
19
II-1.7 Et si c‟était surtout autre chose?
19
II-1.8 Comment évaluer la présence et l‟intensité de l‟anxiété?
21
II-1.9 Quand traiter?
21
II-1.10 Quel traitement de l'anxiété en soins palliatifs?
22
II-2 Vigilance, conscience
24
II-3 Qu’est-ce que la phase terminale
24
II-4 La sédation pour détresse en phase terminale et dans des situations
spécifiques et complexes
26
II-4.1 Définition de la sédation en soins palliatifs
26
II-4.2 Indications de la sédation en soins palliatifs
28
II-4. 3 Les préalables à la sédation
30
II-4. 4 La mise en œuvre
30
II-4.4.1 La molécule
30
II-4.4.2 Ses effets secondaires
31
II-4.4.3 Le protocole de traitement
31
II-4.4.4 L‟évaluation
31
II-4. 5 le principe du double effet et l‟intention
31
5
II-5 Une enquête dans les services
32
II-6 Les mêmes interrogations soulevées par une EPP
34
III . ENONCE DE LA PROBLEMATIQUE
35
III-1 L’approche institutionnelle
35
III-2 L’approche organisationnelle
35
III-3 L’approche psychologique et symbolique
35
III-4 L’approche théorique
36
IV . ENONCE DES HYPOTHESES
37
V. METHODOLOGIE
38
V-1 Le choix de la population et du lieu
38
V-2 Le choix de l’outil
39
V-3 Modalité de recueils des données
39
V-4 Le guide d’entretien
41
VI. RESULTATS ET ANALYSE DES ENTRETIENS
VI-1 Thème anxiété et anxiolyse
43
43
VI-1.1 Arguments et attentes du traitement anxiolytique
43
VI-1.2 Evaluation du traitement et des effets secondaires
46
VI-1.3 Evaluation des troubles de vigilance
47
VI-1.4 Le midazolam utilisé comme anxiolytique et dans le cadre de la
Sédation
49
VI-1.5 Les modalités de prescription du midazolam dans le cadre de
l‟anxiolyse
51
VI-1.5.1 La prescription n‟est pas codifiée
51
VI-1.5.2 La surveillance n‟est pas plus établie
52
VI-2 Thème sédation
52
VI-2.1 Le but de la sédation
52
VI-2.2 Moment et durée de la sédation
53
VI-2.3 La sédation est-elle une anxiolyse
53
VI-2.4 Les indications et la mise en œuvre de la sédation
55
6
VI-2.5 Décider de l‟indication de sédation chez un patient avec
des troubles de communication
57
VI-2.6 Modalités de prescription d‟une sédation
57
VI-2.7 Surveillance de la profondeur de la sédation
58
VII. DISCUSSION
59
VII-1 La difficulté du diagnostic de l’anxiété
59
VII-2 Que proposer au patient ?
60
VII-2.1 L‟influence de la proximité de la fin de vie sur les attentes et
la tolérance des troubles de vigilance
61
VII-2.2 Le patient serein face à la mort
61
VII-2.3 Le « double effet »
62
VII-3 Peut-on maintenir un traitement à but anxiolytique malgré
l’apparition d’effets secondaires ? Si oui, lesquels ?
63
VII-4 La molécule de toutes les vertus ?
64
VII-5 Qu’est-ce que la sédation ?
66
VII-5.1 Une anxiolyse souvent…
66
VII-5.2 Surtout profonde dans des situations de détresse aigue
67
VII-5.3 La souffrance morale et l‟agonie
68
VII-5.4 Le symptôme réfractaire
68
VII-6 Parler de sédation au patient et à la famille ?
69
VII-7 Anxiolyse – sédation – euthanasie
70
VII-8 Le protocole et la surveillance de la profondeur de la sédation
71
VII-9 Provoquer des troubles de vigilance
71
VIII. PROPOSITIONS
73
VIII-1 Des formations et groupes de réflexion à mettre en place
73
VIII-1.1 Des formations existantes à développer au sein de l‟hôpital
VIII-1.2 Des groupes de réflexion au sein des services
73
74
VIII-2 Organiser des groupes de parole pour les soignants
74
VIII-3 Utiliser des outils d’évaluation
75
VIII-3.1 Des échelles d‟évaluation de l‟anxiété et de son intensité
75
VIII-3.2 L‟évaluation de la vigilance
75
VIII-4 Des protocoles à proposer
76
7
VIII-5 Une fiche de surveillance de l’utilisation du midazolam
77
VIII-6 Nouvelle EPP avant et après mise en place des propositions
77
VIII-7 Réflexion autour de l’utilisation d’une molécule autre que le
midazolam pour l’anxiolyse
77
VIII-8 Travail en commun avec tous les acteurs en soins palliatifs
sur le plan régional
78
IX. CONCLUSION
79
X. BIBLIOGRAPHIE
82
XI. LISTE DES ANNEXES
89
XII. LISTE DES ABREVIATIONS
118
8
I. INTRODUCTION
________________________________________________________
I-1 Pourquoi un travail sur le sujet?
Jeune, j'avais déjà été confrontée à la souffrance d'une famille submergée par la douleur face à
un décès « mal accompagné » à l'hôpital.
Médecin généraliste de formation, j'ai été témoin en tant que stagiaire à l‟hôpital avant même
de débuter mes études médicales, du désarroi et de la perplexité des soignants, en premier lieu
des médecins, face à la fin de vie et à la souffrance qui s‟immisce dans un lieu
prévu pour
guérir des maladies.
Le médecin ouvre à peine la porte pour s‟informer si “ elle est toujours là ”, les autres
soignants attendent que “ ça arrive ”, de préférence assez rapidement, ne sachant pas
vraiment que faire.
Cette vision centrée sur maladie uniquement face à un patient qui n‟existait que par les
résultats des ses analyses et réponses aux traitements, m‟a interrogé pendant mes études de
médecine.
Le champ abandonné de ces “ investigations ” était pourtant celui du patient en fin de vie.
Non guérissable, on ne savait pas “ qu'en faire ”, pourtant je découvris chez ces patients une
richesse et profondeur d‟échange, de désir de vivre, mais aussi de souffrance, y compris
physique, face à laquelle je me sentais démunie et désireuse de trouver des réponses.
25 ans plus tard, je peux enfin revenir sur cette approche, enrichie d‟un bagage après des
activités variées, en cabinet libéral, service de médecine en hôpital psychiatrique, COTOREP,
service de soins de suite et depuis longtemps, toujours en cours, au centre de planification
familiale du Centre Hospitalier Bretagne Atlantique de Vannes ( CHBA).
Depuis un an et demi, l'intégration à l'équipe mobile de soins palliatifs de ce même hôpital
m'a amené à constater, dès mes premières rencontres avec les patients hospitalisés
l‟omniprésence près du lit des patients en phase terminale des « batteries » de seringues
électriques et du questionnement des familles, direct ou suggéré : “ à quoi ça sert tout ça, il
est en train de mourir… ! ”
De plus, mon attention a été attirée par la réflexion d‟un prêtre, lors d‟une formation au
personnel hospitalier en équipe mobile, au sujet de certains rites nécessitant la participation du
9
patient qui ne se pratiquaient presque plus, au désespoir de certaines familles. En effet, pour la
plupart, les patients en fin de vie à l'hôpital sont inconscients.
Cette remarque sous-tend-elle qu'actuellement les patients sont moins lucides à l'approche de
leur décès qu'il y a quelques années?
Qu‟est-ce qui a changé ?
Le constat que les patients vivent de plus en plus longtemps “ grâce ” aux traitements
palliatifs, se fait-il au détriment du patient de moins en moins réceptif ?
Administrés presque systématiquement, les médicaments symptomatiques dont les
morphiniques et les benzodiazépines, sont-ils en partie ou totalement responsables de ce
constat?
Qu‟en dit le patient, tant qu‟il peut encore dire ? Comment cette situation est elle vécue par
les familles, l‟entourage, les soignants ?
De part ma fonction, j‟ai assisté aux situations de patients, en phase terminale, chez qui
étaient prescrit du midazolam en continu à la seringue électrique “ parce qu‟il est angoissé ”.
Cette administration, souvent avec des doses stables ou augmentées parce « qu‟il n‟est pas
bien », malgré l‟apparition de troubles de vigilance pouvant aller jusqu‟à l‟inconscience,
même plusieurs jours avant le décès, était malgré tout maintenue.
Se pose alors le questionnement de certaines familles : « pourquoi dort-il ? Est-ce la faute des
médicaments? ”
Tout ce vécu m'a alors conduit à un certain nombre de questions :
Y a-t-il une demande et de quelle nature de la part des patients?
Quels sont les signes cliniques qui amènent à penser que le patient est angoissé ?
S‟agit-il réellement d‟angoisse ou plutôt d‟agitation, de confusion, de douleurs
incomplètement soulagées?
Est-ce l‟angoisse du patient qui est prise en compte, celle de la famille, des soignants ?
Suite à la question de la poursuite d'un traitement par midazolam en continu pour une patiente
à priori calme, mais endormie, la réponse médicale a été la suivante: « surtout pas, là, elle est
confortable. Il vaut mieux laisser comme ça. ». La famille, qui m'avait dit quelques jours
avant que leur mère avait exprimé en début de sa maladie qu‟elle ne supporterait pas de se
voire dépendante et souffrante, ne posait donc pas de question.
10
Pourquoi l‟apparition de troubles de la vigilance, un effet secondaire connu dans le cadre
d‟une anxiolyse, ne fait-elle pas modifier la prescription ?
Ces troubles de vigilance sont-ils acceptables? Pourquoi? Pour qui? Le patient ? Les
soignants, la famille ?
Souvent, dans ces situations de souffrances confuses, le recours à la molécule “ miracle ”, en
administration continue, sur chambre implantable dès qu‟elle existe, fait taire le patient
jusqu'à lui faire perdre sa conscience. Est-ce souhaitable?
Enfin, une histoire m'a touché plus particulièrement, en intervenant pour une patiente très liée
à mon cercle d‟amis personnels, qui était en phase terminale. Celle-ci, hospitalisée
initialement en service de chirurgie, ne pouvait plus recevoir de traitement par voie orale.
Elle recevait des doses importantes d‟antalgiques pour des douleurs mixtes difficiles à
soulager. Elle présentait des moments d‟agitation fréquents avec cris, insultes, chutes. De
petites doses de midazolam en discontinu (si besoin) aidaient la patiente à retrouver son
calme, propice à des moments d‟échanges avec son entourage.
Après le transfert de la patiente sur un lit identifié de soins palliatifs, son “ angoisse ”
importante dès son arrivée a conduit à une prescription de midazolam en continu, dont le
dosage a été augmenté le lendemain, la patiente n'était toujours “ pas bien ”, agitée et confuse.
Dosage jugé efficace quand cette patiente fut calme, mais inconsciente. Elle est décédée le
lendemain, sans avoir repris conscience, sans que ses amis aient pu échanger avec elle dans le
service.
Je n‟ai pu rencontrer la patiente après son transfert, mais ayant senti l‟importance des
échanges entre la patiente et son entourage, et le souhait des amis et des soignants qu‟elle « ne
souffre pas », j‟ai abordée lors du staff hebdomadaire cette augmentation des doses du
midazolam. Ne pouvaient-elles pas être baissées compte tenu de
l‟inconscience de la
patiente? La réponse du médecin fut : “ elle est bien comme ça, ce sera terrible si elle se
réveille ”.
Il semble donc, dans ce cas précis, que la sédation et l‟altération de la vigilance étaient
acceptables, peut être même considérée à l‟origine de l‟apaisement ; nous n‟étions donc plus
dans le cadre d‟une anxiolyse comme étiquetée, mais plutôt dans le cadre d‟une sédation, non
déclarée en tant que telle, discutée ni avec la patiente, ni avec l'entourage. Ce dernier était à la
fois interloqué, mais soulagé, comme l'équipe soignante, par “ le calme et la sérénité » de la
patiente.
11
Anxiolyse ? Sédation ? Pourquoi ce flou, cette confusion ? A qui profite la confusion?
Ce trouble du pourquoi, du comment, du quand, aboutit à des décisions qui sèment le doute
sur la prise en charge optimale de la patiente avant tout chose.
Se pose alors la question suivante :
POURQUOI Y A T IL DANS CERTAINES SITUATIONS EN PHASE TERMINALE
CONFUSION ENTRE ANXIOLYSE ET SEDATION ?
I-2 Architecture du document
Après avoir développé l'approche théorique et pratique autour de l'anxiolyse et la sédation
ainsi que leurs liens éventuels, nous émettrons 3 hypothèses.
Nous développerons la méthodologie utilisée pour rapprocher (ou non) ces hypothèses à la
réalité de terrain par des entretiens semi-directifs.
Nous avons choisi de proposer ces entretiens à des médecins et infirmières du service
d'oncologie du CHBA où sont intégrés les lits identifiés de soins palliatifs et qui sont donc par
la même très régulièrement confrontés à cette problématique.
Nous interprèterons ces recueils de terrain et les comparerons aux données éventuelles de la
littérature.
En fonction des résultats obtenus, nous tenterons d'avancer des propositions.
12
II. CADRE CONCEPTUEL
________________________________________________________
II-1 Anxiété et anxiolyse
II-1.1 Pourquoi parler d’anxiolyse ?
Selon la SFAP, il s'agit de « l'apaisement de l'anxiété » 1.
L‟anxiolyse est la fusion du radical de anxieux , du latin anxiosus et de lyse, du grec lusis,
signifiant « solution, dissolution »2. Il s‟agit donc de combattre, dissoudre l‟anxiété.
L‟anxiolyse, à l‟aide d‟un anxiolytique est l‟utilisation d‟un « médicament propre à combattre
l‟état d‟angoisse, d‟anxiété » 3.
Dans cette présentation, jusqu'à présent, la distinction entre les termes angoisse et anxiété,
sans parler de la peur, n'a pas été faite.
Nous remarquons d'ailleurs que dans la définition de l‟anxiolytique, angoisse et anxiété
semblent se confondre.
II-1.2 De quel apaisement parle-t-on?
La peur, du latin pavor est un « phénomène psychologique à caractère affectif marqué, qui
accompagne la prise de conscience d‟un danger réel ou imaginaire, d‟une menace »4.
Il s'agit donc d'une émotion liée à un événement, une menace concrète qui disparaît en même
temps que celle-ci.
Lorsque cette peur n'a pas d'objet, elle se transforme en
angoisse, du latin angustia: « étroitesse, lieu serré ». C'est
un « malaise psychique et
physique, né du sentiment de l‟imminence d‟un danger, caractérisé par une crainte diffuse
____________________________
1SFAP. La sédation pour détresse en phase terminale. Recommandations.Version longue 2004, p. 7. Consulté
sur www.sfap.org le 10.01.2010
2 Le Nouveau Petit Robert. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française.
Paris, 2010, p 1494
3 Ibid .p 111
4
Ibid. p 1880
13
pouvant aller de l‟inquiétude à la panique et caractérisé par des sensations pénibles de
constriction épigastrique ou laryngée.
L'angoisse au sens philosophique comme chez Kierkegaard et l‟existentialisme est une
« inquiétude métaphysique née de la réflexion sur l‟existence »5.
Au sens psychanalytique, selon Freud, l‟angoisse est « articulable à la perte d‟un objet
fortement investi…Pour Lacan, elle surgit au contraire lorsque le manque, cause du désir,
vient à ne pas manquer, et nous précipite comme sujet dans la situation de l‟inquiétante
étrangeté… »6. Donner une date de mort, une échéance, met le sujet face à l‟innommable, et
fait surgir l‟angoisse.
On cerne et comprend mieux sa signification lorsque l'on analyse ses contraires: « placidité,
sérénité, tranquillité »7.
L’anxiété, du latin anxietas est un « état d‟angoisse ».
Selon la définition de la SFAP, « l'anxiété est un état de désarroi psychique ressenti en face
d'une situation et s'accompagne d'un sentiment d'insécurité » 8
Les termes anxiété et angoisse sont associés, étant tous deux
l'expression physique et
psychique d'un « affect désagréable, douloureux, gênant que l'on voudrait faire disparaître,
dont on voudrait se protéger [et dont] l'origine, sa source, ses causes demeurent inconnues à la
conscience, ce qui en accroît encore le caractère oppressant » 9. « L'angoisse » étant le versant
somatique de l'anxiété.10
Selon d'autres, « l''angoisse est une expérience émotive de même nature que l'anxiété mais en
plus intense »11.
L'anxiolyse a ainsi pour but de faire disparaître cet affect pour revenir à son contraire,
un état de sérénité et de tranquillité.
_____________________________________________
5
Le Nouveau Petit Robert. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française.
Paris, 2010, p 96
6
Chemama R, Vandermersch B. Dictionnaire de la Psychanalyse. Larousse 1998 ; p.21-23
7
Le Nouveau Petit Robert. Op. Cit.p.96
8
SFAP. La sédation pour détresse en phase terminale. Op. Cit. p. 7
9
Hanus, M. Les névroses. In : Psychiatrie intégrée de l‟étudiant. Fasc.2. Maloine
S.A., Paris, 1984, p.8
10
Ibid. p.15
11
Larivey M. L'anxiété et l'angoisse, les Vigiles de l'équilibre mental [en ligne]. Disponible
sur : Infopsy Ressources en développement. http://www.redpsy.com/infopsy/anxiete.html; consulté le 20.2.2010
14
Pour plus de lisibilité, nous allons utiliser uniquement le terme d‟ « anxiété » dans cet exposé.
II-1.3 Comment pouvons-nous diagnostiquer cette anxiété ?
Chez les patients en soins palliatifs, l'anxiété est présente chez plus de la moitié des patients12.
Pour certains, l'angoisse et la douleur sont les deux symptômes les plus fréquents et présents
chez plus de deux tiers des patients en phase palliative, et particulièrement chez les patients à
l‟hôpital13.
Comme la douleur, on pourrait qualifier l'anxiété comme une « expérience émotionnelle et
sensorielle désagréable », qui peut fortement diminuer la qualité de vie des patients, et à
l‟inverse aussi augmenter le ressenti des autres symptômes comme la douleur ou la
dyspnée14..
Elle peut être suffisamment désagréable ou symptomatique par son intensité, sa durée et ses
répercussions sur le fonctionnement quotidien pour que le patient demande une aide.
C‟est lorsque les patients manifestent une réponse exagérée et que l‟anxiété devient
souffrance que l‟on peut parler d‟anxiété pathologique15, 16.
Cette anxiété nécessite donc d'être identifiée, évaluée et traitée.
Comme la douleur17, l'anxiété peut être appréhendée de manière multidimensionnelle,
avec une composante sensorielle, émotionnelle et affective, cognitive et comportementale.
Elle peut être influencée par réactions de l'environnement familial, professionnel et soignant.
Son intensité peut être évaluée et ses causes éventuelles recherchées.
Elle s‟inscrit dans une souffrance et une expérience personnelle dont l'intensité et la gêne ne
peuvent in fine être déterminée que par le patient lui-même.
_______________________________
12
Laval G, Beziaud N, Villard ML. Traitements symptomatiques (hors antalgiques)
chez les patients adultes relevant de soins palliatifs. La Revue du Praticien 2009 ; 59(6) :785-797
13
Chvetzoff G, Perol D, Devaux Y et al. Etude prospective de qualité des soins et de qualité de vie chez des
patients cancéreux en phase palliative, en hospitalisation ou à domicile: analyse intermédiaire de l'étude
Trapado. Bull Cancer 2006 ; 93(2) : 213-21
14
Smith EL, Hann D, Ahles, TA et al. Dyspnea, anxiety, body consciousness, and quality of life in patients with
lung cancer.Journal of Pain and Symptom Management 2001; 21(4): 323-329
15
Dauchy S, Chauffour-Ader C. Prise en charge de l'anxiété en soins palliatifs: privilégier un traitement
étiologique. Med Pall 2002 ; 1 : 19-34
16
Jackson KC, Lipman AG. Drug therapy for anxiety in palliative care. Cochrane Database Syst
Rev.2004 ;(1)CD004596
17
ANAES. Evaluation et suivi de la douleur chronique chez l‟adulte en médecine ambulatoire. Service des
Recommandations et Références Professionnelles. Février 1999
15
II-1.4 Quels sont les signes cliniques pouvant faire évoquer une anxiété ?
Nous pouvons retrouver les différentes composantes multidimensionnelles18, 19, dont
la composante sensorielle avec ses manifestations physiques
- respiratoires (sensation de constriction ou d'oppression thoracique, une dyspnée)
- cardiovasculaires (palpitations, lipothymie, tachycardie, douleurs thoraciques atypiques)
- neuromusculaires (crispations, crampes, tremblements, agitation motrice, paresthésies,
acouphènes, vertiges)
- digestives (inappétence, nausées, spasmes coliques)
- neurovégétatives (sueurs, sècheresse buccale)
- une majoration d‟une plainte douloureuse préexistante ou une modification inexpliquée de
celle-ci
- une fatigue, des troubles du sommeil (retard d‟endormissement, ou réveils anxieux plutôt en
première partie de la nuit).
La composante affective peut se manifester par une anticipation dramatisée des évènements
futurs, une inquiétude, appréhension, crainte de conséquences indéterminées, verbalisation
d‟une peur excessive avec réassurance difficile, peur du processus de mourir, intensification
d‟un sentiment d‟impuissance douloureux et persistant.
Il peut s‟agir d‟un contenu cognitif avec une diminution de l‟attention, des difficultés de
concentration, une tendance à l‟oubli, une difficulté à faire des choix, une rumination, blocage
des pensées
La part comportementale peut se manifester par une irritabilité, une méfiance, une agitation
psychique ou motrice, une hyper vigilance ou un égocentrisme
Toutes ces manifestations sont souvent liées et d‟expression très variable. La crainte est
généralement
présente, mais aussi d‟expression variable, en particulier en fonction du
contexte socioculturel.
______________________________
18
Dauchy S. Op.Cit.p.20
Pautex S, Toni V, Bossert H et al. Anxiété dans le cadre de soins palliatifs. Revue Médicale Suisse 2006; 85
(2): p. 2478-2487
19
16
II-1.5 Existe-t-il des causes ou des facteurs favorisant l’anxiété qui méritent d’être
identifiés ?
L‟anxiété peut être en lien avec un trouble organique :
- d‟origine cardio-respiratoire (embolie pulmonaire, hémorragie interne,..)
- neurologique (tumeurs cérébrales,…),
- avec une douleur mal contrôlée. C‟est une des principales causes d‟anxiété 20, comme à
l‟inverse l‟angoisse peut majorer la douleur.
