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Gériatrie
l’institution (3). » Elle rappelle le rôle que
doit jouer, dans le cadre du projet de service,
l’élaboration du plan de formation continue
des agents hospitaliers. «Il est essentiel de créer
des espaces de parole sur le lieu de travail, afin que
les soignants verbalisent leur souffrance pour se
décharger, pour se ressourcer, dit-elle. Il est im-
portant de les aider à se développer sur un plan
personnel, guidés par des psychologues. C’est d’au-
tant plus urgent que l’actuelle réflexion éthique, au
niveau des services, va porter sur l’euthanasie,
l’acharnement thérapeutique et le soulagement de
la douleur. »
Une formation nécessaire
«Il faut poursuivre l’effort entrepris de formation “à
l’éthique et aux soins palliatifs”, selon le président
de Jalmalv, mais aussi ouvrir des temps réguliers de
réflexion en équipe sur la fin de vie des malades, et
rappeler que l’euthanasie est un homicide », comme
le fait le CCNE.
Une part de l’opinion serait hantée par la peur de
la démence. Or, «jamais, dans ce pays, la dé-
mence, en tout cas pas la démence seule ou la dé-
mence à son début, dit-il, ne constituera, pour une
équipe gériatrique ou un médecin, l’argument suffi-
sant d’une exception d’euthanasie ».
Jalmalv reste opposée à la dépénalisation “du
suicide médicalement assisté”. Celle-ci peut po-
ser un problème insoluble. Quand la souffrance
pousse en effet une personne à demander la
mort, «aucun médecin, aucune équipe n’est apte à
juger la souffrance d’une personne supérieure ou in-
férieure à celle d’une autre qui pousserait le même
cri dans d’autres circonstances ».
Mais reconnaître une parole comme légitime ne
signifie pas l’exécuter à la lettre. «On sait, par
exemple, qu’une demande de mort, même réitérée,
précise le Pr Schaerer, n’est jamais tout à fait à
sens unique et qu’elle exprime aussi, au même
moment, le désir de vivre, d’être soulagé, d’être
reconnu comme personne vivante. » Jalmalv pro-
pose qu’il n’y ait pas d’exception de l’eutha-
nasie. «Si le malade exprime librement sa de-
mande de mort à un médecin qui, de son côté, lui
répond librement, les yeux dans les yeux, qu’il ne
fera pas cet acte, l’un et l’autre restent ou rede-
viennent des sujets capables de chercher ensemble
une issue, dit-il. L’issue ne réside pas dans une
solution professionnelle ou technique, mais dans un
engagement de fidélité réciproque à vivre le temps
qui reste à vivre dans une relation de vérité. Les
solutions techniques, dont les soins palliatifs font
partie, sont utilisées alors, non comme des antidotes
de la demande, mais comme des réponses aptes à
soulager, chargées du seul sens que le malade et son
médecin ont décidé de chercher ensemble. »
M.B.
(1) La Fédération Jalmalv regroupe une soixantaine d’asso-
ciations régionales. Jalmalv (Jusqu’à la mort accompagner
la vie), 132, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75010 Paris.
Tél. : 01 40 35 89 40.
(2) “Pourquoi je dis non à l’exception euthanasique”, Pr René
Schaerer, 7 mars 2000.
(3) “Entre vie et mort”, Parigot C., Poulet J., Roussel M., revue
de la fédération Jalmalv, mars 1999, n° 56, pp. 21-25.
Qu’est ce que l’euthanasie ?
Le mot euthanasie vient du grec (eu/thanatos) qui
veut dire mort douce et sans souffrance. Ce mot a
évolué en prenant des significations différentes
selon la subjectivité de chacun.
L’euthanasie consiste à «administrer volontaire-
ment à un malade, à un handicapé ou à un blessé
incurable, dans le but d’abréger la durée de sa souf-
france, une drogue ou un produit toxique qui met
rapidement fin à sa vie, selon le Pr Schaerer, prési-
dent de la Fédération Jalmalv. L’euthanasie est dite
volontaire quand elle répond à la demande d’un
patient et involontaire quand elle est réalisée sans
qu’il l’ait demandée. Mais «l’arrêt de soins dispro-
portionnés ou superflus et l’administration de mé-
dicaments qui soulagent, comme la morphine,
n’ont rien à voir avec l’euthanasie »,même «si un
usage malencontreux a parfois désigné de tels actes
comme une euthanasie “passive” ; même si, dans
les situations que vivent les soignants, la distinction
est parfois difficile à faire entre un acte volontaire
qui tue et un acte de soin authentique ».
©Alix-Phanie
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