Dossier thématique Aldostérone et cœur Aldosterone and the heart

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thématique
Dossier
Aldostérone et cœur
Aldosterone and the heart
R.C. Gaillard*
Résumé
L
e cœur est non seulement un organe cible pour les actions hormonales mais aussi un organe endocrine qui synthétise et sécrète
des hormones. Ainsi le cœur est-il à la fois un organe cible de
l’aldostérone et de l’angiotensine II, dont il est aussi une source. Il produit de l’angiotensine II soit par la voie classique du système rénineangiotensine-aldostérone, dépendante de l’enzyme de conversion de
l’angiotensine (ECA), soit par une voie alterne indépendante de cette
dernière, la voie de la chymase (une sérine protéinase présente dans
les mastocytes). Outre ses effets classiques qui assurent l’homéostasie
hydro-électrolytique, l’aldostérone induit de nombreux effets délétères (fibrose myocardique, dysfonction endothéliale, augmentation du
PAI-1, etc.) responsables d’une augmentation de la morbidité et de
la mortalité cardiovasculaires. Associé au traitement conventionnel,
le blocage spécifique du récepteur minéralocorticoïde par de faibles
doses de spironolactone ou d’éplérénone réduit de manière très significative cette morbi-mortalité chez des patients atteints d’une insuffisance cardiaque modérée à sévère et/ou d’une dysfonction ventriculaire gauche après infarctus du myocarde.
Mots-clés : Système rénine-angiotensine-aldostérone – Chymase
mastocytaire – Fibrose myocardique – Arythmie – Récepteur minéralocorticoïde – Spironolactone – Éplérénone.
Keywords: Renin angiotensin aldosterone system – Mast cells chymase – Myocardial fibrosis – Arrhythmia – Mineralcorticoid receptor – Spironolactone – Eplerone.
L
e cœur est non seulement un
organe cible pour les actions
directes et indirectes de multiples hormones et facteurs hormonaux, mais il constitue également
un organe endocrine, au sens classique du terme, puisqu’il synthétise et
sécrète dans la circulation des substances qui vont agir à distance.
* Service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme, CHU Vaudois, 1011 Lausanne, Suisse.
Après la découverte du facteur
natriurétique auriculaire (ANF)
dans les années 1980, il a été montré
que le cœur fonctionnait comme un
véritable organe endocrine. En effet,
De Bold et al. (1) ont démontré en
1981 que l’injection à des animaux
de laboratoire d’extraits cardiaques d’origine auriculaire, mais
non d’origine ventriculaire, induisait une natriurèse et une réduction
du volume intravasculaire. Cette
activité fut attribuée à l’ANF, qui,
après son isolement et sa carac-
térisation, est devenu le peptide
natriurétique auriculaire (ANP).
Celui-ci est synthétisé par le cœur,
d’où il est sécrété dans la circulation
pour agir au niveau rénal, où il se
comporte comme un puissant agent
natriurétique, ainsi qu’au niveau
vasculaire, où il induit une vasodilatation. L’ANP agit également sur
la contractilité du myocarde. Depuis
la découverte de l’ANP, d’autres
peptides ou facteurs humoraux
cardiaques ont été identifiés. Parmi
eux, citons l’adrénomédulline, dont
la synthèse est stimulée par une
surcharge de pression et de volume
(2), et l’urocortine, un nouveau
membre des peptides de la famille
du CRH (3). Ces deux peptides sont
de puissants vasodilatateurs. En
outre, l’adrénomédulline diminue
le remodelage vasculaire par un
effet antiprolifératif au niveau de
la paroi vasculaire, et pourrait ainsi
exercer une protection contre le
développement de l’athérosclérose
et/ou de la resténose (4, 5). Le cœur
est également capable, comme nous
le mentionnerons dans cette brève
revue, de produire lui-même tous
les composants du système rénineangiotensine-aldostérone (SRAA).
Il produit encore de nombreux
autres facteurs humoraux tels que
le monoxyde d’azote (NO), l’endothéline, les éicosanoïdes et les
substances du système kallicréinekinine. Toutes ces substances sont
des modulateurs de la performance
cardiaque, que ce soit dans des
circonstances physiologiques ou
physiopathologiques (6).
