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mise au point
Intérêts et limites
du sérodiagnostic fongique
Strengths and limitations of fungal serodiagnosis
F. Persat*, S. Ranque**
D
es demandes de sérologies fongiques sont
régulièrement adressées aux laboratoires de
mycologie. Le terme “sérologies fongiques”
ou “sérodiagnostic” correspond, au sens strict, à la
détection, dans le sérum, d’anticorps dirigés contre
les structures fongiques, ce qui permet de conclure
par un diagnostic indirect que le patient a été en
contact avec un champignon. Dans cet article, nous
prêtons au terme “sérodiagnostic fongique” un sens
plus large, incluant, en plus du diagnostic indirect
(recherche d’anticorps, Ac), un diagnostic direct
par la recherche d’antigènes (Ag), ou éventuellement d’autres molécules d’origine fongique dans
le sérum. Pour lever toute ambiguïté, il convient de
bien préciser la demande : quelles informations le
clinicien souhaite-t-il recueillir lorsqu’il prescrit un
sérodiagnostic fongique ? Souhaite-t-il une recherche
d’Ag et/ou d’Ac ? A-t-il une orientation diagnostique
pour un champignon en particulier ?
Après un bref rappel sur les techniques couramment utilisées en sérodiagnostic fongique, nous
détaillerons leurs indications et leurs limites pour
le diagnostic des infections fongiques invasives (IFI),
en insistant particulièrement sur les plus fréquentes
à l’hôpital en France : aspergilloses et candidoses.
L’objectif de cet article est de permettre d’optimiser le rendement diagnostique des examens de
sérodiagnostic fongique en aidant le prescripteur
à cibler sa demande en termes de type de patient
et de fréquence des prélèvements sanguins.
* Service paludisme, parasites du
sang et mycologie médicale, hospices
civils de Lyon, groupement hospitalier Nord, Lyon.
** Laboratoire de parasitologiemycologie, hôpital de La Timone
adultes, Marseille.
Techniques de sérodiagnostic
fongique
Selon notre définition, le sérodiagnostic fongique
regroupe, d’une part, le sérodiagnostic indirect ou
sérologie, et d’autre part, le sérodiagnostic direct.
Nous allons présenter les techniques utilisées dans
8 | La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIV - n° 1 - janvier-février 2009 les laboratoires de mycologie en France en nous
fondant sur les résultats d’une enquête réalisée sous
l’égide de l’Association française des enseignants
et des praticiens hospitaliers titulaires de parasitologie et mycologie médicales (ANOFEL, www.med.
univ-angers.fr/anofel), à laquelle les biologistes
de 27 laboratoires hospitaliers de mycologie ont
participé en 2007.
Sérodiagnostic fongique indirect
(recherche d’Ac)
Il existe un grand nombre de techniques recherchant des Ac antifongiques ; celles utilisées dans
les laboratoires de mycologie sont détaillées dans
le tableau I. Il s’agit souvent de techniques artisanales, dites “techniques maison” : les principales
sont l’immunofluorescence indirecte (IFI), l’électrosynérèse (ES), la coélectrosynérèse (CoES), et
l’immunoélectrophorèse (IEP). L’inconvénient de
ces techniques artisanales est que les critères d’interprétation sont particuliers à chaque laboratoire,
même s’il existe un certain consensus à propos des
seuils de positivité (par exemple, 3 arcs protéiques de
précipitation pour l’immunoélectrophorèse chez un
patient immunocompétent). Le marquage CE étant
maintenant normalement requis pour utiliser un test
de diagnostic biologique et pour se conformer au
Guide de bonne exécution des analyses de biologie
médicale (GBEA), les techniques artisanales sont
progressivement supplantées par des techniques
commercialisées. L’usage de kits commercialisés
devrait permettre une meilleure standardisation du
rendu des résultats entre les différents laboratoires
et favoriser ainsi les études multicentriques.
L’hémagglutination indirecte (HAI) a été l’une des
premières techniques de sérodiagnostic fongique
commercialisées. L’usage de kits ELISA commerciaux
Résumé
La population de patients immunodéprimés à haut risque d’infection fongique invasive (IFI) est en pleine expansion.
Le diagnostic des IFI est complexe. Il résulte le plus souvent d’un faisceau d’arguments cliniques et biologiques. Les
tests de sérodiagnostic fongique occupent une part croissante dans l’arsenal des tests biologiques contribuant au
diagnostic d’IFI. Ils consistent à détecter la présence de molécules fongiques (sérodiagnostic direct) ou d’anticorps
dirigés contre des antigènes fongiques (sérodiagnostic indirect) dans le sang des patients. Cet article présente
les indications et les limites des techniques de sérodiagnostic fongique actuellement utilisées en France, dans le
but d’aider le prescripteur à interpréter les résultats et à optimiser le rendement de ses demandes.
Tableau I. Caractéristiques des principales techniques utilisées pour la détection d’anticorps antifongiques.