- Dans le cadre d‟un syndrome confusionnel, l‟angoisse peut être présente dans la phase
d‟installation ou d‟amélioration, lorsque le patient perçoit le trouble sans pouvoir le situer
dans son contexte du fait des troubles mnésiques.
- L‟anxiété peut être favorisée par un état fébrile, une dyspnée ou hypoxie, des troubles
métaboliques ou endocriniens.
L‟anxiété peut avoir une origine iatrogène21 :
- être secondaire à l‟introduction de corticostéroïdes, neuroleptiques (y compris le
métoclopramide), bronchodilatateurs, antihistaminiques, digitaliques et de benzodiazépines.
- A l‟inverse, le sevrage brutal en benzodiazépines et hypnotiques, corticoïdes, alcool,
nicotine, opioïdes, anticonvulsivants, clonidine peut aussi provoquer ces mêmes symptômes
d‟anxiété et agitation.
Ceci est une notion importante, car certains de ces molécules sont principalement administrés
par voie orale, voie d‟administration qui devient souvent impossible chez les patients en phase
très avancée.
L‟anxiété peut avoir une origine psychique principale :
- être un symptôme associé à un trouble psychiatrique comme un syndrome dépressif, des
troubles obsessionnels compulsifs, une psychose.
- Une anxiété chronique qui peut s‟accompagner d‟une dépendance alcoolique ou
médicamenteuse peut être majorée par l‟impossibilité de pouvoir avoir recours aux habitudes
toxiques. Elle peut aussi s‟accompagner d‟une focalisation sur des symptômes somatiques
_________________________________
20
Dauchy S. Op.Cit. p 21
Paice, J. Managing psychological conditions in palliative care: Dying need not mean enduring uncontrollable
anxiety, depression, or delirium. American Journal of Nursing 2002; 102(11): 36-42
21
17
existants.
Dans l‟approche thérapeutique de ces symptômes, il est important de garder en tête que la
préoccupation avec des symptômes physiques peut être moins perturbant pour le patient que
la confrontation à la maladie elle même22.
Mais le plus souvent, il s‟agit d‟une anxiété isolée, anxiété qui est alors la « traduction
émotionnelle et cognitive intense et gênante d‟un conflit interne (prise de conscience de
l‟aggravation somatique par exemple) ou externe (conflit familial, changement de lieu ou
d‟équipe soignante….) »23. Elle peut aussi correspondre à une réponse naturelle à l‟approche
de la mort.
La verbalisation de cette anxiété est essentielle car elle est le plus sensible à l‟information et
l‟échange, le soutien relationnel et affectif.
- Peut aussi survenir une attaque de panique durant de quelques minutes à quelques heures,
quelques fois nocturnes, avec des symptômes somatiques et des thèmes catastrophiques ou
phobiques, qui pourraient faire à tort évoquer des cauchemars ou une confusion nocturne.
L‟utilisation chronique des anxiolytiques est à éviter, ces troubles relevant plus de la
prescription de certains antidépresseurs.
- Un syndrome post-traumatique avec anxiété majeure et une reviviscence du traumatisme
vécu comme extrêmement menaçant pour le patient
nécessite une prise en charge
psychothérapeutique spécialisée.
L’approche étiologique de l’anxiété est essentielle, compte tenu de sa symptomatologie
clinique polymorphe, peu spécifique et fluctuante, de son interférence avec la vie relationnelle
ou même avec l‟acceptation des soins.
Cette approche est nécessaire dès le début de son apparition et tout au long
de
l‟accompagnement du patient, pour permettre de faire le lien entre les symptômes du patient
et son histoire.
__________________________________________
22
Lichter, I. Some psychological causes of distress in the terminally ill. Palliative Medecine, 1991; 5(2):
p.138-146
23
Dauchy S. Op.Cit. p 22
18
Cela permet d‟être au plus près de la réalité du patient et de répondre à sa demande de
manière le plus adapté possible.
Mais plus nous nous approchons vers la fin de vie, plus les contours des symptômes
deviennent flous, difficiles à rattacher ultérieurement à une cause plus précise ou accessible à
un traitement étiologique.
L‟anxiété du patient, dans son approche multidimensionnelle et de souffrance globale, est
aussi en lien avec son entourage et sous l‟influence du vécu et de l‟anxiété de celui-ci.
II-1.6 L'anxiété de qui ?
L‟anxiété du patient, éventuellement adaptative et bien tolérée, peut être majorée par la
décompensation anxieuse des membres de la famille ou du personnel médico-soignant et
relève ainsi plus de la prise en charge des accompagnants.
Chaque membre de la famille est confronté à ses propres angoisses face à la maladie, la
dégradation, la mort, et vit une crise personnelle24. Comme cet enfant terrifié par la mort de
son père et le réveillant régulièrement ou ce membre de la famille pressant le malade de
manger ou marcher25, cherchant à se rassurer lui-même, renforce l‟anxiété du patient. Il est
important de trouver des solutions alternatives, en passant par la verbalisation et le travail
pluridisciplinaire avec assistante sociale, psychologue, soutien spirituel,…pour permettre de
maintenir une proximité constructive avec le patient.
De même, la majoration de l‟anxiété du patient peut dépendre de « la capacité ou incapacité
temporaire parfois d‟une équipe à permettre au patient l‟expression et la validation
émotionnelle suffisante pour maintenir sa stabilité psychique »26.
II-1.7 Et si c’était surtout autre chose?
L’agitation n‟est pas toujours un signe d‟anxiété. Lorsque le patient présente des troubles de
communication et qu‟il est difficile d‟entrer en contact avec lui, l‟agitation peut être le seul
___________________________
24
Pillot J. Aspects psychorelationnels de la fin de la vie. Rev Prat 1999;49 :1057-62.
Paice, J. Op.Cit p 2
26
Dauchy S. Op.Cit. p 23
25
19
symptôme visible.
Elle peut être liée à une douleur, à un globe vésical ou un fécalome, une hypercalcémie, une
anoxie cérébrale, une dyspnée,
à l‟impossibilité de se mouvoir à cause de la faiblesse
musculaire.
Mais aussi être l‟effet secondaire paradoxal de médicaments sensés la combattre, comme les
neuroleptiques ou benzodiazépines27.
Le syndrome confusionnel28, pouvant atteindre 85% des patients cancéreux en phase
terminale, se caractérise souvent initialement par des signes pouvant faire penser à une
attaque de panique avec une agitation nocturne avec cris, chute, passage au dessus des
barrières, des cauchemars, une inversion du cycle nycthéméral, des modifications de caractère
avec irritabilité ou agressivité.
C‟est dans un second temps qu‟apparaissent des signes plus évocateurs avec une fluctuation
du niveau de vigilance, des troubles de mémoire et du langage, une désorientation temporospatiale, des hallucinations voir un délire de persécution, la persistance de l‟agitation ou au
contraire apparition d‟une léthargie.
Les causes peuvent être les mêmes que ceux d‟une anxiété, dont un traitement par
benzodiazépines.
Ainsi du point de vue de la prise en charge pharmacologiques, si un traitement
médicamenteux est envisagé, ce qui n‟est pas toujours recommandé, les neuroleptiques sont
au premier plan, les benzodiazépines pouvant même aggraver le syndrome confusionnel et les
troubles cognitifs29.
Il est important de garder à l‟esprit que l‟anxiété peut être un élément de l‟expression d‟une
souffrance plus globale du patient.
Cette souffrance, dans sa dimension physique, psychologique, émotionnelle, relationnelle,
sociale, culturelle n‟est pas toujours en relation avec l‟intensité des symptômes présentés 30.
___________________________
27
Lichter I, Hunt E. The last 48 hours of life. J Palliat Care 1990; 6(4):7-15
Reich M, Lassaunière J-M. Prise en charge de la confusion mentale (“delirium”) en soins palliatifs : l‟exemple
du cancer. Med Pall 2003 ; 2 : 55-71
29
Paice, J. Op.Cit. p 5
30
ANAES. Modalités de prise en charge de l'adulte nécessitant des soins palliatifs. Recommandations pour la
pratique clinique. Argumentaire. Décembre 2002.
28
20
L‟atteinte de l‟intégrité de la personne peut s‟exprimer par des affects qui ne sont que le
signe extérieur d‟une blessure, pas de la blessure elle-même. La disparition du symptôme par
un traitement et un accompagnement ne signifie en rien la disparition de la blessure ni de la
souffrance elle même31.
II-1.8 Comment évaluer la présence et l’intensité de l’anxiété?
L‟utilisation d‟échelles pour une identification plus objective des patients anxieux, de
l‟intensité de cette anxiété, de son évolution dans le temps peut être utile.
Cette évaluation peut faciliter des prises de décisions en donnant des critères communs à une
équipe.
Elle permet la transmission d‟information et sa traçabilité.
L‟échelle d‟auto-évaluation HADS (Annexe 3), qui détecte plus globalement la souffrance
psychologique sous forme de symptômes anxieux ou dépressif, est recommandée32.
Il existe des échelles d‟hétero-évaluation courtes comme l‟échelle de COVI (Annexe 4), mais
l‟hétero-évaluation est considérée comme moins pertinente que l‟évaluation par le patient luimême.
Ces échelles semblent peu adaptées aux patients en phase très avancée de la maladie avec
une symptomatologie plurifactorielle souvent difficile à « dénouer ».
Les échelles EVA, EN et EVS qui permettent une évaluation de l‟intensité du symptôme
ressenti et utilisés pour l‟évaluation de la douleur peuvent être un outil adapté à l‟évaluation
de l‟intensité de l‟anxiété par le patient et permettre un suivi dans le temps.
II-1.9 Quand traiter?
L„anxiété est donc une expérience personnelle dont l'intensité, la gêne et le souhait de
soulagement ne peuvent être déterminées que par le patient lui-même.
Se pose alors la question de la demande et des attentes du patient, demande dont l‟analyse
peut déjà avoir une action sur le symptôme.
_______________________
31
32
Cassel EJ. The nature of suffering and the goals of medicine. N Engl J Med 1982 ; 306:639-645.
Dauchy S. Op.Cit. p 25
21
Cette problématique mérite d‟être gardée à l‟esprit même quand le patient ne peut plus
participer à la prise de décision.
II-1.10 Quel traitement de l'anxiété en soins palliatifs?
L‟anxiolyse se définie selon la SFAP comme l‟apaisement de l‟anxiété et doit être distinguée
de la sédation.
Le traitement des symptômes anxieux en soins palliatifs se fait dans une approche globale en
associant des mesures pharmacologiques ou non33.
Parmi les mesures non pharmacologiques, qui peuvent suffire seules dans le cadre de l‟anxiété
légère et modérée et être complémentaire au traitement pharmacologique, notons l‟apport de
l‟équipe soignante dans une relation d‟aide, le toucher massage, la relaxation, la sophrologie.
La verbalisation et le soutien sont essentiels, par l‟équipe, le psychologue, un psychiatre en
cas de difficulté diagnostique. Le soutien spirituel peut être une aide importante.
Le traitement médicamenteux repose sur une prescription individualisée, avec traitement
systématique en cas de symptôme chronique et anticipatoire en cas de recrudescence de la
symptomatologie.
Il repose aussi sur le maintien de l‟autonomie du patient et de ses facultés relationnelles.
L‟utilisation de la titration permet la recherche de la plus petite dose efficace avec le moins
d‟effets secondaires possibles.
L‟inefficacité du produit ne peut être décrétée qu‟après la prise des doses maximales
tolérables.
En plus du traitement étiologique, la prise en charge médicamenteuse repose sur l‟utilisation
des
anxiolytiques
principalement
benzodiazépiniques,
les
neuroleptiques
et
les
antidépresseurs.
Les benzodiazépines à demi-vie courte sont en général préférables.
D‟après certains, les benzodiazépines devraient être limités à un usage de courte durée ou de
manière intermittente à cause du déclin de l‟effet anxiolytique et de l‟accumulation des effets
____________________________
33
Pautex S. Op.Cit.p.18
22
psychomoteurs34.
Lorsque la voie parentérale est nécessaire, le choix des molécules est restreint, seul existent le
diazepam, le clonazépam et le midazolam. Le lorazepam, très utilisé dans les pays
anglophones, n‟est pas commercialisé sous forme parentérale en France. Mais toutes les
benzodiazépines peuvent être administrées par voie sublinguale 35, certaines en intra rectal.
Les recommandations américaines préconisent comme anxiolytiques chez les patients en fin
de vie l‟utilisation du midazolam et du propofol pour des durées de traitement inférieur à 24
heures et le lorazépam pour des traitements plus prolongés36.
Il est important de garder à l‟esprit l‟interaction des benzodiazépines avec de nombreux
médicaments d‟utilisation courante en soins palliatifs comme les macrolides, la
ciprofloxacine, kétoconazole, les antidépresseurs imipraminiques et sérontoninergiques, les
antiacides, les morphiniques.
Toutes les benzodiazépines ont un effet sur la vigilance et donc un effet en général sédatif.
Pour réduire ce risque dans le cadre de l‟anxiolyse et avoir un effet anxiolytique avec un
minimum de sédation, certains proposent d‟utiliser préférentiellement l‟haloperidol ou la
risperidone37 (hors AMM).
Actuellement en France, le midazolam est fréquemment utilisé comme benzodiazépine
anxiolytique tout en étant officiellement la seule molécule recommandée par la SFAP dans
le cadre de la sédation. Nous reviendrons sur ses effets secondaires à prendre en compte.
___________________________
34
Barraclough J. ABC of palliative care. Depression, anxiety, and confusion. BMJ
1997;315(7119):1365-8.
35
AFSSAPS. Soins Palliatifs: spécificités d'utilisation des médicaments courants hors antalgiques.
Argumentaire.25 octobre 2002.
36
Jackson KC, Lipman AG. Drug therapy for anxiety in palliative care. Cochrane Database Syst
Rev.2004 ;(1)CD004596
37
Heyse-Moore L.Terminal restlessness and sedation : a note of caution. Palliat Med.2003 Jul ;17(5) :469
23
II-2 Vigilance, conscience
Nous venons de parler d‟effets sur la vigilance. De quoi s‟agit-il ?
Vigilance, conscience, faut-il faire une distinction?
La conscience est « l‟ensemble des activités cognitives qui nous permettent d‟attribuer une
signification et de répondre de façon appropriée aux stimulations sensitives et sensorielles, et
notamment… aux stimulations verbales ….La conscience est une fonction du cortex
cérébral»38. La conscience implique
- la vigilance, qui permet l‟attention et qui est une fonction du tronc cérébral,
- un fonctionnement sensori-moteur (vision, audition, sensibilité)
- l‟introspection, qui informe l‟individu de ses pensées, ses sentiments et émotions
La vigilance est l‟état de la personne éveillée et normalement consciente des stimuli internes
et externes et avec laquelle une relation significative peut être établie.
En soins palliatifs, l’échelle modifiée de Rudkin permet d‟évaluer rapidement la vigilance
des patients39, la question de son altération se pose en phase palliative et terminale de la
maladie.
II-3 Qu’est-ce que la phase terminale
L‟évolution d‟une maladie grave, potentiellement mortelle, est marquée par trois phases avec
des objectifs de soins différents, bien que conduits dans la continuité : la phase curative, la
phase palliative et la phase terminale40.
- En phase curative, tant qu‟une guérison ou rémission durable de la maladie est possible, la
question de la préservation de la quantité de vie au détriment de la qualité de vie peut se poser.
- En phase palliative, lorsqu‟il n‟y a plus de possibilité de guérison, la qualité de vie est au
________________________
38
Cambier J, Masson M, Dehan H. Vigilance et conscience. Sommeil et coma. In: Neurologie. Paris : Masson
1985. p. 108
39
Picard S, Picard H, Lassaunière JM. Comparaison du score à l'échelle modifiée de Rudkin au score de
Glasgow chez des patients hospitalisés en unité de soins palliatifs. Med Pal 2005; 4: 285-288
40
Circulaire DHOS/SDO/2005/101 du 22 février 2005 relative à l‟organisation des soins en cancérologie
24
centre des préoccupations avec deux objectifs qui peuvent se contredire : préserver la vie et
privilégier le confort en pesant les bénéfices et les charges pour le malade. Plus la maladie
s‟aggrave, plus les traitements visent à soulager les symptômes sources d‟inconfort.
Les possibilités d‟expression du patient sont privilégiées afin qu‟il puisse exprimer les
symptômes sources d‟inconfort et la souffrance qu‟il ressent 41.
Gardons à l‟esprit la notion de continuité des soins et donc un enchevêtrement de ces phases
comme le suggère ce schéma :
(source : http://medapod.univ-rennes1.fr/medcast5/wp-content/uploads/soins-palliatifs-2bis-2009.pdf )
- La survenue d‟une défaillance d‟une ou plusieurs fonctions vitales, neurologiques, cardiocirculatoires ou respiratoires définit le début de la phase terminale.
L‟objectif est de préserver le plus longtemps possible les possibilités d‟expression et donc la
conscience du patient en essayant de soulager les symptômes pénibles. Le confort étant une
notion subjective que seul le patient peut ressentir et indiquer ce qui est inconfortable.
La survie va de quelques heures à quelques semaines.
Bien que décider que quelqu‟un est en phase terminale est une entreprise difficile, car la
situation n‟est pas toujours si claire, et sa durée est très variable en fonction de la défaillance
organique sous-jacente42.
On peut distinguer deux phases, la phase préagonique et la phase agonique. Distinction utile
pour pouvoir apprécier le vécu du patient.
______________________________
41
Blanchet V. Grandes défaillances organiques dans le cadre des soins palliatifs. La Revue du Praticien. juin
2009 ;59(6): 780-784
42
Heyse-Moore L. Op.Cit.p.469
25
Car si certains traitements médicamenteux peuvent encore avoir du sens dans la première, ils
sont inutiles et disproportionnés dans la seconde43.
La phase préagonique, évoluant sans réanimation le plus souvent vers la phase agonique et
le décès, peut parfois être réversible et évoluer à nouveaux vers une phase palliative.
La conscience est variable, le patient peut être calme ou agité, comateux, conscient par
moment ou présenter un état de confusion aigue. La respiration s‟accélère de façon réflexe et
une cyanose périphérique peut apparaître. L‟encombrement bronchique est variable .Le pouls
s‟accélère, la tension artérielle est variable, apparaissent des marbrures et parfois une diarrhée
profuse. Le soutien de la famille est essentiel, mais il est important de garder un regard
clinique et de rechercher et de traiter si besoin d‟éventuelles sources d‟inconfort comme la
douleur, le globe vésical en cas d‟agitation, la dyspnée.
« L‟anxiété ou l‟angoisse sont évaluées et traitées de façon proportionnée et à bon escient »44.
En phase agonique qui dure rarement plus de quelques heures, irréversible et aboutissant à la
mort, apparaissent les premiers signes de décérébration. Le patient est inconscient, le réflexe
cornéen aboli, la fréquence respiratoire diminue et devient irrégulière, l‟encombrement est
constant avec des râles agoniques, le pouls est ralenti et les marbrures disparaissent parfois.
Le patient n‟a plus de mouvements volontaires ni de manifestations émotionnelles ni de
perceptions, donc pas de douleur ni de gêne respiratoire.
Ce sont des éléments importants pour l‟entourage, aussi bien familial que soignant.
II-4 La sédation pour détresse en phase terminale et dans des
situations spécifiques et complexes
II-4.1 Définition de la sédation en soins palliatifs
La vigilance des patients en soins palliatifs est comme nous l‟avons vu un élément de
préoccupation constant.
Seul le patient conscient peut exprimer sa souffrance et son inconfort est être en relation
avec le monde extérieur, son entourage en particulier.
____________________________
43
44
Blanchet V. Quelles conduites à tenir en phase terminale. Med Pal 2007 ;6 : 285-8
Blanchet V. Op.Cit. p.783
26
Mais l‟évolution de la maladie, les effets secondaires des traitements peuvent altérer cette
vigilance.
En soins palliatifs, « dans certaines situations exceptionnelles, singulières et complexes,
lorsque cette situation est vécue comme insupportable pour le patient, l‟on peut rechercher,
par des moyens médicamenteux, une diminution de la vigilance pouvant aller jusqu‟à la perte
de conscience, dans le but de diminuer ou de faire disparaître la perception d‟une situation
vécue comme insupportable par le patient, alors que tout les moyens disponibles et adaptés à
cette situation ont pu lui être proposés et/ou mis en œuvre sans permettre d‟obtenir le
soulagement escompté »45.
« Cette sédation peut être intermittente, transitoire ou continue et peut aller de la diminution
de la vigilance jusqu‟ à la perte de conscience ».
D‟après Le Petit Robert, le terme de sédation vient du latin sedatio et signifie « apaisement
par un sédatif », comme « sédation de la douleur »46.
La sédation est une technique courante en réanimation ou elle a pour but d‟améliorer le
confort du patient en luttant contre la douleur, l‟anxiété et le manque de sommeil, de faciliter
les soins et les actes techniques47.
Des recommandations publiés en 2002 et 2004 sous l‟égide de la SFAP et réactualisé en 2009
ont pour but d‟encadrer et d‟aider au questionnement autour de la sédation dans le domaine
des soins palliatifs.
Son indication à été étendue non seulement à la phase terminale, mais aussi à la phase
palliative. La réflexion a été élargie au domicile, la pédiatrie, la gériatrie et certaines situations
complexes.
Il est recommandé de ne pas qualifier la sédation, mais de l‟appréhender dans son contexte.
Ceci peut éviter la confusion dans les termes avec une euthanasie déguisée48 (sédation
terminale ?) ou éviter que le pronostic de la maladie change la justification ou la pratique
____________________________
45
SFAP. La sédation pour détresse en phase terminale et dans des situations spécifiques et complexes
Recommandations juin 2009. Consulté sur www.sfap.org le 10.01.2010
46
Le Nouveau Petit Robert. Op. Cit.p.2339
47
ANDEM. Conférence de consensus sur la sédation en réanimation, concept et pratique. 1993.
48
Krakaurer EL. Responding to intractable Terminal suffering. Ann Intern Med 2000; 133(7): 560
27
de la sédation, tout en plaçant des limites à la profondeur de la sédation ou à sa durée49.
La sédation est clairement définie comme étant ni une anxiolyse, ni une analgésie, ni un
somnifère.