Le cœur constitue aussi un organe
cible pour des hormones et certains
facteurs humoraux, comme les
catécholamines, les substances du
SRAA, les estrogènes, la testos-
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térone, l’insuline, ainsi que pour
l’hormone de croissance et les
sécrétines peptidiques de l’hormone de croissance (6-9). Ainsi,
dans l’insuffisance cardiaque, le
cœur est incapable d’assurer correctement sa fonction de pompe, et la
baisse du débit cardiaque qui en
résulte entraîne une augmentation
des concentrations plasmatiques
de plusieurs substances actives au
niveau cardiovasculaire, telles les
catécholamines, l’angiotensine II,
l’aldostérone, la vasopressine et
l’endothéline. L’action de toutes
ces substances a pour but de maintenir la pression de perfusion périphérique. À long terme, toutefois,
les actions de ces hormones se
révèlent dommageables, car elles
sont responsables d’effets délétères sur la structure et la fonction
cardiaques, et contribuent ainsi
paradoxalement à l’aggravation
de la dysfonction cardiaque. L’activation de ces systèmes neurohormonaux sert de marqueur de
l’insuffisance cardiaque et constitue
ainsi une cible thérapeutique. Parmi
ces hormones, il a été récemment
démontré que les composants du
SRAA ont effectivement des effets
spécifiques et néfastes sur le cœur
et les vaisseaux, et que le blocage
de leur action pourrait ainsi être
bénéfique.
Le système rénineangiotensine-aldostérone
Le SRAA préserve l’homéostasie
circulatoire lors d’une perte de sel
et d’eau résultant par exemple d’une
transpiration intense et prolongée,
de vomissements ou d’une diarrhée.
La rénine, l’angiotensine II et l’aldostérone sont des éléments clés de
ce système. La rénine, synthétisée
par l’appareil juxtaglomérulaire du
rein, produira le clivage de quatre
acides de l’angiotensinogène circulant (le précurseur hépatique de
tous les peptides de l’angiotensine)
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pour former l’angiotensine I, un
décapeptide biologiquement inactif.
L’enzyme de conversion de l’angiotensine (ECA) qui est liée à la
membrane des cellules endothéliales
effectue ensuite le clivage de deux
acides aminés de l’angiotensine I
pour engendrer l’angiotensine II.
La chymase mastocytaire
L’ECA est donc une enzyme indispensable à la génération de l’angiotensine II. Dans le cœur, il existe
cependant une voie alterne ne
passant pas par l’ECA, mais impliquant l’α-chymase, une enzyme
similaire à la chymotrypsine qui est
exprimée dans les granules sécrétoires des mastocytes cardiaques.
La présence d’une telle voie a été
démontrée in vitro, puisque, dans
des homogénats de tissu cardiaque
humain, 75 % de l’angiotensine II formée sont dépendants de
la chymase, alors que seuls 25 %
le sont de la voie classique de
l’ECA (10, 11). Diverses études
ont confirmé que l’angiotensine II,
dans les divers tissus d’origine
cardiovasculaire, est dépendante de
la voie de la chymase plutôt que de
la voie classique de l’ECA, puisque
la production d’angiotensine II dans
ces tissus est bloquée à près de 90 %
par des inhibiteurs de la chymase
(12-14).
La chymase est stockée dans les
granules des mastocytes sous forme
inactive, en raison d’un pH à 5,5
dans ces granules. Le pH optimal
pour l’activité enzymatique est
compris entre 7 et 9, situation
rencontrée lors de la sécrétion de
la chymase après activation des
mastocytes présents dans un tissu
lésé ou inflammatoire (15). L’activité chymasique ne s’exerce qu’au
niveau tissulaire local, car de puissants inhibiteurs de la chymase sont
présents dans la circulation sanguine
et bloquent immédiatement son activité enzymatique (15).
Il existe deux types de chymase, la
forme α, qui prédomine notamment
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chez l’homme, le singe et le mouton,
et la forme β, que l’on trouve chez
le rat et la souris (16). La chymase
cardiaque humaine présente une
très grande spécificité pour l’angiotensine I, ce qui la distingue
d’autres enzymes impliquées dans
la production de l’angiotensine II,
telles l’ECA, la kallicréine, la
cathepsine et les autres chymases
(10). En outre, la chymase cardiaque
humaine, au contraire de l’ECA, ne
dégrade pas l’angiotensine II ni les
autres peptides comme la bradykinine, la substance P et la gonadolibérine (10).
La chymase mastocytaire contribue
non seulement à la transformation de
l’angiotensine I en angiotensine II,
mais elle participe aussi à la sécrétion et à l’activation de la cytokine
IL-1β, une cytokine pro-inflammatoire, et du TGF-β1, une cytokine
qui est impliquée notamment dans
l’hypertrophie et la fibrose cardiaque
(17, 18). La chymase active le TGFβ qui se trouve sous forme inactive
ou latente dans les mastocytes (18).
Les mastocytes sont donc, par ce
mécanisme, impliqués dans des
processus pathologiques caractérisés par des événements inflammatoires et fibrogéniques tels que la
fibrose pulmonaire (19), l’infarctus
du myocarde et la fibrose myocardique post-transplantation (20, 21).
