De l’importance des comportements et de l’environnement

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Sommaire
• BPCO : un dépistage trop souvent tardif
• Asthme : incontournable observance
• Mucoviscidose : quand l’origine est génétique
• Tuberculose pulmonaire : une affection en recrudescence
• Légionelloses : des pneumopathies surtout nosocomiales
• Aspergillose pulmonaire : greffe pathogène sur terrain malade
• Grippe et pneumonie à pneumocoques : des facteurs de risque
superposables
• Maladies de l’amiante : essentiellement professionnelles
• Oxygénothérapie à domicile : entrée sur les soins “lourds”
• Transplantation pulmonaire : un dernier recours
Pneumologie
De l’importance des comportements
et de l’environnement
Quand on fait le tour des affections bronchopulmonaires, on s’aperçoit vite combien sont
néfastes certains comportements et délétères
certains environnements. Le tabac, toujours
le tabac ! Et cette mauvaise hygiène de vie,
parfois subie, souvent risquée en toute
inconscience ! Asphyxiant, irrespirable…
des mots passés dans le langage commun,
mais qui prennent un tout autre sens quand
la pathologie s’installe… Entretien avec le
Pr Philippe Godard1, du CHU de Montpellier.
Professions Santé Infirmier Infirmière : Quels sont
les grands axes de préoccupation des spécialistes
de la pneumologie et donc de la Société de pneumologie de langue française (SPLF) ?
Pr Philippe Godard : C’est toujours la BPCO
(bronchopneumopathie chronique obstructive)
qui nous préoccupe le plus. Elle connaît une
forte croissance en termes de morbidité et de
mortalité. Cette croissance ne se ralentira pas au
cours des prochaines années.
L’infectiologie requiert, quant à elle, une attention
particulière du fait de l’arrivée de nouveaux virus.
L’ensemble des thérapeutiques demande également que l’on s’y attarde.
Bien sûr, le cancer du poumon reste un souci majeur parce qu’il est encore très délétère. Il aurait
tendance à diminuer dans certains pays (comme
le Royaume-Uni), mais, chez les femmes qui se
1. Président du conseil scientifique de la Société de pneumologie de langue française (SPLF), chef du service des maladies
respiratoires du CHU de Montpellier.
sont mises à fumer, la situation risque de devenir dramatique. D’autant que celles-ci présentent
en outre une grande fragilité qui fait d’elles des
victimes plus jeunes et plus gravement atteintes.
PSII : Le tabac reste-t-il toujours l’ennemi numéro un ?
Pr P.G. : Évidemment. Les mesures prises par les
gouvernants ne seront jamais assez sévères. Je
rappelle que le cancer du poumon reste parmi les
dix premières causes de mortalité à un âge dont
la moyenne a baissé du fait de la consommation
plus précoce du tabac.
PSII : La prise en charge de l’asthme connaît-elle
des progrès ?
Pr P.G. : La prise en charge de l’asthme en France
n’est pas optimale. Le Plan Asthme en a pris acte
et a proposé une série de mesures pour améliorer la situation. Ce plan se met en place progressivement. Le principal problème étant l’observance des traitements au long cours, il s’agit de
se focaliser sur le suivi du malade. A Montpellier, nous menons deux actions :
– la première se développe dans le cadre de
l’école de l’asthme. Une infirmière spécialisée,
formée et encadrée par une équipe médicale,
teste en ce moment l’intérêt de suivre certains
asthmatiques à domicile par téléphone, en plus
du suivi habituel. L’évaluation est en cours ;
– la deuxième se déroule aux urgences du CHU.
Une infirmière (qui se trouve être la même)
forme ses collègues à l’éducation thérapeutique,
dans le cadre d’un protocole de recherche clinique. L’objectif est de mieux prendre en charge
l’asthme aigu grave après le passage aux l l l
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Dossier réalisé
avec la collaboration de
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urgences. Il n’est pas normal que des patients meurent d’une crise d’asthme. Nous sensibilisons donc
ces services à ce problème. L’enquête ASUR, conduite
par S. Salmeron, montre que le taux d’hospitalisations après un passage aux urgences est plus élevé
en France que dans les pays anglo-saxons. Des protocoles commencent à être mis en place pour optimiser la prise en charge et former les professionnels
en amont et en aval.
Par ailleurs, compte tenu du rôle de l’habitat
dans la maladie, un nouveau métier se développe : celui de conseiller en environnement intérieur (CEI). Un diplôme interuniversitaire a été
créé. Ces CEI participent aux actions des écoles
de l’asthme et contribuent à améliorer l’hygiène
de vie des malades. Il est facile d’accuser la pollution, mais on ne peut nier les inconvénients
d’atmosphères calfeutrées, de l’humidité et, bien
sûr, du tabac à l’intérieur des maisons.
PSII : Les maladies infectieuses reviennent en
force. On parle beaucoup du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), moins de la tuberculose.
Pr P.G. : Le SRAS plane encore comme une épée
de Damoclès. Le cycle du virus n’est pas connu.
Il pourrait être instable au niveau de son ADN,
rendant difficile son diagnostic, mais aussi son
traitement. La prochaine saison hivernale sera
cruciale. Le Congrès de pneumologie de langue
française (CPLF) consacrera une demi-journée à
ce problème important.
La tuberculose est toujours un problème d’actualité. Certes, la prévalence en est désormais faible,
et les changements d’attitude réglementaire vis-àvis de la vaccination BCG sont justifiés. Mais la précarité, les mauvaises conditions socio-économiques et la pauvreté sont toujours des facteurs de
risque. Il convient de continuer la lutte antituberculeuse. En ouverture du prochain CPLF, les pneumologues de la SPLF ont organisé une conférence
d’experts pour répondre à un certain nombre de
questions. Les pays francophones, en particulier
d’Afrique, sont très concernés et participeront en
masse à cette conférence. Un grand nombre de résumés ont été adressés pour le congrès.
PSII : Y a-t-il des disparités régionales pour ces
maladies infectieuses ?
Pr P.G. : Oui et non. Quand il s’agit de maladies
dues à la précarité et à la concentration de la population, il est évident que la région parisienne est
davantage concernée. De plus, le climat est plus
rude que dans le Midi. Mais, quand il s’agit de légionellose, par exemple, tout le territoire peut être
atteint. Ainsi, pendant que la région parisienne se
préoccupait des victimes de la canicule, nous
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étions très soucieux des 37 cas de légionellose,
dont trois décès, que nous avions à Montpellier.
PSII : Qu’est-ce qui rend la légionellose difficile à
soigner ?
Pr P.G. : Les facteurs de risque sont l’immunodépression, le tabac et l’âge. Le pronostic dépend
essentiellement de la rapidité à mettre en route
un traitement antibiotique adapté.
PSII : Si l’on revient aux services hospitaliers qui soignent les maladies respiratoires, pouvez-vous dresser une typologie de ces maladies et des patients qui
occupent ces services, en quelque sorte une information pour les infirmières qui veulent y travailler ?
Pr P.G. : Les services des maladies respiratoires
sont très divers et la typologie des malades qui y
sont soignés dépend de nombreux facteurs. Cependant, certaines tendances peuvent se dégager :
l’oncologie est en nette progression. Le Plan Cancer est le bienvenu. Les maladies infectieuses sont
fréquentes et justifient souvent une hospitalisation, surtout chez les personnes les plus âgées
ayant des comorbidités, voire immunodéprimées.
Les maladies bronchiques (asthme et BPCO) sont de
plus en plus prises en charge en ambulatoire. En
termes d’investissement personnel, la pneumologie est une spécialité très large puisque, d’une part,
la gestion de la fin de vie est souvent nécessaire,
d’autre part, la prise en charge de l’asthme allergique chez l’enfant, l’adolescent ou l’adulte jeune
est commune.
PSII : Pourtant, ces affections sont majoritairement évitables par la prévention.
Pr P.G. : La prévention dépend d’abord d’une
bonne hygiène de vie au sens large du terme :
équilibre alimentaire, exercice physique au grand
air (des études sont actuellement publiées, faisant
état d’un taux moins élevé d’asthmatiques vivant
à la campagne), et surtout, n’ayons pas peur de le
répéter, l’arrêt du tabac. C’est un domaine où l’infirmière jouera un rôle de plus en plus important.