II-4.2 Indications de la sédation en soins palliatifs
Ses indications en phase terminale sont les complications aiguës à risque vital immédiat et
les symptômes réfractaires. Est qualifié comme symptôme réfractaire en reprenant la
définition de Cherny et Portenoy50 « tout symptôme dont la perception est insupportable et
qui ne peut être soulagé en dépit des efforts obstinés pour trouver un protocole thérapeutique
adapté sans compromettre la conscience du patient. »
Pour décider selon ces auteurs qu‟un symptôme est réfractaire, le clinicien doit s‟apercevoir
que malgré des traitements invasifs ou non, ceux-ci n‟arrivent pas à un soulagement adéquat,
ou sont associés à une morbidité aigüe ou chronique excessive et intolérable, ou encore ne
permettent pas de contrôler le symptôme dans un laps de temps acceptable.
En dehors de la phase terminale, un symptôme réfractaire peut être une indication de
sédation intermittente ou transitoire, car en phase palliative, un symptôme vécu comme
pénible et réfractaire peut redevenir accessibles à des traitements après un temps de sédation
transitoire.
Les symptômes réfractaires les plus souvent cités sont la confusion mentale, l‟agitation, la
dyspnée, certaines douleurs, les nausées et vomissements51.
Ils sont à distinguer des symptômes difficiles qui peuvent répondre dans un temps acceptable
aux thérapeutiques qui permettent un soulagement adéquat en préservant l‟état de conscience
sans effets secondaires excessifs. « C‟est dans cette différence que se trouve toutes les
difficultés de la décision médicale, de ses implications éthiques et le risque de dérive »52.
______________________________
49
Cellarius V, Blair H. Justifying different levels of palliative sedation. Ann Intern Med. 2010;
152(5): 332
50
Cherny NI, Portenoy RK. Sedation in the management of refractory symptoms: guidelines for evaluation and
treatment. J Palliat Care 1994; 10(2):31-38.
51
Blanchet V, Viallard M-L, Aubry R. Sédation en médecine palliative: recommandations chez l'adulte et
spécificités au domicile et en gériatrie. Medecine palliative-Soins de support-Accompagnement-Ethique 2010 ;
9 : 59-70
52
Filbet M. Les situations extrèmes en soins palliatifs. La sédation a-t-elle une place? Gérontologie et société
2004; 108 : 129-136
28
Qu‟en est-il de l‟anxiété ? Elle entre dans le cadre des détresses d‟origine psychologique et
émotionnelle qui peuvent parfois déboucher sur une sédation, intermittente ou temporaire.
Pour Morita53, la souffrance psycho-existentielle est une
indication exceptionnelle de
sédation. Parmi celle-ci, son étude rapporte 33% d‟indications pour angoisse de
mort/peur/panique. D‟autres ne retiennent l‟indication pour angoisse profonde que pour les
patients proche du décès54. Braun précise par ailleurs qu‟il distingue clairement la sédation de
l‟utilisation de médicaments à propriétés sédatives utilisés pour le traitement de l‟anxiété et de
l‟agitation où l‟intention est de contrôler l‟inconfort sans induire de troubles de conscience.
D‟après Cherny et Portenoy55, l‟approche classique de prise en charge des patients avec une
anxiété sévère, dépression ou souffrance existentielle peut faire que seule une faible
proportion de patients exprime un haut degré de souffrance. Avant de la désigner comme
réfractaire, elle nécessite une évaluation répétée et pluridisciplinaire.
C‟est pour ce type d‟indication comme la confusion majeure, l‟agitation psychomotrice,
l‟angoisse extrême, l‟insomnie majeure « que le risque de dérive parait le plus important en
France, où nous sommes en tête des prescriptions de benzodiazépines qui est presque reflexe
devant toute expression d‟anxiété et d‟angoisse »56.
Par contre, « les situations de détresse émotionnelle ou psychologique vécues comme
insupportables par les proches ou les professionnels ne justifient pas par elles-mêmes la mise
en place d‟une sédation » selon les recommandations de la SFAP.
____________________________________
53
Morita T. Palliative sedation to relieve psycho-existential suffering of terminally ill cancer patients. J Pain
Symp Manag 2004 ; 28 :445-50
54
Braun TC, Hagen NA, ClarkT.Development of a clinical practice guideline for palliative sedation.J Palliat
Med.2003.Jun ; 6 (3) :345-50
55
Cherny NI, Portenoy RK. Op.Cit. p 34
56
Filbet M. Op.Cit. p 134
29
II-4. 3 Les préalables à la sédation
L‟importance d‟un encadrement de réflexion éthique autours de la pratique de la sédation ne
fait aucun doute. Elle se base sur le principe du double effet, de l‟intention, de la finalité, de
la responsabilité, sur le principe d‟autonomie et de proportionnalité 57, 58.
l‟information des proches,
la réunion pour une procédure collégiale et la traçabilité
conformément à la loi59. (voir annexe 6)
II-4. 4 La mise en œuvre
II-4.4.1 La molécule
Le midazolam de la famille des benzodiazépines est la molécule recommandée en première
intention en raison de son caractère hydrosoluble qui autorise les voies d‟administration intra
rectale, sous cutanée et intraveineuse. De plus son élimination rapide et sa courte durée
d‟action, indépendante de la voie d‟administration en font un traitement maniable.
Elle possède à la fois une action amnésiante, myorelaxante, anti comitiale, hypnotique,
anxiolytique et sédative.
D‟où sont utilisation autant comme anxiolytique dans le cadre de l‟anxiolyse que dans celui
de la sédation.
Comme toutes les benzodiazépines son effet peut être antagonisé par le Flumazenil.
D‟après Fondras60, certains psychiatres pensent qu‟il est malaisé de distinguer les différents
effets psychotropes. Selon la posologie et les circonstances, les effets anxiolytiques, sédatifs
et hypnogène ne sont que les trois degrés d‟un même processus.
On ne peut pas définir de posologie moyenne, celle-ci pouvant varier de 1 à 10.
______________________________
57
Morita T. Op.Cit. p 447
Morita T, Bito S, Kurihara Y et al. Development of a clinical guideline for palliative sedation therapy using
the Delphi method. J Palliat Med 2005; 8: 716-29
59
Loi 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des maladies et à la fin de vie ;
décret d‟application 2006-120 du 6 février 2006 relative à la procédure collégiale et
décret d'application 2010-107 du 29 janvier 2010 relatif aux conditions de mise en œuvre des décisions de
limitation ou d‟arrêt de traitement modifiant l‟article 37 du code de déontologie ( art. R4127-37 du code de
santé publique).
60
Fondras JC. La sédation pharmacologique et les contradictions éthiques. European Journal of Palliative Care
1996 ; 3(1):17-20.
58
30
II-4.4.2 Ses effets secondaires
Ils sont nombreux61 :
dépression respiratoire et cardio-vasculaire en cas d‟association à d‟autres médications
dépresseurs du système nerveux central chez le sujet à risque, tolérance lors d‟un usage
prolongé, syndrome de sevrage à l‟arrêt brutal, hoquet, état d‟excitation paradoxal avec
aggravation de l‟insomnie, agitation, hallucinations, …
II-4.4.3 Le protocole de traitement
Les recommandations préconisent une titration et proposent un protocole en cas de sédation
continue. (annexe 7)
II-4.4.4 L‟évaluation
La définition initiale de la profondeur recherchée de la sédation et sa durée sont essentiels.
La profondeur de la sédation doit donc être évaluée, grâce à l‟échelle modifiée de Rudkin
(annexe 5), recherche d‟un score maximal de 4, une évaluation toutes les 15 minutes pendant
la première heure, puis au moins deux fois par jour.
Il est conseillé de réévaluer tous les autres traitements en regard de leur utilité et d‟évaluer les
effets secondaires du traitement sédatif.
D‟autre part, en cas sédation prolongée, le bien-fondé de son maintien doit être questionné
avec une attention constante vis-à-vis proportionnalité du traitement et de l‟effet sédatif visé.
II-4. 5 le principe du double effet et l’intention
La sédation est entreprise selon les procédures législatives relatives au «… traitement qui
peut avoir pour effet secondaire d‟abréger sa vie… », art.2 de la loi du 22 avril 2005.
Ceci fait référence au principe du double effet.
_________________________
61
AFSSAPS. Op.Cit. p.8-9
31
Cette règle est d‟usage constant en médecine en s‟appliquant entre autres aux effets
secondaires des traitements, dont les anxiolytiques, mais aussi tout
traitement qui peut
présenter un risque d‟abréger la vie.
Les risques sont considérés comme justiciables, si l‟intention est bonne, si le bénéfice attendu
est supérieur à l‟effet néfaste, si ce dernier, tout en étant connu, n‟est pas intentionnel, mais la
conséquence indirecte de l‟acte. Ce dernier ne doit pas être un moyen pour atteindre l‟effet
bénéfique, aucune autre possibilité ne permettant d‟aboutir au bénéfice espéré62.
Mais comment savoir si l‟intention déclarée est bien celle-là ? Car c‟est cela qui est au centre
des débats. Une solution est de recourir à des procédures définies de décisions.
L‟examen de conscience63, le travail sur la droiture de l‟intention, est un préalable, mais
difficilement vérifiable.
Les délibérations collectives après réflexion en équipe, avis d‟un consultant, accord du
patient ou celui des proches, discussion argumentative rationnelle, partage de l‟information
et inscription dans le dossier peuvent aider à la validation morale de la décision.
S‟y ajoute la responsabilité individuelle engagée dans la décision en effectuant ou assistant à
la réalisation de l‟acte.
II – 5 Une enquête dans les services
Afin de savoir si l‟utilisation du midazolam comme anxiolytique en phase terminale et son
maintien malgré l‟apparition de troubles de la vigilance était fréquente d'une part et quels
éléments étaient retrouvés à ce sujet dans le dossier médical d'autre part, nous avons entrepris
une analyse rétrospective au CHBA (annexe 1).
Celle-ci a été menée à partir de dossiers des patients décédés dans le service de gastroentérologie du 7 décembre 2009 au 20 janvier 2010 et dans le service d'hématologie du 2
décembre 2009 au 24 janvier 2010, services qui ont une activité importante, mais pas
exclusive de cancérologie, sans lits identifiés de soins palliatifs. Pour aucun de ces patients
__________________________________________
62
Fondras J-C, Rameix S. Questions éthiques associées à la pratique de la sédation en phase terminale.
Medecine palliative-Soins de support-Accompagnement-Ethique(2010), doi:10.1016/j.medpal.2010.01.001
63
Rameix S. Quels repères éthiques pour les limitations de traitements. In : A propos de la décision de limitation
des traitements. 11ème journée régionale de la coordination de soins palliatifs bretonne.27 novembre 2009 ; p.14
32
l‟EMSP n‟avait été sollicitée, d‟où le choix de ces services.
Parmi les 14 patients décédés (7 patients en gastro-entérologie et 7 en hématologie), la moitié
a reçu un traitement parentéral de midazolam, prescrit dans les derniers jours de vie ( J-3, J-2,
J-1 et J0, sauf une fois dès J-13 en [si besoin] la nuit), et deux fois après un traitement
anxiolytique par voie orale.
Les arguments d‟introduction du traitement pour ces 7 patients, « angoisse et /ou agitation »,
« gémissements », sont mentionnés dans les transmissions infirmières. Un seul diagnostic
d‟ »anxiété » est évoqué dans une observation médicale.
On retrouve le terme d‟anxiolyse dans deux courriers médicaux de sortie pour des patients qui
ont reçu du midazolam à J-1 et J0 avec troubles de vigilance et maintien, voir augmentation
de posologie.
Chez deux patients, aucun élément n‟est retrouvé.
La vigilance n‟est pas évaluée avant l‟introduction du midazolam, ni de façon systématique
pendant le traitement.
Les troubles de la vigilance, s'ils existent, sont retrouvés uniquement dans les transmissions
infirmières. Cependant, à deux reprises, soit ils n'ont pas été mentionnés, soit ils sont imprécis
(« reposé, serein »).
Ces troubles de vigilance ne sont pas un argument pour modifier à la baisse le traitement par
midazolam qui a même été augmenté chez un patient.
Les troubles de vigilance sont notifiés clairement chez 4 patients “ aréactifs ” avec maintien
du traitement, et 1 patient « endormi ++ » la nuit sans modification du traitement administré
la nuit.
L‟efficacité du traitement sur le symptôme initial n‟est pas clairement lisible.
Deux patients, l‟un recevant du clorazépate dipotassique ( Tranxène ®) pour “ agitation,
confusion, désorientation ”, l‟autre de l‟haloperidol ( Haldol) pour “ agitation ” ont vu leur
traitement arrêté à J0 et J-3 à la disparition du symptôme initial : “disparition de l‟agitation,
n‟est plus présent ” pour le premier patient, pas de notification pour le deuxième patient.
L‟interprétation de ces résultats est très difficile, car l‟enquête s‟est faite sur un très petit
échantillon non représentatif et les prescriptions médicales, pas toujours précises,
sont
33
rédigées en toute fin de vie où les troubles de vigilance sont multifactoriels. De plus, il a été
souvent difficile de retrouver des informations précises quant à la voie d'abord, la durée et la
posologie prescrites.
La prescription de benzodiazépine en fin de vie a été fréquente, sans être particulièrement un
relais d'un traitement par voie orale, et débutée, sauf une fois, dans les tous derniers jours de
vie.
On ne retrouve clairement ni l'indication de prescription ni celle de l'efficacité du traitement
ni celle de la vigilance tant initialement que dans le temps.
Une sédation du patient est observée chez plus de la moitié des patients sous midazolam,
mais ne peut être clairement rattachée au traitement par benzodiazépines du fait de ces tous
derniers jours de vie.
Mais une sédation ou une disparition du symptôme n‟a conduit qu‟une fois à l‟arrêt du
traitement par midazolam (patient “ reposé, serein ”), les autres patients ont vu leur traitement
maintenu ou, dans un cas, augmenté.
Par contre, le traitement par un autre psychotrope pour “ agitation ” a été stoppé à la
disparition du symptôme.
Le terme de “ sédation ” n‟est évoqué dans aucun dossier.
II-6 Les mêmes interrogations soulevées par une EPP
En 2008, une Etude des Pratiques Professionnelle ayant comme thème « Utilisation du
midazolam en sédation dans l‟unité d‟oncologie pour les patients relevant de soins palliatifs »
a été faite dans le service d'oncologie du CHBA, analysant rétrospectivement 23 dossiers de
patients en fin de vie, décédés en 2007.
Une des conclusions de cette EPP a été qu'il n'y avait « pas de décision de sédation inscrite
dans les dossiers des patients sous midazolam à visée anxiolytique chez qui on augmente
progressivement la dose ».
Peut se poser ainsi à nouveau la question:
Pourquoi y a-t-il dans certaines situations confusion entre anxiolyse et sédation?
Cette étude n‟a pas analysé si les patients étaient en phase terminale ou non.
D‟après l‟étude rétrospective ci-dessus et mon expérience, il semble que cette situation se
présente surtout chez les patients en phase terminale.
34
III. ENONCE DE LA PROBLEMATIQUE
________________________________________________________
La confusion qu‟il semble y avoir dans certaines situations entre anxiolyse et sédation en
phase terminale recouvre différents champs théoriques et différentes approches possibles :
III-1 L’approche institutionnelle :
Cette situation est-elle liée au lieu où se trouve le patient, c'est-à-dire à domicile, en
institution, à l‟hôpital ?
Voulant restreindre mon analyse à mon terrain d‟activité préférentiel, l‟hôpital, ce champ de la
question n‟a pas été abordé.
Il aurait pu être intéressant aussi d‟analyser plus finement si / comment la confrontation
répétée avec des patients en fin de vie, le type d‟activité du service et la pathologie du patient
influent sur cette problématique.
L‟étude rétrospective menée dans les services de gastroentérologie et d‟hématologie en est un
premier indice.
III-2 L’approche organisationnelle :
Des difficultés conditionnées par l‟organisation interne dans un service par rapport à la
transmission des informations ou des approches, le nombre d‟intervenants et de soignants, le
moment de leur présence, influent-ils
sur cette problématique ? Ce champ de part sa
subjectivité n‟est pas étudié ici.
III-3 L’approche psychologique et symbolique :
Que signifient l‟angoisse et la sédation dans un service où les soignants sont quotidiennement
confrontés à des patients en soins palliatifs avec comme finalité un
projet de service
conduisant à l‟attribution de lits identifiés de soins palliatifs, cet élément influence-t-il la
prise en charge des patients ?
35
Sans l‟exclure complètement de la discussion, j‟ai fait le choix en tant que médecin de ne pas
aborder cette problématique en profondeur.
III-4 L’approche théorique :
La confusion peut-elle naître de l‟abord sémantique et sémiologique des symptômes et de la
maladie ainsi que de la difficulté de poser des repères sur le plan pratique ? Quel est le regard
clinique sur les symptômes, varie-t-il en fonction du stade évolutif dans lequel se trouve le
malade ? Quels en sont les repères ?
C‟est cette approche qui a été choisie, car dans la pratique quotidienne, il semble que c‟est
souvent au travers de la clinique mis en avant et ses implications pratiques que l‟on peut dans
un deuxième temps aborder des questions plus « fondamentales ». L‟existence d‟un cadre est
la garantie de pouvoir mener une réflexion délicate, mais approfondie sur les difficultés sousjacentes. Cette réflexion serait le sujet d‟un autre travail.
36
IV. ENONCE DES HYPOTHESES
________________________________________________________
De cette approche théorique choisie découle trois hypothèses :
- parce qu'il n'y a pas d'identification claire de l'anxiété en phase terminale
- parce qu'il y a confusion des protocoles de traitement pour l'anxiété et de la sédation avec
la même molécule et absence d'évaluation du traitement
- parce ce qu'il y a une méconnaissance des indications et de la surveillance de la sédation en
phase terminale pour symptôme réfractaire
37
V. METHODOLOGIE
________________________________________________________
V-1 Le choix de la population et du lieu
Afin d‟étudier ces hypothèses, j‟ai choisi d‟interroger des soignants (terme dans lequel sont
inclus médecins et paramédicaux) du service d‟oncologie du CHBA avec une équipe qui
semblaient être la plus sensibilisée et la plus formée à cette problématique sur l‟hôpital :
L‟équipe de ce service, confrontée au quotidien avec des patients porteurs de pathologies
cancéreuses, surtout thoracique et gynécologique, mais pas exclusivement, a fait le choix il y
a quelques années d‟accueillir des lits identifiés de soins palliatifs. les médecins et soignants
sont donc quotidiennement confrontés aux questions qui se posent chez les patients en soins
palliatifs et en fin de vie. Le service reçoit sur ses lits identifiés régulièrement des patients non
suivi dans le service et avec des pathologies différentes, bien que principalement cancéreuses.
Certains des soignants interrogés ont suivi une formation de 4 jours en soins palliatifs
dispensés par des membres de l‟équipe mobile de soins palliatifs de l‟hôpital, qui intervient
très régulièrement dans ce service, y étant même administrativement rattachée.
Un Staff hebdomadaire de soins palliatifs a lieu dans le service depuis plus de deux ans.
Pour des raisons pratiques et parce que la sensibilité des personnes interrogées par rapport aux
soins palliatifs et à l‟approche de la fin de vie m‟était connue compte tenu de mon activité au
sein de l‟équipe mobile de soins palliatifs, je n‟ai pas cherché à interroger des soignants dans
d‟autres institutions avec une activité palliative. Mais deux des quatre médecins interrogés
travaillent en même temps dans le service d‟oncologie d‟une clinique avec des lits identifiés
de soins palliatifs.
On été choisi des soignants formés au regard clinique, c'est-à-dire des médecins (du service
ou y intervenant régulièrement) et des infirmières (du service), et directement impliqués dans
la prescription et /ou administration des traitements.
Dans le soucis d‟aboutir à une l‟analyse suffisamment précise , les autres soignant(e)s n‟ont
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pas été inclus(e)s, bien que le regard des aides-soignant(e)s et la vision des familles (avec
d‟autres grilles d‟entretien) auraient certainement constitués des éléments complémentaires et
enrichissants à prendre en considération.
3 des 4 des médecins ont depuis de nombreuses années une activité en oncologie, dont un
surtout en consultation externe et hospitalisation de jour, mais impliqué au moment des
gardes, deux autres ont à la fois une activité dans le service et en consultations.
Il est à signaler qu‟un médecin interrogé est très récemment arrivé dans le service (environ 6
mois) sans aucune expérience en oncologie ni en soins palliatifs. Ce « premier regard »
semblait intéressant à prendre en compte.
Les infirmières choisies ont une expérience professionnelle de plusieurs années, dont environ
deux ans dans le service.
V-2 Le choix de l’outil
L‟entretien semi-directif a semblé le plus adapté pour aborder la thématique, le discours oral
et le dialogue permettant de mieux développer sa pensée et de reformuler le sujet
si
nécessaire. Le souhait étant d‟avoir des réponses spontanées les plus nuancées et approfondies
possibles.
Les thèmes choisis pour étudier les hypothèses sont l‟anxiolyse (et l‟anxiété) d‟une part, la
sédation d‟autre part. Leur champ d‟application, leur mise en œuvre ainsi que l‟utilisation du
midazolam sont analysés.
V-3 Modalités de recueils des données
Dans un premier temps, à l‟occasion de mes passages dans le service, le projet a été évoqué
auprès des médecins et infirmières du service et accueilli avec intérêt.
Les entretiens se sont déroulés après prise de rendez-vous, par choix des personnes sur leur
horaire de travail ou juste après, dans un bureau du service.
L‟entretien a été présenté comme une réflexion sur le lien ou non entre anxiolyse et sédation
dans le cadre du mémoire du DIU de Soins Palliatifs, « certainement pas comme un contrôle
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de connaissance, mais plutôt au contraire pour exposer le vécu et les difficultés au quotidien
que peut représenter cette problématique ». La durée de la rencontre a été en moyenne d‟1
heure.
Le temps d‟échange pris le plus souvent sur le temps de travail, ceci a parfois posé problème
avec un sentiment d‟urgence dans les réponses du fait des impératifs du service, une question
n‟ayant ainsi pas pu être abordée ou de façon très succincte.
L‟entretien a débuté avec des questions personnelles et générales concernant l‟âge et l‟activité
des soignants, pour essayer de déplacer l‟entretien du contexte du « lieu de travail ».
Mon activité au sein de l‟équipe mobile de soins palliatifs, collaborant avec toutes les
personnes interrogées a pu biaiser certains entretiens, avec quelque fois le sentiment que le
soignant cherchait « la bonne réponse ».
Tous les entretiens ont été enregistrés avec autorisation des personnes interrogées, puis
retranscrit sur informatique.
7 entretiens ont pu être réalisés, 3 avec les infirmières et 4 avec les médecins.
Le guide d‟entretien présenté au chapitre suivant était le même pour les médecins et les
infirmières, avec simplement un changement dans la tournure de la phrase (prescrivez et
demandez la prescription) en fonction de la profession.
