Analyse commentée N Engl J Med 1998 ; 339 : 370-4 Étude comparative de l’efficacité du budésonide et de la mésalamine dans la maladie de Crohn active Thomsen O.O., Cortot A., Jewell D. et coll. A comparison of budesonide and mesalamine for active Crohn’s disease 17 % des patients traités par budésonide et 44 % de ceux traités par mésalamine avaient abandonné le traitement auquel ils avaient été assignés. Les deux médicaments étaient moins efficaces chez les patients ayant les poussées les plus sévères (CDAI > 300) et chez ceux ayant une atteinte colique (41 % vs 11 % et 56 % vs 23 %, pour les malades traités par budésonide et mésalamine respectivement). Après 16 semaines de traitement, 90 % des patients traités par budésonide et 100 % de ceux traités par mésalamine avaient une réponse surrénalienne normale à la stimulation par l’ACTH (p = 0,02). C Commentaire Quarante pour cent des malades inclus avaient eu une résection intestinale dans le passé. L’indice de Best médian était de 266-278 au moment de l’inclusion. Le taux de rémission clinique devenait significativement supérieur chez les malades traités par budésonide à partir de 8 semaines de traitement. Après 16 semaines, le taux de rémission clinique était de 62 % chez les malades trai- Le budésonide est un glucocorticoïde ayant un effet anti-inflammatoire puissant au niveau de l’intestin. Quatre-vingtdix pour cent du produit est métabolisé en une forme inactive par un premier passage hépatique, réduisant ainsi les effets systémiques indésirables de la corticothérapie. Les microgranules de budésonide sont entourées d’une résine qui se délite lorsque le pH est supérieur à 5,5. Les études antérieures ont montré que le budésonide a une efficacité supérieure à celle du placebo (1) et légèrement inférieure (2) ou égale (3) à une dose de 40 mg/j de prednisolone. Les effets systémiques et la suppression de la fonction surrénalienne sont inférieurs à ceux d’une corticothérapie par prednisolone. Après obtention de la rémission, le budésonide, à la dose de 3 ou 6 mg/j pendant 1 an, ne prévient pas la survenue de rechute clinique de Crohn (4-6), mais diminue la fonction surrénalienne chez 25 à 50 % des patients. L’étude de Thomsen et coll. résumée cidessus montre la supériorité du budésonide sur la mésalamine dans la maladie de Crohn modérément active, iléale ou iléo-colique droite. Le mérite de cette étude est aussi de montrer les limites ette étude multicentrique en double aveugle a été conduite dans 25 centres en Europe, Australie et Afrique du Sud. Cent quatre-vingt-deux malades ont été tirés au sort pour recevoir 9 mg/j de budésonide (Entocort ®) en une prise ou 4 g/j de mésalamine (Pentasa ®) en deux prises. Les patients inclus devaient avoir une maladie de Crohn active localisée à l’iléon terminal, à la région iléo-cæcale ou au côlon ascendant. Ceux ayant une atteinte rectale, un abcès abdominal, une fistule entérocutanée, une perforation digestive, une stomie digestive ou une résection de plus d’un mètre d’intestin grêle n’étaient pas à inclure. La prise de corticoïdes ou d’immunosuppresseurs était aussi une condition d’exclusion. La durée de l’étude était de 16 semaines. Le critère principal était le pourcentage de rémission dans chacun des deux groupes. tés par budésonide et de 36 % chez les malades traités par mésalamine (p < 0,001). Une diminution de plus de 100 points de l’indice de Best était obtenue chez 71 % des malades traités par budésonide et 51 % des malades traités par mésalamine. Le délai de rémission était plus bref avec le budésonide qu’avec la mésalamine (28 vs 84 jours ; p = 0,04). Au terme des 16 semaines de traitement, Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (12), n° 10, décembre 1998 337 Analyse commentée de l’efficacité du budésonide dans les formes sévères ou localisées au côlon distal. Le budésonide ne devrait pas être employé (sauf circonstances particulières) dans les formes sévères de la maladie de Crohn. En effet, il est déraisonnable de traiter une poussée grave par un médicament ayant une efficacité de 40 % alors que la prednisolone à la dose de 1 mg/kg/j permet d’obtenir 92 % de rémission complète au bout de 8 semaines de traitement (7). Dans ce contexte, l’efficacité prime sur les effets indésirables, généralement modestes, de la corticothérapie à forte dose pendant une période brève. Les médicaments de la poussée de Crohn peuvent être classés sur une échelle d’efficacité croissante : 5-ASA, budésonide, prednisolone à la dose de 40 mg/j, prednisolone à la dose de 1 mg/kg. À effica- cité comparable, le budésonide a moins d’effets indésirables que la prednisolone à la dose de 40 mg/j. F. Carbonnel (Paris) Références 1. Greenberg G.R., Feagan B.G., Martin F. et coll. Oral budesonide for active Crohn’s disease. Canadian Inflammatory Bowel Disease Study Group. N Engl J Med 1994 ; 331 : 836-41. 2. Rutgeerts P., Lofberg R., Malchow H. et coll. A comparison of budesonide with prednisolone for active Crohn’s disease. N Engl J Med 1994 ; 331 : 842-5. 3. Campieri M., Ferguson A., Doe W. et coll. Oral budesonide is as effective as oral prednisolone in active Crohn’s disease. The Global Budesonide Study Group. Gut 1997 ; 41 : 209-14. 4. Greenberg G.R., Feagan B.G., Martin F. et Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (12), n° 10, décembre 1998 338 coll. Oral budesonide as maintenance treatment for Crohn’s disease : a placebo-controlled, dose-ranging study. Canadian Inflammatory Bowel Disease Study Group. Gastroenterology 1996 ; 110 : 45-51. 5. Ferguson A., Campieri M., Doe W. et coll. Oral budesonide as maintenance therapy in Crohn’s disease - results of a 12-month study. Global Budesonide Study Group. Aliment Pharmacol Ther 1998 ; 12 : 175-83. 6. Gross V., Andus T., Ecker K.W. et coll. Low dose oral pH modified release budesonide for maintenance of steroid induced remission in Crohn’s disease. The Budesonide Study Group. Gut 1998 ; 42 : 493-6. 7. Modigliani R., Mary J.Y., Simon J.F. et coll. Clinical, biological and endoscopic picture of abbacks of Crohn’s disease. Evolution on prednisolone. Gastroenterology 1990 ; 98 : 811-9.