Les matrices Dans ce chapitre, K désigne à nouveau le corps des réels ou celui des complexes. 1 Ensembles de matrices 1.1 1.1.1 Mn,p (K) Matrices à n lignes et p colonnes On appelle matrice à n lignes et p colonnes à coefficients dans K ou matrice de format (n,p) tout tableau rectangulaire noté a1,1 a1,2 · · · a1,p−1 a1,p a a · · · a a 2,1 2,2 2,p−1 2,p M = (ai,j )16i6n = . . . . . . . . 16j6p . . . . an,1 an,2 · · · an,p−1 an,p . Cette notation signifie que, pour tout couple (i,j) ∈ [[1,n]] × [[1,p]], le nombre ai,j est à l’intersection de la ligne i et de la colonne j. Le couple d’indice (i,j) peut être remplacé par n’importe quel autre couple ; ainsi : M = (ai,j )16i6n = (aj,k )16j6n = (ak,` )16k6n 16j6p 16k6p 16`6p L’ensemble des matrices à n lignes et p colonnes est noté Mn,p (K). 1.1.2 Cas particuliers : lignes, colonnes Les matrices à 1 ligne et p colonnes , c’est-à-dire les éléments de M1,p (K) sont appelées matrices lignes à p termes. Les matrices à n lignes et 1 colonne, c’est-à-dire les éléments de Mn,1 (K) sont appelées matrices colonnes à n termes. On identifie traditionnellement (pour des raisons liées au sens d’écriture de gauche à droite) Mn,1 (K) à Kn . 1.1.3 Matrices carrées On appelle matrices carrées d’ordre n les matrices à n lignes et n colonnes c’est-à-dire les éléments de Mn,n (K). Pour plus de simplicité, l’ensemble des matrices carrées d’ordre n est noté Mn (K) au lieu de Mn,n (K). Si A = (ai,j ) 16i6n est une matrice carrée, les termes ai,i , 1 6 i 6 n sont appelés termes diagonaux et les termes 16j6n ai,j tels que j > i sont dits strictement au-dessus de la diagonale et ceux tels que i > j sont dits strictement en-dessous de la diagonale. 1.1.4 Matrices diagonales, matrices triangulaires On appelle matrice diagonale toute matrice carrée dont les termes non diagonaux sont nuls. On appelle matrice triangulaire supérieure toute matrice carrée dont les termes strictement en-dessous de la diagonale sont nuls. On appelle matrice triangulaire supérieure stricte toute matrice carrée dont les termes en-dessous de la diagonale sont nuls y compris ceux de la diagonale. On définit de même les matrices triangulaires inférieures et inférieures strictes. 1.2 1.2.1 Opérations Combinaisons linéaires Soient A = (ai,j )16i6n et B = (bi,j )16i6n deux matrices de même format (n,p). 16j6p 16j6p 1 La somme A + B est la matrice (ai,j + bi,j )16i6n ; cela signifie que chaque terme de A + B est la somme des termes 16j6p correspondants de A et de B. Pour λ ∈ K, λA est la matrice (λai,j )16i6n ; tous les coefficients sont multipliés par λ. 16j6p Dès lors, avec deux coefficients λ, µ, on peut définir la combinaison linéaire λA + µB = (λai,j + µbi,j )16i6n . 16j6p Étant donnée une famille (A1 , . . . ,Am ) de matrices de même format (n,p) et une famille (λ1 , . . . ,λm ) d’éléments m X de K, on définit de proche en proche la combinaison linéaire λ k Ak . k=1 Les règles de calcul sur les sommes sont les mêmes que pour les sommes de réels ou de complexes. 