OSTÉOSYNTHÈSES POSTÉRIEURES FIXATION CERVICALE INFÉRIEURE ET POSTÉRIEURE POSTERIAL OSTEOSYNTHESIS OF THE LOWER CERVICAL SPINE CH. MAZEL, R.TERRACHER,O. Chirurgiens La orthopédistes, GUINGAND, Institut Montsouris voie postérieure repose sur l'utilisation de technique fixation du rachisaucervical vis. Les vis desont implantées niveau par du massif articulaire, lieu de stabilité osseuse. Au niveau du rachis cervical inférieur, il n'est pas envisageable d'implanter les vis dans des pédicules comme sur le rachis thoracique et lombaire. Le recours à la voie postérieure en traumatologie est dépendante de l'anatomo-pathologie prédominante des lésions traumatiques postérieures du rachis cervical inférieur. Plusieurs études ont en effet confirmé le fait que plus des 2/3 des lésions siègent sur le segment postérieur de l'arc vertébral cervical justifiant dés cette méthode thérapeutique. La possiblité d'une réduction in situ foyer ouvert de la majorité des luxations des articulaires postérieures est un élément supplémentaire militant en faveur de cette technique chirurgicale. La pratique de celle-ci repose sur une technique rigoureuse tant au niveau de l'installation du patient, de la réalisation de l'abord, et de l'implantation du matériel d'ostéosynthèse que de la fermeture de cette incision. 42, B d Jourdan E. DE THOMAS SON - 75674 Paris Cédex 14 INSTALLATION DU PATIENT EN DÉCUBITUS VENTRAL Le retournement d'un patient placé en décubitus dorsal puis en ventral constitue toujours une phase délicate dans la prise en charge d'un patient traumatisé du rachis cervical inférieur ou présentant toute autre pathologie, dégénérative voire tumorale. L'intubation est habituellement pratiquée avec une sonde armée qui évitera toute plicature de la sonde. Le retournement est fait en monobloc, l'opérateur tient la tête et la positionne lui-même sur la têtière. Nous utilisons la têtière la plus simple, elle est arciforme, avec un arceau suffisamment large pour éviter toute hyper-pression au niveau des yeux. Il faut rappeler l'importance de la fermeture oculaire par un raphé au Stéristrip plutôt que la mise en place de compresses occlusives qui risquent d'être compressives et qui empêchent la surveillance directe de l'orbite et de l'œil. Les appuis thoraciques et iliaques sont rembou- • CH. MAZEL, R, TERRACHER, rés pour éviter les points d'hyper-pression. l?abdomen et la cavité thoracique doivent être le plus possible dans le vide évitant un excès de pression abdominale et thoracique. Il faut glisser une main sous l'abdomen du patient pour contrôler l'absence d'hyper-pression abdominale, source de saignements veineux. l? étude des pressions d'insufflation permet de vérifier le caractère adapté de l'installation. La tête du patient est «scotchée» sur la têtière en prenant appui sur le menton et sur l'occiput. Le patient est par ailleurs fixé au niveau des deux épaules en traction pour dégager le plus possible la charnière cervico-thoracique, toujours difficile à visualiser en per-opératoire lors d'une radiographie ou d'un contrôle par amplicateur de brillance. Ensuite, le patient est placé en proclive, membres inférieurs abaissés par rapport à la tête, ce qui participe à la diminution du saignement. Les opérateurs auront deux possibilités d'installation: • soit ils garderont la tête de leur côté du champ opératoire, les anesthésistes ne disposant plus que des membres inférieurs pour le contrôle de l'ensemble de l'hémodynamique, ce qui n'est pas un véritable problème; • l'autre possibilité consiste à laisser la tête du côté des anesthésistes, mais ce qui handicape fortement l'installation et gêne l'opérateur dans ses mouvements latéraux. l?incision est médiane postérieure, effectuée au bistouri froid, rejoignant l'aponévrose cervicale moyenne et profonde. La ligne blanche médiane, réunion des muscles cervicaux, est ensuite incisée longitudinalement. Il est essentiel de rester au sein de cette ligne et d'éviter de partir latéralement dans le muscle, source de saignement. Il faut noter que l'infiltration à la Xylocaïne adrénalinée proposée il y a quelques années a perdu de son intérêt car fortement combattue par les anesthésistes. Les écarteurs ne sont habituellement placés qu'une fois le plan des épineuses trouvé. Il faut en effet éviter de dissocier les plans les uns par rapport aux autres, source de décollement, d'hématome et de surinfection post- opératoire. Parfois, les écarteurs ne sont placés qu'une fois la dissection des lames effectuée. Au contact des épineuses, la dissection est poursuivie au bistouri froid ou au bistouri électrique. Le dépériostage est poussé latéralement à la compresse jusqu'au niveau des faces latérales des massifs