CAS CLINIQUE
▴ Figure 2. Réponse pulmonaire après trastuzumab-paclitaxel.
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La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 3 - mars 2010 | 223
Le protocole paclitaxel-trastuzumab est commencé en
septembre 2008. Le bilan de décembre 2008 après 2 cycles
complets de chimiothérapie montre une diminution du marqueur
(Ca 15-3 = 70 ng/ ml) et une normalisation de la radiographie
thoracique◆(figure◆2). La FEVG est à 68 %. Le traitement est donc
poursuivi.
En janvier 2009, Mme M. se plaint d’une dyspnée d’effort, révélant
une embolie pulmonaire bilatérale liée à un alitement prolongé
avec phlébite de la veine tibiale postérieure droite. À l’échographie,
la FEVG est conservée et le ventricule gauche apparaît modérément
dilaté, avec une insuffisance mitrale de grade 1. Un traitement par
anticoagulant est instauré.
Le bilan de mars 2009, après 6 cycles de chimiothérapie, confirme
l’absence de métastases pulmonaires, avec une FEVG à 63 %. Il
est décidé de poursuivre le traitement par trastuzumab toutes
les 3 semaines en association avec une hormonothérapie de type
anastrozole.
En mai 2009, devant l’apparition de douleurs osseuses diffuses,
une nouvelle scintigraphie est réalisée et fait apparaître, outre
les fixations vertébrales connues, des fixations du cadre orbitaire
gauche et du fémur gauche. Les radiographies osseuses confir-
ment une lacune de la diaphyse fémorale gauche. Le CA 15-3 est à
170 ng/ml. Il n’existe aucune lésion pulmonaire au TDM thoracique,
mais une thrombose de l’aorte pour laquelle un traitement par
aspirine est prescrit, en association avec la poursuite des HBPM
à dose curative.
Mme M. refuse l’intervention chirurgicale qui lui est proposée sur
la diaphyse fémorale gauche. Elle reçoit donc un traitement par
radiothérapie sur les fémurs et le cadre orbitaire gauche. Au terme
du traitement local, le CA 15-3 est à 578,6 ng/ml.
L’exémestane est remplacé en juin 2009 par du tamoxifène,
toujours en association avec le trastuzumab, le traitement anti-
coagulant étant poursuivi.
Le bilan de septembre 2009 montre une diminution du CA 15-3
à 309 ng/ml, sans aucune évolution pulmonaire, mais il existe à
l’examen clinique une tachycardie associée à une hypotension
orthostatique, pour lesquelles un bilan cardiaque est demandé.
L’holter ECG révèle des passages d’arythmie lente et de rythme
sinusal, l’échographie cardiaque montrant une insuffisance mitrale
modérée, avec une FEVG à 62 %. Outre la poursuite du traitement
par HBPM, le traitement cardiologique comporte de l’amiodarone
(1/2 cp 5 j/7). Après ce bilan, le cardiologue autorise la poursuite
du traitement par trastuzumab.
Discussion
Le cancer du sein HER2+ chez la femme âgée est une situation
peu fréquente. Environ 7 % des patientes âgées de plus de 70 ans
ont une tumeur de statut HER2+ (12 % chez les femmes de plus
de 61 ans) [1]. Le risque métastatique dépend notamment du
profil moléculaire, avec un mauvais pronostic pour les génotypes
HER2 et basal (2).
L’espérance de vie moyenne chez la femme de 79 ans sans comor-
bidités est d’environ 9 ou 10 ans.
En situation adjuvante ou métastatique, il n’existe pas, à ce jour,
d’études spécifiques aux sujets âgés concernant le trastuzumab.
Dans les 3 principales études ayant montré le bénéfice majeur
du trastuzumab en adjuvant, seules 16 % des patientes de l’étude
HERA avaient plus de 60 ans (3), et respectivement 14 % et 18 %
pour les 2 études américaines B31 et N9831 (4). Si l’analyse par
sous-groupes montre toujours un bénéfice significatif sur la survie
sans récidive pour ces sujets, l’intervalle de confiance est beau-
coup plus lâche (3).
Les autres études, comme l’étude FinHer (5), ne concernaient
que des patientes de moins de 66 ans. Ces faibles effectifs de
patientes âgées très sélectionnées ne permettent pas de tirer des
conclusions définitives.