Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume IV, n° 1,février 2000 27
saurait justifier. La première réponse doit
être un effort systématique pour revenir, de
manière cohérente et équilibrée, à un strict
respect du règlement intérieur. L’admission
ou même l’entrée comme visiteur dans un
établissement de soins n’est pas un fait
anodin. L’hôpital est un lieu sacré où sont
protégées les valeurs les plus essentielles
que sont le respect de la personne, le pro-
grès scientifique, la protection du plus
faible, un lieu qui est le symbole de l’enga-
gement d’une nation de défendre la santé et
en définitive la vie.
S’il est légitime d’exiger des personnels un
haut degré de tolérance pour tout ce qui
concerne la mise en œuvre de ces objectifs,
rien ne justifie la moindre tolérance dans la
gestion de l’ordre. Cela commence par
nombre d’attentions ponctuelles témoignant
du respect de l’autre, et par la nécessité de
mettre fin à un certain nombre d’abus tolé-
rés. S’il ne fallait citer que deux exemples,
on retiendrait l’interdiction de fumer et cer-
tains excès dans la pratique des visites.
Le directeur d’établissement est respon-
sable de l’application de l’ordre et du
règlement intérieur. Tous les organes de
concertation interne à l’hôpital doivent être
mobilisés pour témoigner de l’effort d’en-
semble de parvenir au respect de la règle.
Mais certains faits dépassent la notion
d’ordre interne et justifient le recours aux
services de police.
Le respect des procédures
Les établissements, qui ne peuvent ignorer
le phénomène d’insécurité, doivent adapter
leurs procédures en distinguant le bon
fonctionnement du service, qui renvoie aux
responsabilités du cadre, du médecin ou du
personnel paramédical, de l’ordre interne,
qui relève des services administratifs et des
gardes de l’hôpital.
Bien sûr, doit être réservé le cas de l’urgen-
ce vraie, dans laquelle toute personne au
sein de l’hôpital doit prendre les mesures
adaptées : maîtrise d’un agité, retrait d’une
arme, placement en chambre d’isolement.
En dehors de ces situations, le premier
recours doit être une organisation interne
efficace. Il ne doit exister aucune réserve
à joindre l’administratif de garde, et à établir
ensuite des rapports d’incidents transmis
aux autorités et aux organes de concertation.
En cas de troubles graves, et passée la
phase d’extrême urgence, doit être sollicité
le recours aux services de police. Aucun
personnel soignant ou administratif ne dis-
pose des compétences légales pour imposer
une fouille, qu’il s’agisse d’une fouille à
corps ou de celle d’un vestiaire. Cette tâche
relève des services de police. En revanche,
l’autorité administrative dans l’établisse-
ment est à même de demander à une per-
sonne d’ouvrir son sac ou son vestiaire, de
montrer qu’elle n’est pas porteuse sur elle-
même d’une arme, sauf à tirer les ensei-
gnements d’un éventuel refus qui peut
devenir un motif d’exclusion.
Savoir porter plainte
L’équipe soignante doit tolérer un certain
nombre de débordements qui sont peu ou
prou liés à la maladie. Mais dès lors que le
seuil de l’admissible est dépassé, la réponse
doit être le droit commun, à savoir l’engage-
ment de poursuites, le cas échéant sur le
plan pénal. Tout membre du personnel, de sa
propre initiative, est en mesure de porter
plainte contre un patient ou un visiteur qui
l’aurait agressé. Cette plainte est entière-
ment légitime et l’expérience établit qu’elle
est très bien reçue par les tribunaux.
Porter plainte contre un patient est toutefois
un fait grave qui suppose des critères objec-
tifs d’appréciation et une concertation préa-
lable avec l’administration et les services de
police. Sur ces questions, les établissements
connaissent souvent une véritable culture de
l’impunité qui n’a pas de sens. Renoncer à
porter plainte contre un patient auteur de
faits délictueux, c’est le rejeter en dehors de
la communauté des gens responsables, ceux
que l’on appelle les citoyens. Comment
peut-on établir une relation confiante et res-
pectueuse comme doit l’être la relation de
soin sur une base aussi fausse ? Porter plain-
te, c’est reconnaître le lien citoyen. Porter
plainte ne veut pas dire exclusion, mais
d’abord reconnaissance de responsabilité.
Rappelons enfin la règle ancienne selon
laquelle l’administration doit la protection à
ses agents. L’article 11 du statut général de
la fonction publique est clair : “La collecti-
vité publique est tenue de protéger les fonc-
tionnaires contre les menaces, violences,
voies de fait, injures, diffamations ou
outrages dont ils pourraient être victimes à
l’occasion de leur fonction, et de réparer, le
cas échéant, le préjudice qui en est résulté”.
Ainsi, si le fonctionnaire peut porter plainte,
la collectivité peut le faire à sa place. Elle
dispose d’une action directe qu’elle peut
exercer au besoin par voie de constitution de
partie civile devant la juridiction pénale.
Parmi ces pratiques inacceptables l’une
d’entre elles, trop souvent rapportée, n’a
pas fait les gorges chaudes de la presse : il
s’agit des patients refusant les services de
tel ou tel soignant sous prétexte de couleur
de peau. Il est inimaginable de se plier
devant de tels propos. La réponse doit être
immédiate et exemplaire : une démarche
sur le plan interne, le directeur ou son délé-
gué imposant le retrait du propos, la pré-
sentation d’excuses, ou l’exclusion immé-
diate de l’établissement. Il peut y avoir en
outre plainte pénale. “Loi” signifie “civili-
sation”. À bon entendeur, salut ! ■