Toutes ces observations suggèrent
qu’une inhibition de ces effets par
des inhibiteurs de la chymase pourrait être utilisée à but thérapeutique
pour prévenir les maladies cardiovasculaires et la fibrose.
En plus des effets susmentionnés,
l’α-chymase est aussi capable de
former les endothélines de 31 acides
aminés, de dégrader l’endothéline 1,
de modifier le métabolisme lipidique et d’endommager la matrice
extracellulaire (22).
L’ a n g i o t e n s i n e I I exe r c e d e
nombreuses actions pour maintenir
l’homéostasie circulatoire, induisant la constriction des artérioles
au niveau des circulations rénale
et systémique, ainsi que la réabsorption du sodium au niveau des
segments proximaux du néphron.
L’angiotensine II stimule également la sécrétion d’aldostérone
responsable d’une réabsorption du
sodium (en échange du potassium)
au niveau des segments distaux du
néphron, ainsi que dans le côlon,
les glandes salivaires et sudoripares.
Lorsque le volume intravasculaire
est réduit, l’angiotensine II est le
stimulus principal de la production
d’aldostérone, qui peut cependant
aussi être stimulée par le potassium,
l’ACTH, les catécholamines, l’endothéline et la sérotonine d’origine
mastocytaire. Parmi ces stimuli de
l’aldostérone, le potassium a un rôle
physiologique important, puisqu’il
permet de maintenir son homéo­
stasie grâce à la capacité de l’aldo­
stérone, dont il stimule la sécrétion,
à augmenter l’excrétion potassique
dans les urines, les selles, la sueur et
la salive (23). L’aldostérone permet
ainsi de prévenir l’hyperkaliémie en
cas d’apport potassique élevé dans
l’alimentation ou après un exercice
physique intense qui entraîne une
sortie de potassium des muscles.
L’aldostérone produit deux types
d’action : des modifications immédiates de conductances ioniques,
ainsi que l’induction différée de
gènes cibles qui survient après
liaison sur son récepteur intracellulaire, le récepteur des minéralocorticoïdes (MR). Son action principale
consiste à augmenter la synthèse
et l’activité des canaux sodiques
amiloride-sensibles et la Na/KATPase membranaire des cellules
du tubule contourné distal et du
tube collecteur rénal pour aboutir à
la réabsorption du sodium. Comme
nous le verrons ci-après, l’aldostérone, parallèlement à cette action
essentielle de réabsorption sodique,
exerce d’autres actions, notamment
sur le système cardiovasculaire.
Le récepteur MR de l’aldostérone est
un facteur de transcription, membre
de la superfamille des récepteurs
nucléaires, qui comprend les récepteurs aux hormones stéroïdes/
thyroïdes et à l’acide rétinoïque. Ces
récepteurs sont classiquement loca-
lisés dans des cellules épithéliales
(côlon, reins, glandes salivaires et
sudoripares). Des études récentes
ont toutefois démontré que les MR
pouvaient également être présents
dans des tissus non épithéliaux tels
que les organes circumventriculaires
du cerveau, le cœur et les vaisseaux
sanguins. Les domaines de fixation
sur l’ADN et de liaison au ligand
du MR et du récepteur des glucocorticoïdes (GR) ont une grande
homologie de séquences. Pour cette
raison, le MR peut également lier le
cortisol avec la même affinité que
pour l’aldostérone. Le cortisol peut
être un véritable concurrent pour
l’aldostérone, car sa concentration
plasmatique est 100 à 1 000 fois
supérieure à celle de l’aldostérone.
Aussi, pour “protéger” le MR des
glucocorticoïdes, les cellules disposent-elles d’une enzyme, la 11-βhydroxystéroïde deshydrogénase
(11-β-HSD) de type 2, qui transforme le cortisol (actif) en cortisone, inactive car incapable de se
lier au MR. Cela suppose donc que,
dans les types cellulaires spécifiquement répondeurs à l’aldostérone, il y ait une colocalisation de
la 11-β-HSD 2 et du MR. Une telle
colocalisation a été vérifiée dans le
rein, et elle est aussi présente dans
le cœur humain (24).
