Correspondances en Onco-hématologie - Vol. V - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2010
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Risques organiques
Partie I
dossier thématique
signes neurologiques focaux (dé cit sensitif ou moteur)
ou à des épisodes convulsifs et une céphalée, l’EP aiguë
a été principalement décrite chez des patients recevant
du méthotrexate (MTX) et de l’ifosfamide, mais aussi
chez des sujets traités par udarabine, vincristine ou ara-
cytine liposomale, ou encore chez des patients gre és.
Cette EP survient généralement dans les heures ou les
jours qui suivent la perfusion du produit incriminé. Elle
peut engager le pronostic vital mais peut aussi régresser
en quelques jours, après éviction de l’agent causal.
Encéphalopathies associées au méthotrexate
Le MTX est responsable d’EP aiguës di uses, décrites
principalement chez des enfants (1), soit 0,8 à 3 % des
patients (1-3), et apparaissant dès l’administration de
faibles doses, mais avec cependant un caractère dose-
dépendant. L’EP aiguë au MTX survient dans les 6 heures
à 14 jours après la dernière injection (3, 4). Elle peut
aussi survenir après injection de MTX par voie veineuse
(i.v.) ou intrathécale (IT). La toxicité IT survient surtout
en association :
✓✓
soit avec du MTX par voie i.v. à fortes doses (injection
IT trop proche de l’injection i.v. ou sauvetage à l’acide
folinique inadapté, contexte d’insu sance rénale) [5] ;
✓✓soit avec des injections IT d’aracytine (5).
L’IRM, réalisée précocement, est le plus souvent nor-
male, mais peut montrer des modi cations de signal
aspéci ques (6), uni- ou bilatérales, dans la substance
blanche (centres semi-ovales et corona radiata), dans
les noyaux gris centraux et dans le tronc cérébral (1).
Si la première IRM est normale, un contrôle ultérieur
n’apparaît utile qu’en cas d’aggravation clinique. Il n’y
a pas de réhaussement au gadolinium (1). L’IRM peut
se normaliser à distance, entre 5 jours et 3 mois après
l’apparition des signes cliniques (7, 8), ce qui distingue
ces lésions des lésions ischémiques. Dans certains cas,
des hypersignaux T2 FLAIR persistent cependant 6 mois
après l’épisode (1, 3).
La physiopathologie n’est pas connue. La toxicité du
MTX serait favorisée par des mutations de la méthy-
lène-tétrahydrofolate réductase (MTHFR) [9] et par
des variations du taux de folates et l’élévation du taux
d’homocystéine plasmatique au moment du traitement
(10). Néanmoins, ce point reste débattu ; la plupart des
accidents sont décrits chez des patients sans polymor-
phisme connu et, à ce jour, aucun groupe coopératif ne
prévoit d’adapter la prescription du MTX aux polymor-
phismes de MTHFR. L’évolution uctuante et la dispa-
rition progressive des symptômes pourraient évoquer
une dépolarisation neuronale. Des taux élevés d’adé-
nosine, qui entraînent une vasodilatation cérébrale et
la modi cation de la libération de neurotransmetteurs
ont été mesurés dans le liquide céphalo-rachidien (LCR)
de patients traités par MTX.
L’évolution de l’EP liée au MTX peut être spontanément
favorable dès 2 à 5 jours. Divers traitements ont été
essayés (aminophylline, immunoglobulines i.v., acide
folinique…), mais le caractère généralement sponta-
nément résolutif de cette EP aiguë ne permet pas de
conclure à leur e cacité (3). Des séquelles sont pos-
sibles, y compris chez l’enfant (2, 5), ce qui incite à la
prudence quant à une éventuelle réadministration. A n
d’éviter l’EP lors de l’utilisation de fortes doses de MTX,
il est conseillé d’assurer : le suivi de la méthotrexatémie,
le sauvetage à l’aide de l’acide folinique, l’hyperhydrata-
tion alcaline pendant les injections, et une surveillance
rapprochée du pH urinaire jusqu’à la clairance de la
molécule (11). Le taux de récidive d’EP aiguë au MTX
est évalué entre 10 et 56 % (1). Il est recommandé d’in-
terrompre dé nitivement le traitement a n d’éviter tout
dé cit neurologique constitué (3).
L’introduction du MTX, en particulier en IT, peut parfois
se compliquer de symptômes neurologiques focaux
de survenue brutale (3). L’IRM cérébrale montre des
images pathologiques de la substance blanche avec une
diminution importante du coe cient apparent de dif-
fusion. Le caractère brutal de la symptomatologie et les
caractéristiques IRM ont inspiré son nom à cette entité
de leucoencéphalopathie de présentation pseudo-
vasculaire : delayed leucoencephalopathy with stroke-like
presentation (DLEPS). Ce syndrome a aussi été décrit
après administration de 5- uorouracile (5-FU) et de
ses dérivés. La récupération clinique est généralement
complète (3). Dans la publication princeps, 2 patients
sur 18 ont récidivé après réintroduction du MTX (3).
Encéphalopathies associées à l’ifosfamide
L’ifosfamide peut induire des EP dans 5 à 10 % des
cas (12). Des facteurs de risque ont été identi és : l’âge
élevé, une radiothérapie du système nerveux central
(SNC), la dose cumulée d’ifosfamide, l’administration
antérieure de cisplatine, l’utilisation en polychimio-
thérapie, l’hypoalbuminémie.
Cette EP se manifeste par un syndrome confusionnel
qui peut parfois évoluer vers un coma associé à des
crises d’épilepsie. Ce tableau d’EP est parfois accom-
pagné d’autres défaillances d’organes comme une
insu sance rénale et une acidose métabolique (13).
L’IRM cérébrale est normale. L’EP survient dans les
2 jours après le début des injections. Elle est le plus
souvent réversible en moins de 15 jours. Sa prévention
repose sur le fractionnement de la dose d’ifosfamide
sur 5 jours et son adaptation à la fonction rénale et à
l’albuminémie.