Pour des raisons de démographie médicale, certes,
mais aussi pour la place que prend l’éducation du
patient quant à l’observance des traitements. On
l’a vu pour l’asthme. D’ailleurs, lors du CPLF, du
23 au26 janvier 2004 à Nice, la journée du 25
abritera des sessions infirmières (prise en charge
du patient cancéreux, perfusions, surveillance épidémiologique, etc.). Ce sera aussi l’occasion desessions qui mettront en exergue les complémentarités entre les divers paramédicaux comme
l’infirmière et le kinésithérapeute accueillant un
enfant atteint de bronchiolite, par exemple.
Propos recueillis par Andrée-Lucie Pissondes
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BPCO
Un dépistage trop souvent tardif
Définie par une diminution irréversible des débits expiratoires, la bronchopneumopathie
chronique obstructive, ou BPCO, est inconnue ou presque du grand public et même trop
souvent méconnue par les acteurs de santé eux-mêmes et les pouvoirs publics. Pourtant,
lorsque l’essoufflement devient par trop gênant, il est trop tard, car les lésions bronchopulmonaires sont définitives.
son taux de mortalité élevé, la B
est
notamment la cause d’un handicap imporOtantutre
: l’insuffisance respiratoire. A cause d’elle,
PCO
environ 30 000 personnes doivent recevoir de
l’oxygène ou une autre forme d’assistance respiratoire. Les spécialistes pensent que sa fréquence
et les risques de mortalité augmenteront dans les
vingt prochaines années.
Définition
La cause la plus fréquente de la BPCO est le tabac. Sournoise chez le fumeur, qui considère
comme normaux la toux et l’essoufflement, la
maladie se développe lentement et se définit par
une diminution progressive des débits expiratoires. Parmi les autres causes, on retrouve les
expositions professionnelles à des polluants tels
que les gaz toxiques, les solvants, les produits
de la mine, les poussières de silice.
La BPCO se manifeste souvent par une bronchite
chronique (toux avec production de sécrétions,
pendant au moins trois mois par an depuis plus
de deux années consécutives). Le rétrécissement des bronches malades freine le passage de
l’air, entraînant un essoufflement, d’abord à l’effort, puis au repos. Une destruction progressive
des poumons (emphysème) peut s’ajouter au
rétrécissement chronique des bronches.
Prévenir et dépister
Le dépistage peut être réalisé au moyen d’un débitmètre de pointe (peak-flow). Mais la certitude
du diagnostic est apportée par des explorations
fonctionnelles respiratoires précises réalisées par
un spécialiste qui évalue en détail l’obstruction
bronchique, donc la sévérité de la maladie, tout
en permettant de suivre son évolution.
Une radiographie du thorax, et parfois un scanner, sont nécessaires pour rechercher des complications ou une maladie associée.
Comment éviter la BPCO ? Il est indispensable de
ne pas fumer ou d’arrêter le tabac dès que la maladie apparaît. Diverses mesures préventives
permettent de diminuer la fréquence et la gravité des poussées évolutives de la maladie : traitement de foyers d’infections chroniques (des
sinus par exemple), vaccination contre la grippe
chaque année et contre le pneumocoque tous
les quatre ans. Tout fumeur de plus de 40 ans
doit bénéficier d’une surveillance de la mesure
de son souffle, au minimum par la mesure du
débit de pointe.
Insuffisance respiratoire aiguë des BPCO
Dans son évolution, l’insuffisance respiratoire
des BPCO peut être marquée par l’apparition
d’épisodes d’insuffisance respiratoire aiguë. Épisodes de gravités différentes débutant par la
simple dégradation gazométrique pour atteindre
ensuite la grande détresse respiratoire.
Dans la BPCO, l’obstruction bronchique est chronique, ce qui rend impossible la réalisation d’une
hématose correcte. Des phénomènes compensateurs, musculaires notamment, permettent d’établir un état d’équilibre. Lorsque les muscles respiratoires ne peuvent plus répondre, il faut
compenser la charge supplémentaire de travail
qui leur est demandée et apparaît alors l’insuffisance respiratoire aiguë (IRA).
L’infection est la première cause de décompensation. De nature le plus souvent bactérienne, elle
atteint l’arbre bronchique plutôt que le parenchyme. Le foyer de départ peut être dentaire ou
ORL. En même temps que la fièvre se déclare, les
sécrétions bronchiques augmentent et deviennent purulentes, la dyspnée s’accroît.
Un accident thromboembolique est une autre
cause possible : la recherche de signes de phlébite
des membres inférieurs est alors clinique et échographique. Toute décompensation cardiaque, à la
suite d’une valvulopathie notamment, peut aussi
être en cause.
Diagnostic et examens complémentaires
En dehors des signes généraux liés à la cause,
le tableau est marqué par la prédominance de
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signes respiratoires. Une polypnée accompagne
des pauses respiratoires, un tirage costal, une
respiration abdominale avec contraction à l’expiration. L’auscultation retrouve l’encombrement avec une diminution du murmure vésiculaire, la présence de sibilants.
Les signes cardiovasculaires (HTA, tachycardie,
cyanose, sueurs, turgescence des jugulaires,
foie cardiaque) sont les conséquences de l’hypoxie et de l’hypercapnie. Des troubles de la
conscience, une agitation plus ou moins profonde sont également les résultats des troubles
ventilatoires.
En premier lieu, la gazométrie sanguine révèle
une hypoxémie (PaO2 inférieure à 60 mmHg),
une hypercapnie (supérieure à 100 mmHg), une
acidose respiratoire. La NFS retrouve des signes
infectieux, avec une polyglobulie, une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles, une accélération de la vitesse de sédimentation, une
augmentation du taux de la protéine C réactive.
Les explorations radiologiques ou scintigraphiques sont utilisées essentiellement dans un
but étiologique.
Traitement
Devant l’apparition d’une IRA, il faut commencer
le traitement en milieu spécialisé. L’hospitalisation est nécessaire et la réanimation souvent
utile. Les objectifs thérapeutiques sont de limiter l’hypercapnie et l’acidose, et d’améliorer l’hypoxémie. Pour cela, on utilise souvent une oxygénothérapie à faible débit pour ne pas risquer
de majorer l’hypercapnie. Le débit optimal, voisin de 2 l/mn, est celui qui permet de faire baisser l’hypercapnie ou de la stabiliser tout en obtenant une PaO2 supérieure à 60 mmHg.
Devant l’existence d’une infection, il est justifié
d’utiliser une antibiothérapie adaptée, utile aussi
d’y adjoindre une corticothérapie. Les ß2-mimétiques permettent de provoquer une dilatation, la kinésithérapie respiratoire produit quant
à elle une désobstruction. A ce stade d’IRA, le patient est cependant souvent exténué, ce qui rend
toute rééducation impossible. Si l’oxygénothérapie est insuffisante, chez un malade aux muscles
respiratoires épuisés, l’assistance ventilatoire
(AV) s’avère indispensable.
Jacques Bidart
Asthme
Incontournable observance
L’asthme est une maladie inflammatoire des voies aériennes. Sur un terrain particulier,
cette maladie entraîne une obstruction des bronches responsable principalement d’une
difficulté à respirer (difficulté à l’inspiration mais surtout à l’expiration). C’est une
maladie chronique, variable dans le temps et, contrairement à la BPCO, réversible grâce
aux traitements.
crise d’asthme “classique” s’installe sous la
d’un essoufflement qui s’accompagne
Ld’unaforme
sifflement. Une crise peut durer de
quelques minutes à plusieurs heures. L’essoufflement s’accompagne généralement d’un sentiment d’anxiété. Dans certains asthmes, une dyspnée (difficulté à respirer) peut persister entre les
crises (asthme à dyspnée continue). Une toux
sèche, chronique et nocturne, peut être un véritable équivalent d’asthme, surtout chez l’enfant.
L’asthme aigu grave (ou état de mal asthmatique)
est une urgence vitale : c’est une succession de
crises dont l’intensité s’accroît jusqu’à l’installation d’un état d’asphyxie pouvant entraîner
la mort.
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L’asthme aux urgences
Des résultats d’une étude française menée en 2001
par le groupe de recherche Asthme-Urgences
(ASUR) et parue dans The Lancet mettent en lumière, au mieux, une “certaine inadéquation” des
soins de l’asthme aux urgences en France par
rapport aux recommandations existantes.