articulaires, sans chercher à aller trop latéralement où existent des veines volumineuses source de saignements dont seule la compression locale permet de venir à bout. Sous réserve d'une réalisation respec- 0, GUlNGAND, E, DE THOMASSON tant ces différents principes, cet abord se révèle simple et facilement reproductible. ANATOMIE CHIRURGICALE L'ARC POSTÉRIEUR DE CERVICAL Le recours à une instrumentation par vis articulaires justifie la connaissance anatomique précise des éléments de l'arc postérieur qui sont les seuls visibles lors de l'abord chirurgical. l?utilisation de cette technique chirurgicale est ancienne, développée par Robert Judet et codifiée par Raymond Roy-Camille. La fiabilité de cette fixation n'est plus à prouver. Le recul clinique est à notre disposition pour l'affirmer. l?arc postérieur visible est constitué en partant de la ligne médiane vers l'extérieur par: l'épineuse bifide, la lame puis la masse latérale. Deux repères sont intéressants : la jonction lame/articulaire et la face latérale externe du massif articulaire. En dedans de la ligne lame/articulaire se trouve la moelle, la laminectomie cervicale est d'ailleurs faite à ce niveau. Plus en avant, toujours au niveau du sillon lame/articulaire, véritable gouttière, est située l'artère vertébrale (figure 1) . Celle-ci est située en avant de la racine nerveuse, c'est-à-dire loin par rapport à la zone qui nous intéresse. La racine nerveuse, elle, passe en avant de l'articulaire supérieure du massif articulaire. l?implantation en plein milieu du massif articulaire, comme recommandé, nous met donc à distance de la racine, sous réserve de ne traverser que les deux corticales du massif correspondant. Ainsi les trois structures anatomiques nobles constituées par moelle, artère vertébrale et racine, sont situées à distance de la vis dans le massif articulaire. Le matériel d'ostéosynthèse Il est constitué par des vis corticales de 12 à 20 mm de long, allant de 2 en 2, d'un diamètre de 3,5 mm. Les plaques d'ostéosynthèses proposées par R. Roy-Camille ont un entraxe de 13 mm ce qui permet de résoudre la quasi totalité des problèmes de rachis cervical et ce, quelle que soit la morphologie des patients, les plaques étant disponibles de 2 à 5 trous. l?utilisation d'un matériel en titane (I.R.M. compatible) simplifie le suivi post opératoire des patients. D'autres matériels utilisant des tiges sont disponibles. l? entraxe entre les vis est dès lors variable et l'utilisa- • tion simplifiée. Dans quelques cas, un diamètre de vis de 4, 4,5 voire 5 mm peut-être proposé . FIXATION CERVICALE INFÉRIEURE ET POSTÉRIEURE Luxation unilatérale et luxation bilatérale Que ces lésions soient uni ou bilatérales, la technique chirurgicale est très superposable. Il est important chez ces patients de procéder à un retournement très précautionneux et d'éviter notamment tout vrillage. Un retournement monobloc est le gage d'une chirurgie sans complication. La réduction à foyer fermé nous paraît dangereuse car ne permettant pas le contrôle des structures nerveuses. Dès l'abord chirurgical pratiqué, la mise en évidence de la luxation est facile avec visualisation de la surface articulaire brillante et nacrée de l'articulaire supérieure de la vertèbre inférieure. La désaxation des épineuses est bien visible. Que la lésion soit uni ou bilatérale, la réduction est faite à foyer ouvert soit par une manipulation directe des épineuses, soit le plus souvent par mise en place d'une spatule (figure 3), de deux voire de trois, glisssée entre les lames et sur lesquelles on applique un mouvement de démonte-pneu. Il est ainsi possible de rechausser l'articulaire, ou les articulaires luxées. Le maintien de la réduction est nécessaire ; la mise en place d'un davier de Farabeuf entre les deux épineuses donne une bonne stabilisation. Dès lors, il faut forer les massifs articulaires des vertèbres concernées puis implanter la plaque d'ostéosynthèse permettant la fixation. Le montage est toujours bilatéral et ce même en cas de luxation unilatérale sous peine de voir une récidive de la déformation et un démontage. Dans ce dernier cas, la deuxième plaque est dite de neutralisation. Les fractures luxations Qu'il s'agisse d'une atteinte de l'articulaire supérieure ou inférieure, d'une atteinte uni ou bilatérale, le principe est à peu près toujours le même. I.;articulaire du rachis cervical constitue un frein osseux empêchant la luxation et la rotation vertébrale en cas de fracture. La reconstruction de l'articulaire constitue donc un point important dans le traitement. Fracture luxation de l'articulaire supérieure: dans un certain nombre de cas, la fracture de l'articulaire supérieure qui est luxée vers