La question sur les troubles de vigilance « recherchés » dans le cadre de l‟anxiolyse a du à
plusieurs reprises être reprécisée comme voulant dire« provoqués ».
Les questions volontairement non précises évoquant les patients avec des « troubles de
communication » ont été reformulées
par certains soignants en « troubles de la
communication avec ou sans problèmes de compréhension » avec une réponse séparée pour
les deux éventualités.
Il aurait pu être intéressant d‟évoquer le type de traitement à instaurer pour une anxiolyse.
Ceci pouvant trop élargir le sujet, la question n‟a pas été formulée tel quelle dans le guide,
mais le sujet à été abordé pendant l‟entretien souvent de façon spontanée.
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V-4 Le guide d’entretien
Thème 1 : anxiété et anxiolyse
1. Sur quels arguments (cliniques et autres, souffrance exprimée ou non du patient)
prescrivez-vous (pour les médecins) / demandez-vous la prescription ( pour les infirmières) et
qu'attendez-vous d'un traitement anxiolytique chez un patient
- encore sous traitement curatif
- en phase palliative
- en phase terminale (avec un décès prévisible dans les jours ou semaines qui suivent)
- chez un patient avec lequel la communication est difficile
2. Dans ces quatre situations, évaluez-vous l'efficacité du traitement ? Comment? Ces effets
secondaires? Quels sont-ils?
3. Dans ces quatre situations, l'apparition de troubles de vigilance est-elle pour vous un point
important à évaluer? Acceptable? Recherchée (provoquée)? Est-elle pour vous à discuter
avant l'introduction du traitement avec le patient, l'entourage, l'équipe soignante au sens large?
4. Lorsque le midazolam en parentéral est choisi comme traitement anxiolytique, est-il gênant
ou aidant qu'il soit utilisé également dans le cadre de la sédation?
5. Pour les médecins : Selon quelles modalités prescrivez-vous le midazolam dans le cadre
d'une anxiolyse?
Pour les infirmières : Selon quelles modalités voyez-vous prescrit le midazolam et qu'en
pensez-vous?
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Thème 2 : sédation
1. Quel est le but d'une sédation?
2. A quel moment (dans le temps) peut-elle être instaurée et quelle en est sa durée?
3. La sédation peut-elle être considérée comme une anxiolyse?
4. D'après vous, quels sont les différents types d'indication d'une sédation chez un patient et
comment décider de sa mise en œuvre?
5. Comment en pratique quotidienne décider de l'indication d'une sédation face à un patient
avec des troubles de communications?
6. Pour les médecins : Selon quelles modalités prescrivez-vous le midazolam dans le cadre
d'une sédation?
Pour les infirmières : Selon quelles modalités voyez-vous prescrit une sédation et qu'en
pensez-vous?
7. Une surveillance de la profondeur de la sédation est-elle réalisée? Utile? Conseillée?
42
VI. RESULTATS ET ANALYSE DES ENTRETIENS
________________________________________________________
Lors de l‟exploitation des résultats, il s‟est avéré, que mise à part le domaine des prescriptions
médicales, les réponses n‟étaient pas conditionnées par la profession de la personne
interrogée.
En fonction de l‟évolution de l‟entretien, d‟autres sujets en dehors « du chemin tracé » ont pu
être abordés et seront évoqués dans ce chapitre.
VI-1 Thème anxiété et anxiolyse
VI-1.1 Arguments et attentes du traitement anxiolytique
Les arguments pour
lesquels les soignants estiment devoir proposer un traitement
anxiolytique aux patients sont de plusieurs ordres, avec quelques éléments plus spécifiques
pour la phase terminale :
a) Le patient verbalise
de façon spontanée ou provoquée son « angoisse » « anxiété », son « appréhension
du traitement »
b) Des signes somatiques observés:
« traits tirés » « sensations dyspnéiques » « oppression thoracique sans organicité
apparente »
c) Et surtout le comportement du patient observé par le soignant ou rapporté par
des tiers,
seul argument en plus du « ressenti » chez le patient avec des troubles de
communication : « Pas détendu » « agité » ou « agité la nuit » « se mobilise beaucoup
sans douleur ni raison affirmée » »repli sur soi » »attitude différente » « ne mange
plus »« paraît triste » »reste au lit sans bouger » « cris la nuit» « crispations pendant
les
soins »
« la
tension
sommeil » « agressivité
au
envers
moment
les
de
la
toilette » « troubles
soignants » « l‟entourage
le
du
trouve
inquiet » « patient confus »
d) Se rajoute pour le patient en phase terminale des arguments tel que « il baisse les
bras » »non confortable » et « on ne le sent pas serein ».
43
Le soignant se base beaucoup sur son ressenti :
« elle est plus angoissée qu‟elle veut bien le dire », « il exprime le fait de devoir mourir, on le
devine à travers une agitation qui témoigne d‟une souffrance »
Certains soignants évoquent spontanément leur difficultés à évaluer l‟anxiété « car c‟est un
symptôme
psychique »,
alors
que
« l‟angoisse
est
le
symptôme
physique
du
problème…l‟agitation…».
Certains soignants interrogés évoquent le type de traitement proposé :
-
non médicamenteux « je propose….la psychologue », « la parole, le soutien son tout
autant important »,
-
ou médicamenteux « …traitement systématique chez le patient qui ne parle pas [sans
notion de troubles cognitifs], dans la méconnaissance de la communication où on
est… », à la proposition « …d‟un médicament ou du psychologue »
-
ou au contraire « …pas d‟anxiolyse systématique s‟il y a une cause documentée
[pour le patient angoissé et confus] »
Le traitement proposé varie en fonction du stade évolutif :
-
En phase curative,
le traitement par benzodiazépines par voie orale et la parole priment, le midazolam
n’a pas d’indication pour le soignant:
« … le médicament n‟est pas forcément la réponse obligatoire. Le soutien, la parole sont tout
autant important, sinon plus »,
« …je choisirais un traitement par benzodiazépines en commençant d'abord per os…par
pallier comme dans un traitement antalgique,»
« …Xanax® à l‟initiation du traitement… pour son effet sur la mémoire, pour permettre une
meilleure tolérance digestive... »
« [le midazolam ] on ne l‟utilisera pas en phase curative, car [même] s‟il y a une
hospitalisation, un retour à domicile est prévu, et la molécule n'existe pas en ville; et si ce
traitement est mis en place, c'est le plus souvent quelque chose mis en place au long court ».
-
En phase palliative,
«on met aussi un traitement per os si un retour à domicile est prévu ».
«…le midazolam s‟il y a des troubles de déglutition ou une occlusion …parce qu'il est
44
beaucoup utilisé en soins palliatifs.. »
- En fin de vie et en phase terminale,
le traitement médicamenteux et le midazolam en particulier sont les traitements de
référence :
« En fin de vie, la parole est importante, mais j‟attends plus du traitement anxiolytique en
apaisement.. »
« …plutôt l‟ hypnovel® pour bien soulager le patient ; …est beaucoup utilisé…il a surement
une efficacité meilleure que les autres ; on ne l‟utiliserait pas en tout début de prise en charge,
mais plutôt en phase palliative et terminale; car c‟est un traitement puissant, avec lequel on
peut s‟attendre à plus d'effets secondaires qu'un traitement anxiolytique per os, surtout une
sédation plus importante… et souvent il n'y a pas d'autres voie d'administration que
parentéral, c‟est une voie rapide, quasi immédiate, pour que ça soulage très rapidement.. »
Les attentes vis-à-vis du traitement anxiolytique « …sont différents en fonction du stade
évolutif »,
« l‟objet n‟est pas tout à fait le même en début, milieu et fin de prise en charge », « pas le
même type d‟angoisse » :
-
En phase curative et palliative,
on attend « une meilleure tolérance digestive de la chimiothérapie », un « patient plus
serein…le détendre », « que certaines choses deviennent moins envahissantes…se poser sans
que cela empêche l’entrée en relation… » ;
En phase terminale se rajoutent pour certains d‟autres objectifs comme
-
« moins de plaintes » « …qu‟il puisse se poser, dormir pour ne pas trop penser, être apaisé un
peu », « appréhender cette phase là le mieux possible, le plus agréable possible.. ».
Un soignant pense que «…en phase terminale, le patient doit être soulagé et il n'y a plus que
ça qui compte; avant, c'est plus difficile a évaluer; en phase terminale, cela semble plus
simple.
Pour certains soignants, le but du traitement en phase terminale est clairement la
sédation :
« et si c‟est insupportable, et que lui demande une sédation, c‟est dans un but sédatif », «…en
45
phase très avancée, [le patient ]qui est déjà plus ou moins ailleurs, qui a l'air agité, pas très
bien, on perçoit une souffrance et on essaye de sédater le patient plus que même de
traiter l'anxiété, bien que si, c'est une forme d'anxiété qu'il manifeste…c'est
complètement subjectif…combattre le symptôme qui est l‟expression d‟une grande
souffrance, jusqu'à ce qu'il n'apparaisse plus… »
« …quand la mort est imminente,… peut proposer, pas forcément s’il y a une demande, on
peut proposer au patient que dans de telles circonstances quand ça ira de moins en moins
bien, lui expliquer qu‟on a des molécules qui peuvent apaiser ce moment là, quand il n‟y à
plus de traitement possible de la maladie, quand on n‟a rien d‟autres à proposer pour que le
patient se sente mieux… » « …ne pas se voir souffrir…pour que la personne reste
endormie,
pour que ça l'aide dans ces moments là, tout en sachant que le pronostic
derrière... »
VI-1.2 Evaluation du traitement et des effets secondaires
La même démarche que celle de la mise en place et du suivi des traitements est retrouvée lors
de l‟évaluation de ces derniers.
- Evaluation du traitement
a) sur les paroles du patient
« ce que dit le patient », « je reprends les points qui ont conduit à la mise en place du
traitement, je les réévalue avec eux, s‟ils se sentent mieux »,
b) la disparition du comportement évocateur
aux dires de « la psychologue, ou l‟observation du comportement par l‟équipe, la
famille : « ne se plaint plus » , « n‟est plus agité », « plus de cris », « détendu », « par
rapport au sommeil » ;
c) « …il est plus serein…» pour les patients en phase terminale ;
d) C‟est « un peu au feeling », «…on n'évalue pas l'anxiété de la même façon comme on
peut évaluer la douleur », « on ne peut pas coter ».
En fonction de l’évaluation « j‟adapte le traitement s‟il n‟est pas soulagé; si le symptôme
disparait, je continue à la même posologie ».
46
- Evaluation des effets secondaires
Ils sont principalement évoqués pour les traitements anxiolytiques, en particuliers avec les
benzodiazépines.
Les soignants retiennent principalement les « troubles de vigilance », et la « dépression
respiratoire », mais aussi « la somnolence », « l‟endormissement », « la sédation avec
l‟hypnovel® » ; Un médecin ajoute « la myorelaxation, troubles de mémoire, troubles
cognitifs… »,« la confusion ».
L’évaluation des effets secondaires est « différente en fonction de la phase où se trouve le
patient, c‟est important de savoir… ».
-
En phase curative, « par rapport aux gens en phase palliative, on est beaucoup plus
près des constantes, fréquence respiratoire, saturation.. », « on donne un produit dont
on espère qu‟il en tire le meilleur parti sans avoir trop d’effets secondaires.. »
-
En hospitalisation, « ici, souvent le mal être du patient est plus important et on
accepte les effets secondaires, par exemple une sédation trop importante chez un
patient qui en a pas besoin.. »
VI-1.3 Evaluation des troubles de vigilance
Pour tous les soignants, l‟évaluation et l‟importance accordée aux troubles de vigilance
dépend de leurs constatations et du stade évolutif de la maladie.
- Basée sur des constatations :
« un peu trop ensuqué », « somnolent », «…on constate des troubles de vigilance » ou se fait
sur « le langage, l‟orientation… ».
Les troubles de vigilance, « on les constate quand on passe et on les note ; on ne les cherche
pas spécialement… ».
« .. pas d'évaluation de manière objective, mais plutôt de manière subjective, selon le temps
qu'on investi là dedans, sur l'impression pendant les visites s'il a l'air plus calme, plus
serein, sur l'impression de l'équipe…»
47
- Basée sur le stade évolutif de la maladie :
-
En phase curative,
« ils ne sont pas acceptables…on ne veut pas aller dans ce sens.. », car « il faut que la
personne soit maitre de ses pensées et de ses actions, il faut que le patient soit bien là, il doit
participer à sa prise en charge…»
et le traitement est modifié immédiatement « S'il existe des troubles de vigilance, j'arrête le
traitement… et en parle au médecin, je ne prends pas de risque », et le médecin : » pas
acceptable du tout, on modifiera les doses… »
-
En phase palliative,
ils sont tolérés plus facilement: « il ne faut pas que les troubles de vigilance soient là tout le
temps, mais quelques fois ce n'est pas dérangeant… » ; « si la patiente est un peu trop
ensuquée et qu’elle se sent bien comme ça, beaucoup plus détendue, on laisse en général le
traitement…» ; «… chez le patient communiquant qui dit que ça lui fait du bien de dormir,
ça le soulage, c‟est quelque chose que je peux accepter ; par contre, si le patient en est gêné, il
faudra trouver un compromis entre ses troubles de vigilance et le bénéfice du traitement de
l‟anxiété… »
- En phase terminale,
ils sont tolérés, parce que « c‟est un effet attendu, possible ; le double effet, on connait, il y
a plus de risque qu‟ils apparaissent en fin de vie...ils sont plus inévitable par rapport à une
fatigue plus importante,
qui s’installent plus facilement pour des doses parfois très
petites » :
«on signale s‟il y a des troubles de vigilance, mais après, du moment que la personne est bien
sereine et était bien au clair avec ce traitement… ».
« En phase terminale, peut être qu'on va être plus tolérant, si c'est le pris à payer pour
l'anxiolyse, en ayant prévenu que l'anxiolyse puisse déboucher sur une sédation.… »
« Ils sont acceptables en fin de vie dans le sens où la personne ou son entourage est
d'accord que le traitement a un but de la soulager, voir après lui expliquer que le traitement
peut aussi avoir un but de sédater ».
sinon recherchés par certains :
« …c’est un peu l’effet recherché en plus de l’anxiolyse… »
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« chercher à provoquer des troubles de vigilance…peut être pas au début, mais
éventuellement oui en phase terminale ».
« ..dans la phase finale, c'est quelque fois nécessaire qu'il y ait ces troubles de vigilance, par
exemple quand la personne est très agitée et quelle n'arrive plus à être soit même… »
« Pour des gens, vraiment dans les derniers jours, pour des gens non communicants, qui
deviennent moins vigilants du fait d‟un traitement prescrit à doses supposées être
anxiolytiques, s‟ils sont moins vigilants mais dont on sait que ces patients n‟ont que quelques
jours à vivre, il m’arrive rarement de réduire les doses parce que les troubles de vigilance
arrivent, à partir du moment où on atteint l’objectif de soulagement de crispation dans les
soins du quotidien, c‟est le premier objectif, après , les troubles de vigilance… »
La possible apparition de ces troubles de vigilance secondaire au traitement anxiolytique
n’est pas discutée avant avec le patient de façon systématique:
« ça dépend des situations » ; « ça se fait surtout avec les familles » ; « mais ce n'est pas notre
rôle d'infirmière » ; « souvent c'est la famille qui nous en parle…là on explique qu'on vient
d'introduire un traitement anxiolytique »,
bien que « …C‟est important de discuter avec le patient et avec la famille de la possibilité de
l‟apparition des troubles de vigilance…il peut répondre que cela l‟embête… »
VI-1.4 Le midazolam utilisé à la fois comme anxiolytique et dans le cadre de la sédation
- Plutôt gênant ?
-
Aucun soignant ne dit être gêné par l‟utilisation du midazolam dans ces deux
indications, car
« il y a des dosages qui font que c'est pour moi plus anxiolytique ou alors plus dans la
sédation, par exemple de petits dosages (2,5 ou 5mg/24h) avec de petits bolus et la sédation
avec des doses un peu plus importantes… »
Et « …c'est plus simple d'utiliser un traitement qui est déjà en place… »
-
Mais l’utilisation du midazolam complique tout de même pour certaines infirmières
la différenciation entre but sédatif et anxiolytique :
«…au début, on va débuter le traitement par l‟hypnovel® car on le sent anxieux, mais au
final ça va avoir un effet sédatif ; donc cela à pour but final de le sédater, mais dans un but
49
au départ de soulager son anxiété…»
«…du fait que c'est la même molécule qui est utilisée, on en parle souvent entre collègues, ça
peut parfois prêter à confusion, être troublant. Pour moi, cette molécule a déjà une
connotation de fin de vie, même si ce n'est pas dans le sens fin de vie immédiate, donc phase
terminale, de sédation, même si ce n'est pas une sédation ».
« ...On utilise la même molécule pour l‟anxiolyse et la sédation, et des fois, ça peut peut-être
nous perturber…par exemple pour cette dame très anxieuse qui avait en même temps une
grosse détresse respiratoire ; on lui a parlé d’anxiolyse parce qu‟elle était relativement
anxieuse, et elle avait des troubles de la vigilance. On a laissé les doses, c’est là où c’est
difficile, on était dans l‟anxiolyse, on ne lui a jamais parlé de sédation, alors qu’au final,
oui …».
- Plutôt aidant ?
-
Son utilisation est aidante pour d‟autres car :
la transition est facile avec une molécule déjà en place et la molécule est bien connue et
maniable :
« en fin de vie quand on voit que la personne se dégrade et que l‟anxiété se majore… on
peut progressivement augmenter les doses jusqu'à sédation, avec l'accord de la personne ;
même pour la famille ça peut être important…».
«…la souffrance est telle que traiter l'anxiété pour elle même, ça ne signifie plus rien, il
faut endormir les gens, pour plus qu'ils soient angoissés… »
« c‟est la même molécule
qu’on fini par bien connaitre, après, ce ne sont pas les mêmes dosages... » et que «…c‟est
pour les deux, le produit agit vite… » « …drogue extraordinaire, de maniement facile, de
durée de vie très courte ».
-
Pour un médecin « choisir une autre molécule pour l‟anxiolyse, c‟est
hypocrite comme débat, les objectifs n’étant pas les mêmes ; …les gens sont précaires,
fatigués, et avec initialement comme objectif une simple d’anxiolyse, il arrive qu’on
glisse vers la sédation, même à des doses anxiolytiques ; on peut appeler ça sédation si
c‟est d‟être endormi, mais pas si c’est dans le sens de la définition de la sédation pour
détresse ; donc on est dans l’anxiolyse avec des effets secondaires qui sont les troubles de
vigilance difficilement évitables…».
50
VI-1.5 Les modalités de prescription et de surveillance du midazolam dans le cadre de
l’anxiolyse
VI-1.5.1 La prescription n‟est pas codifiée
-
L‟anxiolyse est débutée souvent la nuit
« …c‟est surtout la nuit qu‟il y a des majorations d’angoisse ; pour faire dormir ou au moins
le détendre pour qu‟il puisse s‟endormir sans trop d‟angoisse… »
«… souvent 0.5 mg/h, je suis prudente généralement, pour le patient qui a des difficultés à
trouver le sommeil avec un hypnotique ou un anxiolytique qui n’est pas efficace quand
pris oralement… » ;
-
Ou alors se fait en administration continue « 2 à 5 mg/24h ou 0,1 mg/h; puis plutôt
des augmentations progressives, on ne fait pas tellement de bolus pour les
traitements anxiolytiques ».
-
Ou « au coup par coup pour encadrer un soin », » avant les mobilisations…ils ont
des douleurs, donc pour que ce moment soit moins angoissant »
-
ou « par bolus de 1 mg renouvelés si besoin dans la journée, voir s’il en a besoin »,
-
en continue avec des bolus « …c‟est en continu si les gens sont angoissé en
permanence, ou les deux …c‟est au cas par cas… »
-
« Il faut rechercher la posologie minimale efficace; mais en pratique je ne le fais
pas, mais ce serait bien. »
L’introduction du midazolam la nuit n’est « pas toujours discutée avec le patient » :
« …le patient dit qu‟il voudrait bien avoir quelque chose pour dormir… que cela ne sert à
rien de majorer les angoisses si en en parle trop, à la famille…pour ne pas inquiéter… »,
La voie d’abord est « souvent IV, car il y a un site.. », d‟autres précisent « pas forcément sur
site…en SC aussi… »
51
VI-1.5.2 La surveillance n‟est pas plus établie
Elle se fait « par les infirmières sans protocole particulier… », »… sur nos transmissions
écrites et orales, il n‟y a pas de feuille de surveillance particulière…».
« …on réévalue le lendemain l‟efficacité…, s‟il est bien soulagé, on continue comme ça… ».
En résumé : Il n‟y a donc pas de protocole, l‟administration varie en fonction des habitudes
et des constatations cliniques. La voie d‟abord est principalement intraveineuse sur chambre
implantable.
La surveillance n‟est pas codifiée.
VI-2 Thème sédation
VI-2.1 Le but de la sédation
La plupart des soignants indique comme but une suppression de la vigilance :
« endormir…supprimer la vigilance...rendre comateux...le rendre inconscient… »
Deux soignants parlent d‟une « diminution de la vigilance » ou de « différentes profondeur
de sédation, mais en général ils sont endormis »,
But recherché dans l’intention de :
-
« soulager les symptômes pré mortem angoissants » et « la détresse respiratoire
induisant le décès »
-
« pour avoir une fin de vie plus sereine… »,
-
pour éviter des souffrances qui deviennent invivables...»
-
aider la personne pour qu’elle ne se rende pas compte de l’état où elle est.…
à partir du moment que l'on voit que la personne se dégrade, qu'elle l'exprime elle
même, ou que la famille exprime le fait que cela devient difficile, ou qu'on voit des
signes de fin de vie, le teint, l'encombrement, la douleur, l'angoisse… »
-
« …pour passer un cap …traiter une souffrance intolérable…»
-
« soulager une situation quelle qu’elle soit devenant insupportable pour le patient ;
quand les traitements symptomatiques ne permettent pas de le soulager et qu’on ne
52
peut pas soulager autrement qu’en diminuant la vigilance du patient.. »
VI-2.2 Moment et durée de la sédation
- En phase terminale plutôt ?
Pour la plupart des soignants, la sédation a lieu « en phase terminale », »sans durée
réglementaire…mais jusqu’au décès la plupart du temps », rarement en phase palliative
de manière transitoire « c‟est arrivé une fois pour une anxiété ou des moments évolutifs de
la maladie très difficiles ».
- Quoique …..