L’ASUR, sous la conduite du Pr Sergio Salmeron, a
procédé à une étude transversale de cohortes sur
12 mois, chez 3 772 patients qui se sont présentés avec une crise d’asthme aiguë dans 37 services d’urgences de France. Ce procédé a ainsi
permis de mesurer l’efficacité des praticiens dans
l’évaluation et la prise en charge des crises
d’asthme à l’aune des recommandations et des
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En outre, cette division par deux du risque était
encore plus flagrante chez les enfants de parents
eux-mêmes allergiques, pour lesquels le risque
était diminué par un facteur trois. Certes, ces résultats n’existent que sur une base rétrospective,
mais ils semblent suffisamment probants pour
inciter à plus d’études dans ce domaine.
consensus internationaux les plus complets et
récents, c’est-à-dire ceux de la British Thoracic
Society et des National Institutes of Health américains. Tous s’accordent à recommander, en cas
d’exacerbations, l’emploi systématique de ß2-stimulants inhalés, de corticoïdes systémiques et
d’oxygénation, et réservent les anticholinergiques aux cas très sévères ou d’insuffisance des
traitements de première ligne.
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La prévention
Des directives scandinaves au sujet de la prévention remontent au milieu des années 1990.
Mais, à ce jour, les solutions proposées alors
n’ont pas fait la démonstration de leur intérêt,
sauf, bien sûr en ce qui concerne le tabagisme et
la pollution. Dans le dernier numéro d’Allergy,
une équipe suédoise rapporte que ces efforts entamés il y a une dizaine d’années commencent à
porter leurs fruits. En effet, la Suède est l’un des
pays les plus concernés par l’extension continuelle de l’asthme. Ainsi, sur les 100 000 naissances comptabilisées chaque année, 8 500 enfants environ seront amenés à payer leur tribut à
cette pathologie sous ses différentes formes,
asthme vrai ou “simple” wheezing (ou sifflement).
Pourtant, près de 2 000 d’entre eux pourraient
éviter de développer un asthme avant 2 ans, affirme le Dr Magnus Wickman, de l’hôpital Karolinska de Stockholm et auteur principal de cette
nouvelle étude. Le Dr Wickman a repris les données d’une étude prospective qui portait sur
quelque 4 000 enfants nés entre 1994 et 1996.
Dès l’âge de 2 mois, on demandait à leurs parents
si oui ou non ils se conformaient aux recommandations édictées en Suède. Puis, à 1 et 2 ans,
les enfants étaient reçus en consultation dans
le but de détecter une éventuelle survenue
d’asthme ou de sifflements.
Ainsi, les chercheurs se sont aperçus que les
enfants élevés dans la droite ligne des recommandations avaient au minimum deux fois
moins de risque de développer des maladies respiratoires de ce type. Dans l’analyse, trois items
en particulier démontraient leur importance :
l’allaitement maternel, la non-exposition au tabac et la ventilation de la maison, notamment en
vue d’éviter l’humidité et donc les moisissures.
Pour les familles les plus respectueuses de ces
notions, les prévalences de wheezing et d’asthme
tournaient seulement autour de 12,6 % et 6,8 %,
respectivement. Par opposition, ceux qui ne
se conformaient qu’à une de ces recommandations ou ne s’y conformaient pas devaient déplorer des chiffres supérieurs à 24,1 % et
17,9 %, respectivement.
Comment affirmer le diagnostic ?
L’existence d’une dyspnée n’est pas suffisante
pour faire le diagnostic d’asthme. Tout essoufflement n’est pas un asthme !
Il est donc important de mesurer le débit expiratoire de pointe (DEP) avec un peak-flow ou certains autres débits pulmonaires, grâce à une
épreuve fonctionnelle respiratoire (EFR) effectuée
dans un service spécialisé. Le degré de sévérité
de la maladie, évalué sur des critères cliniques
et sur les résultats des EFR, permet de classer
l’asthme : intermittent, léger, modéré ou sévère.
Parmi les facteurs déclenchants, la composante
génétique est aujourd’hui indiscutable. Plusieurs
gènes sont en cause. Néanmoins, tout enfant issu
de parent(s) asthmatique(s) ne deviendra pas
forcément asthmatique lui-même, mais le risque
est plus élevé chez lui (20 % si un parent est
asthmatique, 40 à 50 % si les deux le sont). Viennent ensuite les allergènes inhalés ou pneumallergènes (pollens, acariens, poils d’animaux, cafards ou blattes, moisissures), les allergènes
ingérés (aliments, boissons), les allergènes professionnels. Cependant, tous les asthmes n’ont
pas une origine allergique. Après 60 ans, 8 asthmatiques sur 10 ne sont pas allergiques : ce sont
des asthmes dits “intrinsèques”.
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Les virus, la pollution atmosphérique, les facteurs psychologiques, les variations hormonales,
l’effort, le tabagisme sont autant de facteurs pouvant déclencher une crise chez un asthmatique.
Il existe deux formes d’asthme : les asthmes intermittents et les asthmes persistants. Dans des
formes chroniques d’asthme, le traitement est
préventif, et associe un médicament bronchodilatateur et un autre dit “anti-inflammatoire”. Il
faut, dans la mesure du possible, que, avec le traitement, la mesure du souffle de l’asthmatique
soit normale.
On dispose actuellement de médicaments très
efficaces pour traiter l’asthme, et il faut distinguer
le traitement de la crise et le traitement de fond.
Les médicaments bronchodilatateurs à action
rapide tels que la ventoline ou la terbutaline
soulagent très rapidement la crise et peuvent
être utilisés largement parce qu’ils sont sans
risque toxique lorsqu’ils sont inhalés. Si la crise
n’est pas améliorée dans un délai court, il faut
répéter leur utilisation et faire appel à un médecin. En effet, les non-réponses à ce type de
médicament indiquent une crise plus grave
qui justifiera probablement l’administration de
cortisone.
Les médicaments bronchodilatateurs peuvent
avoir un effet retard et sont associés, dans les
formes persistantes d’asthme, à un traitement
anti-inflammatoire. Ce dernier est utilisé en traitement de fond. Il ne soulage pas la gêne mais
agit sur l’inflammation de la bronche. Les médicaments les plus utilisés sont les corticoïdes. Les
antileucotriènes sont utilisés dans le traitement
de certaines formes d’asthme pour une action
anti-inflammatoire complémentaire de celle de la
cortisone. Les cromones sont des anti-inflammatoires moins puissants et s’utilisent dans des
formes peu sévères de la maladie.
A.-L.P.
Mucoviscidose
Quand l’origine est génétique
Avec une incidence de 1 personne atteinte pour 2 500 naissances (entretiens de
Bichat 2002), la mucoviscidose est la plus fréquente des maladies autosomiques
récessives. Elle est encore une maladie mortelle. Un enfant né en 2002 et atteint par
la maladie aura une espérance de vie de 40 ans (médiane de survie actuelle : 30 ans).
aladie autosomique récessive, la mucoviscidose est due à une mutation du gène CF siM
tué sur le bras long du chromosome 7. Plus
de 1 000 mutations ont été identifiées à ce jour.
Cette mutation entraîne le dysfonctionnement
d’une protéine transmembranaire, la Cystic Fibrosis Transmembrane Conductance Regulator (CFTR),
qui joue un rôle de canal ionique pour le chlore.
Cette modification cause une augmentation de la
viscosité du mucus tapissant les bronches par diminution de son hydratation. Cette obstruction
au niveau des bronches peut entraîner une insuffisance respiratoire mortelle, mais aussi une insuffisance pancréatique par obstruction.
Diagnostic
Dès la naissance, alors que le poumon est normal,
un syndrome occlusif par iléus méconial est pathognomonique. A l’absence d’émissions du méconium s’ajoutent des vomissements bilieux. Au
premier plan se trouvent parfois : une péritonite,
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un volvulus du grêle, une atrésie du grêle, un ictère cholestatique. A ce stade néonatal, pour affirmer le diagnostic, la radiographie de l’abdomen
sans préparation montre une distension des anses
intestinales, un côlon de petite taille ou des signes
de péritonite. Un lavement doux permet alors souvent de lever l’obstacle.
Chez le nourrisson, ce ne sont pas les signes digestifs qui sont au premier plan mais les manifestations respiratoires. La toux est chronique et les
bronchites sont récidivantes. Les radiographies
pulmonaires confirment l’aspect auscultatoire, à
savoir l’existence d’une distension pulmonaire sur
des obstacles mucopurulents. Des manifestations
digestives dues à l’insuffisance pancréatique sont
retrouvées, sans être prépondérantes. Une diarrhée chronique graisseuse avec des selles de type
“bouse de vache” accompagne un retard staturopondéral malgré un appétit conservé, voire augmenté. L’analyse des selles retrouve une stéatorrhée, et la formule sanguine une anémie ferriprive.