1.2.2 Produit • Produit d’une ligne par une colonne b1 .. Étant données une ligne à n termes L = (a1 , . . . ,an ) et une colonne à n termes aussi C = . . bn n X Le produit LC est, par définition, le nombre LC = aj bj . j=1 Exercice 1 Établir la bilinéarité de ce produit c’est-à-dire : ∀L, L0 ∈ M1,n (K), ∀C, C 0 ∈ Mn,1 (K), ∀(λ,λ0 ) ∈ K2 ∗ (λL + λ0 L0 )C = λLC + λ0 L0 C ∗ L(λC + λ0 C 0 ) = λLC + λ0 LC 0 • On se donne deux matrices A et B telles qu’il soit possible de faire le produit des lignes de A par les colonnes de B c’est-à-dire que le deuxième nombre du format de A égale le premier nombre du format de B. Soient donc m, n, p trois entiers strictement positifs et deux matrices A = (ai,j )16i6m ∈ Mm,n (K) et B = (bj,k )16j6n ∈ Mn,p (K) (Au passage, observer le choix des indices). 16j6n 16k6p def On forme alors la matrice C = (ci,k )16i6m = AB telle que, pour tout couple (i,k) ∈ [[1,m]] × [[1,p]], le terme 16k6p ci,k à l’intersection de la i-ème ligne et de la k-ème colonne est le produit de la i-ème ligne de A par la k-ème colonne de B. n X Autrement dit, pour tout couple (i,k) ∈ [[1,m]] × [[1,p]], ci,k = ai,j bj,k . j=1 En S.I, on adopte la présentation ci-dessous : colonne j ligne i→ .. . ai,1 · · · .. . .. . ai,n .. . ↓ · · · b1,k · · · .. . . . . · · · bn,k · · · .. . · · · ci,k • Produit d’une matrice par une colonne. On se donne une matrice M = (ai,j )16i6n 16j6p x1 .. ∈ Mn,p (K) et une colonne X = ∈ Mp,1 (K). . xp 2 Si on désigne par C1 , . . . ,Cp les colonnes de M alors, on observe que M X = p X x j Cj . j=1 L1 De la même façon, si L1 , . . . ,Ln sont les lignes de M de sorte qu’on puisse écrire M = ... et si L est la Ln n X ligne L = (λ1 , . . . ,λn ) ∈ M1,n (K) alors LM = λ i Li . i=1 • Produit comme famille de colonnes Soient A ∈ Mm,n (K) et B ∈ Mn,p (K). On note C1 , . . . ,Cp les colonnes de B alors les colonnes de AB sont AC1 , . . . ,ACp de sorte qu’on peut écrire : AB = A(C1 , . . . ,Cp ) = (AC1 , . . . ,ACp ). 1.2.3 Propriétés L’addition des matrices de même format est : ∗ Associative : ∀A, B, C ∈ Mn,p (K), (A + B) + C = A + (B + C) ∗ Commutative : ∀A, B ∈ Mn,p (K), A + B = B + A ∗ Elle admet un élément neutre : la matrice nulle notée 0 (attention, ce n’est pas ici le nombre 0 mais bien un tableau de zéros) dont tous les termes sont des zéros. ∀A ∈ Mn,p (K), 0 + M = M + 0 = M ∗ Tout élément admet un opposé : si A = (ai,j )16i6n , alors −A = (−ai,j )16i6n 16j6p 16j6p Avec, en plus, le produit par les scalaires, on a : ∗ ∀A, B ∈ Mn,p (K), ∀λ ∈ K, λ(A + B) = λA + λB ∗ ∀A ∈ Mn,p (K), ∀(λ,µ) ∈ K2 , (λ + µ)A = λA + µA. ∗ ∀A ∈ Mn,p (K), ∀(λ,µ) ∈ K2 , λ(µA) = (λµ)A ∗ ∀A ∈ Mn,p (K), 1.A = A. Prenons en compte le produit des matrices. ∗ Le produit est bilinéaire : ∀A, A0 ∈ Mm,n (K), ∀B, B 0 ∈ Mn,p (K), ∀λ, λ0 ∈ K: (λA + λ0 A0 )B = λAB + λ0 A0 B A(λB + λ0 B 0 ) = λAB + λ0 AB 0 La démonstration se fait en appliquant la bilinéarité sur chaque coefficient. ∗ L’associativité ∀A ∈ Mm,n (K), ∀B ∈ Mn,p (K), ∀C ∈ Mp,q (K), (AB)C = A(BC) Démonstration de l’associativité du produit matriciel. x1 .. Montrons d’abord que, pour tout A ∈ Mm,n (K), B ∈ Mn,p (K) et X = . ∈ Mp,1 (K), on a : xp (AB)X = A(BX). Notons B1 , . . . ,Bp les colonnes de B. On sait que AB = (AB1 , . . . ,ABp ). On a alors BX = A(BX) = p X b X xk Bk d’où k=1 xk ABk = (AB)X. k=1 On pose ensuite C = (C1 , . . . Cq ) ∈ Mp,q (K)0 et on a : (AB)C = ((AB)C1 , . . . ,(AB)Cq ) = (A(BC1 ), . . . ,A(BCq )) = A × (BC1 , . . . ,BCq ) = A × (BC). 