Synthèse de l’aldostérone
La synthèse de l’aldostérone a lieu
dans le cortex surrénalien, où la
P-450 aldostérone-synthase, sous
contrôle de l’angiotensine II et du
potassium, et plus faiblement de
l’ACTH et du sodium, catalyse
cette synthèse à partir de la désoxycorticostérone. Des sites de production extrasurrénaliens ont cependant
été identifiés. Il s’agit du cœur, de
l’aorte, de l’artère pulmonaire et
du cerveau. Un SRAA complet a
été mis en évidence au niveau du
cœur (25), qui possède ainsi l’ensemble de l’équipement enzymatique nécessaire à la production
d’aldostérone (26). Le cœur est
également un organe cible pour
les effets de l’aldostérone, puisque
le messager du MR est abondant
dans les cardiomyocytes et la paroi
endothéliale des artères principales
(24). La concentration tissulaire
cardiaque d’aldostérone, qui est
déjà 15 fois supérieure à celle du
plasma, peut encore augmenter de
deux à trois fois dans le modèle
murin de situation postinfarctus par
ligature coronaire (27). Toutefois,
la contribution cardiaque aux taux
plasmatiques d’aldostérone paraît
non significative comparativement
à celle du cortex surrénalien (28).
Si elle ne contribue pas aux taux
circulants de cette hormone, elle
joue certainement un rôle paracrine
et autocrine important au niveau
cardiaque. Il est intéressant de noter
que le sel a une fonction régulatrice
différente sur l’aldostérone plasmatique et sur l’aldostérone cardiaque.
En effet, un régime hypersodé chez
le rat normotendu induit une diminution de l’aldostérone plasmatique, alors qu’une augmentation
de l’aldostérone cardiaque et une
hypertrophie du cœur sont relevées
(29). Cette observation suggère
donc qu’un régime hypersodé
augmente la synthèse d’aldostérone
du cœur et contribue ainsi à l’hypertrophie cardiaque de manière
indépendante du SRAA circulant.
Des travaux récents ont clairement
démontré que l’aldostérone exerçait
des effets directs sur le cardiomyocyte, par l’induction, en présence
d’une concentration extracellulaire
de sodium, d’une hypertrophie
cardiaque (30). De plus, au niveau
du cœur, l’aldostérone exerce un
rétrocontrôle positif sur sa propre
production, puisqu’elle augmente
paradoxalement l’expression de
l’ARN messager de l’enzyme de
conversion. Ce mécanisme pourrait
être responsable de l’augmentation
et de la progression de l’activité du
SRAA cardiaque en cas d’insuffisance cardiaque.
Le cœur est donc non seulement un
organe cible pour les minéralocorti-
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coïdes et les glucocorticoïdes, mais
il semble également constituer un
organe endocrine capable de synthétiser de novo des corticostéroïdes. Il
y a cependant controverse quant à
l’origine précise de l’aldo­stérone
cardiaque (31-33), des arguments
scientifiques solides amenant à
considérer que l’aldostérone intracardiaque provient essentiellement
de la circulation générale (28).
Effets de l’aldostérone
Les effets minéralocorticoïdes classiques incluent la rétention du sodium
et de l’eau ainsi que l’excrétion du
potassium et du magnésium. Ils
contrôlent l’homéostasie du sel et
de l’eau. Depuis quelques années,
de nouveaux effets ont été mis en
évidence, en particulier au niveau du
cœur et des vaisseaux. Ces derniers
sont plutôt considérés comme des
effets indésirables. Ils sont responsables de l’induction d’une fibrose
cardiaque importante, d’une fibrose/
rigidité vasculaire, d’une diminution
de la capture myocardique de norépinéphrine, d’une augmentation de la
production de l’inhibiteur de l’activateur du plasminogène de type 1 (PAI-
1), de l’induction d’une dysfonction
endothéliale, et d’une diminution du
HDL-cholestérol. Autant d’effets
dont les conséquences délétères sont
résumées dans le tableau.
Effets délétères de l’aldostérone
Chez l’homme sain, un phénomène
d’échappement à l’effet de l’aldostérone empêche qu’une administration
continue d’aldostérone ne produise
une réabsorption sodique au-delà
d’environ cinq jours. Les mécanismes impliqués dans cet échappement semblent multiples. Celui-ci
résulterait de changements hémodynamiques au niveau rénal, d’une upregulation de la sécrétion de l’ANP
et d’une diminution des cotransporteurs Na+/Cl- thiazide-sensibles au
niveau des tubules rénaux distaux. En
cas d’insuffisance cardiaque congestive, ce phénomène d’échappement
est inopérant. En conséquence,
même de petites quantités d’aldostérone vont provoquer une rétention
sodée et une expansion du volume.
En outre, la production cardiaque
d’aldostérone est augmentée au
Tableau. Conséquences délétères de l’augmentation de l’aldostérone.