Technique
Utilisation
Type d’antigènes
utilisé
Détection
Type de résultats
Immunofluorescence
indirecte
Dépistage
Figuré (structure du
Lecture visuelle
champignon préservée) de la fluorescence
(au microscope)
Semi-quantitatifs (rendus
en taux de dilution)
Technique sensible
Hémagglutination
indirecte
Dépistage
Soluble
Lecture visuelle
(broyat de champignon de l’agglutination
et/ou surnageant de
culture)
Semi-quantitatifs (rendus
en taux de dilution)
Technique sensible
Enzyme-Linked
Dépistage
ImmunoSorbent Assay
(ELISA)
Soluble
Lecture automatique
de l’absorbance
Qualitatifs (positif/négatif)
Quantitatifs (index, unités
arbitraires)
Technique sensible
Électrosynérèse
Coélectrosynérèse
Dépistage,
confirmation
Soluble
Lecture visuelle des arcs
de précipitation
CoES : continuité d’arcs
avec le sérum témoin
Comparaison possible
du nombre d’arcs pour
différents prélèvements
d’un patient.
Pour Aspergillus, présence
d’arcs spécifiques.
Qualitatifs
Technique spécifique
Immunoélectrophorèse Dépistage,
confirmation
Soluble
Lecture visuelle des arcs
de précipitation
Détermination du nombre
d’arcs
et, pour Aspergillus,
présence d’arcs spécifiques.
Technique peu sensible,
spécifique, longue
(1 à plusieurs jours)
est de plus en plus répandu. Ils nécessitent plusieurs
heures de manipulation mais offrent plusieurs avantages : capacité de traiter des séries importantes de
prélèvements, capacité de s’adapter à des automates
et possibilité d’une lecture automatisée évitant la
variation opérateur-dépendante.
Sérodiagnostic fongique direct
(recherche d’Ag)
Les techniques utilisées pour le sérodiagnostic
fongique direct sont relativement récentes et reposent
essentiellement sur des techniques commercialisées
agglutination au latex ou ELISA, à l’aide d’anticorps
monoclonaux. Les résultats sont indépendants des
utilisateurs. Les techniques d’agglu-tination au latex,
par leur rapidité, sont idéales pour traiter un échantillon ponctuel en urgence ; les techniques ELISA
sont, en général, plus sensibles mais plus longues
à mettre en œuvre. Les techniques utilisées en
France détectent des antigènes polysaccharidiques
présents dans la paroi des champignons : les galactomannanes pour Aspergillus (PlateliaTM antigène
Aspergillus, BioRad) [1], les mannanes pour Candida
(PlateliaTM antigène Candida, BioRad) [2] ou encore
les glucurono-xylomannanes pour Cryptococcus
neoformans (différents kits). Ces molécules sont
émises lors du renouvellement de la paroi fongique
pendant la croissance du champignon et peuvent
être détectées sous forme libre dans le sang. Ces
techniques, comme toute recherche de molécules
polysaccharidiques, peuvent détecter des épitopes
similaires présents dans le sang, donnant alors des
résultats faussement positifs. Ces techniques sont
parfois utilisées pour détecter des antigènes fongiques dans des prélèvements autres que le sang (en
particulier les liquides de lavage broncho-alvéolaire
ou céphalo-rachidien), mais nous souhaitons limiter
notre propos au sérodiagnostic.
Mots-clés
Anticorps
Antigène
Infection fongique
Sérodiagnostic
Highlights
An increasing number of immunosuppressed patients are at
high risk of invasive fungal
infections (IFI). IFI diagnosis
is a complex issue, most
often relying on a variety of
clinical and biological arguments. Among biological
tests available for IFI diagnosis, sero-diagnostic tests
aim to detect the presence
of either fungal molecules
(direct serodiagnosis) or antibodies directed against fungal
antigens (indirect serodiagnosis) in the patient’s blood.
This article describes both
strengths and limitations of the
fungal serodiagnosis techniques
currently available in France to
help users unravel the results
and optimize the performances
of their practice.
Keywords
Antibodies
Antigen
Fungal infection
Serodiagnosis
La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIV - n° 1 - janvier-février 2009 | 9
mise au point
Intérêts et limites
du sérodiagnostic fongique
Quand choisir plutôt une recherche d’Ac
ou d’Ag fongique ?
En règle générale, il faut se baser sur le statut immunitaire du patient et de l’évolution de sa pathologie.
La recherche d’Ac est utile chez les patients immunocompétents, contrairement aux patients immunodéprimés, qui ne produisent que peu ou pas d’Ac. La
recherche d’Ag est habituellement indiquée chez les
patients immunodéprimés, qui ont en effet un risque
plus élevé d’infection fongique invasive, mais il a été
montré que la présence d’Ag est inversement corrélée
à celle des Ac correspondants (2). De plus, en raison
du délai nécessaire à la synthèse d’Ac, la sérologie est
inefficace pour le diagnostic d’un épisode à la phase
aiguë, mais permettra plutôt un diagnostic rétrospectif
ou le diagnostic d’une infection fongique d’évolution
relativement chronique. En revanche, la recherche d’Ag
est particulièrement indiquée pour diagnostiquer un
épisode aigu, et sa prescription, guidée par le contexte
du patient, s’impose si ce dernier est considéré à haut
risque d’infection fongique.