Des avis très divergents apparaissent :
-
« une sédation, puisqu'on peut la lever à tout moment, on peut la mettre en curatif
en réanimation comme en phase palliative et terminale… » et
-
« pour passer un cap ou dans des projets de survie longue, il doit être possible de faire
autrement que de sédater les gens » et que « C'est fait souvent à des moments un peu
irréversibles… Si on est amené à sédater, il n'y a pas intérêt à bricoler le traitement
pour qu'ils reviennent à une quelconque réalité… il n'y a pas de raisons de revenir
en arrière par la suite…donc jusqu’au décès ».
Un soignant estime que ce sont des situations rares et exceptionnelles et pense que la durée
doit être anticipée, car « …après un épisode hémorragique, l‟arrêt de la sédation n‟avait pas
été prévue…et donc la sédation a avait été maintenue...par crainte de réveiller l’angoisse du
patient en le réveillant…peur de le réveiller et l‟avoir à resédater s‟il resaigne…on s’était
accoutumé à l’idée qu’il serait sédater jusqu’à la fin.. »
VI-2.3 La sédation est-elle une anxiolyse ?
- Pas du tout
- Pour certains soignants la réponse est clairement « non, ce n’est pas la même chose,
l’objectif n’est pas le même »
- Quoique…
-
Mais la plupart des soignants n‟arrivent pas à différencier l’anxiolyse de la sédation et
53
celle-ci a toujours un rapport avec l’angoisse du patient et la composante anxiolytique du
traitement :
« oui…le patient en détresse respiratoire, ça aura le même sens, ça endormira le patient,
mais ça le soulagera ; ça ne soulagera pas le symptôme, mais ça soulagera le patient…»
« oui…c’est pour rendre les gens moins anxieux, plus serein… ».
« oui et non, car c‟est aussi pour supprimer les angoisses de la personne, il y a forcement un
effet anxiolytique, mais en plus il y a des troubles de vigilance… »
« ça peut être un traitement de l'angoisse, parce que la personne ne sait plus ce qui se
passe; mais dans l'anxiolyse, la personne est toujours consciente; donc ce n'est pas vraiment
pareil…»
« la sédation est la conséquence de l'anxiolyse…le but est de soulager une souffrance
physique et morale, en traitant cette anxiété… tant que le patient n'est pas sédaté, l'anxiété est
là, donc tu traites, et plus tu traites, plus tu risques de sédater le patient… ;…anxiolyse et
sédation, c'est de la sémantique… pour traiter une certaine anxiété, il faut sédater les
gens…. tout ce qui est réalité les ramène à leur souffrance, on traite l‟anxiété car chaque fois
qu‟ils prennent pied dans la réalité, ils ont l'air très mal, ils le manifestent sous une forme ou
une autre, donc on augmente les doses…et de ce fait le traitement ayant initialement
pour but de combattre l’anxiété, fini en contre parti par devenir sédation, qu’il faut
accepter de bon augure… »
- Une confusion (consciente ou non) entretenue :
-
Un médecin argumente la confusion possible entre anxiolyse et sédation :
« …nous soignants [on peut] confondre anxiolyse et sédation,…être peu regardants quant
aux troubles de vigilance induit par le traitement anxiolytique… parce qu'on est en
situation palliative…
…je pense que cela tient à la souffrance de l'équipe. C'est probablement plus facile
d'assumer un patient en fin de vie qui roupie qu'un patient en fin de vie qui est vigilant.
On n'a pas besoin de lui causer quand il « roupie »...
…Comme si le fait qu'on ait la même molécule qui permette de tout faire, fasse qu'on ne
se pose pas bien la question de ce qu'on veut faire…
54
car le thérapeute dans l'échec où il est, peut être amené à vouloir gommer, la sédation, ça
permet ça aussi…
Un travail d'équipe, et pas uniquement dans cette relation hiérarchique médecin/infirmière,
mais un regard extérieur des palliatologues permet de discerner mieux quel est l'objectif
de la prise en charge…. »
VI-2.4 Les indications et la mise en œuvre de la sédation pour les soignants interrogés
- Situations insurmontables :
-
La détresse aigue comme « la détresse respiratoire », « l‟hémoptysie et hématémèse
massives ».
-
La souffrance physique et psychique comme « l‟anxiété très importante»,
« l‟encombrement », « des douleurs qui ne sont pas gérables », « les troubles
respiratoires », « …la souffrance morale éventuellement »,
-
Le désir du patient que la souffrance s’arrête : « …il exprime que la vie proposée
devient tellement insupportable qu'il a envie que ça s'arrête… »
-
Le souhait de détente du soignant pour le patient : « pour faire que la personne se
détende au maximum »
-
Les derniers jours trop insupportables à vivre consciemment: « …c‟est dans les
derniers jours, derniers moments…trop insupportable d‟être conscient jusqu‟au bout et
se voir mourir…les gens en parlent….sont conscients qu‟ils vont s‟en aller et ne
veulent pas être conscient à ce moment là…même en dehors d‟évènements physiques
aigus… »
-
Le long mourir : «…les symptômes sont soulagés et que ça dure, ça dure et que la
personne est au plus mal et demandeuse d‟être un peu déconnectée ».
-Et dans quel cadre se fait la mise en œuvre de la sédation :
- Sur demande du patient, mais pas toujours:
« …la situation idéale, quand qu‟on peut réfléchir avec le patient de manière anticipée… »
« …la demande du patient si possible… » « on essaye d‟en parler au patient…de ce que cela
risque d‟engendrer… qu'on arrive à la fin de sa vie ».
« …d'autres me disent aider moi docteur, j'en peux plus…on met les milligrammes
d'hypnovel® jusqu'à ce qu'ils dorment et je fais ça rapidement, pour que ça dure le moins
longtemps possible… »
55
Parler de sédation au patient dépend :
-
Du degré d‟urgence de la situation :
« …sauf en cas d’urgence où on n’a pas le temps d’en parler au patient » ; « les situations
aigües qu‟on ne peut pas prévoir, ou des situations qui se déstabilisent très vite et que l‟on n‟a
pas réfléchie… ».
« si on m'appelle pour un patient que je connais parfaitement, qui est dans cette situation
gravissime, je demande une ampoule d'hypnovel® et on sédate le patient… »
-
si la détresse aigüe s‟est déjà manifestée auparavant ou non:
« s‟il y a un risque théorique, mais s'il n'a jamais saigné, dois- je informer le patient du
risque ? …si la situation est susceptible d'arriver, il faut l'anticiper en équipe; mais ce sont
deux choses différentes, l'équipe d‟une part et le patient et son entourage d‟autre part ».
« si le patient a déjà expérimenté le risque, là, l'ambition est de le rassurer, car il est
angoissé par cette perspective… on doit inscrire l'annonce d'une sédation dans une
perspective de réassurance… » « J'en parlerai à la famille si il y a une angoisse, pour
rassurer la famille »
- La famille est informée si possible, mais pas toujours :
« on parle avec la famille si on peut », « la demande de la famille et du patient si possible »
« pour la famille, je n’ai pas le temps de m’occuper de tout ça la plupart du temps, les
familles n'ont pas plus de regard à avoir que d'autres de ce qui arrive… je les tiens au
courant régulièrement…
En général, tout le monde est content, la famille aussi, toutes les familles demandent la
même chose, que le patient ne souffre pas, ne pas s'acharner, aider les gens à bien
mourir »
- Une décision pluridisciplinaire si possible :
« en avoir parlé en équipe, médecin, infirmière, aide-soignante »,
« éventuellement l‟EMSP »,
« je préfère qu‟il y ait eu discussion collégiale avant, avec un autre médecin, de l‟EMSP par
exemple, concertation multidisciplinaire, d‟équipe, dès lors que l‟on peut l‟anticiper, pour que
cela ait du sens pour tout le monde ».
56
Décider de l’indication de sédation chez un patient avec des troubles de
VI-2.5
communication
L’indication de sédation se pose :
- en fonction de la proximité de la fin de vie : « en fonction d‟où il en est par rapport à sa
maladie… »
- « sur des discussions longues sur ses angoisses de fin de vie bien avant… »
- le ressenti de la souffrance et l’interprétation des signes cliniques: « le ressenti de la
situation…s‟il s‟agite… », « on se fie aux signes cliniques…on comprend qu‟il souffre trop,
«...me regarde d‟un air hagard…en train de respirer sans pouvoir me dire quoi que ce soit, je
comprends le message pour moi comme un appel à l'aide.. »
La décision se prend :
- après essai de discussion avec le patient « elle ne pouvait pas parler mais comprenait
tout… »
- seule par moment : « quand ils ne peuvent pas décider pour eux, je décide pour eux, en
fonction de ce qui me paraitra bien pour moi-même… j'en discute éventuellement avec
l'équipe si j'ai des états d'âme ».
- après discussion « avec la personne de confiance »
- après discussion « avec l’équipe et les différents intervenants du service, la famille ».
VI-2.6 Modalités de prescription d’une sédation
-
Selon un protocole bien défini pour les médecins :
Pour 3 des 4 médecins, la sédation se fait « en iv. par bolus de 1mg toutes les deux minutes
jusqu‟à endormissement, puis en seringue électrique avec les bolus divisés par deux en
mgr/h ». Un médecin ne s‟est jamais retrouvé dans cette situation et ne connait pas le
protocole.
-
Protocole non connu par les infirmières :
« …des posologies beaucoup plus élevées, en continu avec des bolus… on commence par
un bolus si on voit que la personne est vraiment anxieuse, puis on renouvelle les bolus si
besoin… », « on regarde taille et poids du patient, on fait une titration,…on se base sur la
prescription médicale… », « « Il n‟y a pas de protocole type, c‟est une prescription
57
nominative, il y a un traitement de fond, on fait des bolus quand la personne se réveille ».
VI-2.7 Surveillance de la profondeur de la sédation
- utile ?
-
Elle est jugée utile par tous les soignants pour surveiller l’efficacité et le maintien
de la profondeur de la sédation : « utile, oui, pour qu'il ne se réveille pas avec une
gêne à nouveau… avec la même souffrance qu‟au moment où on a fait la sédation ».
- conseillée ou recommandée?
-
Deux soignants pensent qu‟elle est conseillée « on nous apprend ça à l'école
d'infirmière »
-
Un médecin pense qu‟elle est aussi « recommandée, mais pas facile à réaliser »
- codifiée dans le temps ou pour l‟évaluation de la profondeur?
-
La surveillance de la profondeur de la sédation est réalisée mais non codifiée. Sa
durée n’est pas remise en cause :
- à l’initiation par le médecin :
« je reste au début pour voir si c'est efficace, qu‟il ne s'agite pas, n‟ouvre pas les yeux
puis en fonction de ce que dit l'équipe »
- dans le temps :
« pas de rythme particulier », « Elle se fait chaque fois quand on rentre dans la chambre,
infirmières et aides-soignantes, à nos passages habituels, on voit s'il répond, et lors des soins
on voit comment il réagit. Il n'y a pas de surveillance horaire spécifique ».
- sur les signes à surveiller :
« On apprécie en fonction de ses mouvements, qu'il n'ouvre pas ses yeux ou alors qu'il les
ouvre et les referme tout de suite, ou qu'il ne répond plus aux questions », « .. il faut que ce
soit une sorte de coma réactif, qu‟il dorme ; s‟il ouvre l‟œil à la stimulation verbale, c‟est
limite, pas loin du pas assez, sauf si finalement la situation de détresse est soulagée comme
ça ; si c‟est une réponse à une stimulation tactile, c‟est acceptable…je me fie plus à la détente
physique et à la non crispation du visage pour dire que le patient est soulagé ».
58
VII. DISCUSSION
________________________________________________________
VII-1 La difficulté du diagnostic de l’anxiété
L‟anxiété est un symptôme peu spécifique et polymorphe, difficile à identifier clairement, en
particulier lorsque le patient ne peut s‟exprimer verbalement. C‟est un point rapporté
fréquemment par les soignants.
La situation la plus simple est encore celle où le patient exprime lui-même sont anxiété.
Mais les symptômes observés et attribués à l‟anxiété, le patient « pas détendu », « abattu,
effondré », « reste au lit sans bouger », « attitude différente », « l‟agitation » et la
« crispation », « l‟agressivité », les troubles du sommeil ou les cris, sont extrêmement vagues
et peu spécifiques ; d‟où la difficulté de porter ce diagnostic qui se base finalement sur un
faisceau d‟arguments très subjectifs. Lorsque le décès du patient semble inévitable, en phase
terminale, s‟ajoute un nouvel argument : il n‟est « pas confortable, on ne le sent pas serein »
et « il baisse les bras ».
Est-ce bien de l‟anxiété ? Les symptômes pourraient aussi bien être attribués à un syndrome
dépressif, à une douleur. L‟agitation, beaucoup citée, peut avoir de multiples étiologies
comme nous l‟évoquions auparavant, et aussi résulter du traitement anxiolytique lui-même
mis en place.
Les cris sont-ils une demande de présence ou de « trop plein »?
Les signes physiques,
tels la dyspnée, les douleurs thoraciques, les vomissements ...
pourraient être évocateurs d‟une anxiété , mais sont aussi difficiles à prendre en compte du
fait de leur lien avec la maladie ou aux traitements en place.
S‟il s‟agit d‟anxiété, quelle en est son importance, sa tolérance pour le patient ? Sa durée
et sa cause ? Ces patients polymédicamentés avec des troubles multifactoriels ont des raisons
59
très diverses pour ne pas présenter qu‟une anxiété « isolée », qui pourraient
peut être
répondre à une prise en charge spécifique.
Replacer le patient dans son contexte familial, personnel, social peut permettre de donner du
sens à l‟expression d‟une anxiété « isolée ».
Lorsque l‟état du patient se dégrade et qu‟il est même proche de la mort, une recherche
étiologique bien que difficile et un regard clinique s‟imposent. C‟est le cas, par exemple d‟une
absence de substitution intégrale de la voie orale à parentérale, pour un patient présentant des
troubles de déglutition, ou lors de sevrage de traitements tel les corticoïdes qui peuvent
majorer alors la douleur64.
Un diagnostic étiologique le plus précis et le plus précoce possible, est fondamental pour la
prise en charge du patient. Il peut peut être évité un enchaînement (voir déchainement ?)
thérapeutique inadapté ou bien la majoration de l‟anxiété jusqu‟à en devenir réfractaire.
Quelle est la demande du patient ?
Souhaite-il être soulagé de cette anxiété qui devient gêne ? Est-ce l‟expression d‟une
souffrance plus globale ? Faut-t-il « faire cesser le cri… La précipitation de l‟urgence suture
souvent la demande. Elle ne laisse pas au cri le temps de se convertir en mots » et « la tonalité
affective qui colorera l‟expression de cette souffrance (angoisse, colère,..) témoigne d‟un sujet
souffrant, jamais réductible à son seul symptôme. Car, alors, le souffrant ne serait plus qu‟un
objet du « regard clinique ». Dans notre société médicale moderne, « toute douleur devient le
signal du besoin d‟intervention extérieure pour l‟étouffer…la civilisation médicale s‟engage à
réduire les niveaux de souffrance, en augmentant la dépendance »
65
. L‟anxiété semble
pouvoir être assimilée à cette douleur…
.VII-2
Que proposer au patient ?
Les traitements proposés au patient et l‟évaluation des effets secondaires varient en fonction
du stade évolutif de celui-ci et des attentes du soignant.
Qu‟en attend le patient ? En attend-il la même chose que les soignants, que la famille ?
________________________
64
Lichter I, Hunt E. Op.Cit. p. 9
Pillot J. Soulager la douleur : une ligne de crête. Jalmalv 1990 ; 21(juin)
65
60
VII-2.1 L’influence de la proximité de la fin de vie sur les attentes et la tolérance des
troubles de vigilance
Lorsque le traitement de la maladie est encore envisagé, tant qu‟il y a un projet « de vie », le
soignant souhaite que le patient soit combattif, réceptif, autonome, en relation avec le monde
extérieur, adhérent au traitement et « doit participer à sa prise en charge ». Ainsi
« La parole, le soutien sont tout autant important » que le traitement médicamenteux. « je
propose un médicament ou la psychologue », la prescription d‟un « psy », reflétant plus la
prise en charge globale du symptôme que l‟introduction d‟un tiers dans la prise en charge du
malade66.
Le traitement médicamenteux par benzodiazépines proposé est très encadré. Il est prescrit de
préférence par voie orale, afin que le patient puisse le moduler lui-même. Les effets
secondaires, en particulier ceux sur la vigilance, sont surveillés et non acceptables.
Lorsque la guérison n‟est plus envisagée, mais la fin de vie encore éloignée, il y a un
flottement, le souhait de privilégier le confort du patient s‟exprime par une plus grande
tolérance vis-à-vis de la « non-lucidité » du patient. « quelque fois ce n‟est pas dérangeant
[qu‟il soit endormi] », « s‟il est plus détendu, mais un peu trop ensuqué, on laisse le
traitement ». Le sommeil, la diminution de la vigilance, sont plus acceptés comme un refuge
pour le patient qu‟un effet secondaire du traitement avec ainsi une évaluation aléatoire et
subjective.
VII-2.2 Le patient serein face à la mort…
Lorsque la mort approche et devient inéluctable aux yeux des soignants, les attentes face au
traitement de cette anxiété changent encore plus clairement.
« il doit être soulagé et il n‟y a plus que ça qui compte », il faut « qu‟il puisse dormir, pas
trop penser », « être apaiser », « appréhender cette phase le plus agréablement possible ».
Les troubles de vigilance sont tolérés, sinon acceptés ou recherchés « c‟est le prix à payer
pour l‟anxiolyse », « ils sont acceptables dans le sens où le traitement à un but de
soulager… »
_________________________
66
Brocq H, Mignot G, Frenandez H. Prendre en charge des patients cancéreux en fin de vie : éléments d‟une
réflexion pluridisciplinaire. Objectif soins. Le cahier du management 1999 ; 74 :10-2
61
Sommes-nous dans le traitement de l‟anxiété ou souhaitons-nous traiter autre chose ?
Les soignants quotidiennement confrontés aux angoisses en lien avec la fin de vie, « sont
livrées à eux-mêmes face aux turbulences douloureuses de la contagion émotionnelle »67.
Comme le précisait un soignant, « on peut être peu regardant quant aux troubles de vigilance
et confondre anxiolyse et sédation », parce qu‟il y a « la souffrance de l‟équipe » et « nous
sommes en situation d‟échec ». Comme le dit H.Brocq, « le médecin, après une lutte sans
merci à ses côtés contre la maladie, baisse les bras et s‟avoue directement ou indirectement
vaincu. D‟ailleurs pour M.Derzelle, le « fantasme de la bonne mort, sans cachexie, sans
râles, sans douleur, n‟est jamais qu‟une énième métaphore du déni de la mort sous la forme du
déni de la violence », et cette « représentation de fin de vie dépourvue de violence peut être
culpabilisante pour les familles et les soignants lorsqu‟elle est promue au rang d‟idéal
normatif ».
Finalement, le patient attendant sa fin de vie de manière apaisée, sereine,
rappelle
étrangement la représentation du mort comme gisant sommeillant au moyen âge ; la mort
comme un éternel sommeil. Nous nous retrouvons dans « Cette douceur presque cotonneuse,
probablement conforme à notre désir, venant combler l‟angoisse, culmine en une mort qui est
endormissement…Esthétisme de la « belle mort » assumée, préparée, totalement consciente et
surtout inconsciente, où se profile l‟idée douce d‟accompagnement, derniers jours entourés,
respectés, sereins… »68.
Dans un autre contexte, un soignant évoquait le fait que lorsque le patient dort, il pourrait
alors s‟occuper plus des familles. Comme si le fait de ne plus pouvoir « sauver le patient »
était substitué par le souci de pouvoir continuer à « faire ».
VII-2.3 Le « double effet »…
Face au patient fragile avec des défaillances multiples, plus fatigué, les troubles de vigilance
sont alors tolérés comme résultat du « double effet ». Ils s‟installent déjà « avec des doses
plus faibles », et sont pour ainsi dire inévitables ou même secondaires à autre chose que le
traitement instauré.
_________________________
67
Brocq H. Le groupe Ressource: une démarche d'accompagnement dans le cadre des soins palliatifs. Med Pal
2002; 1 : 95-102
68
Derzelle M. Palliativement correct. Annales Médico-Psychologiques 2004 ; 162 : 290-296
62
Tout ceci peut permettre de tolérer des troubles de vigilance par les soignants, peut être
secondaires au traitement anxiolytique et contribuer à une confusion entre anxiolyse et
sédation « intentionnelle ».
VII-3 Peut-on maintenir un traitement à but anxiolytique malgré
l’apparition d’effets secondaires ? Si oui, lesquels ?
Le traitement anxiolytique évoqué par les soignants concerne toujours un traitement par
benzodiazépines, et par midazolam en phase terminale. En dehors des troubles de vigilance,
les autres effets secondaires, plus rares,
semblent peu connus comme les réactions
paradoxales d‟agitation et les troubles du comportement.
Les troubles de vigilance sont-ils tolérables et jusqu‟à quel degré ?
Sont-ils dus au traitement, anxiolytique en particulier, où à d‟autres facteurs liés à l‟évolution
de la maladie, aux autres traitements… ?
Face à l‟inquiétude de réémergence du symptôme lié aux diminutions de posologie du
traitement, du fait des troubles de vigilance, sommes-nous dans une situation de double-effet,
qui oblige alors à admettre qu‟il existe aucun autre traitement susceptible de soulager
l‟anxiété ?
Ou sommes-nous déjà dans le cadre d‟une sédation, « douce » comme la définit Morita 69,
c'est-à-dire l‟utilisation de psychotropes avec l‟intention d‟autoriser la présence d‟une
somnolence ?
Le symptôme réfractaire se défini comme un symptôme insupportable pour le patient, ne
répondant à aucune thérapeutique sans compromettre la conscience de celui-ci.
Quand sommes-nous dans une situation d‟une anxiété « réfractaire », ne pouvant être
soulagée qu‟au détriment de l‟apparition des troubles de vigilance associés ?
En l‟absence de réévaluation du et des traitements, d‟une remise en question du symptôme et
________________________________
69
Morita T, Akechi T, Sugawara Y, Chihara S, Uchitomi Y. Practices and attitudes of japanese oncologists and
palliative care physicians concerning terminal sedation. J Clin Onco 2002 ; 20(3):624-626.
63
de son sens pour le patient, d‟une surveillance systématique de l‟apparition d‟effets adverses
et de leur sévérité, cette distinction autour de la problématique du caractère difficile ou
réfractaire ne sera jamais faite.
