Département de Mathématiques et Histoire des Sciences
UFR MITSIC
Université Paris 8
Licence de Mathématiques
et Licence Informatique
Semestre 3
INTRODUCTION AUX PROBABILITÉS
Benoît MARIOU — Automne 2015
séances vendredi de 12h (ou 11h30) à 14h30 (ou 14h)
du 25 septembre au 18 décembre
page : http://ufr6.univ-paris8.fr/Math/sitemaths2/spip/spip.php?rubrique73
Livres A First Course in Probability de S. Ross (très complet)
Une introduction aux probabilités de R. Isaac & R. Mansuy (intuitif)
Beaucoup d’autres ouvrages convenables se trouvent à la bibliothèque.
Sommaire
Introduction 2
1 Premières notions 4
2 Combiner les événements - Dénombrer 8
3 Probabilités conditionnelles - Indépendance 16
4 Formule des probabilités totales - Formule de Bayes 22
5 Variables aléatoires 26
6 Variables aléatoires indépendantes 32
7 Espérance et variance 35
8 Inégalités de Markov et de Chebishev - Loi faible des grands nombres 43
version du 19 décembre 2015 2Introduction
INTRODUCTION
Les origines de la mathématisation du probable remontent au 17ème siècle lorsque se fait sentir le
besoin d’une aide à la prise de décision en situation d’incertitude, dans deux domaines distincts :
- les jeux de hasards, qui donnent lieu à des discussions théoriques entre mathématiciens ;
- les assurances, avec des questions pratiques sur les risques d’événements rares (accidents,
catastrophes, . . .).
L’objet de la théorie des probabilités est donc d’étudier des phénomènes incertains,indéterminés,
aléatoires,i.e. , selon le dictionnaire « qui ne sont pas connaissables avec précision, pas prévisibles,
dont le résultat n’est pas acquis d’avance ».
Voyons deux exemples.
Exemple 1 – Les anniversaires.
Dans un échantillon de npersonnes, quelle est la probabilité que deux personnes, au moins, aient
leur anniversaire le même jour ?
?Que signifie la question, que recherchons-nous, qu’est-ce qu’une probabilité ? On s’attend géné-
ralement à une réponse du type « 2 chances sur 5 » ou à un pourcentage. Donc à un nombre
entre 0 et 1.
Et plus ce nombre est grand, plus l’événement considéré (ici, deux anniversaires le même jour)
est probable.
?Pour un échantilon fixé de npersonnes dont on connaît les dates de naissance, il n’y a plus
d’incertitude : ou bien il y a deux anniversaires identiques (oui à 100%), ou bien il n’y a pas
deux anniversaires identiques (non à 100% et oui à 0%)
?La question peut être interprétée en termes mathématiques si on la précise.
1. Parmi tous les échantillons de npersonnes, quelle proportion comporte des anniversaires
identiques ?
On confond alors la probabilité de l’événement avec la fréquence, statistique, de sa réalisation.
2. Parmi toutes les listes de ndates de l’année, quelle proportion comporte au moins une
répétition ?
Il s’agit d’une approche plus abstraite, qui permet des calculs, mais qui suppose implicitement que les humains
naissent uniformément tout au long de l’année.
L’important, pour l’instant, est que la question de la probabilité a son sens lorsque la situation
est quelconque, i.e. générale. Tandis que dans le cas d’un échantillon fixé, il s’agit d’une situation
particulière.
Exemple 2 – Lancer d’un dé.
On suppose que le dé est équilibré ou non truqué,i.e. toutes les faces ont la même probabilité,
la même "chance", de sortir.
1. Question posée avant le lancer : Quelle est la probabilité d’obtenir 2 ?
2. On lance le dé mais on cache le résultat, par exemple avec un gobelet. Question :Quelle est la
probabilité d’obtenir 2 ?