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Chez l’enfant plus âgé, la répétition des épisodes
bronchiques cause déjà une insuffisance respiratoire. Celle-ci se manifeste par une dyspnée d’effort ou de repos, une cyanose des extrémités, une
déformation thoracique avec un thorax globuleux,
un hippocratisme digital. Autant d’impressions
confirmées par la radiographie du thorax, qui retrouve un syndrome bronchique, des dilatations
bronchiques, des foyers opacitaires ou lobaires systématisés, éventuellement un pneumothorax, une
fibrose pulmonaire. Les signes d’insuffisance respiratoire se retrouvent dans des gaz du sang perturbés, avec hypoxie et hypercapnie, et dans un
syndrome respiratoire obstructif aux EFR. Les
signes digestifs sont chroniques et prennent la
forme d’entéropathies diverses avec syndrome
colitique, ballonnement, subocclusion ou mal de
ventre à répétition. Aigus, ils réalisent une hémorragie digestive, une invagination intestinale aiguë,
un prolapsus rectal. En dehors des atteintes intestinales, au niveau du foie doivent être suspectées
une cirrhose, une fibrose, une lithiase vésiculaire
avec atrophie et, au niveau du cœur, une insuffisance cardiaque avec cardiomyopathie. On peut
craindre aussi un diabète de type I, un retard pubertaire, une stérilité masculine par obturation des
canaux déférents et, enfin, une déshydratation aiguë avec hyponatrémie.
Forme chez l’adulte
En 1999, selon la Revue des maladies respiratoires,
33 % des personnes atteintes de mucoviscidose
étaient des adultes. Pour 20 % d’entre elles, le diagnostic n’a été porté qu’après 18 ans. Un certain
nombre étaient suivies pour une dilatation des
bronches (DDB). Ainsi, pour tout homme présentant une DDB et une stérilité, le diagnostic de mucoviscidose est quasi certain.
Pronostic
Le pronostic est apprécié au mieux à partir du
calcul du score de Schwachman, lui-même fondé
sur la fonction respiratoire, l’état nutritionnel et
les examens radiologiques.
Sont considérés comme péjoratifs : une insuffisance pancréatique, une atteinte étendue du
grêle, une cirrhose hépatique, une dénutrition,
une insuffisance respiratoire, une cardiomyopathie, toute infection surajoutée à germes hautement pathogènes.
Traitement
La dysfonction de la CFTR est responsable de la
double expression pathologique, à savoir digestive et respiratoire. Pour contrer cette anomalie,
un traitement comprenant la kinésithérapie res-
Les signes d’aggravation essentiels
Évoluant au rythme des poussées de surinfection
bronchique, l’aggravation se porte sur l’état respiratoire. Le patient tousse davantage, l’expectoration devient plus visqueuse, plus abondante,
purulente. En même temps qu’augmente la dyspnée, la capacité à se mouvoir diminue.
Une asthénie générale apparaît, avec un amaigrissement. La modification de la température et celle
des aspects radiologiques présents sont des signes
d’aggravation ; ils peuvent cependant être absents.
piratoire essentielle, l’opothérapie pour compenser une insuffisance pancréatique, et une antibiothérapie adaptée et à la demande doit être
envisagé. La DNase recombinante, puissant viscolytique utilisé en inhalation, traite, elle, le versant pulmonaire.
La kinésithérapie respiratoire doit être pratiquée
tous les jours. Le traitement antibiotique est indiqué lors des poussées de surinfection. Il doit être
assez prolongé (15 jours en moyenne) et à doses
suffisantes et adaptées pour éviter les résistances.
Si, dans les expectorations, sont retrouvés des
germes rares ou très pathogènes comme le Pseudomonas aeruginosa, l’administration des antibiotiques se fera par voie intraveineuse, favorisée par
la pose d’un cathéter sous-clavier ou jugulaire
(Port-a-cath) à raison de trois perfusions quotidiennes d’une demi-heure chacune. Si la colonisation bactérienne à Pseudomonas est chronique, l’antibiothérapie sera pratiquée en continu en aérosol.
Un aérosol qui associera volontiers un antibiotique
(colimycine, tobramycine), de la RhDNase mucolytique, un bronchodilatateur ß2-mimétique ; un
anticholinergique est recommandé.
En cas d’insuffisance respiratoire, l’oxygénothérapie est prescrite en cure, voire en continu.
La thérapie génique n’a pas encore confirmé les
espoirs mis en elle. La colchicine, extrait végétal,
offre une approche thérapeutique intéressante
sur les signes cliniques comme en amont, sur
l’expression biologique de la maladie. En utilisant tout l’arsenal thérapeutique, la durée
moyenne de vie d’un patient atteint ne dépasse
guère 40 ans actuellement. Cependant, un espoir
raisonnable réside dans la recherche, dans le dépistage néonatal récemment introduit, qui permet un repérage précoce de l’affection, et, malgré tout, dans les thérapies géniques.
J.B.
Pour en savoir plus : Société de pneumologie de langue française (SPLF).
Tél. : 01 46 34 03 87. Internet : www.splf.org
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 49 - octobre 2003
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Pneumologie
Tuberculose pulmonaire
Une affection en recrudescence
En France, la tuberculose est toujours présente. Le nombre de cas a même augmenté
au début des années 1990. Il paraît donc important aujourd’hui de savoir reconnaître
cette maladie afin de la traiter le plus rapidement possible.
tique. Les crachats sont étudiés, le matin à jeun,
pendant 3 jours de suite. Si des crachats spontanés ne peuvent être obtenus, deux méthodes
peuvent être utilisées, mais elles nécessitent souvent une hospitalisation : le tubage gastrique effectué le matin avant le lever et la fibroscopie
bronchique avec aspiration des sécrétions.
Lorsque le bacille de la tuberculose est trouvé, sa
sensibilité aux antibiotiques doit être testée grâce
à l’antibiogramme.
A l’heure actuelle, un test de dépistage pour le
VIH devrait être effectué chez tout sujet tuberculeux, car la tuberculose est plus fréquente chez
les personnes séropositives.
est une maladie infectieuse due
bacille de Koch (Mycobacterium tuberculoLsis).aauUntuberculose
malade tuberculeux transmet les bacilles
© La Lettre du Pneumologue 2003 ; VI : 72
en toussant, crachant, éternuant ou simplement
en parlant. Les microbes restent présents dans
l’air pendant plusieurs heures. Les personnes au
contact du malade ou dans les locaux qu’il fréquente peuvent donc respirer les bacilles.
Il se produit alors une “primo-infection”, ou infection tuberculeuse latente. Elle peut passer inaperçue, car elle n’est pas contagieuse. Dans 10 % des
cas environ, elle évolue vers une tuberculose, qui
peut elle-même être contagieuse et grave. Il peut
s’écouler plusieurs mois, voire plusieurs années
entre la primo-infection et la maladie elle-même.
Si un traitement donné est correctement suivi, le
taux de guérison est proche des 100 %.
N’importe qui peut être atteint de la tuberculose
mais le risque augmente chez les personnes
ayant été en contact avec un malade tuberculeux
ou chez celles vivant en collectivité, enfin chez
les immunodéprimés.
Les signes qui alertent
Les examens à effectuer en priorité sont : la radiographie pulmonaire, la recherche de bacilles
de Koch et un test tuberculinique par intradermoréaction (IDR) à la tuberculine. Seule la mise
en évidence des bacilles constitue un diagnostic
de certitude. Et c’est uniquement grâce à la disparition complète de ces bacilles qu’une guérison peut être affirmée après traitement antibio30
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 49 - octobre 2003
Quel traitement ?
La tuberculose est une maladie à déclaration obligatoire (elle peut être extrapulmonaire également).
Toutes les formes de tuberculose nécessitent un traitement antibiotique. Ce traitement dure au minimum 6 mois et doit être pris de façon régulière sans
interruption. Le traitement comporte plusieurs antibiotiques et nécessite un suivi régulier par le médecin qui doit être attentif à sa tolérance. A partir
du début du traitement, la contagiosité diminue
avec le temps. Une hospitalisation peut s’avérer indispensable dans certains cas. Si la personne malade est hospitalisée et présente une tuberculose
contagieuse, des mesures d’isolement respiratoire
seront prises (chambre à un lit, port du masque).