l'avant entraîne une compression de la racine nerveuse ce qui justifie au minimum la réduction de l'articulaire, voire l'ablation du fragment fracturé. Le recours à la plaque en tuile décrite par Robert Judet nous paraît être un élément important de cette ostéosynthèse. Cette plaque en tuile reconstitue le frein osseux, évitant ainsi la récidive de la luxation. La plaque en tuile n'est jamais utilisée seule ; appliquée sur le massif articulaire, elle sera doublée par une plaque d'ostéosynthèse réalisant un «porte-manteau» (figure 4). Le montage en porteman- Figure 4 : Le montage en « porte-manteau» : dans le cas d'une fracture de l'articulaire supérieure, permet de reconstituer le frein empêchant la sub-luxation antérieure. teau est le plus souvent unilatéral, les lésion uni taléraIes des articulaires étant les plus fréquentes. Il sera bilatéral pour les lésions bilatérales, exceptionnelles Le montage unilatéral sera de toute les façons complété par une plaque de neutralisation contro-latérale. Fracture luxation de l'articulaire inférieure: lorsque l'atteinte siège au niveau de l'articulaire inférieure, le montage en porte-manteau tel qu'il a été décrit précédemment, permet de remplacer l'articulaire inférieure fracturée et saisir en sandwich la structure osseuse restante, évitant ainsi la récidive de la luxation (figure 5). Dans quelques cas, un vissage direct de l'articulaire inférieure peut-être proposé avec une petite vis de 3,5 mm. • CH. MAZEL, R. TERRACHER, O. GUINGAND, E. DE THOMASSON plaque de neutralisation contro-Iatérale. Dans le cas d'une horizontalisation importante, il faut réduire le déplacement. L'utilisation d'une plaque en tuile permet la réduction. La plaque en tuile est ensuite fixée de façon complémentaire par une 2ème plaque venant se placer au-dessus réalisant un montage porte-manteau. Ce montage porte-manteau prendra donc 3 étages. Une plaque de neutralisation contro-Iatérale sera bien sûr associée comme nous l'avons évoqué dans tous les autres cas. L'entorse grave du rachis cervical Ces lésions du segment vertébral moyen sont à la fois des lésions discales et des lésions des éléments postérieurs. Elles pourront donc être traitées indifféremment par un abord antérieur ou un abord postérieur. L'abord postérieur étant utilisé de façon préférentielle dans notre pratique. Dans un tel cas, la mise en évidence opératoire de la rupture du ligament inter-épineux voire du déchaussement des articulaires est aisée. La mise en place d'un davier réducteur sur les épineuses stabilise les lésions en position de réduction. Le vissage des deux plaques donne la fixation définitive de l'entorse (figure 6). Figure 5 : Le montage en « porte-manteau» dans le cas d'une fracture de l'articulaire inférieure vient prendre en sandwich le massif articulaire restant et évite la récidive de la luxation. Fracture Séparation du Massif Articulaire C'est habituellement une lésion unilatérale. Il y a deux traits de fracture, l'un est antérieur dans le pédicule, l'autre postérieur sur la lame homo ou contra-latérale. Le massif articulaire détaché est véritablement désolidarisé du reste de la vertèbre. L'obliquité des facettes explique l'horizontalisation du massif articulaire fracturé par rapport aux étages sus et sous-jacents. Cette horizontalisation explique la sub-Iuxation qui apparaît dans ce cas. Le traitement de cette lésion est fonction de l'importance de l'horizontalisation et du déplacement. Si la sub-Iuxation et l 'horizontalisation restent modérées, une ostéosynthèse par deux plaques à trois tra~s prenant donc les étages adjacents à la Fracture Séparation du Massif Articulaire est suffisante. Elle est complétée par une Figure 6: L'entorse grave à double niveau C5-C6 et C6-C7 est manifeste sur le cliché dynamique. La fixation postérieure permet simplement le blocage et la guérison de cette lésion. III FIXATION CERVICALE INFÉRIEURE ET POSTÉRIEURE Plusieurs niveaux pouvent être intéressés. Dans de tels cas, il faut recourir à un double abord systématique. Il est effectué dans le même temps opératoire, parfois en deux temps opératoires. Il est volontiers intéressant de démarrer par la fixation postérieure qui permet une reconstruction anatomique assez facile ; les repères des arcs postérieurs et des massifs articulaires sont retrouvés assez aisément. La fixation et son étendue sont déterminées en fonction des lésions. Cela permet, lors de l'abord antérieur, de travailler sur un rachis cervical stable. L'utilisation d'une synthèse par vis n'est pas strictement rigide et n'empêche pas, lors de l'abord antérieur complémentaire de faire de la distraction qui permet d'aborder le ligament commun vertébral postérieur et l'axe