3. On lance le dé et on regarde le résultat. Question :Quelle est la probabilité d’obtenir 2 ?
Introduction aux probabilités – B. Mariou – Automne 2015 version du 19 décembre 2015 3
?Dans le dernier cas, il n’y a pas d’incertitude. Imaginons que nous faisons des paris. Si les
paris se font après avoir vu le résultat, on est sûr de gagner car on ne pariera que lorsqu’on
constatera que le résultat est favorable.
?Dans les deux premiers cas, il y a incertitude. Et s’il s’agit de parier, ce qui déterminera qu’on
mise ou pas, sera le montant de la mise, le montant du gain et la chance estimée de gagner.
Conclusions
Penser la probabilité : penser à toutes les situations analogues, à tous les résultats possibles.
Démarche probabiliste : chaque situation est envisagée comme un cas particulier
dans un ensemble de situations du même type.
Calcul des probabilités : analyse rigoureuse, structurée, quantitative, de ces situations d’in-
certitude.
version du 19 décembre 2015 4Premières notions
1 PREMIÈRES NOTIONS
1 Expérience aléatoire.
1.1 Exemples basiques. – Jeux dits de hasard.
?Lancer un dé à 6 faces. Il y a 6 scores possibles : 1, 2, 3, 4, 5 et 6.
Dire que le dé est équilibré, c’est exactement dire que tous les résultats ont la même probabilité de
sortir. Cette probabilité est de 1
6.
?Lancer une pièce. Il y a deux résultats possibles : Pile et Face.
Comme pour le dé, la pièce est dite équilibrée lorsque les deux résultats ont la même probabilité de
sortie. Cette probabilité est alors 1
2.
?Tirer une carte parmi 52 : 52 cartes possibles, chacune a une probabilité d’être choisie de 1
52 , toujours
à la condition que les cartes ne soient pas truquées.
1.2 Définition. – Une expérience aléatoire est un phénomène pour lequel on ne connaît pas
de façon sûre le résultat qu’on va observer, mais pour lequel on connaît l’ensemble de tous les
résultats possibles.
Exemples. Le lancer d’un dé, d’une pièce - équilibrés ou pas -, ou le tirage d’une carte, sont des expériences
aléatoires. Ainsi que le lancer de deux dés, le tirage de 5 cartes, etc.
1.3 Définition. – À chacun des résultats possibles d’une expérience aléatoire est associé un nombre,
réel, compris entre 0 et 1, sa probabilité.
Exemple. La probabilité d’obtenir pile en lançant une pièce équilibrée est p(pile) = 1
2.
1.4 Remarque. – La somme des probabilités de tous les résultats possibles est toujours 1.
Exemple. p(pile) + p(f ace) = 1.
1.5 Remarque. – Dans les exemples ci-dessus, tous les résultats possibles ont la même probabilité.
Mais ce n’est pas toujours le cas.
Exemple. Consdérons une pièce truquée de telle sorte qu’on a deux fois plus de chances d’obternir pile
que face. On a p(pile) = 2
3et p(face) = 1
3.
1.6 Définitions. – L’ensemble des résultats possibles d’une expérience aléatoire est appelé l’en-
semble fondamental de l’expérience, souvent noté .
L’application p: Ω [0; 1] telle que P
ω
p(ω)=1 est une loi de probabilité sur .
Autrement dit, si Ω = {ω1;. . . ;ωn}, on a p(ω1) + · · · +p(ωn) = 1.
Exemple. Dans le cas du lancer de la pièce, on a Ω = {pile;face}.
Et si la pièce est truquée comme dans l’exemple ci-dessus, on a p:pile 7→ 2
3, face 7→ 1
3.
Mais on peut aussi avoir, si la pièce est équilibrée p=:pile 7→ 1
2, face 7→ 1
2
De manière générale, sur cet ensemble fondamental
à deux éléments, la loi de probabilité est du type :
pile 7→ a
face 7→ 1a06a61
.
1.7 Remarques. – Interprétation de la loi de probabilité. Plus la probabilité d’un résultat, i.e.
la valeur réelle entre 0 et 1 qui lui est associée par la fonction p, est élevée, plus on a de chances
que ce résultat se produise.
