E N U N E RÉFÉRENCE Impact of valve prosthesis-patient mismatch on short-term mortality after aortic valve replacement. Blais C, Dumesnil JG, Baillot R, Simard S, Doyle D, Pibarot P ❏ Circulation 2003 ; 108 : 983-8. R É F É R E N C E . . . Remplacement valvulaire LE FOND Il s’agit d’une étude canadienne appréciant la survie périopératoire (30 jours) de 1 266 patients après remplacement valvulaire aortique en fonction de l’existence d’un mismatch. L’évaluation du mismatch (inadéquation entre la surface effective de la valve prothétique aortique et le gabarit du patient) distingue le mismatch de moyenne importance, avec une surface valvulaire indexée entre 0,85 cm2/m2 et 0,65 cm2/m2 (447 patients, soit 36 %), et le mismatch sévère, avec une surface valvulaire indexée ≤ 0,65 cm2/m2 (27 patients, soit 2 %). Les patients présentant un mismatch sont plus âgés, plus souvent des femmes, et, comme on pouvait s’y attendre, ils sont plus fréquemment porteurs de prothèses valvulaires de petite taille ≤ 21 mm. Ils ont aussi plus souvent une coronaropathie, un diabète, une hypertension artérielle, des interventions cardiaques réalisées en urgence ou associant des pontages aortocoronaires. La mortalité globale à 30 jours a été de 4,6 %, incluant des chiffres de mortalité de 3 % pour les patients sans mismatch, de 6 % en présence d’un mismatch de moyenne importance, et de 25,9 % en présence d’un mismatch sévère. Les 7 patients décédés dans le groupe mismatch sévère sont tous morts de causes cardiaques : 5 bas débits et 2 infarctus périopératoires. En analyse multivariée, le mismatch reste un facteur prédictif indépendant de décès à 30 jours (p = 0,003), à côté du caractère urgent de l’intervention, d’un temps de CEC > 120 minutes, d’une dysfonction ventriculaire gauche systolique préopératoire (fraction d’éjection : FEVG < 40 %), d’une insuffisance La Lettre du Cardiologue - n° 371 - janvier 2004 aortique et mismatch : impact sur la mortalité périopératoire respiratoire chronique, ou d’une endocardite active. Il faut noter qu’en présence d’un mismatch, la mortalité est franchement augmentée en cas de FEVG < 40 % : le risque relatif de mortalité passe alors de 1,8 (FEVG ≥ 40 %) à 7,1 (FEVG < 40 %) pour les mismatchs de moyenne importance, et de 11,3 à 77,1 pour les mismatchs sévères. COMMENTAIRES Le phénomène de mismatch (trop petit calibre de valve prothétique pour la corpulence du patient) a été décrit en 1978 par S.H. Rahimtoola. L’étude analysée démontre sa nocivité quant à la survie périopératoire (30 jours) après remplacement valvulaire aortique. Si les patients présentant un mismatch ont des caractéristiques de base plus péjoratives, le mismatch demeure un facteur prédictif indépendant de décès au terme de l’analyse multivariée. L’association à une dysfonction ventriculaire gauche systolique amplifie l’impact délétère du mismatch sur la survie, avec un risque relatif de mortalité considérable en présence d’une surface valvulaire effective ≤ 0,65 cm2/m2. Ces constatations nous rappellent les observations de H.M. Connolly et al. (Circulation 2000) concernant la chirurgie des rétrécissements aortiques serrés en bas débit (FEVG ≤ 35 %), où le seul facteur prédictif de mortalité périopératoire en analyse multivariée était la petite taille de la prothèse aortique. Les auteurs proposent une stratégie préventive qui consiste, avant la chirurgie cardiaque, à calculer la surface de valve minimale pour éviter le mismatch (surface corporelle x 0,85 cm2/m2). En fonction de cette donnée, le chirurgien peut s’orienter vers un type de valve prothétique de surface adaptée (éventuellement, par exemple, valve stentless pour gagner “une pointure”), ou envisager la nécessité d’une chirurgie d’élargissement de l’anneau aortique pour pouvoir implanter une valve de plus grand calibre. Une telle stratégie a été utilisée par L.J. Castro et al. (Ann Thorac Surg 2002) avec une incidence de mismatch à 2,5 % (contre une prévision de 17 %) sans majoration sensible de la mortalité opératoire liée au geste associé d’élargissement de l’anneau aortique. BIBLIOGRAPHIE Outre la description princeps de S.H. Rahimtoola (Circulation 1978 ; 58 : 20-4) et l’article de mise au point de P. Pibarot et al. (J Am Coll Cardiol 2000 ; 36 : 1131-41), on notera des études qui se sont intéressées à l’impact pronostique du mismatch : V. Rao et al. (Circulation 2000 ; 102 : III5-III9), A.D. Milano et al. (Ann Thorac Surg 2002 ; 73 : 37-43), et le travail récent de L.J. Castro et al., tenant compte de la stratégie préventive (Ann Thorac Surg 2002 ; 74 : 31-6). MOTS-CLÉS Valvulopathie - Remplacement valvulaire aortique - Mismatch - Mortalité. TIRÉS À PART Dr Pibarot, Quebec Heart Institute, 2725 Chemin Sainte-Foy, Sainte-Foy G1V 4G5, Québec, Canada. E-mail : [email protected] Dr C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil 19