Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume II, n°4, août 1998
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Dossier
insensibilité aux androgènes (IA)
représente plus de la moitié des cas
de pseudo-hermaphrodisme masculin
(PHM) (1), et relève d’une anomalie de
l’action cellulaire des androgènes au niveau
des tissus cibles. Dans sa forme complète
(ICA), le diagnostic repose sur les données
cliniques, biologiques et génétiques. Nous
avions souligné, il y a 10 ans (2), l’hétéro-
généité clinique et biochimique de l’insen-
sibilité partielle aux androgènes (IPA) : de
grands espoirs se sont alors portés vers la
génétique moléculaire, dont les progrès
considérables ces dernières années lais-
saient espérer une réponse aux problèmes
d’ordre diagnostique, physiopathologique,
thérapeutique et pronostique que cette
situation complexe soulève.
Avant d’aborder l’intérêt et les limites de la
génétique moléculaire dans la prise en
charge d’une insensibilité aux androgènes
en 1998, nous rappellerons brièvement les
conceptions actuelles de la structure du
récepteur des androgènes (RcA), du méca-
nisme d’action des androgènes, les anoma-
lies susceptibles d’entraîner une IA et les
méthodes actuelles d’analyse d’une IA.
L’action des androgènes (testostérone, T,
ou dihydrotestostérone, DHT) s’exerce via
un récepteur commun, le récepteur des
androgènes (RcA), facteur de transcription
androgéno-régulé, codé par un gène situé
sur le chromosome X en position q11-12.
Structure
Le RcA appartient à la super-famille des
récepteurs nucléaires, qui regroupe (3) :
– les récepteurs des hormones stéroïdes,
des androgènes : RcAαet RcAß (une
forme tronquée décrite récemment par Gao
et coll. [4], dont le rôle physiologique reste
à préciser), récepteur des glucocorticoïdes
(GRαet GRß), des minéralocorticoïdes
(MR), de la progestérone (PRαet PRß) et
des estrogènes (ERαet ERß) ;
Insensibilités aux androgènes :
génétique moléculaire
Ch. Sultan* ** ***, N. Poujol** ***, S. Lumbroso** ***, B. Terouanne***, V. Georget***,
Ph. Nirde***, B. Tahiri***, F. Audran**, M. Feki* **, Ch. Belon**, R. Dumas*
* Unité d’endocrinologie, gynécologie, pédiatrique, Pédiatrie 1, hôpital Arnaud-de-Villeneuve,
Montpellier.
** Unité de biochimie endocrinienne du développement et de la reproduction, hôpital Lapeyronie,
Montpellier.
*** Inserm U.439, pathologie moléculaire des récepteurs nucléaires, Montpellier.
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L’insensibilité aux androgènes
représente plus de la moitié des cas de
pseudo-hermaphrodisme masculin.
✎
Le diagnostic d’insensibilité com-
plète aux androgènes repose sur des
données cliniques (aménorrhée,
absence de pilosité pubienne, déve-
loppement volumineux des seins),
biologiques (testostérone et LH plas-
matique élevées) et génétiques
(mutation du récepteur des andro-
gènes ou RcA) chez un sujet XY.
✎
L’expression phénotypique en est
très variable, allant d’un phénotype
féminin avec organe péno-clitori-
dien à un phénotype masculin où la
stérilité isolée constitue le principal
signe d’appel de l’insensibilité par-
tielle aux androgènes (IPA).
✎
L’évaluation biochimique de la
concentration en sites récepteurs des
androgènes au niveau des organes
génitaux externes ne représente qu’une
approche indirecte du diagnostic.
✎
Environ 200 mutations du gène
du RcA ont été rapportées dans le
monde.
✎
Les mutations du RcA se répar-
tissent sur l’ensemble du gène.
✎
Il n’existe pas de corrélation
stricte entre une mutation donnée et
un phénotype particulier.
✎
Devant une IPA néonatale, le
problème principal est celui du choix
du sexe d’orientation.
✎
La prédiction du phénotype
pubertaire devra tenir compte du
type de mutation, du caractère
conservé de l’acide aminé, du
caractère conservatif de la substi-
tution.
✎
Les bases moléculaires de la
variabilité phénotypique d’une
même mutation relèvent d’une
modulation en amont ou en aval des
androgènes, par l’intermédiaire de
facteurs activateurs-inhibiteurs de la
transcription.
L’