La primo-infection récente peut justifier un traitement préventif afin de limiter le risque de progression ultérieure vers la tuberculose. Le traitement préventif comporte en général un seul
antibiotique.
Chez la femme enceinte, la tuberculose doit
être impérativement traitée. Toutefois, les antibiotiques utilisés dépendent de la phase de la grossesse.
Quand un traitement a été trop court ou pris irrégulièrement, les bacilles peuvent devenir résistants à certains antibiotiques. Il faut alors les
remplacer par d’autres dont la sensibilité est testée par antibiogramme. Le traitement adapté sera
en général prolongé et impose un isolement en
milieu hospitalier spécialisé.
J.B.
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Légionelloses
Des pneumopathies surtout nosocomiales
Lors du congrès de l’American Legion, en 1976, a été découverte une nouvelle bactérie,
la Legionella pneumophila. Depuis, d’autres bactéries du même type ont été identifiées
comme étant responsables de 3 à 5 % des pneumopathies, voire davantage.
Autant de signes peu explicites, qui sont plus
des arguments de suspicion que des preuves
diagnostiques. D’où la nécessité de recourir à
des méthodes d’identification directe fondées
sur l’immunofluorescence sur les crachats ou
sécrétions bronchiques. On utilisera aussi les
cultures spécifiques et l’antigénurie. Les prélèvements sont effectués dans les expectorations,
le liquide pleural, les aspirats trachéobronchiques, le sang.
plus particulièrement à la fin de
l’été, ou à l’automne, la légionellose touche
Sdesurvenant
bâtiments entiers. Si la bactérie responsable
Diagnostic
La période d’incubation de la maladie s’étend en
moyenne sur 2 à 10 jours. Si l’affection touche
principalement les personnes d’âge moyen, elle
a une préférence pour ceux présentant des facteurs de risque, qu’il s’agisse du tabac, de l’alcool
ou d’une immunodéficience. Le premier signe
est une dissociation entre la fièvre souvent élevée et un pouls ralenti. Les signes de début sont
ceux d’une grippe banale avec des céphalées,
des myalgies, une sensation de malaise général.
Survient alors une toux d’abord sèche, puis rapidement productive. Si la diarrhée est fréquente, les troubles de conscience, à type d’obnubilation, sont plus rares. Peu de signes sont
donc réellement pathognomoniques. La radiographie confirme l’atteinte pulmonaire avec la
présence d’un infiltrat segmentaire ou lobaire.
L’évolution peut se faire vers une bilatéralisation
des atteintes, l’abcédation des lésions ou encore
l’apparition d’épanchements pleuraux. L’aspect
sur les clichés peut être aussi celui d’un poumon
truffé d’opacités signant des emboles septiques.
L’examen du liquide céphalorachidien, effectué
si des troubles de la conscience existent, est normal, comme d’ailleurs celui des selles. La formule sanguine retrouve une hyperleucocytose,
l’ionogramme une hyponatrémie.
© La Lettre du Pneumologue 2000 ; III : I
siège naturellement dans les ruisseaux, les lacs
et les rivières, la contamination se fait à partir
de micro-organismes en suspension dans l’air,
provenant de la condensation de systèmes de
refroidissement, mais aussi de l’eau issue de
pommes de douches contaminées. C’est ainsi
que les hôtels, les piscines, les saunas comme
les hôpitaux sont des cibles privilégiées.
La contamination interhumaine n’a pas été démontrée. Le risque létal se retrouve surtout chez
les patients hospitalisés et immunodéficients.
C’est le cas des transplantés rénaux ou cardiaques, des greffés médullaires, des patients
sous corticothérapie au long cours.
Traitement
L’antibiotique de référence est l’érythromycine,
utilisée à raison de 500 mg toutes les six heures.
En cas d’intolérance, d’allergie médicamenteuse, c’est la doxycycline qui est choisie. Dans
les cas graves, une association peut être préconisée. Mais aussi l’emploi de triméthoprime +
sulfaméthoxazole, voire de quinolones. Le traitement est à poursuivre pendant trois semaines,
en moyenne, pour éviter les rechutes.
A.-L.P
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Pneumologie
Aspergillose pulmonaire
Greffe pathogène sur terrain malade
Mycose pulmonaire due à une moisissure, l’Aspergillus est contenu dans le sol ou les
débris organiques. Son pronostic est d’autant plus grave que son diagnostic est souvent
difficile et donc posé avec retard. Plus de 300 espèces d’Aspergillus existent mais
seules quelques-unes sont pathogènes pour l’homme.
espèces d’Aspergillus se trouvent dans l’enimmédiat des patients, que ce
Csoitesvironnement
à l’extérieur, dans la terre et les débris végétaux, ou à l’intérieur des habitations, dans la
poussière de maison par exemple. Ces moisissures se reproduisent par des spores propagées
par l’air jusque dans les bronches des personnes. C’est donc par simple inhalation que la
contamination se produit. Si un nombre suffisant de spores est introduit, tel qu’il dépasse les
moyens de défense naturels que sont les ma-
La psittacose : le pigeon pollueur
Diarrhée, fièvre (38,5 oC), céphalées diffuses,
toux d’apparition brutale : le diagnostic semble
facile, et pourtant... En deux jours, la fièvre est
voisine de 40°, les céphalées augmentent, et de
nouveaux symptômes apparaissent (discours,
par moment, incohérent dans sa forme et dans
son contenu).
L’examen clinique traduit à l’auscultation l’existence d’un foyer pulmonaire, des signes de souffrance méningée : une raideur de la nuque, des
vomissements. Les examens complémentaires
confirment l’existence d’un foyer pulmonaire
systématisé, avec une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles (18 000, dont 93 % de
PN) ; les examens neurologiques spécialisés,
en particulier la ponction lombaire, eux, sont
normaux.
Les sérodiagnostics et l’interrogatoire poussé
permettent le diagnostic : il s’agit d’une pneumopathie à Chlamydia psittaci due au contact de
fientes de pigeons. Il semble que l’affection ne
soit pas assez suspectée. Elle ne touche pas seulement les éleveurs d’oiseaux, de nombreuses
villes étant largement pourvues de pigeons.
C’est pourquoi les déjections de pigeons (ou
d’autres volatiles) doivent être nettoyées, en portant un masque, au moyen de désinfectants de
type solution de Dakin®.
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Professions Santé Infirmier Infirmière - No 49 - octobre 2003
crophages, les cils et le mucus, l’infection atteint
les bronches, les poumons. Cependant, cette
infestation ne se produit jamais sur un terrain
sain. Une atteinte pulmonaire doit préexister,
dans le cadre d’une mucoviscidose, d’une dilatation des bronches ou de tout obstacle à une
circulation laminaire d’air. Pour que la greffe aspergillaire prenne, il faut également que préexiste une cavité : une caverne ancienne tuberculeuse ou sarcoïdienne, un emphysème ou
encore une tumeur excavée. Dans cet espace,
vont alors proliférer les moisissures réalisant
l’aspergillome.
Diagnostic
Le premier symptôme à apparaître est la toux. Banale au début, c’est son caractère traînant finit par
inquiéter. D’autant que s’y ajoutent une hémoptysie, une fatigue anormale et un amaigrissement.
Devant le moindre doute, comme une toux qui
traîne, une radiographie s’impose.
On retrouve, au sein de la cavité déjà signalée,
une opacité dense arrondie ou ovalaire, mobile
aux changements de positions. C’est un caractère
essentiel et recouvert d’une image de clarté gazeuse en croissant. Classiquement on parle d’aspect “en grelot”.
Afin de déterminer l’agent pathogène, on réalise un sérodiagnostic. On met ainsi en évidence les anticorps anti-aspergillaires. Ces résultats sont à corroborer par les suivants devant
la présence, chez de nombreuses personnes, de
Quelques cas
• L’aspergillose allergique associe l’atteinte pulmonaire, une rhinite, une conjonctivite et un
eczéma atopique. Les IgE spécifiques sont positives, avec une hyperéosinophilie.
• L’aspergillose peut être une maladie professionnelle des travailleurs du malt, des fermiers, ou
encore la maladie des climatiseurs.
