Correspondances en Onco-hématologie - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2010
191
Risques organiques
Partie I
dossier thématique
Complications✓neurologiques✓centrales
des✓chimiothérapies✓chez✓des✓patients
souffrant✓d’hémopathies✓malignes
Central nervous system complications in patients undergoing
chemotherapy for hematologic malignancy
F. Bompaire*, D. Psimaras1**, H. Taillia*, J.V. Malfuson***, J.L. Renard*, D. Ricard1*
L
es complications neurologiques des chimio-
thérapies sont fréquentes et connues des
hématologues, pour les protocoles intensifs et
avec chimiothérapies à haute dose. Elles existent aussi
pour les doses moindres, posant alors le problème de
la sensibilité interindividuelle. Schématiquement, on
distingue les complications aiguës survenant pendant
la chimiothérapie ou dans les 3 mois qui suivent le trai-
tement, et les complications retardées, qui surviennent
au-delà de 6 mois après la  n du traitement.
Complications aiguës
Les complications aiguës les plus fréquentes sont les
encéphalopathies (EP) aiguës, l’encéphalopathie pos-
térieure réversible (EPR), les atteintes cérébelleuses, les
accidents vasculaires cérébraux (AVC) et les myélites.
Encéphalopathies✓aiguës✓diff✓ uses
Dé nie par des troubles de la conscience de sévérité
variable, souvent uctuants, et pouvant s’associer à des
1 Coordinateurs du groupe
OncoNeuroTox (oncologie-
neurologie-toxicité@psl.
aphp.fr)
* Service de neurologie,
hôpital d’instruction des
armées du Val-de-Grâce,
Paris.
** Service de neurologie
Mazarin, hôpital de la Pitié-
Salpêtrière, Paris.
*** Service d’hématologie,
hôpital d’instruction des
armées Percy, Clamart.
R É S U M É
Summary
»
Les chimiothérapies sont des pourvoyeuses connues de toxicités
neurologiques aiguës et tardives. Certains tableaux comme
les encéphalopathies aiguës et lencéphalopathie postérieure
réversible sont de mieux en mieux décrits, et des hypothèses
physiopathologiques se développent. Ces toxicités sont
également décrites chez les patients greff és, mais limputabilité
des produits est diffi cile à mettre en évidence chez ces patients
du fait des polychimiothérapies intensives qui leur sont
administrées. Il est cependant démontré que le méthotrexate
et l’ifosfamide sont le plus souvent à l’origine d’encéphalopathies
aiguës. De même, le méthotrexate et la L-asparaginase sont les
principaux agents à l’origine de complications vasculaires. Avec
l’augmentation de l’espérance de vie des patients et l’utilisation
de protocoles de plus en plus intensifs, de nouveaux profi ls
de toxicité sur le mode d’atteinte cognitive parfois insidieuse
apparaissent. Le diagnostic, la prévention et le traitement (lorsqu’il
existe) de ces pathologies sont un enjeu important à l’heure
actuelle, dans une optique de qualité de vie du patient et de
reprise d’une vie sociale et professionnelle à l’issue du traitement
du cancer.
Mots-clés✓:Chimiothérapie✓–✓Encéphalopathie✓postérieureversible✓
–✓Leucopathie✓–✓Méthotrexate.
Chemotherapies are known to induce early and delayed
neurological toxicities. Acute encephalopathies and posterior
reversible encephalopathy are better known and described,
physiopathological hypothesis are beginning to develop. In
patient treated with allogenic stem cell transplantation, it is
diffi cult to understand what drug is causing the symptoms.
Methotrexate and ifosfamide are responsible for acute
encephalopathies. L-asparaginase and methotrexate
induce cerebrovascular complications. As life expectancy
increases and more and more aggressive protocols are used,
new toxicity profi les are emerging with insidious cognitive
impairment. Diagnosis, prevention, and treatment (when
existing) of these pathologies are expected at this time in order
to allow a good quality-of-life with social and professional
life after their cancer is cured.
Keywords: Chemotherapy – Posterior reversible encephalo-
pathy – Leukopathy – Methotrexate.
Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition
ASH 2O1O
American Society of Hematology
Le Rendez-vous Français
Orlando, États-Unis,
4-7 décembre 2010
Stand n° 341
Nous serons heureux
de vous recevoir sur notre stand
et de vous offrir les services :
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postales
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Correspondances en Onco-hématologie - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2010
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Risques organiques
Partie I
dossier thématique
signes neurologiques focaux (dé cit sensitif ou moteur)
ou à des épisodes convulsifs et une phalée, l’EP aiguë
a été principalement décrite chez des patients recevant
du méthotrexate (MTX) et de l’ifosfamide, mais aussi
chez des sujets traités par udarabine, vincristine ou ara-
cytine liposomale, ou encore chez des patients gre és.
Cette EP survient généralement dans les heures ou les
jours qui suivent la perfusion du produit incriminé. Elle
peut engager le pronostic vital mais peut aussi gresser
en quelques jours, après éviction de l’agent causal.
Encéphalopathies associées au méthotrexate
Le MTX est responsable d’EP aiguës di uses, décrites
principalement chez des enfants (1), soit 0,8 à 3 % des
patients (1-3), et apparaissant dès l’administration de
faibles doses, mais avec cependant un caractère dose-
pendant. L’EP aiguë au MTX survient dans les 6 heures
à 14 jours après la dernière injection (3, 4). Elle peut
aussi survenir après injection de MTX par voie veineuse
(i.v.) ou intrathécale (IT). La toxicité IT survient surtout
en association :
soit avec du MTX par voie i.v. à fortes doses (injection
IT trop proche de l’injection i.v. ou sauvetage à l’acide
folinique inadapté, contexte d’insu sance rénale) [5] ;
soit avec des injections IT d’aracytine (5).
L’IRM, réalisée précocement, est le plus souvent nor-
male, mais peut montrer des modi cations de signal
aspéci ques (6), uni- ou bilatérales, dans la substance
blanche (centres semi-ovales et corona radiata), dans
les noyaux gris centraux et dans le tronc cérébral (1).
Si la première IRM est normale, un contrôle ultérieur
n’apparaît utile quen cas d’aggravation clinique. Il n’y
a pas de réhaussement au gadolinium (1). L’IRM peut
se normaliser à distance, entre 5 jours et 3 mois après
l’apparition des signes cliniques (7, 8), ce qui distingue
ces lésions des lésions ischémiques. Dans certains cas,
des hypersignaux T2 FLAIR persistent cependant 6 mois
après l’épisode (1, 3).
La physiopathologie n’est pas connue. La toxicité du
MTX serait favorisée par des mutations de la méthy-
lène-tétrahydrofolate réductase (MTHFR) [9] et par
des variations du taux de folates et lélévation du taux
d’homocysine plasmatique au moment du traitement
(10). Néanmoins, ce point reste débattu ; la plupart des
accidents sont décrits chez des patients sans polymor-
phisme connu et, à ce jour, aucun groupe coopératif ne
prévoit d’adapter la prescription du MTX aux polymor-
phismes de MTHFR. Lévolution  uctuante et la dispa-
rition progressive des symptômes pourraient évoquer
une dépolarisation neuronale. Des taux élevés d’adé-
nosine, qui entraînent une vasodilatation cérébrale et
la modi cation de la libération de neurotransmetteurs
ont été mesurés dans le liquide céphalo-rachidien (LCR)
de patients traités par MTX.
Lévolution de l’EP liée au MTX peut être spontanément
favorable dès 2 à 5 jours. Divers traitements ont été
essayés (aminophylline, immunoglobulines i.v., acide
folinique…), mais le caractère généralement sponta-
nément résolutif de cette EP aiguë ne permet pas de
conclure à leur e cacité (3). Des séquelles sont pos-
sibles, y compris chez lenfant (2, 5), ce qui incite à la
prudence quant à une éventuelle réadministration. A n
d’éviter l’EP lors de l’utilisation de fortes doses de MTX,
il est conseillé d’assurer : le suivi de la méthotrexatémie,
le sauvetage à l’aide de l’acide folinique, l’hyperhydrata-
tion alcaline pendant les injections, et une surveillance
rapprochée du pH urinaire jusqu’à la clairance de la
molécule (11). Le taux de récidive d’EP aiguë au MTX
est évalué entre 10 et 56 % (1). Il est recommandé d’in-
terrompre dé nitivement le traitement a n d’éviter tout
dé cit neurologique constitué (3).
