DÉPISTAGE MAMMOGRAPHIQUE ORGANISÉ en France dans cette indication.

publicité
R
E
V
U
E
D
E
P
R
E
S
S
E
Revue de presse
● A. Travade*, A. Lesur**
DÉPISTAGE MAMMOGRAPHIQUE ORGANISÉ
À une période d’enthousiasme, avec entre autres de nombreuses
publications en 1997 mettant en évidence les bénéfices du dépistage mammographique, a succédé une phase de scepticisme,
marquée par les articles de deux investigateurs danois, Gotsche
et Olsen, en 2000 : ceux-ci ne trouvèrent aucune différence de
mortalité à long terme entre les groupes de femmes dépistées ou
non. Les deux articles suivants étudiant des populations suédoises et hollandaises montrent en revanche que la diminution
de mortalité est bien réelle, visible dès l’âge de quarante ans
dans l’étude de Tabar. (Dans l’étude hollandaise, l’analyse des
décès n’a été effectuée qu’à partir de 55 ans.)
Tabar L et al. Mammography service screening and mortality in breast cancer
patients : 20-year follow-up before and after introduction of screening. Lancet
2003 ; 361 : 1405.
Otto SJ et al. Initiation of population-based mammography screening in
Dutch municipalities and effect on breast-cancer mortality : a systematic
review. Lancet 2003 ; 361 : 1411.
L’article suivant fait le point sur les connaissances actuelles
concernant les bénéfices et les inconvénients (faux positifs) du
dépistage mammographique, et fournit les arguments permettant
de mieux conseiller une femme et son médecin. En effet, il
s’agit de recommandations pour les États-Unis, où l’information
délivrée aux patientes est particulièrement importante, d’autant
plus qu’il était encore récemment conseillé de laisser la femme
choisir elle-même ! À noter un très bon graphique permettant
d’évaluer pour chaque tranche d’âge le risque de développer un
cancer du sein et d’en mourir, ou de mourir d’une autre cause.
Par exemple, à cinquante ans et pour les dix ans qui suivent,
pour mille patientes, le nombre de cancers invasifs est de 28, le
risque de mortalité par cancer du sein est de cinq, et le risque de
mourir d’une autre cause est de 55.
Fletcher SW, Elmore JG. Mammographic screening for breast cancer. N Engl
J Med 2003 ; 348 : 1672.
BOUFFÉES DE CHALEUR
Les bouffées de chaleur postménopausiques atteignent environ
deux tiers des patientes. Certaines s’atténuent avec le temps,
mais dans 20 % des cas, elles persistent au-delà de cinq ans.
Pour 10 à 20 % de ces femmes, il s’agit d’une contrainte presque
intolérable bien que non vitale ! Le traitement le plus efficace
est représenté par les estrogènes, avec ou sans progestatifs, en
fonction de la présence ou non de l’utérus. Les contre-indications et les réticences, ces dernières étant de plus en plus nombreuses avec les articles récemment parus sur les effets secondaires du THS (voir paragraphe suivant), conduisent à choisir
d’autres thérapeutiques. La publication suivante analyse les
alternatives thérapeutiques, en faisant une part importante aux
* Centre de sénologie République, Clermont-Ferrand.
** Centre Alexis-Vautrin, Vandœuvre-lès-Nancy.
La Lettre du Sénologue - n° 21 - juillet/août/septembre 2003
inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, encore peu utilisés
en France dans cette indication.
Stearns V et al. Hot flushes. Lancet 2002 ; 360 : 1851.
Les deux articles suivants traitent de façon plus ponctuelle de
l’efficacité d’un de ces inhibiteurs (l’antidépresseur paroxétine
ou Déroxat®) et de celle de deux progestatifs, l’acétate de
médroxyprogestérone i.m. ou l’acétate de mégestrol per os chez
des patientes ayant eu un cancer du sein.
Stearns V et al. Paroxetine controlled release in the treatment of menopausal
hot flashes. A randomized controlled trial. JAMA 2003 ; 289 : 2827.
Bertelli G et al. Intramuscular medroxyprogesterone versus oral megestrol for
the control of postmenopausal hot flashes in breast cancer patients : a randomized study. Ann Oncol 2002 ; 13 : 883-8.
THS
Il devient de plus en plus difficile de conseiller les patientes qui
doivent poursuivre ou entreprendre un THS. Il y a un an, en juillet
2002, la parution dans le JAMA des premiers résultats de l’étude
WHI a eu des répercussions considérables non seulement dans les
médias, mais aussi dans les groupes scientifiques français avec
apparition d’une opposition entre les recommandations émises par
l’AFEM et celles indiquées par l’AFSSAPS (quelle doit être la
durée du traitement ?). Cette étude randomisée a été interrompue
prématurément dans le groupe de femmes sous Prémarin® et
médroxyprogestérone du fait de l’apparition d’événements cardiovasculaires et a été poursuivie dans le groupe des femmes hystérectomisées sous Prémarin® seul. Le risque relatif de cancer
du sein est de 1,26 pour l’ensemble de la population de l’étude,
ce qui est celui déjà rapporté dans l’étude du Lancet de 1997. Il
n’existe toutefois pas d’augmentation du risque pour les femmes
n’ayant jamais été traitées avant le début de l’étude.