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© La Lettre du Pneumologue 2001 ; IV : 227
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ces anticorps de manière non pathogène. Le
diagnostic est positif si on retrouve, par le test
Elisa, les antigènes circulants. Il est plus délicat
de mettre en évidence le champignon par bronchoaspiration, peignage ou lavage alvéolaire.
Devant le risque de contamination exogène,
l’analyse des crachats est, quant à elle, peu
fiable.
Parfois, la découverte du diagnostic d’aspergillome se fait par élimination. Une pneumopathie
aiguë qui traîne malgré un traitement antibiotique correctement choisi et suivi doit faire évoquer la possibilité d’une greffe aspergillaire. Une
supposition qui doit même être faite d’emblée,
lorsque le patient présente un terrain affaibli : fumeur, tuberculeux ancien, présentant ou ayant
présenté une sarcoïdose, personne âgée, alcoolique, sujet immunodéprimé.
Traitement
Limité par une toxicité rénale, l’amphotéricine B
en intraveineuse est désormais remplacée par
l’itraconazole donné per os.
En cas de doute sur le diagnostic, en particulier
chez une personne immunodéprimée, leucémique ou transplantée, il est licite, devant une
symptomatologie pulmonaire, de prescrire des
antifongiques parallèlement à un traitement
antibiotique.
J.B.
Anthrax pulmonaire : à cause du bioterrorisme
La maladie du charbon fut la première maladie infectieuse bactérienne dont on a identifié l’agent causal, et ce, grâce à Pasteur, qui mit également au point
le vaccin vétérinaire. Il s’agit d’une maladie infectieuse non contagieuse qui, dans les conditions habituelles, atteint très rarement l’homme.
La maladie du charbon est avant tout une maladie
animale ; connue de longue date, elle atteint principalement les herbivores (ovins, bovins, caprins,
équins) sous forme d’épidémies (épizooties), de manière endémique ou sporadique, selon les régions du
monde. La bactérie (Bacillus anthracis, d’où le nom
d’“anthrax” donné à la maladie par les AngloSaxons) vit dans la terre où elle prend la forme d’une
spore qui peut survivre plusieurs années. Lorsque des
animaux étaient infectés, ils étaient abattus puis enfouis dans le sol. Les spores de charbon remontaient
à la surface du sol grâce au travail des vers de terre,
et elles contaminaient l’herbe et les plantes fourragères ingérées par les animaux. Aujourd’hui, les animaux malades sont brûlés.
La contamination chez l’homme peut se présenter
sous forme cutanée, digestive ou pulmonaire. La
forme pulmonaire ou “anthrax pulmonaire” ou encore “maladie des trieurs de laine” apparaît après
l’inhalation de spores, particulièrement si celles-ci
sont dispersées dans un aérosol. La durée de l’incubation de la maladie peut varier de 1 jour à
2 mois. Il s’agit de la forme la plus redoutable. Elle
commence habituellement comme un rhume puis,
au bout de 24 à 48 heures, apparaît un syndrome
grippal : fièvre, maux de tête, malaises, douleurs
musculaires, toux, gêne respiratoire. Ensuite la maladie évolue en une semaine vers une détresse respiratoire, une insuffisance cardiaque et le coma.
Une fois que la maladie s’est déclarée, l’évolution
est souvent fatale. L’inefficacité du traitement instauré tardivement est liée en partie au rôle particulier de la toxine élaborée par le bacille ; cette toxine
est responsable de l’extension de la nécrose et
des manifestations à distance du foyer infectieux,
comme l’atteinte encéphalitique. C’est seulement
par un traitement précoce, instauré avant la
48e heure après la contamination, que l’on peut espérer améliorer le pronostic.
Aujourd’hui, la maladie refait parler d’elle à cause du
risque de bioterrorisme. Si l’on suspecte une exposition
à la bactérie, un traitement antibiotique doit être immédiatement mis en place (fluoroquinolone). Le traitement sera maintenu 8 semaines si l’on a une confirmation bactériologique, et même prolongé au-delà,
avec d’autres antibiotiques. Les recherches s’orientent
vers des thérapeutiques qui pourraient s’opposer à l’action de la toxine du charbon composée de trois protéines : l’antigène protecteur (AP), qui se lie à un récepteur de l’hôte infecté, le facteur létal (FL) et le facteur
œdémateux (FO), à l’intérieur de la cellule.
A.-L.P.
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Pneumologie
Grippe et pneumonie à pneumocoques
Des facteurs de risque superposables
La grippe est au premier rang des infections virales épidémiques. Le pneumocoque
est le premier des agents infectieux des pneumonies aiguës communautaires (PAC).
On estime l’incidence des pneumonies à pneumocoques à 132 000 cas annuels sur environ 400 000 cas de PAC.
our la grippe et pour les pneumonies à pneumocoques, les facteurs de risques en termes
Pde morbidité
et de mortalité sont superposables,
en particulier l’âge (à partir de 65 ans) et les principales comorbidités (maladies respiratoires
chroniques, pathologies cardiovasculaires, neurologiques, diabète...), explique le Pr Paul Léophonte (service de pneumologie de l’hôpital Rangueil-Larrey de Toulouse)*. Le pneumocoque
est, avec le staphylocoque doré et Haemophilus
influenzae, l’un des trois principaux agents des
surinfections bronchopulmonaires au cours de la
grippe, surtout en période de pandémie grippale.
Lors d’une grippe, la surinfection pulmonaire
bactérienne survient à titre de complication clinique après 3 jours à 2 semaines d’évolution
de la maladie. Elle est marquée par la recrudescence de la fièvre, une toux et une expectoration sanglante ou purulente. Quelquefois, le patient présente un essoufflement et des douleurs
thoraciques. C’est l’examen radioclinique qui
confirme le diagnostic de pneumonie. La surinfection bactérienne se développe d’autant plus
que les défenses du patient sont fragilisées. Les
virus infectent et détruisent les cellules ciliées de
la muqueuse des voies respiratoires. « La défense
antimicrobienne est entravée, au niveau du poumon
profond, par des altérations, dues au virus, de la
fonction des macrophages alvéolaires, dont l’un des
rôles est de phagocyter les micro-organismes inhalés
parvenus aux alvéoles. De surcroît, l’exsudation au
sein des alvéoles pulmonaires constitue un milieu
propice à la multiplication bactérienne », souligne
le Pr Paul Léophonte.
Aujourd’hui, la vaccination grippale annuelle et
la vaccination pneumococcique tous les cinq ans
permettent d’obtenir un bénéfice significatif en
termes de morbidité et de mortalité.
Toux prolongée postgrippale
La toux est un symptôme particulièrement invalidant et elle peut être durable. Au bout de 3 se* 16es Rencontres européennes sur la grippe et sa prévention (Porto,
septembre 2003).
34
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 49 - octobre 2003
maines, elle peut devenir une maladie autonome
autoentretenue. De plus, elle est un “vecteur épidémique” très efficace de propagation des agents
infectieux. Le Pr Daniel Dusser (hôpital Cochin
de Paris, service de pneumologie) a analysé les
mécanismes de ces toux prolongées.
Après infection virale, les récepteurs de la toux
sont stimulés par des facteurs mécaniques (sécrétions bronchiques), des irritants (cigarette,
ozone, SO2) ou des médiateurs tussigènes.
L’hypersécrétion de mucus bronchique est probablement un facteur déterminant. Les mécanismes de cette hypersécrétion commencent à
La prévention :
de la grippe au SRAS
Le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) est
une pneumopathie due à un Coronavirus. La
transmission interhumaine se fait lors des
contacts rapprochés, par voies aérienne (gouttelettes ou “droplet”), ou manuportée. Un office
ou un secteur géographique isolé du reste du service doit être réservé à la prise en charge des patients suspectés de développer l’infection. Le SRAS
est, pour l’instant, une affection peu répandue.
La mission de suivi du SRAS a été confiée aux
Groupes régionaux d’observation de la grippe
(GROG) parce que leurs coordinations sont mobilisables en quelques heures et que les médecins
vigies des GROG ont une grande habitude des prélèvements rhinopharyngés. L’ensemble des dispositifs d’alerte a été coordonné par les membres
de la Direction générale de la santé, notamment
ceux qui ont en charge le “plan pandémique” de
grippe, appuyés par l’unité des maladies infectieuses de l’Institut de veille sanitaire.