Lintroduction du MTX, en particulier en IT, peut parfois
se compliquer de symptômes neurologiques focaux
de survenue brutale (3). L’IRM cérébrale montre des
images pathologiques de la substance blanche avec une
diminution importante du coe cient apparent de dif-
fusion. Le caractère brutal de la symptomatologie et les
caractéristiques IRM ont inspiré son nom à cette entité
de leucoencéphalopathie de présentation pseudo-
vasculaire : delayedleucoencephalopathy with stroke-like 
presentation (DLEPS). Ce syndrome a aussi été décrit
après administration de 5- uorouracile (5-FU) et de
ses dérivés. La récupération clinique est généralement
complète (3). Dans la publication princeps, 2 patients
sur 18 ont récidivé après réintroduction du MTX (3).
Encéphalopathies associées à l’ifosfamide
Lifosfamide peut induire des EP dans 5 à 10 % des
cas (12). Des facteurs de risque ont été identi és : l’âge
élevé, une radiothérapie du système nerveux central
(SNC), la dose cumulée d’ifosfamide, l’administration
antérieure de cisplatine, l’utilisation en polychimio-
thérapie, l’hypoalbuminémie.
Cette EP se manifeste par un syndrome confusionnel
qui peut parfois évoluer vers un coma assoc à des
crises dépilepsie. Ce tableau d’EP est parfois accom-
pagné d’autres défaillances dorganes comme une
insu sance rénale etune acidose métabolique (13).
L’IRM cérébrale est normale. L’EP survient dans les
2 jours après le début des injections. Elle est le plus
souvent réversible en moins de 15 jours. Sa prévention
repose sur le fractionnement de la dose d’ifosfamide
sur 5 jours et son adaptation à la fonction rénale et à
l’albuminémie.
Correspondances en Onco-hématologie - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2010
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Complications neurologiques centrales des chimiothérapies 
chez des patients souff rant d’hémopathies malignes
Le traitement de référence consiste à arrêter l’ifosfamide
dès le diagnostic clinique d’EP et à injecter du bleu de
méthylène (50 mg toutes les 4 heures) ou de la thiamine
par voie i.v. (14) jusqu’à régression de la symptomato-
logie. La introduction de l’ifosfamide nest pas contre-
indiquée et doit être réalisée en injection plus lente
et sous traitement prophylactique par injection i.v. de
bleu de méthylène à la posologie de 50 mg toutes les
6 heures (15). Il s’agit d’une conduite à tenir empirique,
car aucune donnée de physiopathologie ne permet de
connaître le mécanisme d’action du bleu de méthylène.
Lévolution est extrêmement variable : de la guérison
complète et sans séquelles au décès du patient (16).
Encéphalopathies associées aux analogues
des purines
Fludarabine
Dès 1986, un tableau associant cécité corticale et EP
était constaté après traitement par  udarabine, même
à dose conventionnelle (17). On connaît peu l’incidence
des complications neurologiques avec la  udarabine.
Dans le contexte d’une allogre e, la fréquence de sur-
venue d’EP après traitement par udarabine est de
2,4 % (18). Cette EP serait de mauvais pronostic (survie
moyenne de 66 jours). Dans le cadre des EP aiguës,
l’IRM montre des anomalies de la substance blanche
di use (17, 18).
Nélarabine
La nélarabine, utilisée dans les leucémies aiguës
lympho blastiques (LAL) T réfractaires ou en deuxième
rechute, peut entraîner des symptômes neurologiques
centraux (convulsions, troubles de la vigilance et pha-
lées) ou périphériques fréquents (jusqu’à 38 % des cas),
avec une toxicité neurologique dose-limitante (19).
Il n’y a pas d’anomalie spéci que en imagerie.
Clofarabine
La clofarabine ne semble pas avoir de toxicité neuro-
logique centrale (20).
Busulfan
Cet alkylant, lipophile, est utilisé à forte dose dans le
conditionnement de gre e et est à l’origine de crises
convulsives. En prévention, tous les patients recevant du
busulfan sont mis sous benzodiazépines (clonazépam)
pendant le conditionnement (21).