Sérodiagnostic des aspergilloses
Les champignons du genre Aspergillus sont ubiquitaires dans l’environnement. Exceptionnellement
pathogènes pour un sujet sain, ils sont susceptibles
de déterminer une pathologie souvent grave chez
les patients à risque. La porte d’entrée habituelle est
le tractus respiratoire, par aérocontamination. Les
manifestations cliniques provoquées par les Aspergillus ont un spectre particulièrement varié, dont
l’expression dépend à la fois du site de l’infection et
du type de réponse immune opposé par l’hôte.
Sur un terrain d’hyperréactivité immunitaire la
pathologie se manifestera sur un mode allergique :
aspergillose allergique extrinsèque (AAE), asthme
(et/ou rhinosinusite) aspergillaire allergique, aspergillose broncho-pulmonaire allergique (ABPA).
Sur un terrain de déficit immunitaire local (essentiellement les pathologies pulmonaires chroniques),
les manifestations cliniques seront relativement
localisées et d’évolution chronique : aspergillome,
aspergillose pulmonaire chronique nécrosante
(APCN).
Sur un terrain de dépression immunitaire, surviendront des pathologies invasives dont la gravité et
la rapidité d’évolution sont corrélées avec l’importance de l’immunodépression : aspergillose trachéobronchique nécrosante, aspergillose invasive (AI)
pulmonaire ou disséminée.
10 | La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIV - n° 1 - janvier-février 2009 Le diagnostic fait appel à des techniques d’imagerie
(scanner, etc.) et d’analyse de prélèvements variés,
avec recherche d’éléments fongiques par examen
direct (rapide et utile mais peu sensible) et mise
en culture. L’isolement du champignon lui-même
permettra l’identification de l’espèce et l’étude de la
sensibilité aux antifongiques. Toutefois, le sérodiagnostic présente en pratique un intérêt majeur chez
les patients fragilisés, chez lesquels les prélèvements
invasifs sont souvent irréalisables ou ne permettent
qu’une culture de relativement faible sensibilité et
demandent plusieurs jours de délai avant d’observer
la pousse d’un champignon.
Sérodiagnostic indirect des aspergilloses
L’ensemble des laboratoires de mycologie ayant
participé à l’enquête ANOFEL 2007 effectue la
recherche d’Ac anti-Aspergillus. Les techniques de
détection des anticorps utilisent généralement des
antigènes d’A. fumigatus, espèce la plus souvent
impliquée en pathologie humaine. D’autres espèces
émergeant depuis quelques années (A. flavus,
A. niger, A. terreus, etc.) peuvent être détectées
par les mêmes techniques, en raison de réactions
croisées. Selon les centres, le dépistage repose soit
sur une seule technique (essentiellement HAI ou
ELISA), soit sur deux techniques complémentaires.
Lorsqu’une technique de dépistage est positive pour
un sérum, au moins une technique de précipitation (IEP, ES, CoES), réputée moins sensible mais
plus spécifique, sera utilisée en confirmation par
65 % des laboratoires. Ces techniques permettent la révélation de certains arcs de précipitation liés à une activité enzymatique particulière :
chymotrypsique (caractéristique d’A. fumigatus,
espèce majoritaire en pathologie humaine) ou catalasique (caractéristique du genre Aspergillus). Ces
techniques sont sensibles pour le diagnostic des
aspergillomes pour lesquels la culture des prélèvements est souvent négative. Pour les formes
d’aspergilloses liées à une hyperréactivité immunitaire, le dosage d’IgE totales et anti-Aspergillus
sera intéressant ; ce test est souvent pratiqué
dans les services d’immunologie. L’évaluation de
la performance diagnostique des tests de sérodiagnostic des aspergilloses est donc compliquée
par la diversité de la présentation clinique des
aspergilloses et par la variabilité des critères de
définition des cas selon les études, en particulier
chez les patients immuno-déprimés, pour lesquels
le sérodiagnostic indirect est moins performant.
mise au point
Intérêts et limites
du sérodiagnostic fongique
Sérodiagnostic direct des aspergilloses
Un groupe de travail international, l’European Organization for Research and Treatment of Cancer/
Mycosis Study Group (EORTC/MSG), a élaboré
des critères consensuels de diagnostic de mycoses
invasives dans le but de standardiser les études
cliniques chez les patients cancéreux et/ou atteints
d’hémopathie (3). Ainsi, la détection de deux antigénémies aspergillaires positives est reconnue comme
un critère diagnostique d’AI.
La détection d’antigène galactomannane d’Aspergillus species est réalisée, d’après l’enquête
ANOFEL 2007, par 81 % des laboratoires de mycologie. Tous ces laboratoires utilisent le kit ELISA
Platelia TM Aspergillus. Ce test contient, comme
le test PastorexTM d’agglutination au latex, un Ac
monoclonal de rat EB-A2 reconnaissant les chaînes
d’au moins 4 résidus b-1-5 galactofuranoses dans les
molécules de galactomannane (4). Ce test ELISA est
plus sensible que le test PastorexTM, avec un seuil de
détection de 1 ng/ml au lieu de 15 ng/ml.
