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La Lettre du Gynécologue - n° 293 - juin 2004
e rôle de la chirurgie de réduction tumorale dans les
tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire (TEMO)
est bien établi (1, 2). Une méta-analyse, récemment
publiée par Bristow, montrait qu’une chirurgie maximaliste de
réduction était le facteur de bon pronostic le plus puissant sur
la survie des patientes atteintes de TEMO stades III ou IV (2).
Toutefois, la place des curages pelviens et lombo-aortiques,
lors de la chirurgie initiale, est encore actuellement débattue.
Chez les patientes à un stade apparemment précoce (“stade I”
de la classification de FIGO), le taux d’atteinte ganglionnaire
varie de 2 à 20 % (3, 4). Les patientes pN+ bénéficient alors
d’un traitement adjuvant qu’elles n’auraient pas eu si le curage
n’avait pas été réalisé. Chez les patientes à un stade avancé, la
taille du résidu tumoral après d e b u l k i n g est le facteur pronos-
tique le plus important ( 2 ). Comme les TEMO sont l’une des
tumeurs pelviennes les plus lymphophiles, les curages pelviens
et lombo-aortiques devraient, en théorie, être réalisés pour que
la résection soit la plus complète possible. Cependant, aucune
étude randomisée n’a démontré la valeur thérapeutique de la
résection chirurgicale des ganglions atteints chez ces patientes.
Une étude randomisée encore non publiée, mais récemment
présentée en congrès, suggère que la survie sans cidive est
significativement améliorée chez les patientes stades III et IV
qui ont eu des curages complets, par rapport à celles à qui on a
juste réséqué les ganglions atteints fixés (83 versus 63% à 3 ans)
( 5 ). De tels résultats seraient en faveur de curages pelviens et
lombo-aortiques systématiques dans les cas l’on peut réali-
ser une résection optimale (obtention d’un résidu tumoral infé-
rieur à 1 cm dans la cavité abdomino-pelvienne). Toutefois, les
taux de survie globale étaient identiques dans les deux groupes
de cette étude (5).
Si de nombreux auteurs se sont interrogés sur la place des
curages dans le traitement initial des TEMO, aucun article n’a
étudié le pronostic des patientes présentant une cidive gan-
glionnaire traitée chirurgicalement. Le but de cette étude est
d’évaluer le pronostic et la place de la chirurgie dans les réci-
dives ganglionnaires a priori isolées.
MATÉRIEL ET MÉTHODES
Il s’agit d’une étude rétrospective sur les TEMO traitées entre
juin 1987 et novembre 2000 présentant une rechute ganglion-
naire a priori exclusive, prouvée histologiquement, et avec un
intervalle sans récidive d’au moins 6 mois après la fin du trai-
tement initial. Les critères d’exclusion étaient les suivants :
– tumeur non épithéliale ou frontière ;
progression de la maladie ou cidive dans une autre locali-
sation avant la récidive ganglionnaire ;
– absence de preuve histologique de la récidive ;
présence de ganglions atteints lors de la chirurgie de second
l o o k ou lors d’une chirurgie de duction tumorale pour réci-
dive intra-abdominale ;
existence d’autres métastases concomitantes (péritonéale,
épanchement pleural, parenchymateuses) diagnostiquées clini-
quement ou à l’imagerie (radiographie pulmonaire et/ou écho-
graphie abdominopelvienne et/ou TDM).
Toutes les patientes ont été traitées chirurgicalement. Les
modalités du traitement postopératoire pendaient des diffé-
rents protocoles appliqués au cours de la période couverte par
l’étude, des caractéristiques des métastases ganglionnaires
(nombre, localisation, existence d’une rupture capsulaire), des
traitements antérieurs administrés et de létat général des
patientes.
Les caractéristiques des patientes lors du traitement initial ont
été notées (âge, stade FIGO, traitements chirurgical et adjuvant
initiaux, taille du résidu tumoral). De même, ont été étudiés la
durée de rémission initiale (définie comme le temps séparant
la fin du traitement initial du diagnostic de la récidive gan-
glionnaire), le mode de diagnostic de la récidive et sa localisa-
tion, le traitement adjuvant administré et la survie des
patientes.
La survie globale et la survie après la première récidive ont été
calculées selon la méthode de Kaplan-Meier.
M
I S E S A U P O I N T
Récidives ganglionnaires exclusives
de tumeurs épithéliales de l’ovaire : caractéristiques,
prise en charge thérapeutique et pronostic
1
Services de chirurgie gynécologique,
2
de biostatistique,
3
d’oncologie,
4
d e
radiotrapie,
5
d’anatomie-pathologique, Institut Gustave-Roussy, 39, rue
Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif,
6
de chirurgie gynécologique, pital
européen Georges-Pompidou, 75908 Paris Cedex 15.
