patient pourra décider de ne plus être alimenté et d'être endormi jusqu'à ce qu'il décède. Dans
cette situation, un patient pourra ainsi organiser son "suicide médicalisé".
Enfin lorsque le patient ne peut exprimer sa volonté, si un médecin arrête un traitement qui le
maintient en vie artificiellement et considéré comme de l'obstination déraisonnable, l'article 3
prévoit que cette même sédation sera appliquée.
Cet article 3 soulève de nombreux problèmes:
- Il y a un risque très important de glissement car la sédation profonde deviendrait un droit, pas
seulement en cas de souffrance réfractaire (ce qui est une bonne pratique) mais aussi dans les cas
« d’arrêt de traitement engageant le pronostic vital à court terme ». Donc même en l’absence de
souffrance réfractaire. On peut vraiment craindre une dérive vers une forme masquée de suicide
assisté d'une part, et que la mort « normale » devienne une mort sédatée, inconsciente, même en
l’absence de souffrance. Quelle perte dans les relations humaines et le cheminement spirituel que
l’on peut parcourir en fin de vie !
- Si la sédation se généralise et devient un droit, comment ne pas craindre des frontières très floues
entre les sédations visant à soulager en attendant la mort naturelle (qu’elles peuvent accélérer de
façon involontaire), et des sédations visant à abréger la vie, en d'autres termes: des euthanasies.
Quelle confusion pour les équipes soignantes, les proches, et les malades eux-mêmes; que d’angoisse
cela va générer ! De plus, une fois l'intention de la prescription médicale moins établie, la situation
du patient sédaté risque fort de ne plus avoir de sens aux yeux de tous. L'escalade des doses de
médicament pour précipiter le décès ne sera que la suite logique de ce glissement d'intention. En
l'état la loi devrait impérativement prévoir, en écho au droit du patient, un droit à l'objection de
conscience pour le médecin qui ne voudrait pas mettre en œuvre cette pratique dans certaines
circonstances. Exiger du législateur ce droit à l'objection de conscience, c'est l'obliger à nommer les
choses clairement.
- Enfin, faire de la sédation un "droit" du patient, opposable au médecin, bouleverse en profondeur
la relation de soin. Cette dernière, normalement basée sur la confiance et une "alliance
thérapeutique", devient le lieu d'un rapport de force qui risque de générer méfiance et
déresponsabilisation. Plus de solitude pour les malades, plus de fragilité pour les médecins dont la
compétence et la responsabilité sont mises en doute. Une instrumentalisation du médecin contraint
d’obéir au malade. Imaginez un instant que l’on instaure un « droit à être opéré » par exemple : ne
serait-ce pas absurde ? Les situations médicales sont complexes, et chaque fois singulières. Si les
médecins doivent sans doute être mieux formés à l'écoute et la réflexion éthique dans le cadre de
bonnes pratiques prévues par la loi, aucune loi ne peut répondre de façon adaptée et standardisée à
toutes les situations.
Enfin l'article 8 renforce les directives anticipées qui désormais "s'imposent au médecin". Il
est bon d'encourager leur rédaction, leur diffusion et leur accessibilité, car elles peuvent guider
nombre de décisions difficiles lorsque le patient n'est plus en état d'exprimer sa volonté. Néanmoins,
les directives anticipées ne devraient pas pouvoir être opposées au raisonnement et la décision
médicale, qui tient compte de ces directives, mais aussi de beaucoup d'autres éléments trop
complexes pour être anticipés, qui plus est par un non médecin. Il est hasardeux de penser qu’un
document écrit à l’avance puisse rendre réellement compte de la volonté d’une personne lorsqu’elle
sera dans une situation qu’elle n’imaginait pas. Les témoignages abondent de personnes sauvées
d’un problème aigu et rapidement réversible par 48h passées en réanimation, et heureuses de l’être,