Sur une série de patients autopsiés, l’antigénémie
a montré une sensibilité de 92 % et une spécificité
de 96 % pour le diagnostic d’AI (5). Ce test a l’avantage de donner un résultat positif avant l’apparition
des signes radiocliniques et mycologiques (6). Les
résultats sont exprimés en index par rapport à un
Tableau II. Causes de faux positifs et de faux négatifs du test ELISA détectant les Ag galactomannanes (34-36).
Causes probables de faux positifs en galactomannanes
Alimentation : possibilité de translocation vers le sang de galactomannanes alimentaires (lait maternisé, riz ou aliments riches en protéines [37-39] ou en céréales, leurs dérivés et crèmes desserts
– cf. notice du kit), en fonction de l’état de la muqueuse digestive.
Patients de pédiatrie Mucite postchimiothérapie
Colonisation intestinale par Bifidobacterium : prématurés, nouveau-nés, enfants (10)
Administration parentérale de ß-lactamines hémi-synthétiques : piperacilline-tazobactam,
amoxicilline-clavulanate, etc. (11)
Réaction croisée avec d’autres champignons (Penicillium, Alternaria, Paecilomyces, Histoplasma,
Blastomyces, etc.)
Autoanticorps chez les patients avec rejet de greffe et transplantation de foie
Dialyse ou problèmes rénaux (diminution de la clairance rénale)
Contamination avec du coton
Uricase (40)
Plasma-LyteTM (41)
Gluconate de sodium
Causes probables de faux négatifs
Taux élevés d’Ac anti-Aspergillus : complexes Ag-Ac non détectés (8)
Faible relargage d’Ag pendant la croissance de certains isolats (8)
Angio-invasion limitée (ex. : si localisation sinusienne) [8]
Traitement prophylactique et préemptif par amphotéricine B (8)
Infection par d’autres espèces que A. fumigatus (moins efficace avec A. terreus [40])
Maladie chronique granulomateuse : persistance des résultats négatifs même pendant les phases
de progression de la maladie, de même avec le syndrome de Job (selon le fabricant)
12 | La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIV - n° 1 - janvier-février 2009 témoin. Le seuil de positivité de l’index, au départ de
1,5 en Europe, a été abaissé en 2006 par le fabricant
à 0,5, comme ce qui a été retenu par la FDA aux
États-Unis (7). Une limite de ce test est la possibilité
de réactions faussement négatives et faussement
positives, dont les principales causes sont données
dans le tableau II. Les hypothèses avancées pour
expliquer les faux négatifs sont : une angio-invasion limitée du champignon, une relativement faible
charge fongique, un titre d’Ac anti-Aspergillus élevé
et un faible taux de relargage d’Ag par le champignon. Le taux de réactions faussement positives varie
de 1 à 18 % selon les études (8) et constitue une
limitation gênante en pratique (tableau II). Elle est
nettement majorée dans la population pédiatrique
et dans les sérums obtenus dans les 10 jours suivant
une chimiothérapie cytotoxique ou dans les 30 jours
suivant une greffe de cellules souches hématopoïétiques (9). Cela est en lien avec une altération de la
muqueuse intestinale (par exemple, mucite chimioinduite), facilitant la translocation dans le sang à la
fois de galactomannanes provenant d’Aspergillus
spp. ou de Penicillium spp. présents dans l’alimentation, et de l’acide lipotéchoïque de Bifidobacterium
bifidum, bactérie commensale du tube digestif des
enfants dont certains épitopes sont reconnus par le
test PlateliaTM Aspergillus (10). La contamination de
préparations injectables par des galactomannanes a
aussi été documentée, en particulier pour les ß-lactamines hémi-synthétiques (dérivés de Penicillium)
probablement à l’occasion de probables variations
des procédures de préparation (11-13). Pour dépister
cette dernière interférence, il est proposé, et certains
centres en France le font déjà, de rechercher prospectivement des galactomannanes dans les lots
d’antibiotiques avant de les injecter aux patients à
risque d’aspergillose chez lesquels un suivi régulier
de l’antigénémie galactomannane est indiqué (14).
Une des dernières interférences récemment mises en
évidence serait due au gluconate de sodium selon
une communication personnelle d’Annie Sulahian.
Une récente méta-analyse de 27 études (15) a évalué
la performance du test PlateliaTM Aspergillus pour le
diagnostic de l’AI selon les critères diagnostiques de
l’EORTC/MSG. Sur l’ensemble des patients analysés,
la sensibilité était de 71 % et la spécificité de 89 %.
Toutefois, il existait une importante hétérogénéité
des performances diagnostiques en fonction de la
sous-population de patients prise en compte. Le test
était plus performant chez les patients d’hématologie et chez les receveurs de greffe de cellules
souches hématopoïétiques comparés aux receveurs
de greffe d’organe solide.
mise au point
Indications du sérodiagnostic direct
ou indirect des aspergilloses
Les techniques fondées sur la détection d’Ac antiAspergillus dans le sérum du patient sont particulièrement indiquées pour le diagnostic des
aspergilloses, plutôt chroniques chez les patients
ayant une immunité conservée, voire exacerbée. En
revanche, les techniques de sérodiagnostic direct
(Ag galactomannanes) dans le sérum du patient
sont principalement indiquées pour le diagnostic des
aspergilloses chez les patients immunodéprimés. Une
proposition d’utilisation des différentes techniques
de sérodiagnostic fongique est détaillée dans le
tableau III.