Rétention sodée Insuffisance cardiaque
Perte potassique
Perte de magnésium
Arythmies ventriculaires
Toxicité digitalique
Fibrose myocardique
Production de collagène du myocarde
Hypertrophie ventriculaire
Dysfonction ventriculaire
Diminution de la réserve coronarienne
Ischémie
Dysfonction des barorécepteurs
Hypertension artérielle
Diminution capture myocardique NE
Arythmies
Dysfonction endothéliale
ATS
Diminution du HDL-cholestérol
ATS
Augmentation PAI-1 (coagulation)
Ischémie
Abréviations
NE : Norépinéphrine ; ATS : Athérosclérose ; PAI : Inhibiteur de l’activité plasminogénique
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cours de l’insuffisance cardiaque
humaine, proportionnellement au
niveau de dysfonction ventriculaire
(34). La production de l’enzyme de
conversion ainsi que celle du peptide
natriurétique de type B sont également activées dans les ventricules
d’un cœur défaillant. Il est donc
probable que l’augmentation de la
tension de paroi ou la distension
d’un ventricule dilaté observées lors
d’une dysfonction systolique soient
des stimuli pour la production d’aldostérone, d’enzyme de conversion
et de peptide natriurétique de type B
au niveau des ventricules.
Fibrose myocardique due
à l’aldostérone
L’augmentation de l’aldostérone
cardiaque est responsable d’une
fibrose myocardique et vasculaire.
En effet, l’aldostérone stimule la
synthèse du collagène par les fibroblastes cardiaques, induisant une
fibrose cardiaque, avec des conséquences défavorables sur la fonction
de pompe ainsi que sur le rythme
cardiaque (effet arythmogène). Ce
sont les travaux de Weber qui ont,
les premiers, montré que l’aldostérone associée au NaCl induisait une
fibrose cardiaque majeure chez le
rat (35). Cette fibrose résulte d’un
effet direct de l’aldostérone ; elle
est indépendante des facteurs hémodynamiques comme l’hypertension.
L’effet spécifique de l’aldostérone
est confirmé par les observations
suivantes :
✓ le blocage de l’aldostérone par la
spironolactone prévient la fibrose,
même à des doses qui n’influencent
ni l’hypertension, ni l’hypertrophie
ventriculaire gauche ;
✓ la fibrose cardiaque induite par
une infusion systémique d’aldostérone et de NaCl n’est pas prévenue
par l’administration intracérébroventriculaire de spironolactone, bien
que ce traitement prévienne l’apparition de l’hypertension artérielle.
Une étude récente (36) menée chez
des patients normotendus présentant
un hyperaldostéronisme familial de
type 1 démontre clairement que c’est
l’excès d’aldostérone en lui-même
qui est responsable des anomalies
de structure et de fonction du ventricule gauche. En effet, ces patients
atteints d’un hyperaldostéronisme
présentent, en l’absence d’hypertension, un remodelage cardiaque
avec épaississement du septum et de
la paroi ventriculaire gauche, ainsi
qu’une diminution de la fonction
diastolique. La fibrose cardiaque et
le remodelage coronarien résultent
donc bien d’un effet direct de l’aldostérone sur le tissu cardiaque. Cet
effet trophique de l’aldostérone qui
aboutit au remodelage vasculaire
est dépendant du sodium, ce qui
suggère que l’aldosté­rone induit
une entrée de sodium dans les fibroblastes (35). Un travail récent (37)
a en outre démontré que, lors d’un
infarctus, l’aldostérone stimule l’activité des protéinases impliquées
dans la production du collagène
et donc dans la fibrose cardiaque.
En plus de l’aldostérone et du sel,
l’angiotensine II paraît également
participer à cette fibrose par l’intermédiaire des récepteurs AT1 (25).
La synthèse d’aldostérone cardiaque
est augmentée dans la zone non
infarcie du cœur de rat un mois
après la ligature coronaire, parallèlement à la synthèse locale d’angiotensine II (27). Ainsi, l’aldostérone
et l’angiotensine II sont impliquées
dans la régulation des processus
inflammatoires et de réparation qui
surviennent après lésion tissulaire
(38, 39). À cet effet, elles stimulent
la production des cytokines et le
chimiotactisme ; elles activent les
macrophages aux sites de réparation
(40) et stimulent la croissance des
fibroblastes ainsi que la synthèse du
collagène de type I et III qui gouvernent la formation du tissu cicatriciel
(37, 41). Le rôle physiologique de
la production locale d’aldostérone
pourrait donc être son action de
réparation tissulaire après infarctus
du myocarde (27).
Effet arythmogène de l’aldostérone
Le rôle proarythmique de l’aldostérone (42) pourrait dépendre
partiellement de la fibrose
myocardique, qui perturbe la
fonction électrique du cœur, de
l’hypokaliémie et de l’hypo magnésémie dues à la perte de
potassium et de magnésium au
niveau des tubules rénaux, ainsi
que de l’effet de l’aldostérone sur
la capture myocardique des catécholamines (43, 44). Tous ces
effets de l’aldostérone prédisposent aux arythmies ventriculaires,
à la toxicité digitalique et donc à
l’arrêt cardiaque (45).
