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La Lettre du Cancérologue - volume VII - n° 2 - mars-avril 1998
Choix de l'hormonothérapie avant la ménopause
La castration diminue de 80 % le taux des estrogènes circu-
lants. En reposant aujourd'hui en première intention sur les
agonistes de la LH-RH, elle est réversible en cas d'échec. Les
progestatifs étant peu efficaces avant la ménopause, le tamoxi-
fène est le traitement anti-estrogénique de choix. Le taux de
réponse est de 20 à 40 %, identique à celui de la castration,
dont l'efficacité est parallèle.
Choix de l'hormonothérapie après la ménopause
Outre le tamoxifène, de nombreux traitements anti-estrogé-
niques sont aujourd'hui disponibles ou en cours d'évaluation,
qu'il s'agisse des progestatifs, des anti-aromatases, de l'amino-
glutéthimide ou d'autres antagonistes, stéroïdiens ou non. Des
alternatives thérapeutiques sont ainsi possibles en cas d'échap-
pement au tamoxifène.
Choix de la chimiothérapie cytotoxique
L'absence de chimiothérapie antérieure, même adjuvante, est
un facteur favorable de réponse à la chimiothérapie. Il en est
de même d'un intervalle libre court entre le diagnostic initial et
les premiers signes de métastases. En revanche, ni l'âge, ni le
profil réceptologique, ni le statut ménopausique n'ont de valeur
pronostique pour la réponse. Seule la surexpression de Her-2
neu serait prédictive de chimiosensibilité, notamment vis-à-vis
des taxanes.
En phase palliative, le choix thérapeutique doit privilégier la
tolérance sans renier l'impératif d'efficacité. C'est le sens
donné par M. Spielmann à ce qu'il a désigné par l'expression
de traitement “light” : allégé non pas quant à ses effets antitu-
moraux, indispensables notamment au contrôle correct des
symptômes, mais quant au poids qu'il fait peser sur les
patientes elles-mêmes en termes d'effets secondaires, de perte
d'autonomie, d'altération de l'image corporelle, de gêne au
maintien des relations affectives et sociales. Les perfusions
continues de 5-FU et l'association mitoxantrone-vinorelbine,
dont il va être question plus loin, paraissent répondre à cette
double exigence. Le choix de leur utilisation en première ou
deuxième ligne et la durée optimale de traitement relèvent
encore de choix individuels ou de controverses.
POUR EN SAVOIR PLUS...
1. A'Hern R.P.A. Br J Cancer 1988 ; 57 : 615-8.
M. Lenoble
d'après la communication de M. Spielmann
ASSOCIATION MITOXANTRONE-VINORELBINE : UN BON
CHOIX APRÈS CHIMIOTHÉRAPIE ADJUVANTE
Justification de l'association mitoxantrone-vinorelbine
La mitoxantrone, chef de file de la famille des anthracène-
diones, permet d’obtenir, en monothérapie, un taux de réponse
de 20 à 25 % chez les patientes déjà traitées auparavant. En
association au cyclophosphamide et/ou au 5-FU, les taux de
réponse s'échelonnent de 25 à 50 % chez les patientes naïves
de chimiothérapie antérieure. Son profil de toxicité se dis-
tingue de celui de la doxorubicine par une incidence plus faible
des nausées/vomissements, de l'alopécie et des mucites (1).
La vinorelbine a également fait preuve, en monothérapie, d'une
activité significative dans le cancer du sein. À la dose hebdo-
madaire de 30 mg/m2, le taux de réponse a été de 41 % chez
145 patientes en phase évoluée de la maladie (2). La toxicité
extrahématologique est faible, permettant d'envisager son utili-
sation en association à la mitoxantrone, dont le mécanisme
d'action est différent.
Une étude préliminaire non randomisée a montré chez
55 patientes ayant reçu la mitoxantrone (12 mg/m2à J1) et la
vinorelbine (25 mg/m2à J1 et J18), en cycles de 21 jours, un
taux de réponse de 52,5 %, dont 12,5 % de réponses com-
plètes, et un taux de stabilisation de 32,7 %.
Étude randomisée prospective : construction
En s'appuyant sur ces résultats très encourageants, une étude
randomisée prospective a été mise en place pour comparer l'as-
sociation mitoxantrone-vinorelbine telle que définie plus haut
(NO-NA, n = 142) à un traitement de référence comportant
une anthracycline : schéma FAC (5-FU, doxorubicine, cyclo-
phosphamide, n = 17) ou FEC (E pour épirubicine, n = 121), à
dose standard (500 mg/m2pour F et C, 50 mg/m2pour A et E)
toutes les trois semaines (3). La seconde perfusion de vinorel-
bine de chaque cycle n'était réalisée que si le taux des neutro-
philes était au moins égal à 1 000/mm3.
Pour être incluses, les patientes devaient être en première
poussée métastatique d'un cancer du sein et n'avoir pas reçu de
chimiothérapie adjuvante depuis au moins un an. Une stratifi-
cation a été réalisée d'emblée par rapport au traitement adju-
vant reçu. Les critères de jugement étaient le taux de réponse,
la durée de réponse et la toxicité. Pour ces deux premiers cri-
tères, la question posée était celle de l'équivalence des deux
schémas. Pour le troisième, il s'agissait de déceler une éven-
tuelle différence.
Les caractéristiques des patientes sont bien équilibrées entre
les deux groupes. L'âge médian était de 58 ans dans le groupe
FAC-FEC et de 59 ans dans le groupe NO-NA ; 85 % des
patientes étaient ménopausées. Environ 90 % des patientes des
deux groupes avaient un indice de performance de 0 ou de 1 à
l'entrée dans l'étude. Quatre-vingt-deux pour cent des patientes
avaient des métastases viscérales (notamment hépatiques :
137 cas) et le nombre médian de sites métastatiques était de 2
dans les deux groupes (1-7).
Faisabilité du schéma thérapeutique
Le nombre de cycles effectivement administrés a été de 841
dans le groupe FAC-FEC contre 698 dans le groupe NO-NA,
les valeurs médianes (extrêmes) étant respectivement de
6 (1-18) et 5 (1-12).
L'intensité de dose moyenne (rapport de la dose reçue sur la
dose programmée) a été de plus de 95 % pour tous les agents
de FAC/FEC. Pour NO-NA, elle a été de 91 % à J1, mais de
77 % à J8, du fait d'une annulation fréquente de la perfusion de
vinorelbine à J8 (29 % des cas) en raison d'une neutropénie.
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