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La Lettre de l’Infectiologue - Tome XIV - n° 8 - octobre 1999
TRIBUNE
e pronostic de l’infection à VIH s’est nettement amé-
lioré au cours des trois dernières années grâce à l’uti-
lisation des multithérapies (combinaison de plusieurs
antiviraux). Sous traitement, le contrôle de la multiplication du
virus s’accompagne d’une restauration fonctionnelle du sys-
tème immunitaire et d’une amélioration clinique. On observe
une diminution d’environ deux tiers des cas de sida, des décès
ou du nombre de journées en hospitalisation classique. Parmi
les patients suivis, environ 88 % reçoivent un traitement, et on
peut donc parler d’une “maladie chronique sous traitement”.
Plusieurs points importants, confirmés ces derniers mois, sont
susceptibles de modifier les stratégies thérapeutiques dans les
années à venir :
!Une efficacité confirmée des multithérapies permettant
d’obtenir de façon durable une charge virale plasmatique (ARN
VIH) non détectable (< 200 ou 50 copies/ml) chez un grand
nombre de patients.
!La notion d’une prise en charge au long cours avec des
effets indésirables plus fréquents que prévu conduisant à nuan-
cer le moment de l’initiation au traitement et à renforcer la rela-
tion entre les soignants et les soignés.
!La persistance du virus, sous une forme intégrée (ADN
viral), quiescente ou faiblement réplicative, au niveau des lym-
phocytes du sang périphérique, y compris chez les patients ayant
depuis plus de deux ans un ARN VIH plasmatique inférieur à
50 copies/ml.
!Une restauration immunitaire retardée sous traitement,
efficacevis-à-vis des agents infectieux endogènes ou exogènes,
mais incomplète vis-à-vis du VIH lui-même, en particulier au
niveau de la fonction CD4 amplificatrice.
Ces données suggèrent qu’en l’absence de nouvelles classes
d’antiviraux, l’éradication n’est plus l’objectif à court-moyen
terme, mais que l’on s’oriente plutôt vers l’obtention d’un état
d’équilibre immunovirologique éventuellement favorisé par une
immunothérapie.
Les points suivants ont paru particulièrement importants au
Groupe d’experts.
L’instauration du traitement antirétroviral nécessite une
démarche de préparation et d’accompagnement du
patient. L’analyse des avantages et des inconvénients de chaque
stratégie thérapeutique est nécessaire, ainsi que les possibilités
de relais à moyen et long terme. L’objectif théorique est d’ob-
tenir une baisse de la charge virale plasmatique mesurée par
PCR-ARN quantitative profonde et durable.
Plusieurs possibilités d’associations multiples d’antirétroviraux
sont envisageables pour le traitement initial. Le traitement de
référence reste l’association de 2 inhibiteurs nucléosidiques
(IN) + 1 inhibiteur de protéase (IP). Des résultats comparables
sont obtenus avec 2 IN + 1 inhibiteur non nucléosidique (INN).
La combinaison de 3 IN est efficace à court terme, mais l’effi-
cacité à long teme doit être évaluée.
À côté du succès virologique, déjà cité, il faut souligner
que 40 % des patients traités gardent une charge virale
détectable. Les causes d’insuccès sont essentiellement liées à
des problèmes d’adhésion au traitement et aux problèmes de
résistance acquise. Environ 8 % des patients sont en échec thé-
rapeutique sévère. Il s’agit surtout de patients traités de longue
date. Cette catégorie de patients nécessite, à court terme, l’ob-
tention de nouvelles molécules en association avec la colla-
boration active des différentes agences et de l’industrie phar-
maceutique.
Les tests génotypiques de résistance doivent être utilisés
pour le suivi des patients, en particulier dans les échecs
de deuxième et troisième intention. La place des dosages plas-
matiques des inhibiteurs de protéase est importante, en parti-
culier en cas d’associations médicamenteuses et d’échec thé-
rapeutique précoce.
Les anomalies métaboliques cliniques et biologiques sous
antirétroviraux sont fréquentes (plus de 50 % des patients
à deux ans), et ne sont pas seulement liées aux inhibiteurs de
protéase. Il s’agit d’une préoccupation majeure, tant pour le
court terme (arrêt des traitements par les patients) que pour le
long terme (risque cardiovasculaire).
Recommandations sur la prise en charge
des personnes infectées par le VIH : points forts
!
J.F. Delfraissy*
* Service de médecine interne, hôpital de Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre.
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