Aldostérone et dysfonction endothéliale
L’aldostérone augmente la résistance
périphérique et coronarienne en
réponse à l’angiotensine II, à la sérotonine et à la norépinéphrine. Elle
induit la sécrétion d’endothéline,
un puissant stimulus de facteurs de
croissance (46) qui favorise le développement de l’athérosclérose. L’aldostérone inhibe en outre la synthèse
de NO des cellules vasculaires (47).
Finalement, l’aldostérone diminue
le HDL-cholestérol, prédisposant
ainsi à l’athérosclérose (48), et
contribue, avec l’angiotensine II,
à l’augmentation du potentiel de
coagulation par stimulation de la
production du PAI-1 et de l’agrégation plaquettaire aux sites de
saignement (49).
Angiotensine et aldostérone : facteurs de risque cardiovasculaire
L’ensemble de ces effets délétères
fait de l’aldostérone un facteur
de risque cardiovasculaire, indépendant de l’angiotensine II. De
nombreux travaux ont montré une
relation entre la concentration
plasmatique d’aldostérone et la
mortalité chez les patients atteints
d’insuffisance cardiaque, ainsi
qu’avec la masse ventriculaire
gauche, qui est un bon indice de
morbimortalité. Les inhibiteurs de
l’enzyme de conversion (IEC) diminuent efficacement la morbidité et
la mortalité des patients présentant
une insuffisance cardiaque et une
dysfonction ventriculaire gauche.
Comme l’angiotensine II est un
stimulus important de la production
d’aldostérone, il était raisonnable
et logique de penser que l’emploi
d’un IEC aurait pour conséquence
de supprimer les effets indésirables
à la fois de l’angiotensine II et de
l’aldostérone. Les résultats obtenus
avec les IEC n’ont cependant pas
tout à fait répondu à l’attente, ce
qui pourrait être dû à l’échappement du blocage de la production
d’aldostérone sous IEC. En effet,
des observations cliniques ont mis
en évidence un tel échappement,
qui se traduit par une remontée
des concentrations plasmatiques
d’aldostérone après trois mois de
traitement par IEC (43). Plusieurs
mécanismes ont été évoqués pour
expliquer cet échappement. Il pourrait s’agir d’un blocage incomplet
du SRAA, d’une synthèse d’angiotensine II empruntant d’autres
voies que celle de l’ECA, d’une
stimulation de la sécrétion d’aldostérone en réponse à des influences
éventuellement combinées : hypokaliémie, hypomagnésémie chronique, intervention de facteurs
paracrines et neurocrines, et/ou
diminution du catabolisme hépatique de l’aldostérone (50).
L’ a n g i o t e n s i n e I I , q u ’ e l l e
provienne de la voie classique de
l’ECA ou de la voie alterne de la
chymase, exerce diverses actions
sur le cœur. Par la stimulation de
ses récepteurs AT1, elle agit au
niveau de la coagulation (profibrogènes) et pro-inflammatoires.
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L’inflammation joue un rôle
majeur dans la physiopathologie
des affections cardiaques. L’angiotensine II stimule en effet l’expression du facteur nucléaire κB
(NF-κB), un facteur de transcription qui règle l’expression génique
des cytokines pro-inflammatoires,
telle l’interleukine 6 (51). Au
niveau cardiaque, l’angiotensine II joue aussi un rôle important
dans la prolifération vasculaire
(52). Les résultats d’études cliniques confirment l’hypothèse selon
laquelle l’angiotensine II, produite
indépendamment de la voie de
l’ECA, stimulerait la prolifération
vasculaire et favoriserait ainsi la
resténose après une angioplastie
coronarienne percutanée. En effet,
la resténose est prévenue par l’administration d’un antagoniste du
récepteur de l’angiotensine II,
alors qu’elle ne l’est pas en cas
d’administration d’un inhibiteur
de l’ECA (53). Cela confirme la
présence au niveau cardiaque ainsi
que l’importance de la voie alterne
chymasique de la production de
l’angiotensine II.
De nombreux modèles animaux
de pathologie cardiaque (cardiomyopathie, surcharge de pression,
infarctus du myocarde) s’associent
à une élévation de la chymase
cardiaque, aussi bien en ce qui
concerne l’ARNm que son activité
enzymatique. Il en est de même
dans des homogénats de cœurs
humains pathologiques (cardiomyopathie idiopathique, infarctus
du myocarde [54, 55]). Toutes ces
observations étayent l’hypothèse
du rôle de l’angiotensine II, issue
de la voie de la chymase, dans la
pathogénie de ces états pathologiques.