3 C.Q.F.D. Exercice 2 Soient M ∈ Mm,n (K) et N ∈ Mp,q (K). a) À quelles conditions sur les entiers m, n, p, q, les produits M N et N M sont-ils définis? b) Les conditions précédentes étant réalisées, à quelle condition supplémentaire, M N et N M sont-elles de même format? c) Les conditions précédentes étant toutes réalisées, avec m > 2, trouver un contre-exemple où, bien que M N et N M soient définies et de même format, ces deux matrices sont différentes. 1 0 0 0 1 0 . . . . . . . .. ∗ La matrice unité d’ordre n désigne la matrice carrée In = .. .. . . 0 0 0 0 ··· où δi,j est le symbole de Kronecker qui vaut 1 quand i = j et 0 sinon. La matrice unité vérifie : ∀M ∈ Mn,p (K), In M = M Ip = M . ··· .. . .. . 0 0 0 0 .. . .. . . . .. . . 1 0 0 1 = (δi,j ) 16i6n 16j6n Exercice 3 1. Soit (α1 , . . . ,αn ) ∈ Kn . Pour tout i de 1 à n, que vaut n X δi,j αj ? j=1 Indication : On pourra observer que la plupart des termes de la somme sont nuls. 2. On pose M = (mi,j )16i6m , In = (δj,k ) 16j6n et M 0 = M In = (m0i,k )16i6m . 16j6n 16k6n 16k6n Pour tout couple (i,k) ∈ [[1,m]] × [[1,n]], exprimer m0i,k sous forme d’une somme puis réduire en utilisant la question précédente. 3. Conclure pour M In . 4. Démontrer de même que Im M = M . 1.3 1.3.1 Cas particulier des matrices carrées Mn (K) On rappelle que Mn (K) désigne l’ensemble des matrices carrée d’ordre n. Non seulement l’addition y est une loi de composition interne (la somme de deux matrices carrées d’ordre n en est une) mais le produit lui-même est aussi une loi de composition interne car le produit de deux matrices carrées d’ordre n est une matrice carrée d’ordre n. Ce produit vérifie les propriétés vues plus haut mais on sera vigilant sur le fait qu’il n’est pas commutatif. 1.3.2 Puissances d’une matrice carrée D’après ce qui précède, pour toute matrice A et tout entier naturel k, on peut définir Ak par A0 = In , A1 = A et Ak = A · · × A}. | × ·{z k termes On vérifie facilement que ∀h, k ∈ N, ∀A ∈ Mn (K), Ah × Ak = Ah+k , (Ah )k = Ahk . 1.3.3 Formule du binôme de Newton et formule de Bernoulli Si A et B sont deux matrices carrées d’ordre n qui ne commutent pas c’est-à-dire telles que AB 6= BA, alors (A + B)2 = (A + B)(A + B) = A2 + AB + BA + B 2 6= A2 + 2AB + B 2 . On voit ainsi que la formule du binôme de Newton n’a généralement pas lieu dans Mn (K). Il faut faire l’hypothèse supplémentaire que A et B commutent c’est-à-dire AB = BA. 4 Exercice 4 Soient A et B deux matrices de Mn (K) qui commutent. Montrer par récurrence que A commute avec toutes les puissances de B et vice-versa puis que ∀k ∈ N, (AB)k = Ak B k . On peut alors énoncer la formule du binôme de Newton pour les matrices : Soient A et B deux matrices carrées d’ordre n qui commutent. Pour tout entier p > 0 on a : p p X X p p k p−k p Ap−k B k A B = (A + B) = k k k=0 k=0 La démonstration est la même que dans le cas des nombres complexes. Sous les mêmes hypothèses (AB = BA), on a ∀p > 1, An − Bp = (A − B) p−1 X k A B p−1−k = (A − B) k=0 1.4 1.4.1 p−1 X Ap−1−k B k k=0 Calcul sur les matrices triangulaires ou diagonales Les matrices diagonales λ1 0 0 ··· 0 0 .. 0 λ 0 . 2 . . .. .. .. . . . . . . . n Pour (λ1 , . . . ,λn ) ∈ K , on note Diag(λ1 , . . . ,λn ) la matrice = (δi,j λi ) 16i6n . . . . . . 16j6n . . . . . . . . . . 