C. Uzan
1
, P. Morice
1
, A. Rey
2
, A. Thoury
1
, P. Pautier
3
, S. Camatte
6
, C. Lhommé
3
, C. Haie-Meder
4
, P. Duvillard
5
, D. Castaigne
1
Outcomes after combined therapy including surgical resection in patients
with epithelial ovarian cancer re c u r rence(s) exc l u s i v ely in lymph nodes
L
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La Lettre du Gynécologue - n° 293 - juin 2004
M
I S E S A U P O I N T
RÉSULTATS
Durant la période de l’étude, douze patientes ont présenté une
cidive ganglionnaire a priori exclusive de TEMO. Huit
avaient initialement étraies en dehors de notre institut et
étaient adressées pour cidive. L’âge médian des patientes
était de 51 ans (extrêmes : 42-71).
Les caractéristiques des patientes sont détaillées dans le
t a b l e a u. Le stade FIGO initial était : IA chez 5 patientes, IIA
chez une patiente et IIIC dans six cas (sans atteinte péritonéale
dans deux de ces six cas). Toutes les patientes avaient au moins
eu une hystérectomie avec annexectomie bilatérale, omentecto-
mie, biopsies péritonéales multiples et cytologie péritonéale.
Neuf patientes n’ont pas eu de curage lors du traitement initial
(huit d’entre elles avaient initialement été traitées hors institut et
la dernière avait été traitée à l’institut, son âge avait fait contre-
indiquer une lymphadénectomie). Une patiente avait eu des
curages pelviens seuls sans curage lombo-aortique initialement.
La taille du résidu tumoral était non tectable dans sept cas,
inférieure à 2 cm dans quatre cas et supérieure à 2 cm dans un
cas. Neuf pa-tientes ont reçu un traitement adjuvant par chimio-
thérapie (à base
de sel de pla-
tine). Le type
histologique de
la tumeur ini-
tiale était séreux
d a n s huit cas et
e n d o -m é t r i o ï d e
dans quatre
c a s .
La diane de
mission ini-
tiale était de 21
mois (extrêmes :
6-72). La topo-
graphie des ré-
cidives était intra-abdominale dans dix cas (pelvienne n = 5,
lombo-aortique n = 4, les deux n = 1) dont un cas avec une lésion
de carcinose centimétrique découverte lors de la chirurgie qui a pu
être réséquée, inguinale dans un cas et, lombo-aortique et susclavi-
culaire dans un cas. Le diagnostic de récidive a été réalisé devant
des signes cliniques et une évation du CA125 chez deux
patientes, une élévation du marqueur et des signes à l’imagerie
secondairement réalie (dont deux PET scan) chez neuf patientes
et sur une élévation du marqueur seul chez une patiente.
Le traitement chirurgical, réalisé lors de la récidive ganglion-
naire, a été une laparotomie dans dix cas et une adénectomie
sélective dans deux cas (un inguinale et un susclaviculaire). La
cytologie péritonéale était positive dans deux cas (dont un avec
lésion macroscopique centrimétrique visible) et négative dans
huit cas. Il na pas été relevé de complication chirurgicale
sévère. Une chimiothérapie complémentaire a été réalisée dans
dix cas et une radiothérapie dans deux cas.
La médiane de suivi a été de 50 mois (extrêmes : 13-158). Huit
patientes ont présenté une seconde récidive dont quatre avec une
nouvelle récidive ganglionnaire exclusive. Sur ces dernières
patientes, trois ont eu une nouvelle chirurgie. La survie à 5 ans aps
traitement de la récidive était de 71% (IC : 41-90%) ( f i g u r e ). La
médiane de survie sans seconde cidive était de 44 mois (extrêmes :
8-158), celle de survie globale de 114 mois (extmes : 43-172).
DISCUSSION
Dans les séries de la littérature, les localisations précises des
cidives de TEMO sont souvent non spécifiées ou, quand
elles sont spécifiées, les récidives ganglionnaires sont incluses
dans de larges séries regroupant tous types de récidives. Il
s’agit donc, à notre connaissance, de la première série sur les
localisations ganglionnaires exclusives.
Il est important d’insister sur l’impact de la chirurgie initiale sur le
risque de récidive ganglionnaire. Dans une série précédemment
publiée, colligeant 276 curages lombo-aortiques réalisés dans
notre centre, trois récidives ganglionnaires exclusives seulement
Cas n° Âge Chimiothérapie Stade* Taille du Durée de Localisation de Nombre de Traitement Localisation de Traitement de Devenir
initiale initial résidu rémission la récidive ganglions + postopératoire la seconde la seconde ***
tumoral (mois) ** récidive récidive
1 49 non IA R0 60 lombo-aortique 9 CT pleurale CT décedée
2 47 oui IIIC < 2 cm 18 lombo-aortique 3 avec RC CT peritonéale CT VAR
+péritonéale (cm) ****
3 50 oui IIA R0 60 pelvienne 2 avec RC CT - - VSR
4 56 oui IIIC R0 24 pelvienne 1 avec RC CT+RT - - VSR
5 42 non IA R0 24 lombo-aortique 1 avec RC CT lombo- lymphadénec- VAR
+sus-claviculaire aortique tomie + CT
6 52 oui IA R0 32 lombo-aortique 1 none - - VSR
7 51 oui IIIC < 2 cm 6 lombo-aortique 1 avec RC CT hile splénique splenectomie+ ct VSR
8 51 oui IIIC < 2 cm 62 lombo-aortique 15 CT pelvienne lymphadenectomie décédée
+ pelvienne + CT
9 71 oui IIIC > 2 cm 11 inguinale 1 avec RC RT péritonéale CT VAR
10 52 oui IIIC < 2 cm 13 pelvienne gauche 3 CT pelvien droit lymphadenectomie VSr
+ CT
11 48 oui IA R0 15 pelvienne 1 avec RC CT rate splénectomie décédée
12 60 oui IA R0 12 lombo-aortique 1 avec RC CT - - VSR
* Stade de la maladie selon la classification FIGO, 1987. ** CT : chimiotrapie ; RT : radiothérapie. *** VAR : vivante avec cidive ; VSR : vivante sans cidive.
