REVUE DE PRESSE coordonné par le Dr F. Beygui L’insuffisance cardiaque est un facteur de risque de fractures orthopédiques Fractures de la hanche Toutes les fractures Cette étude prospective canadienne, qui a analysé 16 294 patients âgés de plus de 65 ans, cherche à démontrer que l’insuffisance cardiaque est un facteur de risque de fractures osseuses dans une cohorte de patients âgés s’étant présentés aux urgences entre 1998 et 2001 pour un problème cardiologique. Deux mille quarante et un de ces patients avaient consulté pour une poussée d’insuffisance cardiaque (IC) et ont été comparés aux 14 253 autres n’ayant pas présenté d’IC, mais dont 1 233 souffraient d’infarctus (avec sus-décalage de ST), 4 433 d’arythmies cardiaques, 4 966 de douleurs thoraciques, 2 067 d’angors stables et 1 554 d’angors instables (syndromes coronaires aigus sans sus-décalage de ST). Le critère principal de jugement était la survenue d’une fracture nécessitant une hospitalisation dans l’année suivant la consultation aux urgences. Comparativement aux patients sans IC, ceux qui ont consulté pour IC étaient en moyenne plus âgés (78 versus 73 ans), le plus souvent diabétiques, hypertendus, en arythmie auriculaire, atteints d’insuffisance respiratoire chronique et de maladie vasculaire périphérique (accident vasculaire cérébral, entre autres). Les patients atteints d’IC étaient généralement traités par IEC ou AA2, bêtabloquants, diurétiques de l’anse, spironolactone, AVK et hormonothérapie thyroïdienne substitutive. L’utilisation de diphosphonates et d’autres traitements de l’os3,96 Arrêt cardiaque téoporose (dont les corticoïdes) 2,17 était plus fréquente dans le Sexe féminin groupe “non-IC”. 1,26 Âge/5 ans* Dans le groupe “IC”, la mortalité à un an était de 18,1 %, versus 2,55 Biphosphonates 8,9 % dans le groupe “non-IC”. À un an, 4,6 % des patients du Arrêt cardiaque 6,34 groupe IC et 1 % du groupe 1,15 Sexe féminin “non-IC” ont présenté une frac1,67 ture (p < 0,001). La fracture de Âge/5 ans* la hanche a été plus fréquente 1,00 10,00 Odds-ratio ajusté (p < 0,001) dans le groupe “IC” * Analyse multivariée avec odds-ratios ajustés à l'âge par incréments de 5 ans. (1,3 %) que dans le groupe Figure 1. Odds-ratios ajustés : analyse multivariée “non-IC” (0,1 %). En analyse pour le risque de fracture orthopédique à un an. multivariée, la présence d’IC a été significativement associée à un risque plus important de fractures ostéoporotiques osseuses, et en particulier de la hanche. Ce risque a été 4 fois plus important dans la cohorte après ajustement à l’âge, au sexe et aux traitements associés (figure 1). L. Sabbah, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris Impact pronostique du diabète sur des patients porteurs d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée : étude prospective à 5 ans Cette étude prospective française a cherché à démontrer l’impact péjoratif du diabète dans l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée (ICFEP). En 2000, 368 patients consécutifs âgés de plus de 20 ans, hospitalisés dans la Somme pour un premier épisode d’ICFEP (FEVG > 50 %) ont été inclus. Cette cohorte comportait 96 patients diabétiques (26 %), dont 74 traités par antidiabétiques (77 %) [32 par insuline, 42 par antidiabétiques oraux] et 22 par régime seul. Ils ont été comparés aux non-diabétiques lors d’un suivi réalisé à 1, 3 et 5 ans (comparaison ajustée sur l’âge et le sexe). 6 | La Lettre du Cardiologue • n° 422 - février 2009 Commentaire Il pourrait exister un lien entre l’IC et l’ostéoporose : le taux d’aldostérone élevé dans l’IC chronique pourrait stimuler la sécrétion de calcium, provoquant une hyperparathyroïdie secondaire qui diminuerait la densité osseuse comme cela a été rapporté sur un modèle animal. Ces modifications s’atténuent sous antialdostérone et diurétiques de l’anse. Par ailleurs, le taux de vitamine D est plus bas chez les insuffisants cardiaques. Une des implications possibles de cette étude serait de systématiquement dépister (mesure de la masse osseuse) et traiter l’ostéoporose chez les insuffisants cardiaques de plus de 65 ans. Référence bibliographique Van Diepen S, Majumdar SR, Bakal