0 0 0 λn−1 0 0 0 ··· 0 0 λn Le calcul sur les matrices diagonales est très simple dans la mesure où l’on a, pour tous (λ1 , . . . ,λn ) et (λ01 , . . . ,λ0n ) dans Kn : • Diag(λ1 , . . . ,λn ) + Diag(λ01 , . . . ,λ0n ) = Diag(λ1 + λ01 , . . . ,λn + λ0n ) • Diag(λ1 , . . . ,λn ) × Diag(λ01 , . . . ,λ0n ) = Diag(λ1 λ01 , . . . ,λn λ0n ) Pour la somme, la propriété est évidente. Pour le produit, on écrit Diag(λ1 , . . . ,λn ) = (λi δi,j ) 16i6n , Diag(λ01 , . . . ,λ0n ) = (λ0j δj,k ) 16j6n . Pour tout couple 16j6n (i,k) ∈ [[1,n]]2 , le terme d’indices (i,k) du produit est n X 16k6n λi δi,j λ0j δj,k . Or, dans cette somme, tous les δj,k sont nuls j=1 sauf, éventuellement, lorsque j = k, d’où n X λi δi,j λ0j δj,k = λi λ0k δi,k = λi λ0i δi,k . j=1 1.4.2 Cas des matrices triangulaires On s’intéressera uniquement aux matrices triangulaires supérieures. Les résultats se transposent (!) aisément aux matrices inférieures. Il est évident que la somme de deux matrices triangulaires supérieures l’est aussi et que les termes diagonaux de la somme sont les sommes des termes diagonaux des deux matrices (c’est aussi vrai pour les termes non diagonaux). Mais il est nettement moins évident que le produit de deux matrices triangulaires supérieures l’est aussi et que les termes diagonaux du produit sont les produits des termes diagonaux correspondants des deux matrices. Autrement dit, pour : 5 a1,1 a1,2 · · · · · · ··· a1,n b1,1 b1,2 0 a a · · · · · · a 0 b2,2 2,2 2,3 2,n . . .. .. 0 0 0 0 . . . . . . . . . . . A= et B = . . . . . .. .. 0 an−1,n−1 an−1,n . 0 ··· ··· ··· 0 an,n 0 ··· a1,1 b1,1 c1,2 ··· ··· ··· c1,n 0 a2,2 b2,2 c2,3 · · · ··· c2,n . . . . . 0 0 . . . . . . . . . AB = . . . . . . . 0 a b c n−1,n−1 n−1,n−1 n−1,n 0 ··· ··· ··· 0 an,n bn,n La démonstration est un peu technique. On pose A = (ai,j ) 16i6n et 16j6n ··· ··· b2,3 · · · .. . .. .. . . ··· ··· ··· 0 bn−1,n−1 ··· 0 , on a : bn−1,n bn,n b1,n b2,n .. . .. . B = (bj,k ) 16j6n avec : 16k6n ∀(i,j) ∈ [[1,n]]2 , i > j ⇒ ai,j = 0 et ∀(j,k) ∈ [[1,n]]2 , j > k ⇒ bj,k = 0. n X Pour tout (i,k) ∈ [[1,n]]2 , on pose ci,k = ai,j bj,k . j=1 Soit un couple (i,k) tel que i > k. Dans la somme définissant ci,k , pour j < i, on a ai,j = 0 puis pour j > i on a j > i > k donc bj,k = 0. En résumé, tous les termes de cette somme sont nuls donc ci,k = 0. Supposons à présent i = k. Dans la somme définissant ci,k , pour j < i, on a ai,j = 0 et pour j > i = k, on a bj,k = 0. Le seul terme éventuellement non nul est obtenu pour j = i = k et c’est ai,i bi,i d’où ci,i = ai,i bi,i . C.Q.F.D. 2 Pivot 2.1 2.1.1 Matrices élémentaires Transvections, transpositions, dilatation Pour i 6= j dans [[1,n]] et λ ∈ K, on forme la matrice Ti,j,λ = de la façon suivante : On part de la matrice In et on ajoute le nombre λ à l’intersection de la ligne i et de la colonne j. 1 0 · · · · · · · · · · · · · · · · · · 0 0 0 1 0 · · · · · · · · · · · · · · · 0 0 .. . . . . . . . . . . . . . . . 0 0 0 . 0 0 λ 0 ← i-ème ligne Ti,jλ = . . . 0 0 0 .. . . . . . . . . . . . . . 1 0 0 0 ··· ··· ··· ··· ··· ··· 0 1 ↑ j-ème colonne Une telle matrice est dite de transvection. 6 colonne i 1 0 . 0 . . .. . .. . .. . 0 Étant donnés deux indices distincts i, i on pose Pi,i0 = ... .. . .. . .. . 