Espaces Affines
Alain Prouté
Dernière révision de ce texte : 4 mars 2015
Table des matières
1 Espaces et applications affines 3
1.1 Espacesafnes.................................. 3
1.2 Applicationsafnes............................... 4
1.3 Sous-espace affine et espace affine quotient . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.4 Intersections de sous-espaces affines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.5 Rapportdedivision ............................... 7
1.6 Barycentre.................................... 8
1.7 Systèmesottants................................ 11
1.8 Repèresafnes.................................. 14
1.9 Milieu et centre de gravité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
2 Espaces affines complétés 16
2.1 Dénition..................................... 16
2.2 Applicationsafnes............................... 17
2.3 Sous-espacesafnes............................... 19
2.4 Repèresafnes.................................. 20
2.5 Complétion d’un espace affine ordinaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
A Flèches universelles et équivalences de catégories 23
Introduction
Un « espace affine » est le plus souvent défini comme un ensemble sur lequel le groupe
additif d’un espace vectoriel agit de manière libre et transitive. On s’aperçoit vite en
2TABLE DES MATIÈRES
pratiquant que la notion de barycentre joue un rôle central en géométrie affine et
on est également tenté de définir les espaces affines via cette seule notion. On peut le
faire, et la définition obtenue est plutôt naturelle, mais un peu plus difficile à énoncer.
Par ailleurs, chaque espace affine a une « complétion projective », qui consiste à lui
ajouter ses « points à l’infini ». Bien que les points à l’infini soient stricto sensu des
points de l’espace projectif, ils sont en fait attachés à l’espace affine, car dans un
espace projectif tous les points ont le même statut. Des points ne sont « à l’infini »
que par référence à un espace affine, et cette notion doit donc être considérée comme
une notion affine. Il y a d’ailleurs une autre bonne raison de ne pas écarter les points
à l’infini. En effet, quand on utilise des systèmes de poids (familles finies de points
affectés de coefficients appelés « poids »), on utilise des systèmes de poids total non nul,
qui ont un barycentre qui est un point de l’espace affine, et des systèmes de poids total
nul particuliers qu’on appelle des systèmes « flottants », qui jouent un rôle important
dans de nombreuses questions. Il reste tous les autres systèmes, c’est-à-dire ceux qui
sont de poids total nul mais ne sont pas flottants. Il se trouve que ceux-là ont un
barycentre bien déterminé, tout comme les systèmes de poids total non nul, mais que
ce barycentre est à l’infini.
La meilleure chose à faire est de considérer tous ces points de vue, et de les relier
entre eux. et en particulier de démontrer l’« équivalence » de ces différentes défini-
tions. C’est ce qui est fait ici, avec en arrière plan la conviction que tout objet mathé-
matique gagne à être connu sous ses diverses facettes. Afin d’éviter tout malentendu,
on désignera les espaces affines par trois noms différents suivant la façon dont ils
sont définis. On aura donc des « espaces affines (ordinaires) », des « espaces barycen-
triques » et des « espaces affines complétés ». Afin de rendre l’énoncé de ces équiva-
lences aussi rigoureux que possible, on introduit (dans un appendice) quelques no-
tions de théorie des catégories, et on prouve qu’on a des « équivalences de catégories »
entre les catégories définies par ces trois sortes d’espaces affines.
Comme indiqué plus haut, la notion de point à l’infini est une notion affine. La géo-
métrie projective proprement dite n’intervient que lorsqu’on « change de points à l’in-
fini ». On le fait par le biais d’une « homographie », notion définitivement projective,
une homographie n’étant pas (sauf exception) une application affine. Ceci n’est tou-
tefois pas une raison de se priver des homographies en géométrie affine, car de très
nombreux problèmes de géométrie « affine » peuvent être élégamment résolus par
l’utilisation d’homographies. Nous sommes donc naturellement amenés à faire aussi
un peu de géométrie projective.
3
1 Espaces et applications affines
Nous définissons ici ce qu’on appelera éventuellement pour éviter toute confusion
avec les autres définitions, les espaces affines « ordinaires ».
1.1 Espaces affines
+1 Définition. Soit Eun espace vectoriel sur un corps commutatif K. Un « espace
affine » Aest la donnée d’un ensemble non vide |A|(dit « sous-jacent à A), et d’une
action (à droite) libre et transitive du groupe additif de Esur |A|. La « dimension » de
Aest par définition la dimension de E. Un espace affine de dimension 0(resp. 1,2)
est appelé un « point affine » (resp. une « droite affine », un « plan affine »).
L’espace vectoriel Eest appelé la « direction » de Aet peut être noté
A. Les éléments
de Esont appelés des « vecteurs » et ceux de |A|sont appelés des « points ». L’écriture
AAest une abréviation pour A∈ |A|.
Pour tout AAet tout vE, le résultat de l’action de vsur Aest noté A+v.
Autrement-dit, l’action de Esur |A|est la fonction (A, v)7→ A+v. Les axiomes des
actions s’écrivent donc :
(A+u) + v=A+ (u+v)
A+ 0 = A
(où bien sûr, Aest un point quelconque de |A|,uet vdeux vecteurs quelconques de E).
Comme l’action de Esur |A|est transitive, il existe, pour deux points quelconques A
et B, un vecteur vtel que B=A+v, et ce vecteur est unique puisque l’action est libre.
Ce vecteur vest noté
AB. On a donc B=A+
AB.
