Mécanismes de défense en clinique projective / 2
type d’angoisse et du mode de relation d’objet : voir document Annexe (Bergeret, 1985, 1996).
A ces trois critères de base, et notamment pour le test de Rorschach, Catherine Chabert
propose d’ajouter un quatrième : la problématique identitaire et identificatoire.
b) Ce que l’on repère en réalité dans les réponses aux tests sont des manifestations
d’angoisse et de défense contre cette angoisse, en lien soit avec la situation de test elle-même,
soit avec les affects et représentations que le stimulus du test suscite chez le sujet, ces deux
sources possibles étant souvent étroitement intriquées. C’est pourquoi les auteurs français
parlent d’aménagements défensifs (Perron) ou de procédés d’élaboration défensive (Shentoub)
pour désigner ces aspects manifestes. Il revient au clinicien, au cours de son analyse dia-
gnostique progressive des réponses projectives d’un sujet donné, de réunir suffisamment
d’indices de ce type pour formuler l’hypothèse que tel ou tel mécanisme de défense
inconscient (ou implicite) est bien à l’œuvre chez ce sujet et en tirer alors les conséquences
compréhensives et diagnostiques qui s’imposent. Autrement dit, on ne peut jamais observer
d’emblée un « mécanisme de défense » ; on ne peut en repérer que les effets ponctuels et
indirects, à vérifier selon le principe d’une analyse clinique globale et hypothético-déductive par
convergence expérimentale (ou contradictoire) d’indices.
C’est ce que nous rappelait Roger Perron lorsqu’il s’exprimait comme suit à propos de son
test D.P.I. (épreuve projective thématique inspirée du TAT) :
« Il importe de rester très prudent dans les conclusions. Comme toute technique utilisée
par le psychologue, le D.P.I. doit conduire à des conclusions dont la portée dépasse les
caractères étroitement contingents de la situation créée par l’examen ; de même
qu’après un Binet-Simon on se hasarde à dire qu’un enfant “est intelligent”, on pourra,
après un D.P.I. se hasarder à dire qu’il présente, par exemple, une structure
névrotique de tel ou tel type. On prend alors, en généralisant, un certain risque,
mesuré tout à la fois par le degré de validité de l’épreuve utilisée et par la
compétence clinique de celui qui l’utilise. Si donc on relève dans un protocole – par
exemple – cinq exemples de “dénégation” (contraction en une seule phase d’une
évocation et de sa négation), il faut bien garder à l’esprit qu’il s’agit là d’une
modalité défensive d’élaboration du récit, et, stricto sensu, de rien d’autre. Il se peut
que chez ce sujet l’usage de la “dénégation” soit réellement permanent, et constitue
un trait essentiel de se personnalité ; mais on ne peut conclure de l’un à l’autre ipso
facto et sans examen soigneux du problème. » - (Perron, 1969, p. 41-42)
c) Vica Shentoub (1990) a particulièrement insisté sur le fait que toute réponse
projective comporte une part d’élaboration défensive, qui détermine le point d’équilibre
trouvé par le sujet entre les motions pulsionnelles inconscientes réactivées par le stimulus et
- Pour cet auteur, les processus d’individuation (« problématique de l’identité ») peuvent être consi-
dérés comme établis et opérants lorsqyue les formes perçues, au Rorschach par exemple – mais cela
vaut aussi pour tout autre test projectif –, sont claires, sans ambiguïté d’appartenance à telle ou telle
catégorie d’objet (monde humain, monde animal…), bien distinctes par rapport à l’environnement. « Au
contraire, la confusion des limites, les relations symbiotiques, les références aux doubles (jumeaux)
rendent comptent d’une séparation insuffisante entre sujet et objet, d’une absence de contnuité dans le
sentiment d’exister témoignant d’une identité mal différenciée » (Chabert, 1998, p. 75). Les processus
d’identification sexuelle (« problématique de l’identification ») sont considérés comme stables et
opérants lorsqu’il y a cohérence entre l’identité sexuelle (ou sociale, fonctionnelle) attribuée aux
personnages évoqués dans les réponses du sujet et les conduites que celui-ci leur attribue. « Quand les
identifications sexuelles sont conflictuelles, la confrontation aux représentations humaines est chargée
d’anxiété, entraînant évitement ou hésitation dans les choix identificatoires. Les modèles sexués sont
caricaturaux, les planches à symbolisme sexuel sont génératrices d’angoisse, conduisant à des blocages
ou à des prises de positions rigides mettant en évidence un déchirement douloureux entre des ten-
dances vécues comme contradictoires, barrant les possibilités d’identification satisfaisantes. » (ibid.)