Si on imagine la vie sans l’idée de la mort, elle perd alors quelque chose de son intensité, la
vie rétrécit si la mort est niée.
Freud : « la limitation dans la possibilité de la jouissance en augmente le prix ».
Et aussi il affirmait que la guerre avait pour intérêt de ramener la mort au sein des
préoccupations vitales.
Lorsque la mort est exclue, nous perdons de vue les enjeux de la vie
Giraudoux dans Amphytrion 38 : « c’est une chose que nous ( nous les dieux) ignorons, cette
intensité de l’éphémère, ce rappel à la mortalité, cette tristesse amère qui s’empare des
humains… » dit Jupiter à Mercure à propos de s mortels que nous sommes tous
L’approche de la mort peut nous amener à de réelles croissances personnelles :
- réévaluation des priorités de la vie
- sentiment de pouvoir enfin choisir de ne pas faire des choses non désirées
- sensation aigüe de vivre dans le présent, sans remettre des projets à plus tard
- appréciation plus vive des choses simples
- échanges plus riche avec les proches
- diminution des peurs relatives aux contacts inter-personnels
mais généralement,
La terreur de la mort de par son omniprésence et son intensité mobilise chez chacun de nous
une proportion considérable d’énergie vitale utilisée dans des défenses de déni : au plan
collectif : monuments, théologies, idéologies, cimetières, embaumement, exploration de
l’espace, mais aussi au plan individuel , qui se traduit en modes de vies : addictions, quête
infinie de divertissements, et de richesses matérielles, notre croyance inébranlable dans le
mythe du progrès, notre pulsion à « aller de l’avant », notre désir de gloire éternelle, de laisser
une trace.
Irvin Yalom note trois types de peurs :
- celles relatives à ce qui survient après la mort
- l’événement lui-même de la mort : peur de souffrir, peur du passage
- le fait de cesser d’être,( oubli, extinction, anéantissement) est aussi la plus cruciale :
une peur qu’il est impossible de comprendre et de situer, qui ne peut être affrontée et
en devient plus terrible encore, qui génère de l’impuissance et en intensifie l’angoisse
Comment nous combattons cette angoisse ? En la déplaçant du « rien » vers un « quelque
chose » ( Kierkegaard). Si nous parvenons à transformer notre peur du rien en une peur de
quelque chose nous pouvons avoir l’impression d’un contrôle.
Les êtres humains ont donc l’habitude de transformer leur angoisse de mort en peur de
quelque chose, l’angoisse de mort se manifeste rarement sous sa forme originelle dans le
travail clinique. On élabore des mécanismes de protection qui se fondent sur le déni,
constituant un ensemble complexe d’opérations mentales visant au refoulement.
Il y a donc une pluralité de registres, car afin de perdre de sa toxicité l’angoisse originelle se
voit toujours transformée par le biais de nos mécanismes de défense. Le désir « d’arrêter le
temps » la croyance en notre invulnérabilité, le désir de fusion avec autrui…ou le besoin
constant de mouvements, de changements ( travail, partenaires) : refus de fixer quelque chose,
de terminer quelque chose, qui correspond à la peur de vieillir, de stagner, et donc de mourir.
Cf Leonard de Vinci