+2 Lemme. (relation de Chasles) Pour tous points A,Bet Cdans un espace affine,
on a :
AC =
AB +
BC
Démonstration. Comme l’action est libre, deux vecteurs sont égaux si et seulement
si ils agissent sur un point quelconque de la même manière. Il suffit donc de montrer
que A+
AC =A+
AB +
BC. Or, A+
AC =C=B+
BC =A+
AB +
BC.o
41 ESPACES ET APPLICATIONS AFFINES
+3 Exemple. Tout espace vectoriel Eagissant sur lui-même par translation définit un espace
affine dont l’ensemble sous-jacent est Eet dont la direction est E.
+4 Exemple. Soit f:EFune application linéaire, et soit vun vecteur de Fqui est dans l’image
de f. On pose A=f1(v). Alors An’est pas vide, et on définit ϕ:A×Ker(f)Apar ϕ(x, u) = x+u.
On a alors une action à droite de Ker(f)sur A(noter que f(x+u) = f(x) + f(u) = v+ 0 = v, ce qui fait
que ϕ(x, u)f1(v)) qui est libre puisque x+u=xentraîne u= 0, et transitive puisque si on écrit
y=x+ (yx), pour xet ydans A, on a f(yx) = f(y)f(x) = vv= 0, donc yxKer(f).
Un cas particulier important est celui où f:EKest une forme linéaire non nulle et où v= 1. On y
reviendra plus loin.
1.2 Applications affines
+5 Définition. Soient Aet Bdeux espaces affines sur le même corps K. Une
« application affine » de Avers Best une application f:ABtelle qu’il existe
une application linéaire
f:
A
Btelle que pour tous points Aet A0de A, on ait
f(A)f(A0) =
f(
AA0). L’application linéaire
fest dite « sous-jacente » à f.
+6 Lemme. Toute application affine f:ABa une et une seule application
linéaire sous-jacente
f.
Démonstration. Supposons qu’on en ait une autre g, donc que
f(A)f(A0) = g(
AA0).
On a alors
f(
AA0) = g(
AA0), pour tous points Aet A0de A. Choisissons un point A
dans A(qui n’est pas vide). Soit vun vecteur de
A. On peut poser A0=A+v. On a
alors g(v) = g(
AA0) =
f(
AA0) =
f(v).o
+7 Lemme. La composition gfde deux applications affines f:ABet g:
BCest une application affine. De plus,
gf=
g
f. L’application identique de
Aest une application affine dont l’application linéaire sous-jacente est l’application
identique de sa direction.
Démonstration. Pour tous points Aet A0de A, on a
(gf)(A)(gf)(A0) =
g(
f(A)f(A0)) =
g(
f(
AA0))(
g
f)(
AA0). Ainsi, gfest une application affine d’ap-
plication linéaire sous-jacente
g
f. L’autre affirmation est triviale. o
On a donc une catégorie Aff des espaces affines et applications affines sur le corps
K, et un foncteur « direction » de Aff vers VectKassociant à chaque espace affine
sa direction et à chaque application affine son application linéaire sous-jacente. C’est
pourquoi l’application linéaire sous-jacente
fà une application affine fpeut aussi
1.3 Sous-espace affine et espace affine quotient 5
être appelée la « direction » de f.
De même, on a un foncteur de Aff vers Ens qui a tout espace affine Aassocie son
ensemble sous-jacent |A|et à chaque application affine f:ABassocie son appli-
cation sous-jacente |f|:|A|→|B|. Ce foncteur est appelé « foncteur d’oubli ».
1.3 Sous-espace affine et espace affine quotient
+8 Définition. Soit Aun espace affine et soit Fun sous-espace vectoriel de la
direction Ede A. Comme Eagit sur A, il en est de même de F. Un « sous-espace
affine de direction F» de Aest une orbite de l’action de Fsur A. Deux sous-espaces
affines de Asont « parallèles » s’ils ont la même direction.
Il est clair qu’un « sous-espace affine de direction F» de Aest un espace affine et que
sa direction est F. On remarque également que tout point de Aest un sous-espace
affine de A(de direction 0). Un sous-espace affine n’est évidemment jamais vide.
Il est clair également que l’inclusion canonique i:BAdu sous-espace affine
Bdans l’espace affine Aest une application affine dont l’application linéaire sous-
jacente
iest l’inclusion canonique de la direction de Bdans celle de A. En effet,
puisque i(B) = Bpour tout point Bde Bet
i(v) = vpour tout vecteur vde
B, on a
i(
BB0) =
BB0=
i(B)i(B0).
+9 Lemme. Si Best un sous-espace affine de A, on a B={A+v|v
B}pour
tout point Ade B. Réciproquement, si Eest un sous-espace vectoriel de
Aet si Aest
un point de A,{A+v|vE}est un sous-espace affine de Ade direction E.
Démonstration. La première affirmation est équivalente à dire que l’action de
B
sur Best transitive. La seconde affirmation est une paraphrase de la définition des
sous-espaces affines, puisque {A+v|vE}n’est rien d’autre que l’orbite de Asous
l’action de E.o
On pourra désigner le sous-espace affine {A+v|vE}par l’expression « le sous-
espace de direction Epassant par A».
+10 Définition. Soit Bun sous-espace affine de direction Fd’un espace affine A
de direction E. L’ensemble des orbites de l’action de Fsur Aest noté A/Bet appelé
le « quotient » de Apar B.
Il est clair que deux quotients A/Bet A/B0sont identiques si et seulement si Bet
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