0 ··· Il s’agit de la matrice unité dont on a échangé les lignes i et i0 . Une telle matrice est dite de permutation ou de transposition. ··· ··· ··· colonne i0 ··· ··· 1 1 .. . .. . ··· ··· 1 0 .. . .. . 1 1 0 1 .. ··· ··· ··· ··· ··· ··· 0 . 0 .. . .. . .. . .. . .. . .. . .. . .. . 1 i ↓ }| { z On définit enfin, pour i ∈ [[1,n]] et λ ∈ K∗ , la matrice Di,λ = Diag(1, . . . , λ,1, . . . ,1). On dit que Di,λ est une matrice de dilatation. 2.1.2 Action par le produit à gauche Pour comprendre ce qui se passe quand on calcule EM où E est une matrice élémentaire et M une matrice à n lignes, il faut voir que si la i-ème ligne d’une matrice A est la i0 -ème de In , alors la i-ème ligne de AM égale la j-ème ligne de M . Exercice 5 1. Utiliser ce qui précède pour déterminer l’action des matrices élémentaires à gauche. On pourra utiliser le fait que Ti,jλ est la somme de In et de λ fois la matrice dont toutes les lignes sont nulles à l’exception que la i-ème qui se trouve être la j-ème de In . 2. Que se passe-t-il quand on fait Li ← Li − λLi0 à la matrice Ti,i0 ,λ ? Quelle relation matricielle en déduit-on? 3. Écrire des relations analogues pour les Pi,j et les Di,λ . 2.1.3 Décomposition ER On sait qu’il est possible au moyen d’opérations élémentaires sur les lignes d’une matrice rectangulaire M de transformer celle-ci en une (unique) matrice échelonnée réduite R. D’après ce qui précède, il existe donc des matrices élémentaires E1 , E2 , . . . ,EN telles que : EN × EN −1 × · · · × E2 × E1 × M = R. Pour chaque matrice Ek , notons Ek0 la matrice de la transformation réciproque. On a alors: 0 0 0 0 0 0 M = E10 × E20 × · · · × EN −1 × EN × EN × EN −1 × · · · × E2 × E1 × M = E1 × E2 × · · · × EN −1 × EN × R. 0 0 0 0 En posant E = E1 × E2 × · · · × EN −1 × EN on a M = ER où E est un produit de matrices élémentaires et R une matrice échelonnées réduite. 2.2 2.2.1 Action sur les colonnes Produit à droite par les matrices élémentaires Soit M ∈ Mn,p (K). La multiplication à droite par des matrices élémentaires d’ordre p agit sur les colonnes de M . Exercice 6 Décrire l’action de chacune des matrices élémentaires par ces opérations. 7 2.2.2 Échelonnement en colonnes De la même façon que sur les lignes, il set possible de transformer toute matrice M de Mn,p (K) en une matrice échelonnée ou échelonnée réduite en colonnes. On note M 0 ∼ M . C 3 Matrices carrées inversibles 3.1 3.1.1 GLn (K) Matrices inversibles Définition : Une matrice A ∈ Mn (K) est dite inversible lorsqu’il existe B ∈ Mn (K) telle que AB = BA = In . La matrice B s’appelle l’inverse de A et se note A−1 . L’ensemble des matrices inversibles d’ordre n s’appelle le groupe linéaire d’ordre n et se note GLn (K). 3.1.2 Exemple des matrices élémentaires On a vu en exercice que les matrices élémentaires sont inversibles et que : −1 −1 (Ti,i0 ,λ )−1 = Ti,i0 ,−λ , Pi,i 0 = Pi,i0 et Di,λ = Di,1/λ . 3.1.3 Inverse d’un produit Propriété : Si A et B sont inversibles, alors AB l’est aussi et (AB)−1 = B −1 A−1 . En résumé : l’inverse d’un produit est le produit en sens contraire des inverses ce qui s’étend à un produit d’un nombre quelconque (fini) de matrices inversibles en conséquence de quoi les produits de matrices élémentaires sont inversibles. Exercice 7 Le démontrer. 