– Associer un ensemble fondamental et une loi de probabilité à une expérience aléatoire, c’est
modéliser l’expérience. Cela signifie qu’on représente les principales caractéristiques de l’expérience
grâce à des objets mathématiques et qu’on espère que cette représentation permettra, grâce aux
Introduction aux probabilités – B. Mariou – Automne 2015 version du 19 décembre 2015 5
manipulations sur ces objets, de mieux connaître les divers aspects de l’expérience.
– Dans la première remarque ci-dessus “probabilité d’un résultat” désigne la probabilité modélisée,
i.e. la valeur de l’application ppour ce résultat. Tandis que “plus on a de chances que” fait référence
à la probabilité intuitive, expérimentale, celle qu’on essaie de modéliser.
1.8 Définition. – Le cas où tous les résultats possibles ont la même probabilité s’appelle situtation
d’équiprobabilité. Cela signifie qu’aucun résultat n’est favorisé par rapport aux autres. La loi de
probabilité, dans ce cas, est appelée loi uniforme.
C’est le cas lorsqu’on choisit au hasard : choisir au hasard c’est sélectionner mais sans favoriser
aucun des choix possibles par rapport aux autres.
1.9 Équiprobabilité avec nrésultats possibles. – Supposons que anéléments ω1, . . . , ωnet que
tous ces éléments ont la même probabilité, qu’on nomme a. On a donc :
1 = P
ω
p(ω) = n
P
i=1
p(ωi) = n
P
i=1
a=na. Et donc la probabilité de chaque résultat est a=1
n.
Exemple. Lancer d’un dé à 6 faces non truqué. L’ensemble fondamental a 6 éléments, et on est en
situation d’équiprobabilité puisque le dé est équilibré. Donc la probabilité de chacun des résultats
possibles est 1
6.
1.10 Remarque. – En situation d’équiprobabilité, les calculs sont simplifiés puisque les probabilités
individuelles des différents résultats possibles sont les mêmes. Il est cependant nécessaire de bien
préciser les raisons pour lesquelles on est sûr d’être en situtation d’équiprobabilité (voir exemple
ci-dessus).
2 Événements.
1.11 Exemple. – On lance un dé non truqué. Quelle est la probabilité d’obtenir au moins 5 ?
“Obtenir au moins 5” est un événement qui se réalise lorsque le résultat est 5 ou 6.
L’événement peut donc être décrit par une propriété démandée pour le résultat (ici, être supérieur à 5) ou
encore par la liste des résultats possibles qui le réalisent, i.e. qui ont cette propriété (ici, 5 et 6).
1.12 Définition. – Autrement dit, un événement est sous-ensemble de .
On peut le décrire avec une propriété qui sélectionne ses éléments parmi tous ceux de (compré-
hension) ou par la liste explicite de ses éléments (extension).
1.13 Exemples. –
?Lancer d’un dé. Événement E:“obtenir un score impair” ={ω|ωimpair}. Résultats le réalisant :
1, 3 et 5. Donc E={1; 3; 5}.
?Choix d’une carte parmi 52. E=“obtenir un as ou un ={ω|ωest un as ou un ♠}.
Résultats qui réalisent E: tous les (13 cartes dont l’as) et tous les as (4 cartes dont celui de ).
?Singleton. Si ωest un résultat possible, alors {ω}est un événement ; c’est l’événement qui est
réalisé ssi le résultat est ω.
1.14 Probabilité d’un événement. – C’est la somme des probabilités de ses éléments.
Autrement dit : pour E,p(E) = P
ωE
p(ω).
1.15 Exemples. –
?Lancer d’un dé (suite). lO na p(“obtenir au moins 5”) = p({5; 6}) = p(5) + p(6)
p(“obtenir un score impair”) = p({1; 3; 5}) = p(1) + p(3) + p(5).
Si le dé est équilibrée (équiprobabilité), on peut évaluer ces deux probabilités. Elles valent, respective-
ment, 1/6 + 1/6 = 1/3et 1/6×3 = 1/2.
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