médullaire. La disponibilité d'une synthèse postérieure simplifie la reconstruction antérieure, l'encastrement d'un volumineux greffon iliaque tricortical est habituellement suffisant et ne justifie dès lors que rarement le recours à une ostéosynthèse antérieure complémentaire. Figure 7 : La myélopathie cervicarthrosique est une atteinte rare. La dégradation multi-étagée du rachis cervical est à l'origine de compressions aussi bien antérieures que postérieures. Un geste chirurgical est volontiers pratiqué par un double abord systématique dans la même séance opératoire. Le temps postérieur est fait en premier, il permet la laminectomie et la fixation du rachis cervical sans forcément chercher à la réduction de la déformation. Le temps antérieur est une corporectomie décompressive selon la technique de Simmons. La fracture tear-drop Elle est à la fois une lésion osseuse et une entorse grave. La lésion ligamentaire a souvent été négligée dans un premier temps, mais elle est au premier plan et doit être prise en compte. L'utilisation du scanner a fréquemment mis en évidence un trait sagittal sur tout le corps vertébral concerné confirmant que cette atteinte siège rarement à un seul niveau mais volontiers à deux niveaux disco-ligamentaires. C'est pour cela qu'il faut lors d'un abord antérieur ou postérieur, faire une fixation sur trois niveaux vertébraux, soit deux disques. La fixation postérieure est réalisée selon la technique décrite pour l'entorse grave; elle intéresse simplement un étage supplémentaire. Utilisation des ostéosynthèses postérieures dans les grands délabrements disco-ostéoligamentaires du rachis cervical Certaines lésions échappent à toute description anatomique et siègent à la fois en arrière et en avant. INSTRUMENTATION POSTÉRIEURE DES LÉSIONS ARTHROSIQUES RACHIS CERVICAL INFÉRIEUR DU L'utilisation d'une ostéosynthèse postérieure dans le traitement du rachis cervical arthrosique a des indications variées. Qu'il s'agisse du traitement d'un canal cervical étroit avec laminectomie extensive ou d'un spondylolisthésis arthrosique, le recours à la fixation postérieure par plaques est un complément qui simplifie souvent le geste chirurgical. Une grande laminectomie, du fait du risque de cyphose et swan-neck postopératoire par démusculation est volontiers associée, dans notre pratique, à une ostéosynthèse par plaques sur plusieurs niveaux. Du fait du caractère multi-étagé de ces lésions, la fixation est volontiers extensive. Un artifice technique mérite d'être mentionné: lors de la pratique d'ostéosynthèse de 5 niveaux voire plus, il est intéressant de commencer par le forage des massifs articulaires extrêmes du montage. La plaque est d'abord vissée à ses deux extrémités, les vis intermédiaires seront ensuite implantées après forage au travers des orifices de la plaque dans les massifs articulaires correspondants . • CH. MAZEL, R. TERRA CHER, O. GUINGAND, INSTRUMENTATION POSTÉRIEURE DES TUMEURS DU RACHIS CERVICAL INFÉRIEUR Le recours à l'abord postérieur et à la fixation postérieure dans les tumeurs du rachis cervical inférieur est extrêmement utile, La fixation dans le massif articulaire est certainement sur le plan osseux la plus économique des fixations puisqu'elle ne nécessite que la conservation du massif articulaire, Il est dés lors possible d'effectuer des laminectomies voire des arthrectomies ; la fixation à cheval sur l' arthrectomie ne posant pas de véritable difficulté. Les tumeurs du rachis cervïcothoracique sont très fréquentes, notamment métastatiques. Le recours à la technique que E. DE THOMASSON nous venons de décrire, complétée par une fixation pédiculaire au niveau du rachis thoracique, est de loin la méthode la plus fiable à notre disposition aujourd'hui, Du fait de l'importance des contraintes et de l'instabilité au niveau de cette charnière, il est souvent justîfié d'associer la décompression-fixation postérieure à la décompression-reconstruction antérieure, Les gestes chirurgicaux sont habituellement pratiqués lors de la même séance opératoire et ici encore nous commençons par la stabilisation postérieure première qui permet de travailler sur un rachis stable. Le recours à la synthèse postérieure évite le plus souvent d'utiliser une synthèse antérieure dont la tolérance n'est pas toujours exempte de difficulté, notamment sur le plan œsophagien. EN CONCLUSION I:utilisation d'une synthèse postérieure dans le traitement des lésions du rachis cervical, quelle qu'en soit l'étiologie, est importante à connaître car elle permet de résoudre de très nombreux problèmes. Elle donne la stabilité mécanique de loin la meilleure, qu'elle soit utilisée isolément ou en complément avec une voie antérieure.