Vincristine
La vincristine administrée par voie i.v. peut entraîner
des EP aiguës (22). Il faut alors rechercher un syndrome
de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique
(SIADH) associé et des facteurs favorisants : défaut des
émonctoires ou potentialisation par les antifongiques
azolés. Des injections accidentelles de vincristine par
voie IT et par voie intra-ventriculaire ont entrdes EP
aiguës suivies du décès des patients (23). Ces accidents
dramatiques ont été favorisés par le conditionnement
des chimiothérapies par vincristine et leur association
fréquente à des injections IT de chimiothérapie dans les
protocoles de lymphomes et de LAL. Malgtoutes les
recommandations, ces accidents répétés ont conduit
les agences de santé européennes à demander que les
injections i.v. de vincristine et les injections IT soient
plani ées à des jours di érents.
Aracytine liposomale
L’aracytine liposomale est administrée par voie IT. Son
conditionnement permet un contact prolongé du pro-
duit avec le SNC (14 jours). Des céphalées, des crises
d’épilepsie et des états confusionnels post-injection ont
été rapportés (16 % des patients). Lassociation à la dexa-
méthasone en prévention de l’arachnoïdite médullaire
doit être systématique. Une ponction lombaire trauma-
tique pourrait favoriser cette toxicité neurologique (24).
Encéphalopathies et allogreffe
Chez les patients immunodéprimés et conditionnés
par de nombreuses molécules, il est délicat, d’après la
littérature actuelle, de mettre en cause un produit précis
ou même une association (plus souvent retrouvée).
Selon la littérature (25), la transplantation de cellules
souches ou de moelle osseuse, après un condition-
nement associant des drogues neurotoxiques et une
importante immunosuppression, entraîne une toxi-
cité neurologique centrale chez 39 % des patients. Les
troubles neurologiques décrits sont très nombreux (EP,
crises d’épilepsie, troubles psychiatriques, hémorragies
cérébrales) et leur évolution est variable. Cependant,
ces complications surviennent principalement chez des
patients ayant une atteinte initiale d’un organe noble
(poumons le plus souvent).
La conduite à tenir en cas d’apparition de symptômes
neurologiques centraux chez un patient gre é médul-
laire doit permettre d’écarter les diagnostics di érentiels
curables (EPR ou infectieux ++) et consiste à interrompre
les produits les plus neurotoxiques ou ceux dont l’im-
putabilité paraît la plus forte.
Encéphalopathie✓postérieure✓aiguë✓réversible
L’EPR est une forme d’EP aiguë hypertensive, qui peut
être observée lors de pics tensionnels, lors d’une
éclampsie ou lors de l’utilisation de certains immuno-
suppresseurs ou antimitotiques. Elle peut cependant
Correspondances en Onco-hématologie - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2010
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Risques organiques
Partie I
dossier thématique
apparaître en dehors d’une hypertension artérielle
constatée. Sa dé nition est clinico-radiologique.
La symptomatologie associe : phalées, troubles visuels
(parfois cécité corticale, en règle générale réversible),
crises d’épilepsie ou confusion. La présence de signes
neurologiques en foyer doit faire rechercher d’autres
diagnostics (en priorité vasculaires). L’EPR survient dans
le mois suivant le traitement incriminé.
La liste des produits en cause s’allonge régulièrement
(26). En dehors des corticothérapies prolongées et à
fortes doses (LAL), pendant lesquelles ces accidents sont
décrits régulièrement, les polychimiothérapies de type
CHOP (doxorubicine + cyclophosphamide + prednisone
+ vincristine), l’aracytine, le MTX ou les thérapies ciblées
(anticorps monoclonaux ou inhibiteurs de tyrosine
kinase) sont régulièrement incriminés.
L’IRM cérébrale retrouve des anomalies de signal dès
les 72 premières heures ( gure) [27], bilatérales et non
nécessairement symétriques (28). Le plus souvent, on
observe un hypersignal T2 FLAIR dans les régions pariéto-
occipitales avec prise de contraste nodulaire en T1 injecté.
L’hyposignal en di usion et lélévation du coe cient
apparent de di usion (ADC) traduisent l’œdème vaso-
nique. Parfois, les lésions peuvent être étendues dans
tous les lobes, dans le tronc rébral et dans les ganglions
de la base (thalamus et noyau caudé).
La physiopathologie de cette a ection est inconnue ;
il existe trois hypothèses principales (29) :
une hypertension artérielle sévère qui dépasse les
limites d’autorégulation cérébrale avec constitution
d’un œdème vasogénique dans le cadre d’une hyper-
perfusion cérébrale ;
une vasoconstriction cérébrale avec hypoperfusion
cérébrale et œdème cérébral secondaire (vasogénique
et cytotoxique) secondaire à une hypertension arté-
rielle ;
une augmentation de la perméabilité de la barrière
hémato-encéphalique.