JA et al. Heart failure is a risk factor for orthopedic facture. Circulation 2008;118: 1946-52. REVUE DE PRESSE A 96 Survie (%) 80 Survie attendue 88 77 79 60 50 40 Diabétiques 32 20 0 0 1 2 3 Suivi (années) 4 100 Survie relative (%) 100 5 B Non diabétiques 80 60 68 40 Diabétiques 20 0 0 1 2 3 Suivi (années) 4 41 5 Figure 2. A. Survie des patients insuffisants cardiaques à FEVG préservée et diabétiques, comparée à celle de la population générale appariée sur l’âge et le sexe. B. Survie relative (observée/attendue) des patients avec ou sans diabète. Les patients étaient âgés en moyenne de 76 ans, et 53 % étaient des femmes. Le diabète était associé à une plus forte prévalence de la maladie coronaire (36 % versus 22 %), un âge plus jeune, un IMC plus élevé, un nombre plus élevé de facteurs de risque cardiovasculaire et un taux plus élevé de traitement par IEC, statines, dérivés nitrés et inhibiteurs calciques. Au terme du suivi, le taux de mortalité à 5 ans pour l’ensemble de la cohorte était de 43,5 %, le diabète était associé à une moins bonne survie à 1 an (77 % versus 96 %), 3 ans (50 % versus 88 %) et 5 ans (32 % versus 79 %) indépendamment de l’âge et du sexe (HR = 1,77 ; p = 0,001) [figure 2]. Commentaire Le diabète apparaît ainsi comme un facteur indépendant de mauvais pronostic en présence d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée à moyen et long termes. Référence bibliographique Tribouilloy C, Rusinaru D, Mahjoub H et al. Pronostic impact of diabetes mellitus in patients with heart failure and preserved ejection fraction: a prospective five-year study. Heart 2008;94:1450-5. L. Sabbah, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris Incidence de l’insuffisance aortique après implantation percutanée d’une prothèse sur le septum interatrial Les études de suivi après fermeture percutanée de communication interauriculaire (CIA) ou de foramen ovale perméable (FOP) ont porté sur les taux de succès de la procédure, l’incidence des shunts résiduels et le risque de récidive d’événements thrombo-emboliques ; mais aucun travail ne s’est intéressé à l’effet potentiel du dispositif de fermeture sur les valves cardiaques et notamment sur la valve aortique. Cette étude a concerné 240 patients ayant subi une fermeture percutanée de CIA (70 patients) ou de FOP (170 patients) par une prothèse Amplatzer® ou Cardia®. Un échocardiogramme transthoracique et transœsophagien a été réalisé avant la procédure, puis 3 mois, 6 mois et 12 mois plus tard. Une insuffisance aortique (IA) a été retrouvée chez 43 patients avant implantation de la prothèse. Elle était modérée chez 40 patients (29 avec FOP et 11 avec CIA), et moyenne chez 3 patients (3 avec FOP). À 3 mois, on notait l’apparition d’une IA chez 9 patients et l’aggravation d’une IA préexistante chez 1 patient. À 12 mois, la survenue d’une IA touchait 12 nouveaux patients, et l’aggravation d’une IA chez 1 autre patient était signalée. Au terme des 12 mois, une IA était apparue ou s’était aggravée chez 23 patients, dont 6 avec CIA et 17 avec FOP. L’IA était centrale et modérée dans 92 % des cas, et moyenne dans 8 % des cas. Son incidence était indépendante du type de prothèse utilisée et n’était pas liée au débordement éventuel de la prothèse sur la racine aortique. Le mécanisme de l’IA pourrait être lié à une traction sur la sigmoïde aortique non coronaire, secondaire aux modifications de la géométrie du septum interauriculaire et favorisée par l’endothélialisation secondaire de la prothèse. Cela expliquerait l’apparition retardée de l’IA par rapport à l’implantation de la prothèse. B. Gallet, service de cardiologie, CH d’Argenteuil Commentaire L’apparition d’une IA, le plus souvent modérée, est notée dans environ 10 % des cas après fermeture percutanée d’une CIA ou d’un FOP. Cette complication potentielle devrait être prise en compte dans les indications de la procédure. Référence bibliographique Schoen SP, Boscheri A, Lange SA et al. Incidence of aortic valve regurgitation and outcome after percutaneous closure of atrial septal defects and patent foramen ovale. Heart 2008;94:844-7. La Lettre du Cardiologue • n° 422 - février 2009 | 7