La chymase contribue aux affections cardiaques non seulement par
la transformation de l’angiotensine I en angiotensine II, mais aussi
par l’activation du TGF-β et par le
remodelage de la matrice extracellulaire. Ainsi, la chymase contribue
à la fibrose et à l’hypertrophie
cardiaque.
Effets cardiovasculaires
bénéfiques résultant de l’inhibition de la chymase
mastocytaire
L’activité de la chymase cardiaque
étant élevée dans de nombreuses
pathologies cardiaques, il était
logique de penser que son inhibition
pourrait avoir un effet thérapeutique
bénéfique. C’est pourquoi plusieurs
inhibiteurs sélectifs de cette enzyme
ont été développés ou sont en cours
de développement (15). Ils n’ont pas
encore été utilisés chez l’homme,
mais des résultats prometteurs ont
été obtenus chez l’animal, dans des
modèles expérimentaux d’infarctus
du myocarde, de cardiomyopathie
et d’insuffisance cardiaque induite
par tachycardie (15). Il est donc fort
probable que ces inhibiteurs soient
appelés à occuper une place significative dans le traitement de maladies cardiaques où la dégranulation
des mastocytes, provoquée par la
lésion ischémique, paraît jouer un
rôle important. Des inhibiteurs de
la chymase ont significativement
réduit la prolifération vasculaire
dans des veines greffées chez le
chien (56, 57), ainsi que la prolifération vasculaire et l’hyperplasie
intimale survenant après une lésion
par ballonnet de dilatation (58).
Ces molécules pourraient donc être
utiles dans la prévention de la resténose après dilatation percutanée de
vaisseaux coronariens.
L’activité chymase est aussi
augmentée dans la paroi des
anévrysmes de l’aorte abdominale (59), et son inhibition, dans le
modèle d’anévrysme du hamster,
s’accompagne notamment d’un effet
favorable sur le diamètre aortique,
ce qui suggère que l’inhibition de
la chymase pourrait prévenir la
progression de l’anévrysme aortique
abdominal (60).
L’inhibition de la chymase pourrait
également avoir un effet thérapeutique dans certaines cardiomyopathies (15) [figure], dans l’infarctus
du myocarde (55), dans la prévention du remodelage cardiaque lors
Mastocyte
Mastocyte
Activation
Angiotensine I
Chymase
active
Inhibition
Chymase
inactive
Inhibiteur
de chymase
Angiotensine II
TGF-β
Affections
cardiovasculaires
TGF-β latent-binding protein
Fibrose
tissulaire
Figure. Mécanisme d’action des inhibiteurs de la chymase mastocytaire pour la prévention
des maladies cardiovasculaires et de la fibrose myocardique. Libérée par les mastocytes
activés, la chymase induit la production d’angiotensine II et de TGF-β, responsables de maladies cardiovasculaires et de fibrose. L’inhibition de la chymase est susceptible de prévenir
ces deux conséquences en réduisant la production d’angiotensine II et de TGF-β. (D’après
Takai et al. [15].)
Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 6, novembre-décembre 2006
d’une insuffisance cardiaque (61),
ainsi que dans l’athérosclérose
(62).
Au niveau cardiaque, l’angiotensine II possède un effet inotrope
positif. Ainsi, la présence dans le
cœur d’une voie génératrice d’angiotensine II indépendante de
l’ECA pourrait avoir un rôle bénéfique important en cas de traitement
de l’insuffisance cardiaque par des
IEC. Cette voie alterne n’étant pas
touchée par les IEC, l’angiotensine
II qui en est issue pourrait ainsi
participer à la préservation de la
fonction d’un cœur insuffisant en
maintenant son support inotrope
positif. En effet, en cas d’insuffisance cardiaque, les IEC améliorent
la fonction cardiaque par diminution des effets de l’angiotensine II
au niveau des vaisseaux, réduisant ainsi les pré- et post-charges
cardiaques sans modifier l’effet
inotrope positif de l’angiotensine II
cardiaque, puisque celle-ci provient
de la voie de la chymase, ce qui la
rend indépendante de l’action des
IEC (10).
En conclusion, toutes les observations suggèrent que l’inhibition
de l’activité de la chymase par des
inhibiteurs non peptidiques, et donc
actifs par voie orale, pourrait, dans
un avenir proche, faire partie de
l’arsenal thérapeutique des pathologies cardiovasculaires.