Des observations récentes décrivent l’association
possible avec une hypomagnésémie (29), qui serait le
facteur déclenchant de l’EPR, notamment lorsque cette
dernière est associée à l’éclampsie ou aux immuno-
suppresseurs.
La prise en charge repose sur l’arrêt du produit incrimi
et le contrôle rapide et e cace de l’hypertension ar-
rielle. En cas d’activité épileptique, les antiépileptiques
doivent être rapidement introduits. La durée totale du
traitement antiépileptique n’est pas bien dé nie ; elle
est discutée au cas par cas.
Lévolution est le plus souvent favorable après arrêt de
l’agent causal, avec récupération clinique complète en
quelques jours (7 jours en moyenne). L’IRM se normalise
dans 72 % des cas (41 jours en moyenne) [30]. Chez
les patients ayant présenté des crises d’épilepsie, la
normalisation de l’imagerie n’entraîne pas toujours la
disparition concomitante des crises (27).
En théorie, la réintroduction, en injection lente, du pro-
duit incriminé peut être envisagée si celui-ci ne peut pas
être remplacé du fait de son e cacité hématologique.
Il faut alors assurer un contrôle tensionnel optimal. Il
s’agit d’une a ection survenant le plus souvent avec
les poly chimiothérapies. On conseille alors de favoriser
la monothérapie pour éviter la récidive. On observe
quelques récidives (entre 3,8 % et 8 %), même après
plusieurs années, de pronostic non défavorable (31).
Syndromes✓cérébelleux
Des atteintes cérébelleuses toxiques ont été décrites en
début d’utilisation de l’aracytine à haute dose, utilisée
en induction et en consolidation de leucémies aiguës
myéloblastiques (32). Ce syndrome cérébelleux peut
être statique ou cinétique. Il associe ataxie, nystagmus,
dysarthrie, troubles de la coordination, vision oue,
dysmétrie. Il peut apparaître jusqu’à 1 mois après la
cure. On le retrouve plus rarement chez les patients
traités par aracytine à dose standard.
L’IRM cérébrale est le plus souvent normale ; quelques
rares hypersignaux T2 cérébelleux di us et des hypo-
signaux T1 sont crits, mais il n’y a pas de rehaussement
au gadolinium. L’apparition d’un syndrome belleux
doit fair e éliminer de principe une pathologie vascu-
laire, une localisation secondaire, ou un syndrome
Figure. Encéphalopathie postérieure réversible chimio-induite.
Patiente âgée de 20 ans ayant présenté une crise convulsive dans les jours qui ont suivi une cure
de ciclosporine pour une aplasie médullaire idiopathique. Il existe un hypersignal FLAIR dans
la partie postérieure du cerveau associé à une prise de contraste dans la même région à l’IRM
cérébrale. Régression complète des symptômes et des anomalies IRM après arrêt de la ciclosporine.
Correspondances en Onco-hématologie - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2010
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paranéoplasique sintégrant dans le cadre d’une dégé-
nérescence cérébelleuse ou d’une encéphalomyélo-
névrite (anticorps anti-Yo, anti-Hu, anti-amphiphysine,
anti-CV2) [33], mais la concordance de temps permet
généralement de rattacher les symptômes à la chimio-
thérapie. D’autres diagnostics di érentiels comme le
syndrome de Gayet-Wernicke ou une invasion tumorale
de la fosse postérieure peuvent être discutés.
À ce jour, aucune donnée ne permet d’envisager de
mécanisme physiopathologique. Certains facteurs de
risque sont connus et leur maîtrise permet de diminuer
la fréquence de ces accidents sévères : âge supérieur à
60 ans, insu sance rénale, cholestase. L’adaptation des
doses est nécessaire chez ces patients à risque. On ne
dépasse généralement pas 1 g/m² par injection chez
les patients de plus de 60 ans. Le débit de perfusion est
également incriminé ; la plupart des groupes coopéra-
tifs utilisent un temps de passage de 3 heures pour les
bolus (1 à 3 g/m²) d’aracytine.