Par conséquent, la réflexion sur la nécessité ou non de mettre en place une sédation ne peut
émerger.
Sédation dans le cadre d‟un symptôme psychique considérée par ailleurs dans les
recommandations nationales et internationales comme exceptionnelle et nécessitant une
réévaluation fréquente et rapprochée70.
La question autour de l‟obstination raisonnable face au maintien d‟un traitement anxiolytique
avec apparition de troubles de vigilance, peut naturellement se poser. En soins palliatifs, ce
traitement est-il à considérer comme « un traitement inutile ou disproportionné » selon la loi
du 22 avril 2005 ? Seul le patient connaît le degré de sa souffrance et l‟intensité de son
anxiété qu‟il est prêt à accepter en lien avec les effets secondaires de ses traitements. Tout
ces éléments devraient être abordés avec le patient et sa famille au décours de discussions
régulières, il semble que ce ne soit pas toujours facile.
Cette échange répété est d‟autant plus important que la sévérité de la souffrance émotionnelle,
dont l‟anxiété peut faire partie, peut être très fluctuante dans le temps71 et peut être ne pas ou
ne plus relever d‟un traitement médicamenteux.
.VII-4
La molécule de toutes les vertus ?
Le patient en phase terminale reçoit presque exclusivement comme traitement anxiolytique du
midazolam, » parce que la voie orale est souvent impossible », mais aussi « parce qu‟il est très
efficace, maniable ».
Il peut être important de maintenir la prise orale, même en sublingual, de molécules de courte
durée d‟action comme le lorazepam, l‟alprazolam ou l‟oxazepam, conseillés dans l‟anxiété en
fin de vie72. Ceci peut permettre au patient de rester acteur le plus longtemps possible.
______________________________
70
Cherny NI, Radbruch L. European Association for Palliative Care (EAPC) recommanded framework for the
use of sedation in palliative care. Palliative Medecine 2009. 23(7): 581-593
71
Ibid.p 6
72
Brody H, Campbell ML, Faber-Langendoen K, Ogle KS. Withdrawing intensive lifesustaining treatmentrecommendations for compassionate clinical management. N Engl JMed 1997; 336(9):652-657.
64
Peut-on utiliser d‟autres molécules lorsque l‟on constate une altération de la vigilance ou en
fonction de l‟étiologie du symptôme visé ?
Les benzodiazépines peuvent aussi aggraver une anxiété dans le cadre d‟un syndrome
confusionnel. Les neuroleptiques comme l‟haloperidol, aussi moins sédatif, sont conseillés
lorsque les benzodiazépines ne contrôlent pas / plus suffisamment les symptômes.
Les mesures d‟accompagnement comme le soutien par la parole, la relaxation, les
techniques de distraction, le toucher, la modification de l‟environnement par la musique (par
exemple), la réduction de la lumière et du bruit peuvent être très aidants73.
Le fait que la même molécule ait plusieurs effets dont l‟un, les troubles de vigilance, sont à un
moment un effet secondaire et à un autre moment un effet souhaité, peut prêter à confusion,
surtout quand le traitement est déjà en place.
Certains soignants constatent qu‟ « au départ, le patient reçoit un traitement contre l‟anxiété
avec un résultat de sédation au final ». « Ainsi, lorsque la personne se dégrade et l‟anxiété se
majore, on peut progressivement augmenter les doses jusqu‟à sédation… ».
Comme si le fait d‟avoir déjà la molécule en place permettait de « profiter » de ses effets
secondaires sans devoir passer par le questionnement de l‟intention ; effet de « glissade »
consciente ou non?
Ceci peut prêter d‟autant plus à confusion que la proposition d‟une « anxiolyse nocturne »,
ayant comme but déclaré de faire dormir, est qualifié d‟anxiolyse et non de sédation nocturne.
Le patient dans le souci de le préserver, n‟est pas toujours impliqué dans cette décision.
La différence entre anxiolyse et sédation basée sur la posologie administrée est mise en
avant.
Dans la littérature74,75, on ne peut pas prédire l‟effet sur la conscience du produit, la posologie
peut varier d‟un rapport de 1 à 10.
Effectivement, l‟effet anxiolytique précède théoriquement l‟effet sédatif, mais chez certains
____________________________
73
Ibid. p.653
Lecomte D. Utilisation du midazolam en unite de soins palliatives. Infokara septembre
1996 ; (43)
75
Blanchet V, Viallard M-L, Aubry R. Op.Cit. p. 64
74
65
patients fragiles, on peut observer une quasi concomitance de ces effets à des doses très
faibles ; où à l‟inverse une tolérance à des doses très importantes.
La posologie anxiolytique et sédative est donc très variable et non extrapolable. Pratiquer des
injections-tests permettant au malade et à l‟équipe d‟évaluer l‟effet du midazolam pourrait
être une étape utile avant de poser une perfusion continue.
Dans le cadre de l‟anxiolyse, Lecomte précise que « c‟est lorsque le soulagement des
symptômes s‟accompagne d‟une dégradation de la qualité relationnelle que l‟indication est à
réévaluer ».
Dans le cadre d‟une sédation, M-S. Richard conseille « si le symptôme pénible s‟amende, il
n‟y a pas lieu de renouveler les drogues sédatives »76.
Ce principe ne peut-il pas aussi être appliqué à l‟anxiolyse, d‟autant plus que l‟anxiété peut
être très fluctuante ?
Les soignants décrivent des pratiques très variables d‟administration de la molécule sans
protocole bien défini. Des repères plus précis pourraient –ils être aidants ?
De même, « le midazolam possède un effet amnésiant intéressant. La malade, se souvenant
peu du soin effectué, l‟appréhende moins par la suite »77, ce qui peut éviter une administration
systématique.
VII-5 Qu’est-ce que la sédation ?
Le pas entre anxiolyse et sédation est facile à franchir, d‟autant plus que le but et les
indications de celle-ci sont floues et elle est assimilée à une anxiolyse par certains soignants.
VII-5.1 Une anxiolyse souvent …
Le but recherché de la sédation est pour la plupart « l‟endormissement », c'est-à-dire
l‟obtention des troubles de vigilance ne permettant plus à priori la communication avec le
patient.
Mais la confusion demeure, car cette endormissement à visé anxiolytique qui peut même
__________________________
76
Richard MS. Faire dormir les malades. Cahiers Laennec 1993; 41(5):2-7.
Ibid.p.3
77
66
glisser en sédation, conséquence d‟une anxiolyse efficace pour certains, n‟est pas remis en
cause, et peut même n‟être considéré « que » comme une question de « vocabulaire » pour un
soignant.
VII-5.2 Surtout profonde dans des situations de détresse aigue…
Provoquer des troubles de vigilance dans le cadre d‟une sédation est surtout associé à des
situations de détresse aigu comme la détresse respiratoire ou l‟hémorragie cataclysmique
principalement en phase terminale, avec le décès du patient.
Une sédation profonde est recherchée, avec peut être un doute sur le risque de précipiter la
mort, comme peut le laisser entendre cette remarque « …on souhaite que cela se passe dans
les meilleures conditions possibles, sachant qu‟il n‟y a pas d‟issu de toute façon… ».
Dans cette vision d‟une sédation toujours profonde, avec « un patient dans un coma réactif à
une stimulation tactile », les troubles de vigilance induit par un traitement anxiolytique dont la
profondeur n‟est pas évaluée, peuvent laisser supposer que l‟on est dans deux domaines
distincts.
La SFAP78 recommande effectivement une sédation de profondeur Rudkin 4, mais cite
comme référence dans sa version longue en 2004 : « l‟efficacité du midazolam est appréciée
par “ la sérénité ” obtenue ou plus précisément, en tenant compte du soulagement des
symptômes, de l‟existence d‟un endormissement ainsi que de sa durée, du niveau de réactivité
(aux stimuli verbaux et/ou tactiles), du maintien d‟une communication, verbale ou non
verbale ».
MS.Richard propose « d‟adapter la profondeur et la durée du sommeil à la situation du
malade »79 et Verspieren80 pose comme exigence éthique que « la profondeur du sommeil
induit ou le degré d‟inconscience soient adaptés aux nécessités du soulagement de la
souffrance, de manière à ne pas faire obstacle sans raison suffisante au maintien d‟une activité
psychique du malade et à la communication infra-verbale ».
Peut-on distinguer l‟anxiolyse avec troubles de vigilance et sédation « douce » ?
__________________________
78
SFAP. Op.Cit. p.29
Richard M-S. Faire dormir les malades.Op.Cit.p.7
80
Verspieren P. Profondeur et durée du sommeil induit. Cahiers Laênnec 1993 ; 41(5):7-10
79
67
VII-5.3 La souffrance morale et l’agonie
Les autres indications sont pour beaucoup de soignants « la souffrance intolérable du patient »
et la fin de vie en elle –même « ils sont conscients qu‟ils vont s‟en aller et ne veulent pas être
conscient à ce moment là… » ou lorsqu‟on pense que « ça va aller de moins en moins bien ».
Ces indications donnés par les soignants font penser comme le dit J.Pillot que « le fait d‟avoir
« un savoir » sur le destin du malade complique notre relation et nous risquons, en ne le
considérant plus que comme quelqu‟un marqué par le sceau de la mort, de ne plus percevoir la
complexité de ce qui l‟habite », alors que « l‟expression de la souffrance sera plus appel à
témoin qu‟appel à sédation »81.
Ainsi, les soignants situent la sédation principalement en phase terminale, ou même « les tous
derniers jours, les derniers moments », et la plupart du temps jusqu‟au décès. La notion
théorique d‟une sédation transitoire, en phase palliative, existe chez certains, mais reste très
exceptionnel.
Par ailleurs, l‟agonie, dont il semble s‟agir pour certains soignants, se traite-t-elle ?
Nous avions vu qu‟en phase agonique, le patient est inconscient et n‟a plus de manifestations
émotionnelles ni de perceptions et nécessite surtout une présence humaine.
La différenciation avec la phase pré-agonique n‟est pas toujours aisée. Mais il est possible
que dans cette période terminale, « cet abîme ouvert par la mort d‟autrui proclame la
condition humaine, ses limites insupportables, son absurdité… ne pas „moduler‟ l‟agonie ou
proposer des traitements de fin de vie permet de garder cette question pendante au cœur de
notre monde : quel sens pouvons nous créer ensemble et comment œuvrer comme
homme ? »82
VII-5.4 Le symptôme réfractaire
L‟indication de sédation pour un symptôme réfractaire dans le sens d‟un symptôme qui ne
répond pas à un traitement sans compromettre la conscience du patient, n‟est évoquée par
aucun soignant alors que c‟est cette interrogation qui permettrait comme nous l‟avons vu de
__________________________
81
Pillot J.Aspect psychorelationnels de la fin de vie.Op.Cit. p.1057-1058
Marin I. Traiter l‟agonie ? Esprit 1992 ;(jan):91-97
82
68
resituer et réévaluer le traitement anxiolytique avec le patient.
VII-6 Parler de sédation au patient et à la famille ?
L‟importance de l‟anticipation, la discussion avec le patient et la famille, la réflexion
collégiale autour de la décision de sédation sont évoquées par la plupart des soignants.
Mais ces derniers mettent en avant également leur difficulté en pratique de ne pas pouvoir
anticiper des situations aigues, ou de vouloir faire rapidement ce « que je souhaiterais qu‟on
fasse pour moi ». Ils ne veulent pas inquiéter patient et famille pour un risque théorique qui
pourrait ne pas survenir, et souhaitent au contraire soulager « les souffrances et rapidement »,
« et quand il ne peut plus décider pour lui, je le fais pour lui ».
Ceci indique bien la nécessité de réflexion autour de la position du soignant, de l‟entourage et
du patient :
Les soignants et l‟entourage ne ressentent-ils pas parfois un inconfort du patient supérieur à
celui du malade83 ? Cette question peut aussi se poser dans le cadre de l‟évaluation de
l‟anxiété.
L‟anticipation, même de situations théoriques non encore vécus
peut être nécessaire,
car « une telle discussion [avec le patient] peut s‟avérer très apaisante et non anxiogène
(comme certains le pensent) »84.
Nous retrouvons aussi ce que constate Rietjens85, que « la décision du praticien de pratiquer
une sédation profonde continue se construit entre les intérêts du patient et les sentiments
personnels, comme l‟empathie et la compréhension « profonde » de la souffrance du patient.
Selon Morita86, la décision du soignant est influencée par son vécu personnel,
comme sa religion, spécialité, sa confiance dans la maîtrise du symptôme, son expérience face
à la fin de vie et son degré de surmenage ».
_______________________________
83
Richard M-S. La sédation en fin de vie. Laennec 2001 ; 10(6) : 12-16
Richard M-S. Op.Cit.p.3
85
Rietjens JA, Buiting HM, Pasman HR, et al. Deciding about continuous deep sedation : physicians‟
perspectives : a focus group study. Palliat Med.2009; 23(5) : 410-7.
86
Morita T, Akechi T, Sugawara Y, Chihara S, Uchitomi Y.Op.Cit.p.758
84
69
VII-7 Anxiolyse – sédation – euthanasie
Pourquoi semble-t-il être plus difficile de provoquer des troubles de vigilance chez un patient
en dehors d‟une détresse aigue que de les accepter comme effet secondaire ?
Comme l‟évoque un soignant, « c‟est difficile de parler aux gens de sédation…ils ne se
rendent pas compte de l‟aboutissement de la sédation, cela nous met mal à l‟aise, le but n‟est
pas d‟angoisser la personne ».
Mais quel est donc l‟aboutissement de la sédation pour le soignant ?
Cela sous-tend-il de rendre le patient inconscient ou plutôt de provoquer son décès ?
Finalement pour le
patient d‟être mort « symboliquement » dès la
mise en place du
traitement ? Ou est-ce plutôt la difficulté de parler de cette mort à venir ?
Ce qui différencie clairement la sédation de l‟euthanasie, c‟est sa réversibilité, en plus de la
clarification de l‟intention et de la poursuite de l‟accompagnement et du soin. La réflexion sur
la réversibilité et l‟adaptation de la profondeur d‟une sédation est essentielle pour le patient,
son entourage et le soignant.
Dans le cas de troubles de vigilance comme effets secondaires, toute cette réflexion est
absente et impose le statu quo.
Se pose aussi le problème du double-effet. Il est important que le patient et la famille puissent
avoir des informations claires à ce sujet pour ne pas avoir le doute de l‟euthanasie, ce qui est
une entreprise difficile dans un moment de stress émotionnel intense 87.
Il semble difficile pour le soignant de garder à l‟esprit le principe de réversibilité, les
situations de détresse aigue aboutissant au décès en général. Une mise en parole régulière
semble alors nécessaire.
_______________________.
87
Barreth A, Fainsinger R, Oneschuk D, Pritchard Z. The challenge of communicating intent of sedation in
advanced illness. J Palliat Care 2003 ;19(3) :217-9
70
VII-8 Le protocole et la surveillance de la profondeur de la
sédation
Le protocole de titration du midazolam et de maintien du traitement dans le cadre de la
sédation est parfaitement connu par la plupart des médecins. Les infirmières gardent la notion
de proportionnalité dose / effet, avec un traitement de fond et des bolus, similaire à ce
qu‟elles font dans le cadre de l‟anxiolyse.
Cette similitude peut-elle ajouter à la confusion, surtout en l‟absence de protocole clair
d‟anxiolyse ?
La surveillance de la vigilance n‟est pas déterminée clairement ni même l‟outil éventuel
d‟évaluation, bien que reconnu utile en particulier pour éviter le réveil « pour qu‟il ne se
réveille pas avec une gêne à nouveau ».
C‟est d‟ailleurs ce même
argument qui est aussi avancé lors de l‟évaluation du traitement
anxiolytique face à des troubles de vigilance ; le traitement ayant pour but de soulager une
souffrance ou angoisse supposée ou potentielle.
VII-9 Provoquer des troubles de vigilance…
Que signifie provoquer une baisse de la vigilance ou même une perte de conscience, sur le
plan psychique et relationnel88 ? Ne peut-on pas se poser la même question quand elles sont
le résultat de l‟effet secondaire d‟un traitement, donc non intentionnelles ?
Est-ce acceptable de priver le patient de sa capacité de communiquer et donc de décider de ses
capacités de relation à autrui dans un état de totale vulnérabilité ? Le maintien de la vie
relationnelle n‟est-elle pas une des bases de l‟accompagnement ?
Comment au-delà de l‟apparence paisible du patient, peut-on évaluer si la technique est
réellement efficace, le patient soulagé ? « La conscience est-elle altérée au point que le
trouble ayant justifié la sédation n‟est plus perçu ? Le malade n‟est-il pas condamné à une
situation pire encore ?...la sédation permet-elle au malade de ne pas acquérir l‟information ou
__________________________
88
Aubry R, Blancet V, Viallard M-L. La sédation pour détresse chez l‟adulte dans des situations spécifiques et
complexes. Medecine palliative-Soins de support-Accompagnement-Ethique 2010 ; 9 : 71-79
71
simplement de ne pas se souvenir de son acquisition ? »89
Question tout aussi pertinente face à des troubles de vigilance non intentionnels dont l‟origine
médicamenteuse peut être difficile à évaluer, d‟autant plus que le décès est proche où qu‟ils
constituent en eux même un indice de la proximité de celui-ci90.
Ce questionnement se pose particulièrement pour le « sommeil continu, jusqu‟à la mort
…l‟endormissement pour une brève durée, s‟il correspond à des indications précises, ne
soulève aucune difficulté d‟ordre éthique », certains patients faisant un réel travail
psychologique pendant le sommeil. A chaque réveil, ils expriment un état psychique
différent »91.
Que signifient les troubles de vigilance pour la famille et les soignants ?
Les soignants expriment souvent une grande souffrance face à ce patient « délibérément
endormi qui communique si peu »92.
« La famille est en général contente » ou même comme le rapportait un soignant, « le fait que
la personne est inconsciente, diminue les angoisses de la famille ». Cette dernière peut parfois
acquiescer pour satisfaire et soutenir la position du soignant, plutôt que la leur 93.
Brajman constate94 que la famille peut exprimer des sentiments ambivalents, souhaitant le
soulagement du patient, mais souffrant voir reprochant le manque de communication avec
leur proche ; cette communication devenant même encore plus importante à mesure que le
décès approche. L‟entourage s‟interroge sur les effets des traitements, sur l‟état du patient et
la précipitation éventuelle du décès.
Outre le dialogue avec le patient, l‟implication et la prise en compte familiales, les échanges
avec les soignants sont essentiels dans toute décision thérapeutique pouvant compromettre la
vigilance du patient.
___________________________
89
Salamagne M, Pourchet S.Euthanasie et sédation: de la maîtrise à la compréhension. La lettre de l'Espace
éthique 1999; 86 (9-10-11).
90
Tzen-Pelard M-C, Picard S, Lassaunière JM. Evaluation de la vigilance chez des patients cancéreux
hospitalisés en unités de soins palliatifs. Etude longitudinale. Med Pal 2007; 6 : 315-320
91
Richard M-S. Op.Cit.p.6
92
Verspieren P. Op.Cit.p.9
93
Barreth A, Fainsinger R, Oneschuk D, Pritchard Z.Op.Cit.p.218
94
Brajtman S.The impact on the family of terminal restlessness and its management. Palliat Med.3003 Jul ;
17(5) :454-60
72
VIII. PROPOSITIONS
________________________________________________________
Mieux connaître et réfléchir ensemble, mieux comprendre la situation du patient d‟une part,
utiliser des outils d‟évaluation au quotidien et des protocoles précis pour l‟anxiolyse et la
sédation d‟autre part et finalement réfléchir sur l‟utilisation de deux molécules distinctes pour
l‟anxiolyse et la sédation peuvent être des propositions pour aider à la clarification des
situations nécessitant une anxiolyse ou une sédation.
VIII-1 Des formations et groupes de réflexion à mettre en place
VIII-1.1 Des formations existantes à développer au sein de l’hôpital
1.1.1 Depuis 2008, il existe au sein du CHBA une initiation aux soins palliatifs de 4
jours dispensée par les membres de l‟équipe mobile de soins palliatifs et des soignants ayant
une formation dans ce domaine.
Elle n‟est pas encore ouverte à l‟ensemble du personnel de l‟hôpital, ce qui retarde la
diffusion de la « culture palliative ».
Une approche plus précise sur l‟anxiété et la sédation en soins palliatifs pourrait y être
proposé.
Un chapitre sur la phase terminale et l‟agonie semble nécessaire.
Mais les soignants assistent une seule fois à cette formation et tout ceux d‟un même service
n‟y participent pas. Elle se veut généraliste et ne peut pas entrer dans le détail des prises en
charge.
1.1.2 L‟EMSP a initié cette année une information sur la loi « Léonetti » proposée dans
un premier temps au pôle gériatrique et dont la diffusion va être élargie à l‟ensemble du
personnel de l‟hôpital.
1.1.3 Dans le cadre des formations dispensées aux internes des hôpitaux par les EMSP
en Bretagne, un chapitre pourrait également prévoir ces problématiques.
73
VIII-1.2 Des groupes de réflexion au sein des services
C‟est au sein des services mêmes qui prennent en charge des patients en fin de vie, et en
premier lieu le service d‟oncologie avec ses lits identifiés qu‟une rencontre régulière pour une
réflexion autour de l‟anxiété et l‟anxiolyse, la sédation , la souffrance , l‟agonie, le processus
naturel du mourir, mais aussi l‟accompagnement du patient et des familles pourrait être
initiée et animée par l‟EMSP.
Il semble intéressant d‟y intégrer tous les soignants et de prévoir cette rencontre à un
rythme régulier 1-2 fois par an afin de faire participer sans tarder les nouveaux arrivants ,
permettant ainsi des échanges d‟idées et de difficultés, des réflexions sur des protocoles, des
discussions à propos des évaluations des symptômes sur les thèmes de l‟anxiété, anxiolyse et
sédation.
Ces réunions permettront aussi de rappeler que toute prise en charge peut s‟articuler autour
des garde-fous indispensables (B. Devalois) que sont les questions « de quoi parle-ton, que
fait-on et pourquoi, pour qui, comment le fait-on et dans quel contexte ».