La cinétique d’apparition des antigènes dans le sang
est généralement rapide et fugace, alors que celle
des anticorps est tardive et durable. Il en découle
que, pour pouvoir détecter une antigénémie galactomannane avec une sensibilité acceptable, il est
recommandé de répéter les prélèvements sanguins
au moins deux fois par semaine (la fréquence minimale étant hebdomadaire), alors que les prélèvements pour la recherche d’Ac seront plus espacés. En
cas de résultat positif en Ag, la démarche conseillée
est de tester à nouveau ce même prélèvement en
parallèle avec un nouveau sérum. Globalement, la
détection d’Ag galactomannanes combinée avec
les autres techniques de diagnostic contribue à
améliorer le diagnostic d’AI chez les patients à risque.
Comme tous les tests diagnostiques en mycologie,
un résultat de sérodiagnostic, qu’il soit positif ou
négatif, s’interprète toujours en fonction de la cinétique du biomarqueur, en considérant les données
des autres investigations et le contexte particulier
de chaque patient.
Sérodiagnostic des candidoses
invasives
Le diagnostic de candidose invasive est difficile.
C’est une infection due à un champignon ubiquitaire dont les signes cliniques sont aspécifiques.
Elle se traduit le plus souvent par une simple fièvre
résistante à un traitement par antibactériens à
large spectre (16, 17). La population de patients
particulièrement à risque est variée, comprenant
les patients immunodéprimés ou immunocompétents hospitalisés en services de soins intensifs, de
réanimation médicale, de réanimation postchirurgie
digestive et cardiovasculaire, d’onco-hématologie
et de néonatologie, ou encore les grands brûlés ou
les personnes ayant subi une d’organe (18). Les
facteurs de risque sont connus, chirurgie digestive, antibactériens à large spectre, alimentation
Tableau III. Proposition d’indications de sérodiagnostic fongique chez les principaux patients à risque d’aspergillose et/ou de candidose (hors allergies).
Présentation du patient
Risque fongique
Tests de sérodiagnostic
Remarques
Parenchyme pulmonaire remanié (caverne, Aspergillome
emphysème…)
Ac Asp
Sérologie positive dans 90 % des cas
Pneumopathie d’évolution chronique
(maladie de système + corticoïdes, ...)
Aspergillose chronique
Ac Asp
Ag Asp
Associer l’imagerie (radiologie/scanner)
Ag pas toujours positif, fort positif possible
Ag Asp sur LBA
(en plus de l’examen direct et de la culture)
Greffe (organes solides)
Prégreffe et J0
Postgreffe foie, rein, cœur
Postgreffe poumon
Candidose invasive
Aspergillose invasive
Ac Asp, Ag Asp, Ac Ca
Ag Asp pour tester si faux positif lié au traitement
Idem + Ag Ca si possible
Ag Asp, Ag Ca × 1/semaine puis en Poumon : associer l’imagerie + Ag Asp dans LBA ;
ambulatoire Ag Asp, Ac Asp × 2/mois baisse de la fréquence des examens après 1 an
Candidose invasive
Ac Ca × 1/semaine
Fièvre résistante aux ATB
Chirurgie digestive
(patients immunocompétents)
Ag Ca × 2/semaine si possible
Montée des Ac = augmentation de la colonisation
d’où majoration du risque d’infection invasive
Baisse brutale des Ac, due à un relargage massif
d‘Ag (avec formation de complexes immuns ?)
Soins intensifs
Candidose invasive
Ac Ca × 1/semaine
Ag Ca × 2/semaine si possible
Immunodépression transitoire possible si longs
séjours
Soins intensifs avec pneumopathie ou
immunodépression
Aspergillose invasive
Candidose invasive
Ag Asp × 2/semaine Ag
Ca × 2/semaine si possible
Ac Ca × 1/semaine
Ag Asp positifs, faire un scanner, Ag Asp sur LBA
Pour les candidoses : montée des Ag, puis baisse
des Ag coïncidant avec une montée des Ac
Ag Ca × 2/semaine si possible
Associer l’imagerie (échographie/scanner)
Douleurs + montée des enzymes hépatiques Candidose hépatosplénique
Ac : anticorps ; Ag : antigène ; Asp : Aspergillus ; Ca : Candida ; IFI : Immunofluorescence indirecte ; CoES : coélectrosynérèse ; IEP : immunoélectrophorèse ; LBA : lavage
broncho-alvéolaire ; ATB : antibiotique ; ED : examen direct.
La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIV - n° 1 - janvier-février 2009 | 13
mise au point
Intérêts et limites
du sérodiagnostic fongique
parentérale, voie veineuse centrale, neutropénie
profonde, chimiothérapie, et chez les nouveau-nés,
poids à la naissance inférieur à 1 kg (18, 19). La
porte d’entrée de l’infection est souvent digestive
ou cutanée, certaines levures étant des saprophytes
des muqueuses (C. albicans, C. glabrata) ou de la
peau (C. tropicalis, C. parapsilosis). L’infection peut
être secondaire à une infection locale (cathéter,
péritoine, poumon). L’imagerie apporte une aide au
diagnostic dans certains cas seulement, comme les
candidoses hépatospléniques (forme de candidose
disséminée retrouvée préférentiellement chez les
patients ayant eu un épisode de neutropénie).
