Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) Philippe Heim ERES | « Empan » 2016/4 n° 104 | pages 66 à 70 ISSN 1152-3336 ISBN 9782749253848 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-empan-2016-4-page-66.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ERES. © ERES. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. 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SOP – Syndicat général organisme privé sanitaire et social, SNASEA – Syndicat national au service des associations du secteur social et médicosocial, fusionnés dans le SYNEAS – Syndicat des employeurs associatifs de l’action sociale et médicosociale ; FEGAPEI – Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées et fragiles ; aujourd’hui NEXEM est la fusion des trois ; FEHAP – Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne, privés non lucratifs. …/… C’est sur cette interrogation qu’il m’a été proposé de réfléchir et d’essayer d’apporter quelques points de débat. sur un plan purement méthodologique, il semble que la première étape est de déconstruire la proposition, d’en définir les différentes composantes et d’essayer de mettre en exergue toute la complexité du problème et de son contexte. Cette dénomination générique, a priori simple et explicite, pose, de fait, incidemment, trois postulats dans l’intitulé : – il y aurait une spécificité des professionnels éducatifs liée aux ime ; – les ime sont une entité homogène en termes de public, d’organisation, de projet ; – les professionnels éducatifs représentent un corpus bien identifié et repéré. Un premier élément à prendre en compte est que les notions de formation initiale et continue n’ont plus cours si ce n’est dans les représentations qu’en ont les acteurs ; en effet, depuis les lois successives sur la formation professionnelle, il s’agit de formation tout au long de la vie, la différenciation entre la dimension initiale et continue étant essentiellement liée au mode de financement. On peut toutefois postuler, pour l’exercice, que nous nommerons formation continue ce qui advient en complément, après un premier diplôme professionnel. Un autre facteur incident de l’interrogation est que la question est plus une question de compétences et de savoirs à acquérir, de parcours professionnalisant. Lesquels, savoirs et compétences, 66 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Dossier EMPAN 104.qxp_- 09/12/2016 15:58 Page66 EMPAN 104.qxp_- 09/12/2016 15:58 Page67 IME ? Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES publique que des transformations des organisations ou de l’évolution des publics accueillis. Ce discours régulièrement véhiculé selon lequel les éducateurs d’aujourd’hui sont moins bien formés, moins engagés, que le processus de formation ne produit pas ce qui est escompté en termes de compétences par les terrains professionnels (dénomination générique qui associe les acteurs sur l’ensemble de la chaîne des fonctions) est à mettre en perspective avec le fait que dans ce processus d’apprentissage en alternance, plus de la moitié du temps de formation est effectué dans le cadre de stages de formation pratique. Dans le cadre récent des réformes des formations, les professionnels, reprenant ainsi les processus historiques de l’apprentissage, sont les premiers formateurs. Cette fonction tutorale, formatrice, est également à intégrer dans le processus de formation permanente, partant du fait que le fait d’exercer un métier, voire avec une ancienneté importante (cf. ancienneté versus compétence), ne garantit en rien la compétence à en transmettre les compétences. La confusion, constante, inhérente au secteur, entre expérience et ancienneté s’inscrit également dans la problématique. Un autre aspect concerne la notion de « professionnels éducatifs » et les métiers qui composent ce corpus, la mission qui leur est dévolue et ce qui fait sens. Dans le cadre d’un institut médico-éducatif (cette dénomination pouvant spécifier des acteurs des deux champs, sanitaire et éducatif), que revêt ce corpus ? Ceux de la filière éducative, sociale… ? Tous les professionnels participent-ils à la fonction éducative de la structure ? si l’on s’entend assez largement sur la finalité, c’est-à-dire essayer de permettre à celles et ceux, quel que soit leur âge, qui sont en marge, quelles qu’en soient les raisons – situation de handicap, précarité, âge, difficultés sociales de tous ordres, délinquance… –, de prendre le train sociétal sans finir systématiquement sur le marchepied au mieux, si ce n’est sur la voie, on reste assez en difficulté pour ce qui est de définir quels sont les métiers reconnus comme « professionnels n’existent que s’ils sont évalués, ce qui nous amène à intégrer cet aspect dans la proposition. Le « savoir agir et interagir en situation » développé par Guy le Boterf 1 explicite que le fait de posséder des compétences ne rend pas compétent pour autant si celles-ci ne sont pas agies dans un contexte, en référence au processus qu’un professionnel met en œuvre lorsqu’il agit avec pertinence et compétence en situation. Dans ce qu’il est convenu d’appeler « le secteur », la référence à l’expérience est souvent convoquée par les professionnels en place et les équipes de direction, pour beaucoup tenant du « avant on était mieux formés, on était plus engagés… C’était différent ». effectivement, il y a peu de rapport entre le niveau de complexité des problématiques auxquelles