VIII-2 Organiser des groupes de parole pour les soignants
Comme nous l‟avons vu, l‟accompagnement des patients en fin de vie confronte les soignants
a des situations émotionnelles difficiles car liées à l‟angoisse de mort. L‟accompagnement
qui consiste à soutenir le désir de vivre de quelqu‟un qui va mourir est mis à mal, car ces
équipes ne bénéficient pas d‟un dispositif pour « penser » les angoisses en lien avec la fin de
vie95. La contagion émotionnelle, le refuge dans le traitement médical qui sert d‟unique
vecteur quand on ne trouve plus de sens, la projection et l‟identification sont autant de signes
de souffrance de l‟équipe qui érodent la croyance du soignant en sa capacité à soigner
efficacement et qui compromettent cet accompagnement. L‟aide à l‟équipe à prendre de la
distance en différenciant ses émotions de celle du patient et a comprendre les processus
psychologiques impliqués de part et d‟autre est une aide également au patient, car celui-ci a
besoin de « trouver dans son milieu de vie une réassurance affective qui lui permette de
pallier sa sécurité de base défaillante »96. Il a besoin de l‟autre pour organiser sa vie psychique
______________________________
95
96
Brocq H.Le groupe ressource. Op.Cit. p95-96
Brocq H, Mignot G, Frenandez H. Prendre en charge des patients cancéreux en fin de vie.Op.Cit.p.11
74
et si cet étayage devient défaillant, l‟angoisse surgit.
L‟organisation de groupes de paroles réguliers semble ainsi un élément important afin de
faciliter l‟appréciation de l‟anxiété du patient.
VIII-3 Utiliser des outils d’évaluation
VIII-3.1 Des échelles d’évaluation de l’anxiété et de son intensité
Nous avons vu combien le symptôme anxieux manque de spécificité et peut être sur et sousestimé.
Des échelles d‟auto-évaluation peuvent être utilisées comme l‟HADS (annexe 3), permettant
un diagnostic positif de la souffrance psychologique, dont l‟anxiété et un suivi de son
évolution dans le temps. Ceci permet une approche plus précoce et pertinente ainsi qu‟un
suivi continu au cours de l‟évolution de la maladie si cette évaluation est faite de façon
régulière. Elle permet de poser un cadre autour du symptôme et par la même autour du
traitement.
Lorsque cette auto-évaluation n‟est plus possible du fait de l‟asthénie ou des troubles cognitifs
du patient, des échelles d‟hétéro-évaluation comme l‟échelle de COVI (annexe 4) existent.
Mais ces échelles semblent peu adaptées à des situations polysymptomatiques de fin de vie.
Par contre tant que cela est possible pour le patient, la mesure de l‟intensité de l‟anxiété par
une échelle EVA, EN ou EVS, avant et après mise en place d‟une prise en charge, peut
guider celle-ci de manière plus objective et permet de juger de l‟efficacité du traitement
anxiolytique mis en place.
VIII-3.2 L’évaluation de la vigilance
C‟est l‟évaluation systématique de la vigilance précédant et accompagnant un traitement
anxiolytique qui aidera à juger de l‟apparition de troubles de vigilance et de leur évolution
par rapport à l‟instauration, le maintien ou la modification du traitement.
Cette documentation objective permettra de questionner l‟intention du traitement anxiolytique
75
lorsque les troubles de la vigilance apparaissent ou s‟accentuent.
Une
surveillance objective systématique biquotidienne est recommandée pour évaluer
l‟efficacité d‟une sédation, le maintien ou l‟adaptation de la profondeur choisie et surveiller
sa proportionnalité par rapport aux charges physiques et psychologiques pour le patient et son
entourage.
L’échelle de Rudkin (annexe 5) validée et recommandée dans la sédation semble adaptée de
façon générale au suivre de la vigilance des patients en fin de vie. Elle pourrait être utilisée de
manière générale de façon biquotidienne, et en particulier dans le cadre d’une sédation et
d’une anxiolyse.
VIII-4 Des protocoles à proposer
Il semble important de proposer aux soignants des protocoles concernant l‟anxiolyse et la
sédation pour donner un cadre guidant la réflexion et se basant sur des recommandations
officielles.
- Il peut être utile de différencier le protocole de l’anxiolyse de celui d‟une sédation
nocturne pour souligner la différenciation entre troubles de vigilance recherchée ou non.
De même, la proposition de la surveillance de l’intensité du symptôme avant et après
traitement ainsi que la surveillance de la profondeur de la sédation nocturne recherchée
au moins à l‟initiation du traitement peuvent être utiles.
Un rappel des effets secondaires du midazolam, dont certains sont peu connus, peut être
nécessaire.
Des protocoles élaborées par d’autres équipes existent et peuvent être retravaillés dans
ce sens comme cela est proposé en annexe 10 et 11.
- Un protocole de sédation avec ses indications basées sur les recommandations 2009 de la
SFAP (annexe 7) pourrait être précédé par un chapitre sur les conditions préalables (annexe 6)
et la procédure collégiale à respecter avant toute prescription.
76
VIII-5 Une fiche de surveillance de l’utilisation du midazolam
Suite à l‟EPP de 2008 sur l‟« utilisation du midazolam en sédation dans l‟unité d‟oncologie
du CHBA pour les patients relevant de soins palliatifs » une fiche de « décision et de suivi
d‟une sédation » a été mise en place par l‟EMSP (annexe 9) pour essayer de clarifier et
formaliser cette prise de décision.
Mais cette fiche n‟aide pas à différencier l‟utilisation du midazolam dans le cadre d‟une
anxiolyse ou d‟une sédation.
Une « fiche de surveillance journalière de l’utilisation du midazolam » (annexe 12),
précisant son indication, sa posologie, son mode d‟administration et les paramètres de
surveillance (le symptôme visé, l‟intensité de l‟anxiété, la surveillance de la vigilance) peut
être proposée.
Ce suivi pourrait inciter à une réévaluation de l‟intention et du symptôme en fonction de
l‟évolution des critères de surveillance.
VIII-6 Nouvelle EPP avant et après mise en place des propositions
Une réévaluation des dossiers de 2009 dans le cadre de cet EPP doit être réalisée cette année.
Une introduction de cette « fiche de surveillance journalière de l‟utilisation du midazolam »
en 2010 avec une nouvelle réévaluation permettrait d‟analyser son impact sur l‟évolution des
pratiques.
VIII-7 Réflexion autour de l’utilisation d’une molécule autre que
le midazolam pour l’anxiolyse
La confusion entre anxiolyse et sédation est en partie entretenue par l‟utilisation de la même
molécule en cas d‟administration parentérale avec souvent un passage « naturel » de l‟un à
l‟autre sans réévaluation ou questionnement de l‟intention. De même, son utilisation très
fréquente en fin de vie lui confère une connotation inappropriée de garant d‟une mort
« sereine » laissant la porte ouverte à toutes les interprétations.
77
Une réflexion autour de la recommandation d‟une molécule autre que le midazolam dans le
cadre d‟une anxiolyse parentérale et l‟utilisation du midazolam préférentiellement dans le
cadre de la sédation semble utile.
La possibilité de la poursuite d‟une administration entérale d‟un traitement anxiolytique aussi
longtemps que possible, même en sub-lingual et en phase terminale, doit être souligné, ceci
permettant de plus une implication active du patient et une réévaluation du symptôme si ce
traitement semble inefficace à fortes doses.
VIII-8 Travail en commun avec tous les acteurs en soins palliatifs
sur le plan régional
Une réflexion sur le plan régional dans le cadre des dispositifs déjà en place entre les EMSP
et les acteurs de soins palliatifs sur cette problématique et l‟analyse de l‟approche proposée
peut élargir le champ d‟action.
78
IX. CONCLUSION
________________________________________________________
Au terme de ce travail et compte tenu de l‟analyse des 7 entretiens semi-directifs auprès des
médecins et infirmières du service d‟oncologie du CHBA,
l‟hypothèse qu‟il y a confusion dans certaines situations en phase terminale entre anxiolyse et
sédation parce qu‟il existe une difficulté à identifier clairement l‟anxiété en phase terminale se
confirme. Mais cette difficulté existe de manière générale et particulièrement lorsque le
patient ne s‟exprime pas ou ne peut s‟exprimer lui-même clairement à ce sujet.
Le risque étant de sous-évaluer, mais surtout de surévaluer l‟incidence de l‟anxiété et de
définir comme telle des symptômes qui n‟en sont pas forcément comme l‟agitation, les cris, la
confusion, et la souffrance morale et existentielle et de proposer ainsi une approche
inappropriée.
Par ailleurs, l‟évaluation de la gêne ou du souhait de prise en charge de cette anxiété est par
beaucoup influencée par les projections et valeurs personnelles du soignants, surtout en phase
terminale et lorsque le patient ne s‟exprime (plus) à ce sujet.
L‟hypothèse d‟une confusion des protocoles de traitement pour l‟anxiété et la sédation avec
la même molécule et l‟absence d‟évaluation du traitement se confirme en partie :
Le protocole de sédation est bien connu et bien différencié de l‟anxiolyse en particulier par les
médecins prescripteurs.
Mais l‟utilisation de bolus et de l‟administration continue dans les deux indications avec la
même molécule sans protocole identifiable, en particulier pour les infirmières, prête à
confusion, la différenciation étant établie par certains soignants sur l‟importance des doses
utilisés plus que sur l‟apparition de troubles de vigilance.
C‟est surtout la banalisation et l‟interprétation des
troubles de vigilance comme effet
secondaire acceptable, en partie lié à la fin de vie et ainsi non surveillé de manière objective,
qui est un des éléments de la confusion.
Cette interprétation conduit à l‟absence de réflexion sur la nécessaire réévaluation d‟un
traitement pouvant être impliqué dans ces troubles de vigilance.
Cette absence de réévaluation du symptôme et du traitement dans le temps, particulièrement
en phase terminale, avec un maintien de celui-ci comme dans une maladie chronique bien
79
équilibrée par un traitement, augmente le risque d‟apparition d‟effets secondaires « inutiles ».
La qualification par beaucoup de soignant de la sédation comme étant une anxiolyse ne peut
que rajouter à cette tolérance des troubles de vigilance dans le cadre d‟une anxiolyse, et la
transition avec des troubles de vigilance finalement recherchés devient facile.
L‟utilisation de la même molécule dont l‟effet sédatif est une fois non recherché mais
potentiellement possible, de l‟autre recherché mais à des degrés variables, ajoute à cette
confusion, surtout lorsque les indications et le but recherché ne sont pas clairement définis et
encadrés, puis redéfinis lorsque les indications changent alors que le traitement est déjà en
cours.
La connotation de molécule de la fin de vie et de molécule de toutes les vertus attribuée au
midazolam comme l‟indique son nom, « Hypno-well, le bon sommeil », n‟aide pas une
utilisation centrée sur les souhaits du patient.
L‟hypothèse d‟une méconnaissance des indications et de la surveillance de la sédation en
phase terminale pour symptôme réfractaire se confirme également.
La notion de symptôme réfractaire selon la définition des recommandations de la SFAP n‟est
pas connue. Ainsi, il manque un élément essentiel à la réflexion sur la tolérance des troubles
de la vigilance dans le cadre d‟une anxiolyse et de sa requalification en sédation. De même la
nécessité d‟une recherche autant que possible d‟un autre traitement du symptôme ayant moins
d‟effets sur la vigilance n‟est pas connu, même si ceux-ci peuvent effectivement être
multifactoriels.
Il existe par ailleurs une méconnaissance des indications de la sédation et de la possibilité
d‟une profondeur de sédation variable, ainsi qu‟une absence de surveillance objective codifiée
de la sédation.
Les signes de l‟agonie comme processus naturel de la fin de vie, nécessitant plus un
accompagnement qu‟un traitement, sont mal connus par certains et interprétés comme
souffrance du patient.
L‟analyse de la demande du patient, qui est souvent une demande de soulagement du
symptôme sans souhait « d‟inconscience » est difficile au quotidien.
Les soignants associent la sédation principalement aux situations de détresse aigue auxquels
80
ils sont confrontés très régulièrement. La nécessité de la même démarche de réflexion
possible et nécessaire dans d‟autres indications et de la délicate réflexion indispensable pour
une indication dans le cadre d‟une souffrance morale est peu réalisée en pratique, même si
cela est connu sur le plan théorique par certains. La non-indication à priori d‟une sédation
pour détresse émotionnelle de l‟entourage plus que pour le patient ne semble pas si évidente
en pratique quotidienne.
En découlent des propositions de formations, de mise en place d‟outils de surveillance et de
protocole, une proposition de réflexion sur l‟utilisation d‟une autre molécule que le
midazolam pour l‟anxiolyse, d‟outils d‟évaluation et de suivi à utiliser au quotidien, mais
aussi de groupe de parole et de réflexions réguliers pour tous les soignants.
Le soignant est confronté au quotidien à des situations émotionnelles et une gestion du temps
difficiles. La position du soignant dans un service de soins « aigu » où les projets de soins
sont en général orienté vers une prolongation de la vie, mais où cohabitent aussi des patients
en fin de vie dans des situations souvent très délicates, avec de plus un environnement sociétal
qui considère la mort encore et toujours comme un échec,
nécessite une écoute de la
souffrance du soignant pour permettre un repositionnement bénéfique à tous les patients.
Le fait d‟être membre de l‟EMSP en relation presque quotidienne avec ce service et le petit
nombre de personnes interrogées ayant des impératifs complexes de temps, l‟information
donnée au préalable d‟un travail réalisé dans le cadre du DIU de Soins Palliatifs
ont
certainement biaisés les résultats de cette analyse.
Il serait utile d‟étendre la réflexion à d‟autres lieux, hospitaliers et extrahospitaliers, et
d‟autres groupes de soignants, à l‟entourage du patient, car l‟existence de l‟anxiolyse et de la
sédation est connue et accessible, mais nécessite une prise de conscience indispensable à un
véritable accompagnement du malade en fin de vie.
81
X. BIBLIOGRAPHIE
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JO n° 116 du 20 mai 2005). Disponible sur : http://corse.sante.gouv.fr/droi_mal.pdf ;
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relatif à la procédure collégiale. Disponible sur
http://textes.droit.org/JORF/2006/02/07/0032/0033/ ; consulté le 10.02.2010
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modifiant l‟article 37 du code de déontologie ( art. R4127-37 du code de santé publique).
Disponible sur : http://textes.droit.org/JORF/2010/01/30/0025/0025/ ;
consulté le 12.03.2010
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Paris, 2010.
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http://www.afssaps.fr/
- CENTRE DE RESSOURCES NATIONAL DE SOINS PALLIATIFS FRANCOISXAVIER BAGNOUD
http://www.croix-saint-simon.org/
-COMITE CONSULTATIF NATIONAL D‟ETHIQUE
http://www.ccne-ethique.fr/
- EUROPEAN ASSOCIATION FOR PALLIATIVE CARE
http://www.eapcnet.org/
-HAUTE AUTORITE DE SANTE
http://www.has-sante.fr
-LE SERVICE PUBLIC DE L‟ACCES AU DROIT
http://www.legifrance.gouv.fr/
-LISTE DE DISCUSSION ET D‟ECHANGE DANS LE DOMAINE DES SOINS
PALLIATIFS
http://www.dialogpalliatif.org/listes/
-SOCIETE
FRANCAISE
D‟ACOMPAGNEMENT
ET
DE
SOINS
PALLIATIFS
http://www.sfap.org/
88
XI. LISTE DES ANNEXES
________________________________________________________
ANNEXE 1 : Enquête rétrospective concernant les patients
décédés au CHBA dans les services de gastroentérologie et d’hématologie en décembre 2009 et
janvier 2010
ANNEXE 2 : Retranscription du premier entretien semi-directif
ANNEXE 3 : Echelle d’auto- évaluation de la dépression et de
l’anxiété HADS
ANNEXE 4 : Echelle d’hétero-évaluation de l’anxiété COVI
ANNEXE 5 : Echelle modifiée de Rudkin
ANNEXE 6 : Dix questions préalables à la mise en place d’une
sédation
ANNEXE 7 : Bases pour un protocole de sédation
selon les recommandations 2009 de la SFAP
ANNEXE 8 : Grille de recueil des données de l’EPP 2008 au
CHBA sur l’utilisation du midazolam pour sédation
ANNEXE 9 : Fiche de décision et de suivi d’une sédation utilisée
dans le service d’oncologie du CHBA
ANNEXE 10 : Proposition d’un protocole d’anxiolyse
ANNEXE 11 : Proposition d’un protocole de sédation nocturne
ANNEXE 12 : Proposition d’une fiche de surveillance journalière
de l’utilisation du midazolam (Hypnovel®)
89
ANNEXE 1
________________________________________________________
Enquête rétrospective concernant les patients décédés au CHBA
dans les services de gastro-entérologie et d’hématologie en
décembre 2009 et janvier 2010
90
ANNEXE 2
________________________________________________________
Retranscription intégrale du premier entretien semi-directif,
permettant en même temps de tester le guide
(sans avoir conduit à des modifications)
réalisé avec le plus jeune médecin
91
ENTRETIEN avec A.
Thème 1 : anxiété et anxiolyse
1. Sur quels arguments (cliniques et autres, souffrance exprimée ou non du patient)
prescrivez-vous et qu'attendez-vous d'un traitement anxiolytique chez un patient
- encore sous traitement curatif
- en phase palliative
- en phase terminale (avec un décès prévisible dans les jours ou semaines qui suivent)
- chez un patient avec lequel la communication est difficile
« les arguments seraient la demande du patient, peu importe qu‟il soit en phase curative ou
palliative, ou alors sur les traits tirés, qu‟il ne semble pas détendu, est agité, se mobilise
beaucoup sans douleur ni raison autre affirmée.
S‟il a des troubles de communication les arguments sont le ressenti de la famille qui viendra
nous voir si elle le trouve agité, pas confortable, se mobilisant beaucoup sans raison affirmée,
traits tirés sans pouvoir déterminer une douleur ; sur l‟impression des soignants, des
infirmières, aides-soignantes et mon ressenti.
On peut avoir l‟impression, comme avec ce patient très dyspnéique au bord du lit, on a
l‟impression qu‟il est très angoissé et qu‟il va pas bien, mais lui se plaint de rien, c‟est
difficile de faire mettre en place quelque chose, même s‟il a des signes cliniques qui
pourraient montrer chez d‟autres beaucoup d‟angoisse ; donc j'aurai envie de mettre un
traitement anxiolytique en place, même si le patient ne veut pas ; finalement, en discutant plus
longtemps avec lui, il a exprimé une angoisse, une envie d‟être soulagé, mais ça a été très
tardif.
Pour les attentes du traitement anxiolytique,
En phase curative: qu'il n'y ait plus de sensations d'angoisse, qu'il n'ait plus de plaintes au
quotidien
en phase palliative, c‟est un peu le même principe aussi
En phase terminale: faire en sorte que le patient soit moins angoissé, moins de plaintes, et si
c'est insupportable, et que lui demande une sédation, c‟est dans un but sédatif ; on peut
répondre à une demande de sédation puisqu‟il est déjà sous un traitement anxiolytique par
hypnovel®; pas au début, mais en phase terminale, quand la mort est imminente, on peut
92
proposer, pas forcément s‟il y a une demande, on peut proposer au patient que dans de telles
circonstances quand ça ira de moins en moins bien, lui expliquer qu‟on a des molécules qui
peuvent apaiser un ce moment là, quand il n‟y à plus de traitement possible de la maladie,
quand on n‟a rien d‟autres à proposer pour que le patient se sente mieux.
Si le patient a des troubles de communication, j‟attends qu‟il soit moins agité. »
Question : De quoi dépend le choix de la molécule dans le cadre de l‟anxiolyse?
« Si le patient n‟a pas trop de troubles ventilatoires, et que des traitements curatifs sont encore
en place, je choisirais un traitement par benzodiazépines
En phase terminale, on mettra plutôt l‟ hypnovel® pour bien soulager le patient ; j‟ai
l‟impression qu‟il est beaucoup utilisé ici, qu‟il a surement une efficacité meilleure que les
autres ; on ne l‟utiliserait pas en tout début de prise en charge, mais plutôt en phase palliative
et terminale; car c‟est un traitement puissant, avec lequel on peut s‟attendre à plus d'effets
secondaires qu'un traitement anxiolytique per os, surtout une sédation plus importante.
On ne l‟utilisera pas en phase curative, car s‟il y a une hospitalisation, un retour à domicile est
prévu, et la molécule n'existe pas en ville; et si ce traitement est mis en place, c'est le plus
souvent quelque chose mis en place au long court;
En phase curative, on ira par pallier comme dans traitement antalgique, en commençant
d'abord per os;
En phase palliative : on met aussi un traitement per os si un retour à domicile est prévu.
En phase terminale, je débuterais directement de l‟hypnovel® directement à petites doses. »
2. Dans ces quatre situations, évaluez-vous l'efficacité du traitement ? Comment? Ces effets
secondaires? Quels sont-ils?
« le patient qui ne se plaint plus ou s'il est moins agité s'il était confus ; évaluation aussi selon
les dires des infirmières; les dires de l'équipe soignante qui vient en parler, et je vais évaluer la
situation;
en phase terminale, c'est pareil;
on adapte le traitement si pas le patient n‟est pas soulagé;
s‟il y a disparition des symptômes, je continue à la même posologie;
Pour les effets secondaires, c‟est surtout les troubles de vigilance, la dépression respiratoire;
ici, souvent le mal être du patient est plus important et on accepte les effets secondaires,
93
comme par exemple la sédation trop importante chez un patient qui en a pas besoin »
3. Dans ces quatre situations, l'apparition de troubles de vigilance est-elle pour vous un point
important à évaluer? Acceptable? Recherchée (provoquée)? Est-elle pour vous à discuter
avant l'introduction du traitement avec le patient, l'entourage, l'équipe soignante au sens large?
« Pour l‟évaluation des troubles de la vigilance, tout dépend en quelle phase il est :
en phase curative ou en palliatif avec une vie pas normale, mais avec état général assez
conservé, c'est important de rechercher les troubles de vigilance; ils ne sont pas acceptables;
on veut soulager le patient, mais pas en allant dans ce sens;
en phase terminale: c'est plus acceptable d'avoir une sédation si sans le traitement le patient ne
se sent vraiment pas bien ou se présente très très angoissé et que avec il se sent mieux, mais
avec un certain trouble de vigilance
Rechercher des troubles de vigilance en général: non, pas en systématique; en fonction de ce
qu'on me raconte au cours de la journée par l'équipe soignante.
en phase terminale: chercher à provoquer des troubles de vigilance: peut être pas au début,
mais éventuellement oui en phase terminale »
4. Lorsque le midazolam en parentéral est choisi comme traitement anxiolytique, est-il gênant
ou aidant qu'il soit utilisé également dans le cadre de la sédation?