Selon les critères de l’EORTC (3), la mise en évidence
d’une levure dans un prélèvement profond normalement stérile signe une infection fongique invasive.
L’examen direct du prélèvement dans les heures qui
suivent fournit déjà des renseignements importants. Il
est accompagné d’une mise en culture, qui nécessite
un délai minimal de 24 heures avant de se positiver.
Ce type de prélèvement invasif (biopsie), comme nous
l’avons mentionné pour le diagnostic d’AI, n’est pas
toujours possible chez les patients fragilisés (hémodynamiquement instables et/ou thrombopéniques).
Une hémoculture dans laquelle on isole une levure
signe une fongémie (20), mais la sensibilité de cet
examen reste encore trop faible, les levures restant
apparemment peu de temps dans la circulation générale (16), en dépit des progrès techniques liés à l’utilisation d’automates et de milieux de culture fongiques
spécifiques. Là encore, il faut tenir compte d’un délai
moyen de 3 jours entre la date du prélèvement et
celle de la détection du champignon par le système
de culture (21). Cela a pour conséquence de retarder
la mise en route d’un traitement antifongique, ce
qui est associé à une augmentation de la mortalité
(22). De plus, toutes les candidoses invasives ne se
manifestent pas par des hémocultures positives, en
particulier en cas d’infections mixtes bactériennes et
fongiques, qui constituent environ 18 % des fongémies graves (23), les bactéries inhibant la culture
des levures. Contrairement aux techniques de sérodiagnostic, la culture offre l’avantage de permettre
d’identifier l’espèce de levure responsable et de tester
sa résistance in vitro aux antifongiques. L’indication
de recherche d’Ag et/ou d’Ac de Candida est à définir
dans l’ensemble du contexte clinico-biologique
d’un patient à un moment donné, et son résultat
ne peut s’interpréter isolément ni, a fortiori, sur un
seul sérum (tableau III). Il faut aussi définir le but
recherché : diagnostic précoce pour une mise en route
rapide d’un traitement présomptif ou diagnostic de
certitude (24).
14 | La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIV - n° 1 - janvier-février 2009 Sérodiagnostic indirect des candidoses
D’après l’enquête ANOFEL, tous les laboratoires
de mycologie pratiquent des recherches d’Ac antiCandida, avec des techniques de dépistage et, éventuellement, de confirmation. Différentes études ont
souligné l’importance de la détection d’Ac pour le
diagnostic des candidoses invasives, puis la détection d’Ac chez des patients simplement colonisés
a induit le doute sur l’utilité cet examen. Il faudrait
en effet être capable de différencier colonisation et
infection. Toutefois, il s’agit d’un processus dynamique, et il est actuellement bien admis que la
colonisation des sites superficiels est un facteur
de risque de candidémie. Cette colonisation peut
être estimée, en particulier par l’indice de Pitet,
en réalisant des prélèvements multiples et répétés
pour le suivi mycologique d’un patient. Ce type
de démarche est lourd dans les grands centres,
où les patients à risque sont nombreux (16). Il est
théoriquement plus simple de suivre la cinétique
du taux d’Ac chez ces patients et d’interpréter une
sérologie positive comme indiquant une colonisation ou un foyer fongique profond selon le contexte
du patient.
L’hémagglutination indirecte (Fumouze) est la technique la plus utilisée d’après l’enquête ANOFEL.
Les trois autres techniques fréquemment utilisées
sont l’IFI “maison”, l’électrosynérèse “maison” et
l’ELISA (majoritairement Platelia TM Candida Ac,
BioRad). ELISA est une technique généralement
très sensible ; or, la plupart des kits ELISA Ac antiCandida travaillent avec des dilutions sériques de
l’ordre du 1/100. Ces ELISA présentent beaucoup de
positifs en IgG chez les témoins (2 à 4 sur 10 patients
testés) et chez les patients à risque sans colonisation ni fièvre résistante aux antibiotiques (8 à 10 sur
10 patients testés) [25]. Ces kits permettent aussi la
détection des IgM et des IgA, ce qui pourrait aider
au diagnostic, comme l’ont montré de rares études
(18, 26). Pourtant, aucun laboratoire n’a déclaré
pratiquer systématiquement ces trois recherches
en parallèle.
Deux kits préconisent des dilutions plus importantes
des sérums (kits Serion ELISA classic, Orgentech,
et Platelia TM Candida Ac). L’un a établi, d’après
sa notice, un seuil pour les IgG de telle sorte que
90 % des donneurs de sérums testés obtiennent un
résultat négatif ou limite. Ce dernier kit permet aussi
la recherche d’IgM et d’IgA. Le second recherche
l’ensemble des immunoglobulines et aurait, toujours
d’après sa notice, 2,3 % de faux positifs sur des
sérums tout-venant.
mise au point
Il est important de souligner que les kits sont
préparés avec des Ag de C. albicans, qui est responsable de seulement 50 % environ des candidoses
invasives (alors qu’A. fumigatus est impliqué dans
plus de 80 % des aspergilloses). D’autres espèces
de Candida émergeant en pathologie humaine, il est
nécessaire de vérifier que les techniques sérologiques
sont capables de détecter les anticorps correspondant à l’ensemble des Candida les plus fréquemment
impliqués en pathologie humaine.