**** RC : rupture capsulaire.
Tableau. Caratéristiques des patientes.
Figure.
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La Lettre du Gynécologue - n° 293 - juin 2004
ont été retrouvées ( 4 ). Dans cette série, huit des onze récidives
intra-abdominales n’avaient pas eu de curages lors de la chirurgie
initiale. Ces éléments sont en faveur d’un le thérapeutique pro-
bable de la lymphadénectomie.
Le site de tastase ganglionnaire le plus fréquent des TEO
est en lombo-aortique. Dans la littérature, on retrouve 13 à
4 0 % de N+ en pelvien et 15 à 40 % de N+ en lombo-aortique
( 6 - 8 ) . Dans l’étude réalisée dans notre centre, le taux de N+
pelvien exclusif était de 8 % et de 33 % pour les atteintes
lombo-aortiques exclusives. Au total, 92 % des N+ étaient
localisés en lombo-aortique plus ou moins associés à des loca-
lisations pelviennes (4).
La survie des récidives ganglionnaires exclusives paraît plus
élevée que dans les récidives globales (9-11).
On peut sinterroger sur la survie des patientes ayant eu
recours à la chirurgie seule dans le traitement global. En effet,
la plupart des patientes de notre étude ont eu un traitement
adjuvant. Il n’existe pas de données dans la littérature sur le
traitement par chimiothérapie exclusive des cidives gan-
glionnaires. Toutefois, certaines données sont en faveur d’une
chimiorésistance des tastases ganglionnaires (12, 13). De
plus, dans les cas de cidives globales, Kuhn retrouvait une
meilleure survie en cas de chirurgie d’exérèse associée à une
chimiothérapie par rapport à une chimiothérapie seule (38 ver-
sus 12 mois, p < 0,01) ( 1 4 ) . De me, on peut envisager la
chirurgie des secondes récidives ganglionnaires exclusives
(dans notre série, deux patientes vivantes sans récidive sur
trois nouvelles reprises chirurgicales).
Pour ce qui est du type de chirurgie d’exérèse à réaliser, il
semble recommandé de faire une lymphadénectomie complète
s’il n’y a pas eu de curages initiaux, et une adénectomie sélec-
tive dans le cas contraire.
De nouvelles techniques d’imagerie comme le TEP scan peuvent
aider à sélectionner les localisations ganglionnaires exclusives.
Cette série, certes ts limitée, montre que la survie, après
résection de la récidive ganglionnaire, semble indépendante du
stade FIGO initial. On ne retrouve pas non plus d’influence de
la durée de rémission après la fin du traitement initial. Dans la
littérature, ces deux critères modifient la survie dans les cas de
cidives globales, avec notamment un seuil de 12 mois de
rémission en dessous duquel les auteurs ne recommandent pas
de traitement chirurgical des récidives (15, 16).
CONCLUSION
On semble observer un relatif bon pronostic de ces patientes
avec récidive ganglionnaire exclusive de TEMO. Ces cas sont
rares d’autant plus si on a réalisé une lymphadénectomie com-
plète lors du traitement. La durée de rémission et le stade ini-
tial ne semblent pas influencer le devenir de ces patientes. Une
section chirurgicale de ces récidives isolées paraît donc
licite, même en cas de récidive ganglionnaire itérative.
Néanmoins, l’interprétation des résultats de cette série est limi-
tée par le nombre faible de patientes étudiées (les indications
d’une chirurgie ganglionnaire de rattrapage dans les TEMO
étant rares) et par la présence de biais de sélection (patientes
présentant une récidive a priori unique et donc de meilleur pro-
nostic que les patientes ayant des récidives multifocales). Une
étude multicentrique fraaise soutenue par la SFOG est en
cours afin d’analyser l’intérêt de cette chirurgie ganglionnaire
de rattrapage.
RÉ F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S
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M
I S E S A U P O I N T
24-26 février 2005 – Kursaal – Dunkerque – 2
e
congrès de la Société de chirurgie gynécologique
et pelvienne.
I n s c r iption et renseignements : O ffice du tourisme de Dunke rq u e. E-mail : congre s @ o t - d u n ke rq u e. f r.
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e r
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