WHI Group. Risks and benefits of oestrogen plus progestin in health postmenopausal women : Principal results from the Women’s Health Initiative randomized controlled trial. JAMA 2002 ; 288 : 321.
Fletcher SW, Colditz GA. Failure of estrogen plus progestin therapy for prevention. Éditorial. JAMA 2002 ; 288 (3) : 366-8.
Collaborative Group on Hormonal Factors in Breast Cancer. Breast cancer and
hormone replacement therapy : collaborative reanalysis of data from 51 epidemiological studies of 52 705 women with breast cancer and 108 411 women
without breast cancer. Lancet 1997 ; 350 : 1047-59.
De nombreux commentaires ont été publiés tout au long de
l’année 2002-2003 sur cette étude.
Il est d’abord intéressant de relire les critères d’inclusion de l’étude :
on y apprend notamment que les femmes venant d’être ménopausées et très gênées par des signes de ménopause étaient exclues
de la randomisation de peur qu’elles ne respectent pas le principe
de l’essai, et en sortent rapidement (problème d’adhésion).
The women’s health initiative study group. Design of the women’s health initiative
clinical trial and observational study. Controlled clin trials 1998 ; 19 : 61-109.
Quelques articles ont été résolument contre la prescription de
traitement de la ménopause à la suite de la publication de cette
étude. On se souviendra entre autres de l’article de Daniel Dargent.
33
R
E
V
U
E
D
E
Dargent D. Hormonothérapie substitutive et cancer du sein. Prééminence et
limites de la médecine factuelle. Rev Prat 2002 ; 67 : 27-8.
Humphries KH, Gill S. Risks and benefits of hormone replacement therapy ;
the evidence speaks. CMAJ 2002 ; 168 (8) : 1001-10.
La majorité des auteurs a essayé de faire une analyse critique
des données, et de redéfinir une attitude face au traitement de
la ménopause. Nous retiendrons particulièrement l’article de
Philippe Bouchard qui permet une excellente synthèse, les
“critical comments” publiés dans Maturitas en 2003, notamment
par Genazzani, ainsi que l’article de Sven Skouby dans Acta
Obstetric Gynecology Scandinavia 2002, mais aussi ceux de
Manuel Neves-e-Castro, David Grimes, Monique Lê, Henri
Rozenbaum, C. Solomon, Léon Sperof.
Bouchard P. Traitement hormonal substitutif de la ménopause : les suites de la
WHI, HERS II, et autres méta-analyses : le rêve est-il brisé ? Gynecol Obstet
2002 ; 9 : 11-3.
Genazzani AR, Gambacciani M. Critical comments. Maturitas 2003 ; 44 : 11-8.
Skouby SO. Consequenses for HRT following the HERS II and WHI reports :
the primum non nocere is important, but translation into quo vadis is even
more essential. Acta Obst Gynecol Scand 2002 ; 81 : 793-8.
Neves-e-Castro M, Samsioe G, Dören M et al. Results from WHI and HERS II.
Implications for women and the prescriber of HRT. Maturitas 2002 ; 42 : 255-8.
Grimes DA, Lobo RA. Perspectives on the Women’s Health Initiative trial of
hormone replacement therapy. Obstet Gynecol 2002 ; 100 (6) : 1344-53.
Lê MG. Il n’est pas justifié d’interrompre le traitement de la ménopause après
une période d’utilisation de dix ans. Gyn Obst Fertil 2002 ; 30 : 733-6.
Rozenbaum H. Les conclusions de l’étude WHI sont-elles applicables en
France ? Rev Prat Gyn Obstet 2002 ; 64 : 29-30.
Solomon CG, Dluhy RG. Rethinking postmenopausal hormone therapy. N
Engl J Med 2003 ; 348 (7) : 579-80.
Sperof L. The impact of the women’health initiative on clinical practice. J Soc
Gynecol Investig 2002 ; 9 (5) : 251-3.
Grodstein F, Clarkson TB, Manson JE. Understanding the divergent data on
postmenopausal hormone therapy. N engl J Med 2003 ; 348 (7) : 645-50.
Dans le même temps, mais avec beaucoup moins de succès
médiatique, l’équipe de B. de Lignières publiait les données
d’une cohorte française de 3 175 femmes ménopausées suivies
pendant près de 9 ans dont plus de la moitié étaient sous THS
quasi exclusivement à base d’estradiol cutané et d’un progestatif autre que l’acétate de médroxyprogestérone. Aucune augmentation du risque relatif de cancer du sein n’a été mise en évidence chez les femmes sous ce type de THS (RR = 0,98).
De Lignières B, de Vathaire F, Fournier S et al. Combined hormone replacement
therapy and risk of breast cancer in a French cohort study of 3 175 women.
Climacteric 2002 ; 5 : 332-40.