Certains patients ont naturellement des taux élevés
d’anticorps, mais ces taux pourront rester stables
tout au long du suivi, comme cela a été observé pour
11,5 % des patients d’hématologie en aplasie selon
l’expérience personnelle de F. Persat. Chez les patients
jugés à risque, c’est donc la cinétique du taux d’Ac qu’il
faut suivre, par rapport à une valeur de référence (par
exemple celle obtenue par une sérologie pratiquée
à l’admission dans le service). Une élévation de ces
taux indique un accroissement de la colonisation ou
la survenue d’une infection invasive. Dans ce cas,
une cartographie du nombre de sites colonisés par
les levures peut aider à faire le point. Pour d’autres
patients sans Ac détectés à l’admission, une séroconversion sera recherchée. Parfois, une baisse brutale du
taux d’Ac est observée dans un contexte d’infection,
probablement liée à un largage d’Ag dans le sang selon
l’expérience personnelle de P. Delaunay. La fréquence
de surveillance du taux d’Ac ne fait actuellement pas
l’objet de consensus et elle dépendra du contexte du
patient. Classiquement, le suivi de l’évolution des Ac
est réalisé tous les 15 jours pendant la période à risque.
Dans certains cas, une surveillance hebdomadaire est
justifiée, afin de détecter au plus tôt d’éventuelles
variations d’anticorps.
Sérodiagnostic direct des candidoses
Les travaux sur la détection des Ag de Candida ont
débouché sur la commercialisation du kit ELISA
PlateliaTM Candida Ag. L’Ag recherché est de type
mannane, composant majeur de la paroi des Candida,
capable de former des complexes immuns avec les
Ac correspondants. Ces Ag ont une demi-vie courte
et sont éliminés au niveau du foie et des reins (27).
La détection s’effectue à l’aide de l’Ac monoclonal
EB-CA1. La sensibilité est de 80-100 % pour C. albicans, C. glabrata ou C. tropicalis, et serait de 40-50 %
pour C. krusei et C. parapsilosis, dont la paroi est
moins riche en mannanes (24).
Dix-sept des laboratoires ayant répondu à l’enquête
ANOFEL pratiquent la recherche des Ag Candida
(dont 64 % à l’aide du kit ELISA PlateliaTM Ag). Les
raisons pouvant expliquer la diffusion restreinte
de la recherche d’Ag Candida peuvent être liées
à la mise en place délicate de la technique, qui
nécessite un matériel performant, et au fait que
certains laboratoires sont confrontés à des résultats
faussement positifs dont les causes restent inexpliquées. Les Ag recherchés sont des molécules
polysaccharidiques, comme les Ag d’Aspergillus,
mais il existe trop peu de données sur l’origine des
résultats faussement positifs. Seuls sont documentés
les faux positifs lors de traitement à l’hydroxyéthylamidon (type Hestéril® 6 %) chez des patients
hospitalisés en unité de soins intensifs (selon le
fabricant).
Indications du sérodiagnostic direct
ou indirect des candidoses
Les études portant sur la cinétique des Ag et Ac de
C. albicans ont mis en évidence une bascule entre les
taux d’Ag et d’Ac au cours du temps pendant l’infection (2). Dans cette étude portant sur 43 patients,
la sensibilité atteignait 80 % lorsque les deux techniques étaient associées, alors qu’elle était de 40 %
pour ELISA Ag et de 53 % pour ELISA Ac utilisées
isolément. Une étude rétrospective a rapporté que
la détection d’Ag ou d’Ac est positive dans 47 % des
cas jusqu’à 5 jours avant la mise en évidence de la
levure par hémoculture (21). Cette même étude a
montré qu’en règle générale les patients de chirurgie
présentent d’abord des taux positifs d’Ac, puis d’Ag,
puis des isolements de levures sur hémoculture.
Inversement, les patients d’hématologie présentent
d’abord des taux positifs d’Ag, puis d’Ac, en fonction
de la sortie d’aplasie. Le suivi de l’évolution des taux
d’Ag mannanes en parallèle avec celle des Ac antimannanes est donc préconisé par ces auteurs pour la
détection des candidoses invasives (tableau III).
Sérodiagnostic des autres
infections fongiques
Sérodiagnostic de la cryptococcose
La recherche d’Ag est rapide et très efficace pour la
détection des cryptocoques, en particulier chez les
patients VIH+, dans le sang, le LCR pour les formes
méningées et le LBA pour les formes pulmonaires (28).
Elle est réalisée dans plus de 92 % des laboratoires
de mycologie ayant répondu à l’enquête ANOFEL.