La crise du SRAS est survenue en pleine phase de
préparation du plan “Pandémie grippale” en
France. En somme, une répétition “pour de vrai”.
L’expérience d’anticipation d’une épidémie de
grippe pouvant servir d’exemple à la prévention
d’épidémie de SRAS.
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être mieux connus ainsi que ses conséquences :
dans les grosses bronches, la toux permet d’évacuer ces sécrétions. Par contre, dans les bronchioles, il n’y a pas de récepteurs de la toux, ce
qui provoque un encombrement chaque fois
qu’on n’a pas évacué ces sécrétions par aspiration
ou par kinésithérapie respiratoire. Cependant,
habituellement, tout rentre spontanément dans
l’ordre après 3 semaines de toux. Dans certains
cas, l’inflammation se prolonge, soit parce qu’elle
s’amplifie, soit parce que la réparation est incomplète et tardive. Certaines circonstances
favorisent cette amplification : asthme, BPCO, coinfection, prédisposition, nature du virus. Les
anti-inflammatoires non stéroïdiens ont une efficacité très faible. Les médicaments antisécrétoires (par exemple les inhibiteurs des récepteurs
EGF) ne sont, pour l’instant, qu’une piste de recherche et il n’existe pas d’antimédiateurs.
Le Pr Hervé Allain (CHU de Rennes, laboratoire de pharmacologie expérimentale et clinique) a analysé les raisons qui font que “la
toux entraîne la toux”. Les mécanismes encore
incomplètement connus semblent centrés sur
Virulence et pathogénicité
Ce sont des mots synonymes mais ils mesurent le
pouvoir pathogène d’espèces virales différentes
sur le même hôte alors que la virulence résulte de
la comparaison de souches différentes d’une
même espèce virale (C. Sweet, Royaume-Uni). Le
niveau de pathogénicité permettant de distinguer
les souches hautement pathogènes (HP) des virus
faiblement pathogènes (LP) et le site d’infection
sont analysés en comparant des virus grippaux
d’origines aviaire et humaine.
Le premier stade de pathogénicité est déterminé
par l’entrée du virus dans l’hôte : par voie respiratoire ou par voie digestive. L’entrée dans la cellule se fait par liaison du virus aux récepteurs cellulaires, avec deux spécificités suivant l’origine
virale : pour les virus aviaires, liaison SA a 2,3 Gal ;
pour les virus humains : SA a 2,6 Gal, et pour les
virus de porcs, les deux liaisons sont utilisées.
La deuxième étape est la balance entre la fixation
du virus par l’hémagglutinine et sa libération par
la neuraminidase. La troisième étape est la fusion
entre l’hémagglutinine virale clivée et les cellules.
Les enzymes responsables de ce clivage sont différentes pour les souches HP et LP.
Extraits des rapports du Pr M. Aymard et du Dr E. Nicand aux
16es Rencontres européennes sur la grippe et sa prévention (2003).
© Garo/Phanie
*DOSSIER PSII 49
un “embrasement du système glutamatergique”
(NMDA), dans lequel un abaissement central du
seuil de la toux entraîne une hyperexcitabilité
bronchique apparente. Cette toux maladive repose donc sur la pérennisation de l’amplification du mécanisme de la toux, accompagnée
d’une réorientation de la plasticité synaptique.
Neuf fois sur dix, ces toux chroniques postinfectieuses surviennent chez des femmes. Ce
mécanisme d’inégalité sexuelle a été étudié
chez les souris et les rates femelles : les estrogènes stimulent les domaines NR1 et NR2B du
récepteur NMDA (N-méthyl D-aspartate), ce qui
génère une plasticité synaptique, même chez
les souris femelles âgées. Ce rôle central du récepteur NMDA explique peut-être certains effets
antitussifs de l’amantadine (médicament antiviral spécifique de la grippe A, dont on connaît
bien, par ailleurs, les effets psychiatriques ou
hallucinogènes).
Il faut souligner que la grippe est une source importante, gravissime, coûteuse et évitable d’infections nosocomiales pouvant sévir dans n’importe quel service hospitalier, n’importe quand,
même en dehors des épidémies, et touchant des
patients de tous âges. Sa gravité est spécialement
dramatique chez les jeunes enfants, les personnes âgées et les immunodéficients.
A.-L.P.
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35
*DOSSIER PSII 49
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Pneumologie
Maladies de l’amiante
Essentiellement professionnelles
Dès 1900, l’amiante a fait son entrée dans l’industrie parce qu’ininflammable,
résistant à la chaleur et non conducteur d’électricité. Au début des années 1980,
son utilisation est réduite et de plus en plus contrôlée à cause des risques de
maladie que l’on soupçonne chez les travailleurs exposés aux fibres d’amiante. C’est
seulement en 1997 que son utilisation est interdite, à la suite de la mise en évidence
de ces risques.
le terme amiante sert à désigner une séde substances minérales naturelles cristalEliséesnriebref,
et fibreuses contenant de la silice. Endom-
ceptibles d’entraîner une diminution de la capacité respiratoire.
magés par le vieillissement, les chocs, les vibrations ou les mauvaises manipulations, les matériaux contenant de l’amiante peuvent libérer des
fibres d’amiante dans l’air dangereuses pour la
santé. Les effets pathogènes de l’amiante sont liés
au caractère indestructible des fibres, à leur dépôt dans le tissu pulmonaire, et à leur migration
facile vers l’enveloppe du poumon (la plèvre) et
vers le péritoine (enveloppe qui entoure la cavité
péritonéale). Plusieurs années après l’exposition
surviennent les pathologies spécifiques liées à
l’inhalation d’amiante : asbestose, atteintes non
cancéreuses de la plèvre, cancer du poumon et
mésothéliome.
Les cancers du poumon
Le risque de cancer bronchopulmonaire est d’autant plus élevé que l’exposition aux fibres
d’amiante a été importante.
Ces fibres altèrent les cellules de l’épithélium des
bronches et perturbent les phénomènes de division cellulaire, ce qui aboutit, dans certains cas,
avec un temps de latence de 10 à 20 ans, à une
transformation cancéreuse.
Ces cancers liés à l’amiante ne se distinguent pas
des autres cancers pulmonaires, il est donc difficile de chiffrer les cancers du poumon liés strictement à une exposition professionnelle à
l’amiante (selon l’INSERM, de 0,5 % à 15 %).
Il existe une synergie entre le tabac et l’amiante :
le risque de cancer bronchopulmonaire est nettement plus élevé chez les fumeurs exposés à
l’amiante.
L’asbestose
Décrite dès 1906, l’asbestose est une affection
pulmonaire non cancéreuse qui résulte d’une inhalation prolongée (plusieurs années) et intense
d’amiante. Le poumon “s’encrasse” et devient fibreux, ce qui entraîne une gêne respiratoire de
plus en plus importante. Le poumon perd progressivement son élasticité à cause d’un épaississement de la paroi des alvéoles pulmonaires qui
gêne les échanges gazeux, donc l’oxygénation du
sang. Au début, la maladie n’est détectable que
par la radiographie du thorax ou par l’exploration fonctionnelle respiratoire. Caractérisée par
un essoufflement, cette affection évolue vers une
insuffisance respiratoire chronique, qui peut être
mortelle.
Les atteintes bénignes de la plèvre
Les plus fréquentes sont les “plaques pleurales”,
très spécifiques de l’amiante, surtout si elles
sont bilatérales. D’autres atteintes bénignes de
la plèvre ont été décrites : épaississement de
ses feuillets (symphyse pleurale) ou épanchement entre ses deux feuillets (pleurésie), sus36
Professions Santé Infirmier Infirmière - No 49 - octobre 2003
Les mésothéliomes
Le mésothéliome est une tumeur cancéreuse qui
atteint la plèvre ou, plus rarement, le péritoine,
les autres localisations étant exceptionnelles.
La localisation pleurale est cinq fois plus fréquente que celle du péritoine. Pour la quasi-totalité de ces mésothéliomes, on retrouve une exposition professionnelle à l’amiante mais aussi une
exposition environnementale “naturelle” quand
existent des affleurements d’amiante dans le sol.
Par ailleurs, diverses études indiquent la possibilité d’un risque de mésothéliome associé à la
proximité d’une source industrielle d’amiante. Le
risque d’apparition de cette tumeur est étroitement lié à la durée de l’exposition, à l’âge, au niveau d’exposition, à la nature des fibres.