sont confrontés les nouveaux professionnels et les réalités de la fin des Trente Glorieuses, voire jusqu’aux années 2000. Les cadres de référence qui ont présidé, après guerre, à la structuration des espaces professionnels sociaux et médico sociaux ont vu leurs lignes de partage s’effilocher jusqu’à disparaître. Les confrontations d’idées, les engagements idéologiques, qui alimentaient le débat entre mouvements d’éducation populaire, structures confessionnelles, associations de parents, Éducation nationale…, portés par des groupements et syndicats employeurs 2, n’ont plus cours ; les regroupements et fusions des syndicats et des branches, des associations, la polarisation des agréments signent un changement de paradigme radical, économique, politique et social, du « champ » et de ce qui en détermine le sens. L’ancrage revendiqué des Unions dans l’économie solidaire (UDes) peut être la base d’un nouveau débat d’idées. Parallèlement, peu de rapport également entre les niveaux acquis de savoirs et de connaissances exigés actuellement dans les formations et les diplômes d’État, et ce qui faisait référence avant les réformes des titres et le passage aux crédits européens. Les professionnels entrant dans la carrière aujourd’hui sont bien mieux et bien plus équipés que nous ne l’étions 3 et ainsi mieux armés à affronter les défis et problématiques qui leur sont proposés, tant au regard des prescrits de la commande 67 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Quelle formation initiale et continue pour les professionnels éducatifs travaillant en EMPAN 104.qxp_- 09/12/2016 15:58 Page68 104 éducatifs ». La fonction éducative dans un ime n’est pas le domaine réservé des professionnels éducatifs, pas plus que le soin n’est celui des médecins, psychologues et autres acteurs des métiers de la santé. Ce qui fait soin est ce qui est porté par l’institution dans ses composantes multiples. La plupart des écrits positionnent les éducateurs spécialisés (es), moniteurs éducateurs (me) et aides médico-psychologiques (amP), voire éducateurs de jeunes enfants, dans le cadre des professionnels éducatifs. Les études de la Drees de 2010 englobent les dénominations éducatif, pédagogique et social pour un ratio de 55 % des professionnels en ime, avec une partition présentant deux fois plus de me que d’amP et un même différentiel entre me et es. LES IME, QUELLE SPÉCIFICITÉ ? …/… 3. F. Muel-Dreyfus, Le métier d’éducateur. Les instituteurs de 1900, les éducateurs spécialisés de 1968, Paris, Éditions de Minuit, 1983 : « Le métier d’éducateur spécialisé offre à cette génération, outre un salaire correct, de nombreux avantages : il n’exige pas d’études supérieures, majore ce que l’on est par rapport à ce que l’on sait, n’offre pas de postes définis une fois pour toutes et permet donc l’innovation. » 4. C. Dubar, La socialisation. Construction des identités sociales et professionnelles, Paris, Armand Colin, 2000, p. 118. 5. J.-P. Gaillard, L’éducateur spécialisé, l’enfant handicapé et sa famille. Manuel à l’usage des professionnels de l’éducation spécialisée et des familles, Paris, ESF, 2012, p. 17. De fait, même si la définition générique des ime demeure stable depuis leur création avec les annexes xxiv en 1989 (des établissements préexistaient pour accueillir des enfants et adolescents de moins de 20 ans présentant des handicaps), au fil du temps, des différentes lois liées à la scolarisation, aujourd’hui à l’inclusion des enfants présentant une situation de handicap dont la déficience, l’évolution des cadres de référence (psychanalyse, behaviorisme, psychothérapie institutionnelle, sociologie, anthropologie…), des concepts (résilience, don, care, cure, empowerment, humanitude…), des approches (individuelle versus collective, théorie versus pratique, psychologique versus sociologique…), la restructuration des organisations et le développement de dispositifs ambulatoires ou type sessaD, les cadres législatifs et règlementaires (2005…) accompagnent la mutation de ces structures d’accueil et de soin (dans son acception Oms et non sanitaire). entre ime, imP, imPro…, ces établissements présentent une grande disparité dans leurs formes d’organisation, leurs projets, leurs modes de gouvernance, ainsi qu’en ce qui concerne les profils des enfants, adolescents et jeunes adultes accompagnés. La fonction, la place des « professionnels éducatifs » dans ce contexte est complexe, voire difficile à appréhender. Les métiers « sociaux » sont adossés à des formations génériques qui doivent permettre aux professionnels d’exercer leurs compétences dans un spectre très large de cadres d’emplois, allant de la petite enfance à la personne âgée, dans des services ou établissements ouverts ou avec hébergement, auprès de personnes présentant des handicaps ou en situation de précarité, d’exclusion, ainsi que dans le cadre de la protection de l’enfance ou du secteur socio-judiciaire. aujourd’hui, les espaces professionnels sont encore plus larges, intégrant les problématiques émergentes liées à des facteurs de crise hors des frontières. 