La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIV - n° 1 - janvier-février 2009 | 15
mise au point
Intérêts et limites
du sérodiagnostic fongique
L’Ag recherché est le glucurono-xylomannane. Ce
composant majeur de la capsule de cette levure est
une molécule stable dont la clairance est lente dans le
sang. Les techniques utilisées sont commercialisées :
il s’agit de différentes techniques latex rapides ou
d’une technique ELISA. Une titration est effectuée
dans le sang et le LCR. Dans la plupart des études,
la spécificité est supérieure à 95 % (28). Des faux
positifs peuvent être observés, dus à la présence de
facteurs rhumatoïdes, d’anticorps anti-idiotypes,
d’infections par d’autres organismes (Trichosporon
asahii, Capnocytophaga canimorsus) ou une contamination avec de l’agar-agar ou des détergents. De faux
négatifs peuvent être liés au phénomène de prozone
en technique latex (trop d’Ag pour permettre une
agglutination), ce qui peut être corrigé en diluant
le prélèvement ou par un traitement préalable à la
pronase (29). Chez les patients avec sida atteints de
cryptococcose neuroméningée, un titre élevé d’Ag
dans le LCR est associé à un mauvais pronostic. Une
augmentation des titres dans le LCR pendant le traitement peut correspondre à une rechute. La corrélation
est moins évidente avec les taux sériques, mais, en cas
d’augmentation, une rechute est suspectée. Chez les
patients sans sida ayant une cryptococcose méningée,
les titres d’Ag dans le LCR diminuent lentement mais
peuvent rester élevés jusqu’à environ 6 mois (28).
Sérodiagnostic des infections
fongiques rares
Plus ponctuellement, des Ac pourront être recherchés
pour confirmer une suspicion d’infection fongique
plus rare, comme l’histoplasmose, la scédosporiose, la coccidioïdomycose, ou d’allergie d’origine
fongique. Ces recherches se feront à la demande,
dans certains centres spécialisés, ou auprès du Centre
national de référence des mycoses et antifongiques
de l’institut Pasteur à Paris. Pour l’histoplasmose, la
détection des Ac est utile au diagnostic, même si ces
Ac sont parfois absents chez les patients avec sida.
Un test de détection d’antigène spécifique d’Histoplasma capsulatum n’est disponible qu’aux ÉtatsUnis. Une positivité du test PlateliaTM Aspergillus
chez des patients atteints de formes disséminées
d’histoplasmose avec une charge fongique relativement importante a été décrite (30). Cette réaction
croisée peut apporter une aide diagnostique, le test
détectant l’Ag spécifique (plus sensible et spécifique)
n’étant pas disponible en France, et les résultats
des autres techniques diagnostiques d’obtention
moins rapide.
16 | La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIV - n° 1 - janvier-février 2009 Perspectives
Nous avons présenté des techniques visant à diagnostiquer un genre précis de champignons par la détection d’Ag et/ou d’Ac spécifiques. Des études sont en
cours pour la détection d’Ac à l’aide d’Ag recombinants
pour Aspergillus (31). La détection d’un métabolite
spécifique de C. albicans, le D-arabinitol, qui pourrait
se faire aussi dans les urines et qui est en relation avec
le taux de créatinine, n’est pas effectuée en pratique.
Un nouveau kit, le Fungitell®, sera bientôt distribué en
France (32). Ce kit détecte les glucanes, constituants
de la paroi de la majorité des champignons susceptibles d’être pathogènes. Toutefois, Cryptococcus et
les zygomycètes ne sont pas détectés. Son spectre
de détection est cependant plus large que celui des
autres kits, puisqu’il permet, en plus des Candida et
Aspergillus, de détecter les Fusarium, Scedosporium ou
Pneumocystis, sans toutefois apporter de renseignements sur l’espèce du champignon détecté. Il semble
intéressant d’intégrer la détection des glucanes,
associée a priori à la détection d’antigènes spécifique d’Aspergillus et de C. albicans dans la stratégie
diagnostique des IFI chez les patients à risque. Ce test
fournirait un critère supplémentaire pour le diagnostic
des pneumocystoses, à partir d’un prélèvement moins
invasif que le LBA.
La concurrence commerciale entre les différents fournisseurs de kits de sérodiagnostic fongique permettra
probablement d’améliorer leurs performances et,
accessoirement, de diminuer leur coût (pourtant
faible relativement au coût des traitements antifongiques). La standardisation par la commercialisation de ces techniques permettra de réaliser des
études de plus grande ampleur pour mieux établir
leur place dans la stratégie diagnostique, soit par leur
valeur prédictive positive pour renforcer un diagnostic,
soit par leur valeur prédictive négative pour écarter
un diagnostic, et pour le suivi des patients (33). Il faut
rappeler que le diagnostic précoce de ces infections
fongiques de pronostic grave reste difficile mais doit
rester un objectif prioritaire. Pour progresser dans la
connaissance des intérêts et des limites respectifs des
différentes techniques de sérodiagnostic fongique,
une étroite collaboration entre cliniciens et biologistes
est indispensable.
Remerciements
Nous remercions C. Pinel, P. Delaunay, H. Rabérin, J.-P.
Gangneux et F. Philit pour leur aide dans l’élaboration
de certaines parties de ce document, ainsi que les
biologistes des laboratoires hospitaliers de mycologie
qui ont répondu à l’enquête de l’ANOFEL.
■
mise au point
Intérêts et limites
du sérodiagnostic fongique
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