La récupération n’est pas systématique ; elle peut com-
porter une phase de plateau de quelques mois avec
récupération lente. Parmi les traitements essayés, les
techniques de ushing-out semblent être e caces dans
des observations de cas isolés (34, 35). En cas de traite-
ment à haute dose, le syndrome cérébelleux peut être
régressif en diminuant la dose à 2 g/m².
AVC✓et✓pseudo-AVC
Le principal pourvoyeur d’AVC est la L-asparaginase
(environ 0,2 % à 5 % des patients) [36, 37]. Cette molé-
cule est responsable d’accidents thrombotiques (essen-
tiellement veineux) et d’hémorragies, en particulier
dans les territoires cérébraux. La présentation la plus
classique est celle de la thrombophlébite du sinus longi-
tudinal supérieur. Après une période durant laquelle le
patient se plaint de céphalées (typiquement céphalées
maximales au réveil, à distinguer des céphalées liées
à un éventuel syndrome post-ponction lombaire), un
accident aigu à type de convulsion (état de mal convulsif
possible) ou d’AVC survient. Le traitement repose sur
une anticoagulation e cace, di cile à obtenir compte
tenu du fréquent dé cit en antithrombine III induit par
l’asparaginase. Lassociation héparine et antithrombine
humaine (Aclotine®) est néanmoins contre-indiquée.
Une anticoagulation insu sante peut s’associer à une
extension de la thrombose et augmenter le risque
hémorragique (hyperpression).
Ces accidents sont secondaires à la réduction de syn-
thèse des facteurs de coagulation corrélée à l’e cacité
de la déplétion en asparagine et sont donc le pendant
de son e cacité (38). Les principaux facteurs favorisants
sont : des injections répétées pendant plus de 9 jours,
l’association aux corticoïdes et aux anthracyclines, l’exis-
tence d’une thrombophilie (37) et probablement les
chimiothérapies IT. L’IRM cérébrale est, par dé nition,
anormale (hypersignal en di usion avec baisse du coef-
cient apparent de di usion en cas d’accident artériel
à la phase initiale, suivi d’un hypersignal T2 FLAIR).
Leur prévention repose sur des mesures imparfaitement
validées et encore débattues (39). Chez deux tiers des
patients sous L-asparaginase, la récupération est rapide
et spontanée, avec cependant une mortalité pouvant
atteindre 10 % (plus élevée dans les lésions hémorra-
giques) [36]. La reprise de la L-asparaginase n’est pas
formellement contre-indiquée ; l’importance majeure
de cet agent dans le traitement de certaines hémopa-
thies (LAL en particulier) doit en e et faire rediscuter
sa réintroduction, d’autant plus que ces accidents sont
surtout décrits à l’induction, cure pendant laquelle s’as-
socient une thrombophilie maximale (liée à la maladie
elle-même) et les schémas les plus intensifs. Un traite-
ment préventif par héparine de bas poids moléculaire
(HBPM) sera alors discuté.
Les autres produits incriminés sont le MTX, la cispla-
tine, la bléomycine, la vincristine et l’adriamycine (36).
L’association L-asparaginase et MTX semblerait poten-
tialiser le risque de complications ischémiques ar-
rielles (incidence atteignant 10 %) [36].
Les anti-VEGF peuvent aussi entraîner des événements
ischémiques et hémorragiques cérébraux (40). Dans la
pratique, les patients sont souvent asymptomatiques
sur le plan neurologique et il nest pas nécessaire d’inter-
rompre le traitement.
Dans tous les cas, cette complication nécessite une
exploration cardio-vasculaire complète en milieu spé-
cialisé. Aucun facteur de susceptibilité n’a été mis en
évidence à ce jour.
Myélites
Les produits le plus régulièrement incriminés dans les
myélites sont le MTX et la cytarabine (41) injectés par
voie IT. Le risque est majoré lorsqu’ils sont associés,
notamment lors des ponctions lombaires triples avec
corticoïdes (42).
La prise en charge de cette atteinte est traitée dans l’ar-
ticle rédigé par P. Landrieu dans ce même nuro (p. 180).
Complications retardées
Ces complications, rares en l’absence de radiothérapie
associée, surviennent à distance de la chimiothérapie,
au-delà de 6 mois. Elles sont redoutables, car souvent
irréversibles.
Complications neurologiques centrales des chimiothérapies 
chez des patients souff rant d’hémopathies malignes
>>>
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