68 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Dossier EMPAN N° EMPAN 104.qxp_- 09/12/2016 15:58 Page69 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Parallèlement, au regard de leurs diplômes et place dans l’organisation, du projet d’établissement, du projet associatif ou de l’employeur public, la fonction de ces « professionnels éducatifs » balance entre « prise en charge éducative », « accompagnement social », « référence de projet personnalisé ou projet individualisé », « coordination d’équipe de travailleurs sociaux », « animateur d’activités », combinaison de fonctions… De fait, il semble évident que la question de l’engagement dans un processus continu d’acquisition de compétences et de savoirs s’impose, et avec une nécessité particulière pour ce qui est des ime au vu de l’évolution et des transformations importantes auxquelles ces établissements ont été confrontés, telles la diversification des modes d’accueil, la spécialisation, la personnalisation des parcours. selon Claude Dubar 4, être professionnel est un mode de socialisation fort « pour réaliser la construction biographique d’une identité professionnelle et donc sociale, les individus doivent entrer dans des relations de travail, participer sous une forme ou sous une autre à des activités collectives dans des organisations, intervenir d’une manière ou d’une autre dans des jeux d’acteurs ». On peut comprendre la difficulté à se situer professionnellement, « géographiquement » ou/et « symboliquement » dans un organigramme et un fonctionnement au regard des autres professionnels et en lien avec les jeunes accueillis et les parents ou responsables légaux. Par ailleurs, chaque corps professionnel, champ disciplinaire, véhicule ses codes, son langage, son histoire, est empreint d’enjeux… Psy chiatres, psychologues, infirmiers, assistants de service social, enseignants spécialisés, encadrement, orthophonistes, etc., ont un spectre d’intervention, d’action, lié à une expertise et un savoir reconnu, identifié, validé. si l’on considère les éducateurs (au sens large) comme professionnels éducatifs, ceux-ci, en france, ne peuvent se référer à un cadre de référence scientifique ou universitaire spécifique et reconnu, à une technicité explicite, à des concepts du « travail social ». Un « bon » éducateur est un IME ? éducateur qui « fait », « la double contrainte culpabilisante dans laquelle les éducateurs sont emprisonnés, soit normaliser, intégrer, rentabiliser le non-normalisable, non-intégrable, nonrentable, a conduit la profession à une religion du “faire” 5 ». Leur compétence doit être validée en acte, dans le faire, dans l’action, la capacité à appréhender des problématiques complexes, en discerner les contours et enjeux, à les inscrire dans un ou des projets et à socialiser les hypothèses envisagées auprès d’autres professionnels dont ils doivent préalablement avoir intégré les codes et modes de communication faute de se voir invalidés dans leur légitimité à faire émettre du sens. Compétences et savoirs n’ont de réalité effective que confrontés à leur évaluation. Dans ce contexte, la question de la professionnalisation, de la formation (qu’elle soit initiale, continue, permanente) des professionnels, est un enjeu fort des nouvelles organisations, mais également de leur devenir et de la pertinence de ce qui est engagé auprès des personnes accueillies et accompagnées dans les services, établissements ou pôles. au-delà des compétences et savoirs pertinents pour des professionnels exerçant en institut médico-éducatif, la question, semble-t-il, est plutôt de savoir comment les acquérir. Ce qui interroge tout à la fois les référentiels des différentes formations et la place des employeurs, des professionnels, mais aussi, au regard des orientations du plan d’action interministériel pour l’action sociale, des personnes accueillies, dans leur élaboration. Quelle fonction « apprenante » des organisations ? Comment agir le rôle de tuteur, de transmetteur d’une technicité, mais également d’une culture, des professionnels entre eux, entre les générations, les secteurs d’activité ? Dans une profession où la fonction d’accompagnement (cum panis) se combine avec celle d’éduquer (ex ducere, conduire vers…, hors de…, au sens d’émanciper, de s’élever), la question de la recherche permanente du sens de l’action (sociale, éthique, politique) participe des fondements mêmes de ce qui fait socle à l’acquisition 69 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Quelle formation initiale et continue pour les professionnels éducatifs travaillant en EMPAN 104.qxp_- 09/12/2016 15:58 Page70 104 et au développement des savoirs et compétences, toujours mis en action et portés et relayés par les professionnels dans un processus et des organisations en capacité d’élaborations réflexives. La palette des formations (quatorze au rNCP – répertoire national des compétences professionnelles –, dont plus d’une dizaine pour l’action et l’intervention sociales et éducatives) offre un ensemble de possibles à combiner dans des organigrammes dynamiques au regard du projet de l’ime en lien avec le prescrit public et dans le cadre d’un projet associatif porteur et promoteur de sens. Plus que la question de la formation initiale et continue se pose avec acuité celle de la nécessaire réappropriation par les professionnels eux-mêmes, au-delà des « professionnels éducatifs », à tous niveaux de fonction et de statut, de ce qu’ils engagent en tant que formateurs, mais également en tant que citoyens, dans un compagnonnage permanent, toujours en veille des nécessaires compétences et savoirs. 70 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Claude Bernard Lyon 1 - Moron Laura - 134.214.188.171 - 21/05/2020 16:30 - © ERES Dossier EMPAN N°