Dossier thématique
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Figure 3.
Stratégie thérapeutique médicamenteuse proposée
pour l’occlusion intestinale.
*Traitement initial au pousse-seringue électrique (PSE) [les trois produits
peuvent être mélangés] :
– morphine 30 mg/j;
– butyl-bromure de scopolamine 60 mg/j;
– halopéridol 5 mg/j.
* En cas d’inefficacité sur la douleur:
1. Augmenter la posologie de morphine par titration ;
2. En cas de coliques intestinales:
° augmenter le butyl-bromure de scopolamine (maximum 380 mg/j) ;
° voire introduire l’octréotide s.c. au PSE à 0,3 mg/j.
* En cas d’inefficacité sur les nausées et vomissements:
1. Augmenter les posologies de:
– butyl-bromure de scopolamine (maximum 380 mg/j),
– halopéridol (maximum 15 mg/j).
2. Associer ranitidine (i.m., i.v.) 150 mg/j ;
3. En cas d’échec, après 5 jours: octréotide par voie s.c. au PSE
commencer par 0,3 mg/j et titrer jusqu’à 0,6 mg/j maximum;
4. En cas d’échec : pose provisoire d’une sonde nasogastrique en
aspiration, dans l’attente de la réalisation rapide d’une gastrostomie
de décharge.
La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. XI - n°2 - mars-avril 2008
réduction des vomissements à un épisode ou moins par jour. Sur
le plan diététique, les aliments froids et lisses en petites quantités
sont mieux supportés, et il faut éviter les odeurs alimentaires trop
envahissantes. Certains facteurs associés tels qu’hypercalcémie,
insuffisance rénale, ascite importante, infection, hypertension
intracrânienne, douleur ou anxiété doivent être recherchés et
traités. L’association de plusieurs molécules aux modes d’action
différents est souvent nécessaire. Les molécules les plus intéres-
santes sont l’halopéridol, la lévomépromazine, le métoclopra-
mide, le butyl-bromure de scopolamine et l’octréotide (2).
Prokinétiques : le métoclopramide (Primpéran
®
) stimule la
motricité gastrique et intestinale. Il faut l’éviter en cas d’occlu-
sion complète, car il peut induire des coliques intestinales. La
posologie optimale est atteinte par titration (60 à 240 mg/j), soit
par injections toutes les 4 heures, soit, mieux, par perfusion
continue à l’aide d’une pompe.
Neuroleptiques : l’halopéridol (Haldol
®
) a un effet anti-
émétique puissant. Il est utilisé par voie sous-cutanée à la dose
de 5 à 15 mg/j.
Antisécrétoires : les antisécrétoires, qu’il s’agisse du butyl-
bromure de scopolamine ou de l’octréotide, ont un effet anti-
émétique. L’intérêt de ces deux molécules est leur action mixte,
antiémétique et antalgique. Le butyl-bromure de scopolamine
est utilisé à la dose de 40 à 120 mg/j. L’octréotide est admi-
nistré par voie sous-cutanée ou intraveineuse, soit par injections
toutes les 12 heures, soit par perfusion continue. La dose initiale
est de 0,3 mg/j; la posologie est augmentée progressivement
jusqu’à l’obtention d’un contrôle satisfaisant des symptômes
(8). Certains optent pour une stratégie inverse, avec une dose
initiale de 0,6 mg/j suivie d’une diminution progressive de la
posologie à la recherche de la dose minimale efficace. La dose
–
–
–
habituellement nécessaire s’élève entre 0,15 et 0,6 mg/j. Des
doses plus importantes n’apportent pas de bénéfice (13). Le
contrôle des vomissements est rapide, satisfaisant ou complet
dans 75% à 100 % des cas. Il permet l’ablation de la sonde naso-
gastrique chez deux patients sur trois. Il peut être utilisé seul ou
en association avec le traitement antiémétique conventionnel,
éventuellement mélangé dans le même pousse-seringue (8).
Deux essais randomisés contrôlés ont montré que l’octréotide
était significativement plus efficace que le butyl-bromure de
scopolamine pour le contrôle des nausées et des vomissements
(11, 14). Lorsque les vomissements ne sont pas contrôlés par
l’une de ces deux molécules, on peut les associer, puisque leurs
mécanismes d’action sont différents. La place de l’octréotide
reste à définir: première ligne ou deuxième intention lorsque le
traitement antiémétique conventionnel échoue ou occasionne
des effets indésirables gênants? Deux essais contrôlés rando-
misés sont en cours pour l’évaluation des dérivés retards de la
somatostatine dans cette indication.
Les antihistaminiques H2 induisent une réduction du volume
de sécrétion gastrique supérieure ou égale à celle causée par
les inhibiteurs de la pompe à protons. La ranitidine peut être
administrée par voie intramusculaire ou intraveineuse à la dose
quotidienne de 150 mg (2).
Corticoïdes : l’efficacité des corticoïdes n’est pas prouvée. Leur
usage repose sur des études non contrôlées qui ne permettent
de conclure ni sur leur efficacité ni sur leur posologie optimale.
Deux essais contrôlés n’ont pas montré de différence significa-
tive entre corticoïdes et placebo (15, 16). Dans ces essais, une
résolution spontanée de l’occlusion survenait dans 33 % à 60%
des cas sous placebo. Les posologies recommandées sont très
variables, de 8 à 100 mg/j de dexaméthasone, et de 50 mg/j de
prednisone à 1 000 mg/j de méthyl-prednisolone. On peut les
utiliser à titre de test thérapeutique de courte durée (5 jours)
en pratique à la dose de 6 à 16 mg/j de dexaméthasone ou de 1
à 2 mg/kg/j de méthyl-prednisolone (17).
Laxatifs: les laxatifs peuvent être utiles en cas d’occlusion
incomplète sur obstacle colique ou rectal. Les macrogols, le
docusate sodique, l’huile de paraffine et l’hydroxyde de magné-
sium sont les laxatifs recommandés par les équipes spécialisées
en soins palliatifs. Les laxatifs stimulants doivent être évités, car
ils risquent d’induire des coliques intestinales (8).
Aspiration nasogastrique
L’aspiration nasogastrique est inadaptée en fin de vie. Elle est
source d’un inconfort important et de complications. Elle ne doit
être utilisée que pour de courtes durées, inférieures à 3 jours,
dans deux situations:
Lors de l’installation de l’occlusion : l’aspiration nasogas-
trique entraîne la levée, le plus souvent transitoire, de l’occlusion
dans moins de 20% des cas (8). Lorsque l’occlusion se lève sous
simple aspiration nasogastrique, le délai est habituellement
inférieur à 3 jours. Il ne faut pas prolonger l’aspiration au-delà
de 3 jours. Lorsqu’un traitement désobstructif est exclu d’emblée,
il ne faut pas poser d’aspiration nasogastrique, mais instaurer
le traitement médicamenteux des symptômes.
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