« ce n‟est pas gênant;
si on est en début de phase palliative, et si on n'est pas en phase terminale, les troubles de
vigilance induit par le midazolam deviennent gênants;
en phase terminale, finalement c'est un peu l'effet recherché en plus de l'anxiolyse et les
troubles de vigilance sont acceptables si le patient est soulagé
pourquoi le choix du midazolam: car souvent il n'y a pas d'autres voie d'administration que
par parenteral, c‟est une voie rapide, quasi immédiat, pour que ça soulage très rapidement, en
sc. ou iv. peu importe. »
5. Selon quelles modalités prescrivez-vous le midazolam dans le cadre d'une anxiolyse?
« je n'ai prescrit que en phase terminale pour l'instant; parce qu'avant, j'ai quand même du mal
à prendre l'initiative de mettre un traitement comme cela en place; pourquoi? A cause de la
balance bénéfice/risque: le patient doit être soulagé et il n'y a plus que ça qui compte; avant,
94
c'est plus difficile a évaluer; en phase terminale, cela semble plus simple.
Selon quelles modalités ? d'abord par bolus de 1 mg renouvelé en si besoin, voir si il en a
besoin, si ça le soulage dans la journée;
puis mettre en route une seringue électrique si ce n'est pas suffisant, si les bolus sont trop
répétés et patient toujours angoissé, sur 24heures à 10 mg; et réévaluer le lendemain
l'efficacité; s‟il est bien soulager, continuer comme ça s‟il n‟a pas de troubles de vigilance. Il
faut rechercher la posologie minimale efficace; mais en pratique je ne le fais pas, mais ce
serait bien. »
Thème 2 : sédation
1. Quel est le but d'une sédation?
« C‟est d‟être endormi, soulagé des symptômes pré mortem angoissants, la sensation
d'étouffement, la dyspnée, la détresse respiratoire induisant le décès,
Une détresse respiratoire aigue ou qui s'aggrave les derniers jours ou dernières heures, pour
traiter l'angoisse induite par la détresse respiratoire »
2. A quel moment (dans le temps) peut-elle être instaurée et quelle en est sa durée?
« En phase terminale, jusqu'au décès; pour l'instant, je ne vois pas d'autres indications ni
d'autres durées »
3. La sédation peut-elle être considérée comme une anxiolyse?
« oui, la sédation peut être considérée comme une anxiolyse, car pour les patients en détresse
respiratoire, ça aura le même sens, ça endormira le patient, mais ça le soulagera ; ça ne
soulagera pas le symptôme, mais ça soulagera le patient »
4. D'après vous, quels sont les différents types d'indication d'une sédation chez un patient et
comment décider de sa mise en œuvre?
« Si il n'y a pas de traitement curatif à mettre en place, si le patient est en phase terminale de
sa maladie, la détresse respiratoire, l‟hémoptysie massive, l‟hématémèse massive.
Pour sa mise en œuvre, je ne décide pas seul, j'appelle le médecin référent ou l'EMSP ; c'est
95
difficile comme situation; j'essaye d'en parler au patient, en discuter et de ce que cela risque
d'engendrer, que le traitement peut le soulager, mais qu'il n'y a pas de traitement pour traiter la
maladie, que ça va l'endormir, mais qu'en arrive à la fin de sa vie »
5. Comment en pratique quotidienne décider de l'indication d'une sédation face à un patient
avec des troubles de communications?
« je ne sais pas; en parler à la famille déjà, en discuter avec l'équipe et les différents
intervenants du service;
Sur quels arguments ? Je mettrais en place sur le resenti de la situation, surtout, le fait qu'il
s'agite »
6. Selon quelles modalités prescrivez-vous le midazolam dans le cadre d'une sédation?
« par bolus de 1 mg jusqu'à endormissement, toutes les 2 minutes, puis en seringue électrique
avec les bolus divisé par 2 en mg par heure, c'est comme cela je ferais si j'étais seul à décider,
en iv. de préférence pour une action plus rapide;
Pour la surveillance de l'efficacité, vérifier qu'il est bien endormi: qu‟il ne s'agite pas,
n‟ouvre pas les yeux;
je reste au début pour voir si c'est efficace, puis en fonction de ce que dit l'équipe »
7. Une surveillance de la profondeur de la sédation est-elle réalisée? Utile? Conseillée?
« utile, oui, pour qu'il ne se réveille pas avec une gêne à nouveau; conseillé dans les
recommandations? Je ne sais pas; pas de rythme particulier, en fonction de ce que me rapporte
l'équipe. »
96
ANNEXE 3
________________________________________________________
Echelle d’auto- évaluation
de la dépression et de l’anxiété
HADS
97
ÉCHELLE DU RETENTISSEMENT ÉMOTIONNEL
HADS (Hospital Anxiety and Depression scale)
A. Je me sens tendu ou énervé :
3. La plupart du temps
2. Souvent
1. De temps en temps
0. Jamais
D. Je prends plaisir aux mêmes choses qu'autrefois :
0. Oui, tout autant
1. Pas autant
2. Un peu seulement
3. Presque plus
A. J'ai une sensation de peur comme si quelque chose d'horrible allait m'arriver :
3. Oui, très nettement
2. Oui, mais ce n'est pas trop grave
1. Un peu, mais cela ne m'inquiète pas
0. Pas du tout
D. Je ris facilement et vois le bon côté des choses :
0. Autant que par le passé
1. Plus autant qu'avant
2. Vraiment moins qu'avant
3. Plus du tout
A. Je me fais du souci :
3. Très souvent
2. Assez souvent
1. Occasionnellement
0. Très occasionnellement
D. Je suis de bonne humeur :
3. Jamais
2. Rarement
1. Assez souvent
0. La plupart du temps
A. Je peux rester tranquillement assis à ne rien faire et me sens décontracté :
0. Oui, quoi qu'il arrive
1. Oui, en général
2. Rarement
3. Jamais
D. J'ai l'impression de fonctionner au ralenti :
3. Presque toujours
2. Très souvent
1. Parfois
0. Jamais
A. J'éprouve des sensations de peur et j'ai l'estomac noué :
0. Jamais
1. Parfois
2. Assez souvent
3. Très souvent
D. Je ne m'intéresse plus à mon apparence :
3. Plus du tout
2. Je n'y accorde pas autant d'attention que je le devrais
1. Il se peut que je n'y fasse plus autant attention
0. J'y prête autant attention que par le passé
98
A. J'ai la bougeotte et n'arrive pas à tenir en place :
3. Oui, c'est tout à fait le cas
2. Un peu
1. Pas tellement
0. Pas du tout
D. Je me réjouis d'avance à l'idée de faire certaines choses :
0. Autant qu'avant
1. Un peu moins qu'avant
2. Bien moins qu'avant
3. Presque jamais
A. J'éprouve des sensations soudaines de panique :
3. Vraiment très souvent
2. Assez souvent
1. Pas très souvent
0. Jamais
D. Je peux prendre plaisir à un bon livre ou à une bonne émission de radio ou de télévision :
0. Souvent
1. Parfois
2. Rarement
3. Très rarement
Total anxiété : ................. Total dépression : ..............................
Sont considérées comme valeurs seuils pour chaque sous-échelle :
- 10 dans un objectif de spécificité
- 8 dans un objectif de sensibilité
99
ANNEXE 4
________________________________________________________
Echelle d’hétero-évaluation de l’anxiété
COVI
100
ÉCHELLE DE COVI (D'après Guelfi JD)
(ANAES 2001- Diagnostic et prise en charge en ambulatoire du trouble anxieux généralisé de
l‟adulte)
Coter selon l‟intensité les trois rubriques ci-après.
La présence d‟un seul des symptômes proposés suffit pour effectuer la cotation.
Si plusieurs de ces symptômes sont présents, la cotation sera effectuée sur le plus sévère.
1
Pas
du
tout
Discours
SUJET
2
Un
peu
3
Modérément
4
Beaucoup
5
Enormément
du Nerveux, pas
dans son
assiette, agité,
effrayé
sans
raison,
peureux,
tendu, noué,
doit
éviter
certaines
conduites,
certains
lieux,
difficultés à se
concentrer
Comportement
Semble
effrayé, mal à
l‟aise, agité,
angoissé
Plaintes
somatiques
Sudation,
tremblements,
sensation de
striction
cardiaque,
tachycardie,
oppression
respiratoire,
sensation
de chaud ou
froid,
sommeil agité,
estomac noué,
boule
dans la gorge
101
ANNEXE 5
________________________________________________________
Echelle d’évaluation de la vigilance en soins palliatifs
Echelle modifiée de RUDKIN
102
Echelle de Rudkin
1 : Patient éveillé-orienté
2 : Somnolent
3 : Yeux fermés répondant à l‟appel
4 : Yeux fermés répondant à une stimulation tactile légère (traction
du lobe de l‟oreille)
5 : Yeux fermés ne répondant pas à une stimulation tactile légère
103
ANNEXE 6
________________________________________________________
Dix questions préalables à la mise en place d’une sédation
104
DIX QUESTIONS PREALABLES A LA MISE EN PLACE
D’UNE SEDATION EN INSTITUTION COMME A DOMICILE
(d’après V. Blanchet. Grandes défaillances organiques. Revue du
Prat 20 juin 2009 ; 59 : p 782)
Compétences et organisation de l’équipe
1. Quelles connaissances l‟équipe a-t-elle des médicaments à utiliser, de leur
pharmacocinétique, de leurs effets secondaires
2. L‟équipe connaît-elle les indications, le contexte, l‟intention de la
démarche ?
Décision collégiale et traçabilité
3. Les discussions en vue des prises de décision sont-elles organisées avec
tous les intervenants ? Ces échanges sont-ils réalisés de façon régulière ?
4. Les décisions et la façon dont elles sont prises sont-elles écrites dans le
dossier ?
5. S‟est-on assuré que chaque membre de l‟équipe est informé des objectifs
visés par les thérapeutiques mises en œuvre ?
Information du patient
6. Le consentement éclairé (objectif, risque de la sédation) du patient a-t-il
été recherché
7. S‟il est hors d‟état d‟exprimer sa volonté : existe-t-il des directives
anticipées ?
8. A-t-il désigné une personne de confiance ?
9. A défaut, les proches ont-ils été consultés ?
Information des proches
10. Les proches ont-ils été informés de l‟objectif de la sédation, de ses
risques ?
105
ANNEXE 7
________________________________________________________
Bases d’un protocole de sédation
selon les recommandations 2009
de la SFAP
106
Bases d’un protocole de sédation chez l’adulte
(source : Recommandations sédation pour détresse en phase terminale et dans des
situations spécifiques et complexes. SFAP 2009)
Le midazolam est utilisé en première intention. La voie parentérale est recommandée, en
intraveineux ou sous-cutané.
L‟administration doit être débutée par une titration, pour l‟adulte le midazolam est préparé à
une concentration de 1mg/ml
Chez l‟adulte, la titration débute par une injection de 1 mg toutes le 2-3 minutes jusqu‟à
l‟obtention d‟un score de 4 sur l‟échelle de Rudkin modifiée
Chez le sujet très âgé ou fragilisé, la titration débute par une injection de 1 mg toutes les 5-6
minutes jusqu‟à l‟obtention d‟un score de 4 sur l‟échelle de Rudkin modifiée
En cas de sédation continue, l‟entretien de la sédation se fait en injectant une dose horaire, en
perfusion continue, égale à 50% de la dose qui a été nécessaire pour obtenir un score de 4 sur
l‟échelle de Rudkin modifiée chez l‟adulte.
Pendant toute la durée de la sédation, la surveillance clinique, les soins de confort et
l‟accompagnement de la personne malade doivent être maintenu.
Pendant toute la durée de la sédation, il est recommandé de réévaluer tous les autres
traitements au regard de leur utilité.
L‟évaluation de la profondeur se fait toutes les 15 minutes pendant la première heure, puis au
minimum 2 fois par jour.
L‟adaptation de la posologie se fait selon
-
Le degré de soulagement du patient
-
La profondeur de la sédation (Rudkin supérieur ou égal à 4)
En cas de sédation prolongée, le bien-fondé de son maintien au cours du temps doit être
régulièrement questionné.
107
ANNEXE 8
________________________________________________________
Grille de recueil des données
De l’EPP 2008 au CHBA
« Utilisation du midazolam en sédation pour détresse dans l’unité
d’oncologie pour les patients relevant de soins palliatifs en 2007 »
108
Audit Clinique Ciblé appliqué à « l’évaluation de la sédation en soins palliatifs »
GRILLE DE RECUEIL DES DONNEES
EPP : Utilisation du midazolam en sédation pour détresse dans l’unité
d’oncologie pour les patients relevant de soins palliatifs.
Date : …………………
N° de la grille : ………..
Établissement / secteur d’activité : …………………
Identification du patient : ……………
Nom – Prénom de l’évaluateur : ……….
N° de binôme : ………

Nom – Prénom (anonymisé) : …………
Etiquette patient
OBJECTIF :
- Vérifier (ou non) l’adéquation entre les pratiques et les recommandations
nationales dans le cadre de la sédation
- S’assurer (ou non) d’une traçabilité de cette décision et de son suivi dans le
dossier patient au niveau de la pharmacie
NO
N°
CRITÈRES
OUI
NA SOURCE COMMENTAIRES
N
La décision de mettre en place
1 une sédation est retrouvée dans
DPA
le dossier du patient.
La décision de sédation est prise
2 en équipe et notée comme telle
dans le dossier patient.
3
4
5
6
7
8
L’information donnée au patient
ou à sa personne de confiance
est retrouvée dans le dossier du
patient.
L’information donnée à la famille
ou l’entourage est retrouvée dans
le dossier du patient.
Les indications de la sédation
sont notées dans le dossier
patient.
La
prescription
précise
et
complète
de
sédation
est
retrouvée dans le dossier patient.
Des éléments de réévaluation
sont retrouvés dans le dossier
patient.
L’information de la décision de
sédation est transmise à la
pharmacie et tracée dans le
dossier patient.
DPA
DPA
DPA
DPA
DPA
DPA
DPA
Dossier du
patient
109
ANNEXE 9
________________________________________________________
Fiche de décision et de suivi d’une sédation
utilisée dans le service d’oncologie du CHBA
110
Equipe Mobile de Soins Palliatifs
Fiche de décision et de suivi d’une sédation
Nom :
Prénom :
Date de naissance :
N ° I EP :
Etiquette
Service :
Date :
Médecin
IDE
Intervenants
Psychologue
Assistante
sociale
Signatures
SEDATION :
OUI

NON 
Type de sédation :
Réversible courte


Réversible longue


Définitive (mais réversible) 

Indication de la sédation :………………………………………………………….
……………………………………………….……………………………………………..
Modalités de prise de décision :
Isolée
Famille
Pharmacien
Autre

Equipe mobile

Equipe référente


Entourage

Patient


Bénévoles

Aumônerie

……………………………………………………………..
Eléments de demande de sédation :
……………………………………………………………...…………………………………
.…………………………………………………………………………..……………………
Prescriptions de l’unité :
……………………………………………………………….…………………………………
…………………………………………………….…………………………………………
…………………………………………………………………………………………………
Commentaires de suivi :
…………………………………………………………………….……………………………
…………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………
111
ANNEXE 10
________________________________________________________
Proposition d’un
PROTOCOLE D’ANXIOLYSE
112
Protocole d’anxiolyse par Midazolam
(s’appuyant sur les recommandations de l’EMASP du CHU de
Rennes)
La mise en œuvre de ce protocole nécessite une prescription et une réflexion d’équipe
préalable. Il est aussi nécessaire de définir le contexte dans lequel cette prescription va
s’appliquer
Le Midazolam ( Hypnovel®) est utilisé en raison de sa maniabilité, sa réversibilité, sa marge
de sécurité thérapeutique importante et sa facilité d‟emploi ( demi-vie courte de 2 à 4 heures,
utilisation en IV ou SC à la même posologie).
C‟est une benzodiazépine, à visée anxiolytique, hypnotique, amnésiante antérograde et
myorelaxante.
Comme toute molécule, elle présente aussi des effets secondaires :
Dépression respiratoire et cardio-vasculaire en cas d‟association à d‟autres médications dépresseurs du système
nerveux central chez le sujet à risque, tolérance lors d‟un usage prolongé, syndrome de sevrage à l‟arrêt brutal,
hoquet, état d‟excitation paradoxal avec aggravation de l‟insomnie, agitation, hallucinations, …
Il existe un antidote, le flumazénil (Anexate®)
1. Induction
Si angoisse modérée : 0.2 mg en SC ou IV
Si angoisse importante : 0.4 mg en SC ou IV
Attendre 5 à 10 minutes (SC) ou 2 à 3 minutes (durée nécessaire à l‟apparition de l‟effet
anxiolytique).
Si absence d‟efficacité : renouveler les doses d‟induction, toutes les 2 à 10 minutes en
fonction de la voie d‟administration, jusqu‟à obtenir une disparition de l‟angoisse.
2. Dose d’entretien
En SCSE ou IVSE débit en mg/h = dose de charge / 2
3. Proposition de bolus en cas d’accès d’angoisse
Bolus = dose d‟induction
L‟intensité de l‟angoisse avant, pendant et après traitement peut être déterminé
par le patient avec une échelle EVA, EN ou EVS.
L‟apparition d‟effets sur la vigilance peut être surveillée avec l‟échelle modifiée
de RUDKIN
113
ANNEXE 11
________________________________________________________
Proposition d’un
PROTOCOLE DE SEDATION NOCTURNE
114
Protocole de sédation nocturne par Midazolam
(s’appuyant sur les recommandations EMASP du CHU de
Rennes)
La mise en œuvre de ce protocole nécessite une prescription et une réflexion d’équipe
préalable. Il est aussi nécessaire de définir le contexte dans lequel cette prescription va
s’appliquer
Le Midazolam ( Hypnovel®) est utilisé en raison de sa maniabilité, sa réversibilité, sa marge
de sécurité thérapeutique importante et sa facilité d‟emploi ( demi-vie courte de 2 à 4 heures,
utilisation en IV ou SC à la même posologie).
C‟est une benzodiazépine, à visée anxiolytique, hypnotique, amnésiante antérograde et
myorelaxante.
Comme toute molécule, elle présente aussi des effets secondaires :
Dépression respiratoire et cardio-vasculaire en cas d‟association à d‟autres médications dépresseurs du système
nerveux central chez le sujet à risque, tolérance lors d‟un usage prolongé, syndrome de sevrage à l‟arrêt brutal,
hoquet, état d‟excitation paradoxal avec aggravation de l‟insomnie, agitation, hallucinations, …
Il existe un antidote, le flumazénil (Anexate®)
1. Traitement anxiolytique en cours : doubler le débit du traitement anxiolytique continu de
la journée
Commencer en fonction du souhait du patient : Début vers 21h par exemple et revenir à la
posologie initiale à 6h
2. Pas de traitement anxiolytique en cours durant la journée :
Commencer en fonction du souhait du patient ; Début vers 21h par exemple et arrêt à 6h
a) Prescription anticipée : En SCSE ou IVSE autour de 0.5 mg / h ; si inefficace, passer à
1 mg / h
b) Avec induction :
0.4 - 0.5 mg en SC ou IV
Attendre 5 à 10 minutes (SC) ou 2 à 3 minutes (IV) (durée nécessaire à l‟apparition de l‟effet
sédatif).
Si absence d‟efficacité : renouveler les doses d‟induction, toutes les 2 à 10 minutes en
fonction de la voie d‟administration, jusqu‟à obtenir une sédation à la profondeur souhaitée
par le patient (échelle de RUDKIN 2- 4 en fonction des souhaits du patient)
Dose d‟entretien :
En SCSE ou IVSE débit en mg/h = dose de charge / 2
115
ANNEXE 12
________________________________________________________
Proposition d’une
FICHE DE SURVEILLANCE JOURNALIERE DE
L’UTILISATION DU MIDAZOLAM (Hypnovel®)
116
MIDAZOLAM (HYPNOVEL®) :
FICHE DE SURVEILLANCE JOURNALIERE
Service :……………………………..
INDICATION :
1 = anxiété
2 = sédation
3 = autre : ……………………………… (Chiffre ou commentaire à reporter dans la grille)
INTENSITE par auto-évaluation : EVA
J0
Avant
traitement
EN
J1
matin
EVS
(à entourer)
J1
soir
J2
matin
J2
soir
INDICATION
Midazolam
POSOLOGIE et
NOMBRE DE
BOLUS
Midazolam
POSOLOGIE EN
CONTINU ( mg/h)
Signature médecin
INTENSITE
ANXIETE
par
Auto-évaluation
VIGILANCE
(Echelle de Rudkin)
Signature IDE
Echelle de RUDKIN :
1 patient éveillé et orienté
2 somnolent
3 yeux fermés, mais répondant à l‟appel
4 yeux fermés, répondant à une stimulation tactile légère (traction lobe de l‟oreille)
5 yeux fermés, ne répondant pas à une stimulation tactile légère
117
XII. LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS
________________________________________________________
AMM
Autorisation de mise sur le marché
ANAES
Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé
AFSSAPS
Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé
CHBA
Centre Hospitalier Bretagne Atlantique
COTOREP
Commission technique d'orientation et de reclassement professionnel
CHU
Centre Hospitalier Universitaire
DIU
Diplôme inter-universitaire
EMASP
Equipe mobile d‟accompagnement et de soins palliatifs
EMSP
Equipe mobile de soins palliatifs
EPP
Evaluation des Pratiques Professionnelles
HADS
Hospital Anxiety and Depression Scale
SFAP
Société Française d‟Accompagnement et de Soins Palliatifs
118
RESUME
Une enquête semi-directive menée auprès de soignants d‟un service hospitalier en Bretagne
met en évidence une confusion entre anxiolyse et sédation dans certaines situations en phase
terminale.
A l‟analyse des résultats, il apparaît que cette confusion résulte d‟une difficulté à identifier
clairement l‟anxiété, à l‟absence d‟une réévaluation du traitement et enfin à une banalisation
des troubles de la vigilance en fin de vie.
Les approches délicates de symptôme réfractaire et de modulation de profondeur de sédation,
le flou de cette notion avec un traitement qui a également une visée anxiolytique et enfin
l‟utilisation d‟une molécule ayant pour certains soignants une connotation symbolique de
fin de vie « sereine », comme l‟indique son nom, « Hypno-well, le bon sommeil »,
participent à ce trouble.
La mise en œuvre de propositions de formations, d‟outils, de lieux d‟écoute et d‟échanges
d‟une part, la réflexion autour de l‟utilisation d‟une seule et même molécule pour l‟anxiolyse
et la sédation d‟autre part, devraient permettre une étude plus nuancée de ces situations.
MOTS CLES
Anxiolyse
Sédation
Midazolam
Symptôme réfractaire
Troubles de vigilance
119
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