3.1.4 Cas des matrices réduites étagées Proposition : La seule matrice étagée inversible de Mn (K) est In . Démonstration : Si une matrice R réduite étagée n’est pas In alors sa dernière ligne est nulle et, pour tout B ∈ Mn (K), la dernière ligne de RB est nulle donc ∀B ∈ Mn (K), RB 6= In . C.Q.F.D. Le même argument montre qu’aucune colonne d’une matrice inversible n’est nulle. 3.1.5 Caractérisations Proposition: Soit A ∈ Mn (K). Les propriétés suivantes sont équivalentes. 1. A est inversible. 2. ∃B ∈ Mn (K), AB = In 3. ∃B ∈ Mn (K), BA = In 4. L’équation AX = 0 d’inconnue X ∈ Mn,1 admet 0 pour unique solution. 5. ∀Y ∈ Mn,1 (K) l’équation AX = Y a au moins une solution. 6. ∀Y ∈ Mn,1 (K) l’équation AX = Y a au plus une solution. Exercice 8 Vérifier que la propriété 1. entraı̂ne toutes les autres. Montrons les autres équivalences. Posons A = ER où E est un produit de matrices élémentaires donc est inversible et R est étagée réduite en ligne. 2. ⇒ 1. : Si AB = In alors RB = E −1 d’où R = In sinon la dernière ligne de RB = E −1 est nulle. Alors A = E est inversible. 8 3. ⇒ 1. : On raisonne de façon analogue à ce qui précède en écrivant A = R0 E 0 où E 0 est inversible et R0 est étagée en colonnes. 4. ⇔ 1. : AX = 0 ⇔ RX = 0 d’où l’équivalence. 5. ⇒ 2. : Pour tout j de 1 à n, il existe une colonne Cj telle que ACj soit la j-ème colonne de In . On pose B = (C1 , . . . ,Cn ) et AB = In . Enfin on a 6. ⇒ 4. ⇒ 1. On a fini ! 3.2 Calcul de l’inverse d’une matrice 3.2.1 Résolution de AX = Y On se donne une matrice A = (ai,j ) 16i6n . 16j6n −1 Lorsque A est inversible, pour tous X,Y ∈ M n,1 (K), AX = Y ⇔ X = A Y . Cela peut s’écrire : a1,1 x1 + · · · + a1,n xn = y1 x1 = b1,1 y1 + · · · + b1,n yn .. .. .. ⇔ .. .. .. . . . . . . an,1 x1 + · · · + an,n xn = yn xn = bn,1 y1 + · · · + bn,n yn Alors, on a A−1 = (bj,k ) 16j6n . 16k6n 3.2.2 Conséquences Une matrice diagonale Diag(λ1 , . . . ,λn ) est inversible si et seulement si ses termes diagonaux sont non nuls et, dans ce cas l’inverse est la Diag(1/λ1 , . . . ,1/λn ). Une matrice triangulaire A est inversible si et seulement si ses termes diagonaux sont non nuls et, dans ce cas, son inverse est triangulaire et a pour termes diagonaux les inverses de ceux de A. 3.2.3 Pivot de Gauss-Jordan Lorsque A est inversible, il existe une matrice E produit de matrices élémentaires telles que EA = R où R est échelonnée réduite. On a donc R = In d’où E = A−1 . Il résulte qu’une suite d’opérations élémentaires sur les lignes de A transforme celle-ci en EA = In . La même suite de transformations élémentaires sur In transforme In en EIn d’où le procédé suivant : On forme une matrice M rectangulaire de format n × 2n en collant la matrice In à droite de la matrice ; on a donc, par blocs M = (A,In ). Chaque opération élémentaire appliquée aux lignes de A est étendue à toute la ligne correspondante de M . Lorsque A a été transformée en In , M = (A,In ) a été transformée en (In ,E) = (In ,A−1 ). On peut observer que la même méthode appliquée à une matrice rectangulaire A permet de trouver une matrice E telle que EA soit échelonnée réduite. 