La maladie apparaît en moyenne entre 30 et
40 ans après le début de l’exposition. Elle est
mortelle et la plupart des patients meurent dans
l’année qui suit le diagnostic.
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En France, au début des années 1990, la fréquence estimée du mésothéliome était d’environ 600 cas par an. Il semble que, par rapport
aux autres pays industrialisés, cette incidence
soit relativement faible, ce qui s’explique par
une utilisation massive plus tardive de l’amiante
en France.
D’autres cancers ont été décrits mais sont plus
rares : larynx, péricarde, et une relation avec
l’amiante est discutée pour d’autres tumeurs
cancéreuses (tube digestif, appareil urinaire).
Le problème de la surveillance postprofessionnelle des personnes retraitées qui, au cours de
leur activité salariée, ont été exposées à des
agents cancérigènes est précisé par le décret du
26 mars 1993 et par son arrêté d’application du
28 février 1995. L’intéressé doit produire l’attestation d’exposition remplie par l’employeur
et par le médecin du travail.
Depuis le 1er janvier 1997, un décret a interdit la
fabrication, l’importation, la mise sur le marché
national, l’exportation, la détention en vue de la
vente, l’offre, la vente et la cession à quelque titre
que ce soit de toute variété de fibres d’amiante et
de tout produit en contenant.
A.-L.P.
Oxygénothérapie à domicile
Entrée sur les soins “lourds”
En France, plus de 100 000 personnes présentant une bronchopneumopathie chronique
obstructive (BPCO) relèvent d’une oxygénothérapie au long cours à domicile. La BPCO,
les maladies neuromusculaires ou neurologiques dégénératives, comme la sclérose
latérale amyotrophique (SLA), sont le plus souvent responsables d’une insuffisance
respiratoire nécessitant une oxygénothérapie.
n sont responsables également : la tuberculose, et, plus récemment, les apnées du
Esommeil
qui sont également soignées ainsi. La
ventilation artificielle à domicile (VAD) est obtenue par l’utilisation d’un respirateur avec embout buccal, masque nasal ou facial, ou canule
endotrachéale.
Indications
Après l’arrêt des polluants en cause, notamment
le tabac, pour pouvoir commencer l’oxygénothérapie, l’état du patient doit être stable, avec
une hypoxie PaO2 inférieure à 55 mmHg retrouvée sur deux mesures à trois semaines de
distance.
On choisira de préférence une oxygénothérapie de déambulation réalisée sur 15 heures,
à savoir 12 heures de nuit et 2 à 3 heures de
jour. L’objectif à atteindre est alors une saturation en O2 supérieure à 90 % et une PaO2 supérieure à 60 mmHg. La surveillance est au minimum bimensuelle au départ, fondée sur la
gazométrie, puis elle est effectuée trois à quatre
fois par an.
Cependant, il faut vérifier régulièrement, grâce
aux explorations fonctionnelles respiratoires
(EFR), que l’oxygénothérapie n’entraîne pas une
hypoventilation de manière réflexe.
Le suivi du malade à domicile par le personnel
médical est fondé sur la vérification de la tolérance cardiaque, la recherche de complications
de types encombrement, surinfection ou défaillance cardiaque.
Toute apparition ou réapparition de signes
d’insuffisance respiratoire doit faire rechercher un problème technique tel qu’un déréglage, une fuite ou un dysfonctionnement
du système. Il faut rechercher d’emblée un
problème de raccordement tel qu’une obstruction de la canule. Mais on doit aussi craindre
une complication clinique : pneumothorax,
sténose trachéale ou encore atélectasie sur
encombrement.
Le nursing infirmier portera sur la vérification
d’une alimentation équilibrée, notamment limitée en hydrates de carbone, accompagnée d’une
kinésithérapie respiratoire.
Les contrôles comporteront des radiographies
régulières des poumons, des bilans sanguins,
des EFR, des ECG, selon une fréquence à définir
en fonction de l’évolution de la maladie.
J.B.
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Pneumologie
Transplantation pulmonaire
Un dernier recours
Mise en place dans les années 1980 grâce aux progrès des techniques chirurgicale et
immunologique, en particulier l’arrivée de la ciclosporine, la transplantation pulmonaire fait partie de l’arsenal thérapeutique de l’insuffisance respiratoire grave.
lusieurs types de transplantation existent : la
transplantation monopulmonaire consiste, sur
Pthoracotomie,
à pratiquer l’exérèse du poumon atteint, remplacé par le greffon, sous circulation extracorporelle. Si la réimplantation des veines et artères pulmonaires est pratiquée, celle des artères
bronchiques, elle, n’est, en revanche, pas souvent
réalisable. La transplantation bipulmonaire se fait
par grande voie d’abord thoracique antérieure. Elle
consiste en fait en la succession de deux transplantations monopulmonaires. La transplantation bloc
cœur-poumons est beaucoup plus rare.
Indications, contre-indications
Solution extrême, la transplantation n’est indiquée
a fortiori que si toutes les autres solutions tentées
n’ont pas donné de résultats satisfaisants. Le sujet
receveur doit avoir une durée de vie inférieure à
18 mois, être motivé et informé des contraintes
postopératoires qui lui seront imposées. Il doit avoir
arrêté de fumer, il ne doit pas être alcoolique, il doit
présenter un état général assez bon et être psychiatriquement équilibré. Enfin, pour une transplantation cœur-poumons, il doit être âgé de moins de
55 ans, de moins de 60 pour un bipulmonaire, de
moins de 65 pour un monopulmonaire.
Se présentent également comme contre-indications à la greffe : une corticothérapie au long cours,
une tumeur maligne, une ostéoporose, une coronaropathie, une hépatite B, une infection chronique, du moins tant qu’elle n’est pas traitée.
Les indications de la greffe tenant compte des
contre-indications sont en premier lieu un emphysème : c’est l’indication principale des candidats à la transplantation, lorsque leur VEMS devient
inférieur à 30 %. Mais il y a aussi la fibrose pulmonaire lorsque celle-ci rend les malades oxygénodépendants. Une transplantation devient ainsi
urgente lorsque le VEMS devient inférieur à 50 %.
La mucoviscidose est une troisième indication
lorsqu’apparaissent un VEMS inférieur à 30 %, une
hypercapnie et une hypoxémie sévères.
Surveillance postopératoire
Un traitement médical associant cortico- et immunothérapie commence en postopératoire.
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Professions Santé Infirmier Infirmière - No 49 - octobre 2003
L’œdème de réimplantation est possible, résultant de la souffrance du greffon, fonction de la
période d’ischémie qu’il a subie. Il demande une
surveillance clinique et biologique avant de décider de l’extubation.
Favorisées elles aussi par les phases ischémiques
peropératoires, les infections bactériennes sont fréquentes. Elles sont également causées ou aggravées
par le contexte hospitalier (infections nosocomiales)
et par les traitements immunodépresseurs. Les infections virales à herpès virus, entre autres, mais
aussi à cytomégalovirus sont à craindre également.
En dehors de ces complications pouvant survenir dès le premier mois, sinon la première année,
le rejet aigu se traduit histologiquement par un
infiltrat lymphocytaire périvasculaire.
Cause principale d’échec des transplantations, le
rejet aigu de greffe survient principalement au
cours des quatre premiers mois suivant la transplantation. C’est une réaction immunitaire essentiellement cellulaire, faisant intervenir les
lymphocytes T.
L’activation des lymphocytes T est le résultat de
quatre étapes successives :
– l’étape 1 ou activation calcium-dépendante ;
– l’étape 2 ou de costimulation ;
– les phases 3 et 4 : l’IL-2 active la mitose et la prolifération clonale, le tout aboutissant au rejet aigu
de la greffe.
Le mode d’action des différents immunosuppresseurs suit plusieurs phases :
– l’étape 1 est bloquée par la ciclosporine et le
tacrolimus ;
– la phase 3 est bloquée par les Mab qui inhibent
la fixation de l’IL-2 sur les lymphocytes.
En bloquant les mitoses, plus spécialement les
acides nucléiques, l’azathioprine, le mycophénolate mofétil et le cyclophosphamide exercent leur
action immunosuppressive.
Les premiers signes cliniques de rejet aigu à apparaître sont une fièvre, une hypoxie, une altération
de la fonction respiratoire avec un infiltrat pulmonaire radiologique. Toutes les modifications respiratoires évidentes sur les EFR doivent faire partie de
la surveillance usuelle.
J.B.
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