É D I T O R I A L A-t-on besoin de nouveaux anti-inflammatoires pour traiter l’asthme ? " M. Molimard* D ans ce numéro de La Lettre du Pharmacologue, V. Lagente et coll. nous rappellent les propriétés des inhibiteurs des isoenzymes de phosphodiestérases et, en particulier, l’intérêt anti-inflammatoire potentiel des inhibiteurs des phosphodiestérases de type 4 dans le traitement de l’asthme. Il est clairement établi que l’asthme est avant tout une maladie inflammatoire des bronches. En effet, le traitement de l’inflammation réduit l’hyperréactivité bronchique et la fréquence des crises. Le traitement anti-inflammatoire repose principalement sur les corticoïdes inhalés dont l’introduction a constitué une avancée majeure indiscutable dans le traitement de l’asthme. Leur spécificité tient dans leur premier passage hépatique important minimisant l’effet systémique de la fraction déglutie. Cependant, très lipophiles par nature, leur récepteur étant intracellulaire, les corticoïdes diffusent parfaitement à partir des bronches dans l’organisme. On peut donc craindre des effets secondaires systémiques à long terme chez des individus particulièrement sensibles ou en cas d’utilisation répétée de fortes doses, les corticoïdes inhalés devant être pris souvent pendant des dizaines d’années. Les corticoïdes inhalés étaient considérés initialement comme sans effets indésirables autres que locaux. Les effets secondaires ne se sont révélés qu’après plusieurs années d’utilisation. L’atrophie cutanée, les hématomes puis la cataracte ont été les premiers effets décrits. Actuellement, on n’a pas, hormis quelques cas cliniques, de certitudes quant à la possibilité de survenue d’une ostéoporose ou d’une insuffisance surrénalienne d’expression clinique. Cependant, on sait que l’utilisation de corticoïdes inhalés fortement dosés peut induire une insuffisance surrénalienne infraclinique dont la signification à long terme est incertaine. Des améliorations ont vu le jour dans la corticothérapie inhalée, avec l’amélioration des systèmes d’administration optimisant la déposition pulmonai- * Département de pharmacologie, CHU Pellegrin-Carreire, Bordeaux. La Lettre du Pharmacologue - Volume 13 - n° 3 - mars 1999 re, avec de nouvelles molécules permettant le sevrage en corticoïdes oraux de patients jusque-là non contrôlés avec des corticoïdes inhalés moins puissants. Cependant, ces améliorations ne se traduisent pas par une modification significative du rapport bénéfice/risque pour la majorité des patients. Des améliorations pouvant avoir un impact en termes de rapport bénéfice/risque sont à venir, avec une amélioration de la granulométrie des aérosols permettant peut-être un traitement plus complet de l’inflammation bronchique avec de plus faibles doses. De nouvelles molécules pourraient favoriser la formation de monomères corticoïdes récepteurs inhibant des facteurs de transcription nucléaires NFκB ou AP1 (transrépression), et ne favorisant pas la formation de dimères corticoïdes récepteurs à l’origine de la plupart des effets secondaires par transactivation de la transcription. Les autres antiinflammatoires (cromones ou antileucotriènes) sont naturellement moins efficaces que les corticoïdes inhalés dans la mesure où leur activité est moins diffuse vis-à-vis de l’ensemble des cellules et médiateurs impliqués dans l’inflammation bronchique. Un grand espoir est né avec la découverte d’inhibiteurs des phosphodiestérases de type 4 comme le rolipram, dont l’effet réduit l’activité de l’ensemble des cellules impliquées dans l’inflammation bronchique. Lors des premières administrations à l’homme, ces espoirs ont été vite déçus du fait d’effets secondaires à type de troubles digestifs ou neurologiques. La découverte récente d’inhibiteurs de phosphodiestérases de type 4 de deuxième génération ayant un site de fixation différent de celui du rolipram et moins d’effets indésirables relance l’intérêt pour cette classe thérapeutique. À terme, les inhibiteurs de phosphodiestérases de type 4 deuxième ou troisième génération pourraient présenter une alternative ou un complément à la corticothérapie inhalée, intéressants dans le traitement de l’inflammation bronchique caractéristique de ! l’asthme. 47