4 Transposition 4.1 4.1.1 Définition et notations L’idée Il s’agit de prendre la “symétrique” de la matrice par rapport à la diagonale : 9 a1,1 a1,2 · · · a2,1 a2,2 · · · an,1 an,2 · · · a1,p a2,p a1,1 a1,2 − − − − − − − − − − − − − − − − − − − − → transposition .. . a1,p an,p an,1 an,2 .. . an,p a2,1 a2,2 .. . a2,p L’idée est simple mais la définition est délicate car il nous faut respecter quelques contraintes. Une première mauvaise idée est de dire que la transposée de (ai,j )16i6n est (aj,i )16j6p . 16j6p 16i6n Ça ne marche pas car, quand M est non carrée de format (n,p) avec p > n, il n’existe pas de terme ap,n . Une deuxième mauvaise solution est alors de dire que la transposée de (ai,j )16i6n est (ai,j )16j6p . 16j6p 16i6n Là encore, c’est incorrect car l’indice de ligne de la transposée, c’est-à-dire j, est le deuxième indice au niveau des ai,j . 4.1.2 La bonne définition La bonne méthode consiste à définir la transposée de (ai,j )16i6n par tA = (a0j,i )16j6p avec, pour tout couple (j,i) ∈ [[1,p]] × [[1,n]], a0j,i = ai,j . On peut encore noter aujourd’hui la transposée de A : AT . 4.2 4.2.1 16j6p 16i6n Propriétés Transposée d’une combinaison linéaire On admet sans difficulté que la transposée d’une combinaison linéaire de matrices de même format est la combinaison linéaire des transposées c’est-à-dire : ∀(n,p) ∈ (N∗ )2 , ∀A, A0 ∈ Mn,p (K), ∀λ, λ0 ∈ K, t(λA + λ0 A0 ) = λ tA + λ0 tA0 ou, avec l’autre notation : (λA + λ0 A0 )T = λAT + λ0 A0T . 4.2.2 Transposée d’un produit Il est déjà plus difficile d’admettre la propriété suivante : ∀A ∈ Mm,n (K), ∀B ∈ Mn,p (K), t(AB) = tB tA ou, avec l’autre notation : (AB)T = B T AT . On retiendra cette propriété sous la forme : La transposée d’un produit est le produit en sens contraire des transposées. On admet ou on lit soigneusement la Démonstration : On vérifie sans difficulté la compatibilité des formats permettant de définir lesdits produits. Posons A = (ai,j )16i6m , B = (bj,k )16j6n , C = (ckl )16k6p , AB = (di,k )16i6m , BC = (ej,l )16j6n avec : 16j6n 16k6p 16l6q 10 16k6p 16l6q ∀(i,k) ∈ [[1, m]] × [[1, p]], di,k = n X ai,j bj,k et ∀(j,l) ∈ [[1, n]] × [[1, q]], ej,l = j=1 p X bj,k ck,l . k=1 0 ) Enfin, posons (AB)C = (fi,l )16i6m et A(BC) = (fi,l 16i6m . On a, pour tout couple (i,l) ∈ [[1, m]] × [[1, q]] : 16l6q 16l6q p p p n n X X X XX fi,l = di,k ck,l = ai,j bj,k ck,l = ai,j bj,k ck,l d’une part et, d’autre part : k=1 0 = fi,l n X k=1 ai,j j=1 p X k=1 j=1 ! bj,k ck,l = k=1 j=1 p n X X ai,j bj,k ck,l . j=1 k=1 Il n’y a plus qu’à échanger les deux signes somme pour obtenir l’égalité. 4.2.3 Transposée d’une inverse La propriété suivante est conséquence directe de la précédente. Pour toute matrice inversible A ∈ GLn (K) on a tA ∈ GLn (K) et (tA)−1 = t(A−1 ). Autrement dit : L’inverse de la transposée est la transposée de l’inverse. Démonstration : De AA−1 = In on déduit : t(A−1 ) tA = tIn = In d’où la propriété. 4.2.4 Matrices symétriques, antisymétriques Une matrice M carrée d’ordre n est dite symétrique lorsque tM = M . Elle est dite antisymétrique lorsque tM = −M . On a la propriété suivante : Si M et N sont symétriques (respectivement : antisymétriques), alors, pour tout couple (λ,µ) ∈ K2 , λM + µN est symétrique (respectivement : antisymétrique). Exercice 9 Le montrer. Exercice 10 1. À quelle condition un produit de deux matrices symétriques est-il symétrique? 2. À quelle condition un produit de matrices antisymétriques est-il symétrique? 11