La Lettre du Gynécologue - n° 320 - mars 2007
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toute patiente devant recevoir à ce jour une chimiothérapie en
situation adjuvante et ayant un cancer du sein avec surexpres-
sion de HER2 doit recevoir cet anticorps monoclonal anti-
HER2 pendant un an. Toutefois, deux questions essentielles
restent en suspens :
– la durée optimale du traitement dont on ne sait si la réduc-
tion ou l’allongement modifierait l’impact thérapeutique du
trastuzumab ;
– l’utilisation concomitante à la chimiothérapie et donc plus
proche du geste chirurgical ou à l’issue des autres traite-
ments.
Si l’on analyse les résultats des différents essais disponibles
(10, 14), on notera quelques points communs et un nombre
de divergences :
En termes d’administration du trastuzumab, les posologies
sont identiques d’une étude à l’autre en fonction des modali-
tés d’administration hebdomadaires ou toutes les trois semai-
nes. La démonstration pharmacologique de l’équivalence
de ces schémas étant faite (15), certaines études, comme la
BCIRG 006 (13), ont même autorisé en cours de traitement
une modification du schéma d’administration allant de la
phase hebdomadaire à toutes les trois semaines, notamment
pendant la phase d’entretien du traitement pour des raisons
évidentes de commodité d’administration. Toutefois, il existe
de nombreuses différences d’une étude à l’autre en ce qui
concerne l’introduction de ce traitement et les modalités de
son administration par rapport aux autres thérapeutiques.
L’étude HERA (11, 12) a montré l’impact de ce traitement
administré pendant une période d’un ou deux ans compara-
tivement à un groupe placebo. Le trastuzumab était introduit
après une chimiothérapie adjuvante ou néoadjuvante et après
la réalisation de la radiothérapie. Le choix de la chimiothéra-
pie (agents, posologie et nombre de cycles) ainsi que du trai-
tement antihormonal était libre. Cette étude pragmatique a
servi à l’enregistrement du trastuzumab dans le monde entier
et est donc à la base de son AMM. Elle est, par ailleurs, la
seule étude avec un recul médian de deux ans à démontrer
un impact sur la survie globale du traitement (12) et de réali-
ser une analyse sur le type de rechutes démontrant clairement
l’impact du médicament sur l’incidence des métastases avec,
toutefois, l’absence d’effet sur les métastases cérébrales (11,
12).
Toutes les autres études ont utilisé le trastuzumab en associa-
tion avec une chimiothérapie, traitement fondé, notamment,
sur un rationnel de synergie entre les taxanes, la vinorelbine
ou les sels de platine et expliquant ce choix thérapeutique (16).
L’introduction du trastuzumab dans ces études est donc plus
précoce, mais montre à ce jour des résultats identiques en ce
qui concerne la réduction du risque de récidive sans impact
sur la survie. Seule l’étude du NCCTCG pose la question d’une
différence d’efficacité entre l’administration concomitante ou
séquentielle du trastuzumab avec la chimiothérapie, mais les
résultats préliminaires ne sont pas suffisants pour conclure,
même s’il existe très nettement un avantage à l’utilisation
concomitante pour l’instant.
L’étude BCIRG 0006 (13) pose la question de la non-utilisa-
tion des anthracyclines dans cette population en cas d’admi-
nistration du trastuzumab afin d’éviter le surrisque de toxicité
cardiaque (17). Les résultats de la seconde analyse intérimaire
concluent à une stricte équivalence entre les différents bras de
traitement comportant le trastuzumab, suggérant que, dans
cette population, on puisse en cas d’utilisation du trastuzumab
s’affranchir de celle des anthracyclines. Toutefois, l’analyse
rétrospective de l’impact de l’amplification de la topo-isomé-
rase II alpha (cible des anthracyclines coamplifiée dans 30 %
des cas de tumeurs HER2 amplifiées), évoque l’intérêt des
anthracyclines dans cette population, notamment en cas de
non-utilisation du trastuzumab, comme cela a été démontré
cette année par d’autres équipes (18).
Enfin, l’étude FinHer a posé la question de l’introduction
immédiate mais courte (12 semaines) du trastuzumab après
la chirurgie. Les résultats ne portent que sur un petit effec-
tif mais confirment ceux des essais de plus grande puissance
en ce qui concerne la survie sans récidive, posant la question
d’une durée courte de traitement à condition qu’elle soit d’in-
troduction précoce et associée à la chimiothérapie
Toujours dans cette population, mais en situation métasta-
tique, ont été présentés les résultats des essais d’association
du trastuzumab avec l’anastrozole concluant à un intérêt en
termes d’amélioration du taux de réponse (20,3 % versus 6,8 %,
p = 0,018) et du temps à progression (4,8 mois versus 2,4 mois,
p = 0,0007) de l’association par rapport à l’anastrozole seul
en cas de cancer métastatique hormonodépendant et HER2
surexprimé. Ces résultats soulignent surtout le faible impact
thérapeutique des traitements antihormonaux seuls dans
cette population (19).
Enfin, disponible en pratique clinique en 2007 (ATU en
cours), le lapatinib, qui est un inhibiteur de tyrosine kinase
spécifiquement anti-HER2 a démontré son intérêt en associa-
tion avec la capécitabine dans le cancer du sein métastatique
HER2 surexprimé après échec à un traitement préalable par
anthracyclines, trastuzumab et taxanes (20). Il existe un dou-
blement du temps à progression (4,8 mois versus 2,4 mois ;
p = 0,0016). Cette nouvelle association valide le concept de
maintien d’un traitement anti-HER2 en situation métastatique
et de la modulation de ce traitement par une autre chimio-
thérapie, mais nécessite clairement une comparaison avec une
deuxième ligne de traitement associant le trastuzumab à une
chimiothérapie.
En d’autres termes, la question ouverte reste : après échec du
trastuzumab en situation métastatique, doit-on juste changer
la chimiothérapie associée, le traitement anti-HER2 ou les
deux ?
LES CANCERS TRIPLES NÉGATIFS
Actuellement, les cancers du sein dits triples négatifs font l’ob-
jet de recherches concernant l’identification d’une ou plusieurs
cibles thérapeutiques dans des populations défavorisées où la
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