En mai 2003, un “nouveau pavé dans la mare” apparaît puisque
contrairement aux “études d’observation précédentes”, on
n’observe aucune prévention de la maladie d’Alzheimer dans
l’étude de la WHI. L’AFEM reprend position avec la lettre de son
président H. Rozenbaum résumant la réunion de consensus
européen qui s’est tenue du 1er au 4 mai 2003 à Athènes. Cette
lettre datée du 30 juin 2003 insiste sur l’information à donner
aux patientes, le respect des contre-indications, la nécessité
d’avoir une indication précise, une prescription individuelle et
la réévaluation régulière.
Shumaker SA, Legault C, Rapp SR et al. Estrogen plus progestin and the incidence
of fementia and mild cognitive impairment in post menopausal women. JAMA
2003 ; 289 (20) : 2651-62.
Rapp ST, Espeland MA, Shumaker SA et al. Effect of estrogen plus Progestin on lobal cognitive function in postmenopausal women. JAMA 2003 ; 289
(20) : 2663-72.
Les critiques précédemment émises sur l’âge des patientes ne
permettant pas de réaliser contrairement à ce qu’affirment les
34
P
R
E
S
S
E
auteurs, une prévention primaire, sont à reprendre pour nuancer
ces articles. Il en va de même pour l’article publié par J. Hays
sur la qualité de vie, très bien commenté par D. Grady, insistant
là aussi sur l’âge tardif des patientes ayant en général entre 10 et
15 ans de ménopause non traitée et ne présentant plus les symptômes qui ont pu les gêner en début de ménopause.
Hays J, Ockene JK, Brunner RL et al. Effects of estrogen plus progestin on
health-related quality of life. N engl J Med 2003 ; 348 (19) : 1-16.
Grady D. Postmenopausal Hormones-therapy for symptoms only. N Engl J
Med 2003 ; 348 (19) : 1-3.
Avant l’été, on note la parution dans La Lettre du Gynécologue
d’un dossier thématique entièrement consacré au traitement
hormonal substitutif un an après, coordonné par Christian Jamin,
qui fait une excellente synthèse.
La Lettre du Gynécologue. Juin 2003 ; 283 : 11-38.
L’été 2003 n’est pas en reste par rapport à l’été 2002 puisqu’il a
donné lieu à deux publications ; la première sur le pronostic des
cancers du sein survenus sous THS, dont les résultats sont discordants de la plupart des autres études faisant état d’un cancer
peut-être plus fréquent mais moins dangereux.
Chlebowski RT, Henddrix SL, Langer RD et al. Influence of estrogen plus progestin on breast cancer and mammography in healthy postmenopausal women.
The women’s health initiative Randomized Trial. JAMA 2003 ; 24 : 3243-53.
Gann PH, Morrow M. Combined Hormone therapy and breast cancer. A
single-edged sword. Éditorial. JAMA 2003 ; 289 (24) : 3304-5.
Enfin, le 9 août 2003, paraissait dans le Lancet la Million Women
Study, étude observationnelle qui a l’intérêt de comparer une
grande diversité de traitements, dont une partie de ceux qui sont
maintenant utilisés en France. En termes de risque relatif de cancer
du sein, l’ordre de grandeur est toujours le même : il est plus
faible avec les estrogènes seuls, quelle que soit leur voie d’administration, orale ou transcutanée (Prémarin® ou estradiol : 1,3) ;
il est de 2 avec l’association estroprogestative quels que soient
les progestatifs utilisés (médroxyprogestérone et dérivés 19-nortestostérone). Pour la première fois, on obtient un chiffre pour
la tibolone (Livial®) : 1,45. Le risque augmente avec la durée
d’utilisation, en particulier au-delà de 10 ans, notion déjà acquise.
La mortalité est accentuée mais il faut remarquer que cette augmentation est à la limite de la signification. Comme dans les
études précédentes, l’augmentation du risque disparaît dès l’arrêt
du traitement.
Cette étude a encore été peu commentée, hormis dans l’article du
Monde du 12 août. On peut toutefois d’ores et déjà s’interroger
sur le risque particulièrement faible chez les femmes ménopausées non traitées (RR = 0,63) par rapport à celui des femmes
encore réglées, ce qui a pu entraîner une surestimation du risque
associé aux traitements. À noter un excellent éditorial de Sperof
publié dans Maturitas il y a quelques jours.
Million Women Study Collaborators (correspondance to V. Béral). Breast
cancer and hormone replacement therapy in the Million women study. Lancet 2003 ; 362 : 419.
Enfin, pour terminer sur une note plus optimiste, et en ce qui
concerne le risque thromboembolique, l’étude parisienne de
Scarabin, Oger et Plu-Bureau montre que les estrogènes administrés par voie transdermique n’augmentent pas ce risque
contrairement aux formes orales.
Scarabin PY et al. Differential association of oral and transdermal estrogenreplacement therapy with venous thromboembolism risk. Lancet 2003 ; 362 : 428.
La Lettre du Sénologue - n° 21 - juillet/août/septembre 2003
Téléchargement