Effets cardiovasculaires
bénéfiques résultant du blocage des actions
de l’aldostérone
L’échappement de l’aldostérone
observé sous IEC et les résultats
des travaux qui ont démontré les
effets cardiaques délétères de l’aldostérone ont motivé la réalisation
de l’étude multicentrique RALES
(Randomized Aldactone® Evaluation Study), dont le but consistait à
évaluer, chez des patients présentant
une insuffisance cardiaque sévère,
l’effet sur la morbidité et la mortalité cardiovasculaires d’une adjonction de spironolactone au traitement
standard (63), afin de bloquer l’effet
de l’aldostérone au niveau des
récepteurs. Les résultats obtenus
par l’adjonction de la spironolactone ont été tellement favorables
que l’étude a été arrêtée au bout de
24 mois, soit plus d’un an avant le
terme prévu, l’objectif primaire de
diminution de la mortalité ayant
été atteint. En effet, l’association
de 26 mg/j de spironolactone au
traitement standard de l’insuffisance cardiaque (IEC, diurétiques
et digoxine) a permis de diminuer
le risque de décès toutes causes
confondues de 31 %, celui de décès
d’origine cardiaque de 31 %, et les
hospitalisations d’origine cardiaque
de 30 %. De plus, la spironolactone
a exercé un effet bénéfique sur la
fonction cardiaque, puisque des
patients sont passés de la classe IV
de la NYHA à la classe III au terme
de l’étude. Le blocage de l’action de
l’aldostérone par une faible dose de
spironolactone, associée au traitement conventionnel de l’insuffisance
cardiaque, produit donc un bénéfice
assez spectaculaire. La faible dose
de spironolactone utilisée n’ayant
pas d’effets hémodynamiques, il est
donc fort probable que le bénéfice
observé résulte d’une inhibition des
effets directs de l’aldostérone au
niveau cardiaque.
Ainsi, une réduction de la fibrose
a certainement joué un rôle dans la
diminution de la morbidité et de la
mortalité de ces patients, ainsi que
le démontre le travail de Zannad et
al. (64). Utilisant le dosage plasmatique d’un fragment du collagène III comme mesure de la fibrose
cardiaque, ces auteurs ont, d’une
part, observé une relation entre
le taux de fibrose cardiaque et la
mortalité, et démontré, d’autre part,
que la spironolactone réduisait la
fibrose cardiaque, l’effet le plus
net étant relevé chez les patients
présentant la fibrose la plus élevée
au début de l’étude.
La spironolactone est également
capable de réduire les arythmies
ventriculaires observées en cas
d’insuffisance cardiaque congestive
ou ischémique. En effet, Ramires et
al. (44) ont décrit, chez 35 patients
insuffisants cardiaques traités par
spironolactone (25-50 mg/j), une
diminution de 74 % des extrasystoles ventriculaires, de 80 % des
épisodes de tachycardie ventriculaire non soutenue, et de 100 % des
épisodes de tachycardie ventriculaire à l’effort. Le blocage du MR
s’oppose au rôle proarythmique de
l’aldostérone, soit en diminuant la
fibrose cardiaque, soit en équilibrant
la balance électrolytique (hypokaliémie et hypomagnésémie), et/ou
en permettant la capture des catécholamines par les cardiomyocytes.
L’utilisation clinique de l’éplérénone, un nouvel antagoniste plus
sélectif du MR, diminue également de manière significative, dans
l’étude EPHESUS, la morbidité et
la mortalité de patients en insuffisance cardiaque et en dysfonction ventriculaire gauche après un
infarctus du myocarde (65). Dans
cette étude, l’éplérénone administrée en complément du traitement
conventionnel diminue la mortalité,
toutes causes confondues, de 15 %
à 16 mois (65). Rapidement introduite (entre trois et 14 jours) après
l’infarctus du myocarde, elle réduit
la mortalité à 30 jours de 31 % ; la
mortalité cardiovasculaire, en particulier, diminue de 13 % chez des
patients ayant une fraction d’éjection inférieure ou égale à 40 % et
des signes d’insuffisance cardiaque
(66).
thématique
Dossier
Aldostérone et dysfonction
endothéliale
L’aldostérone est impliquée dans la
dysfonction endothéliale, notamment par inhibition de la synthèse de
NO (47). Cet effet de l’aldostérone
Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 6, novembre-décembre 2006
149
Dossier
thématique
est mis en évidence par l’amélioration de la dysfonction endothéliale
par le blocage par la spironolactone
du MR qui augmente la bioactivité du NO, qui rétablit la réponse
artérielle à l’acétylcholine et qui
inhibe la conversion vasculaire de
l’angiotensine I en angiotensine II
chez les patients en insuffisance
cardiaque (67). Il est donc fort
probable que ces effets bénéfiques
de la spironolactone aient contribué
à la réduction de la morbidité et de
la mortalité cardiovasculaires, telles
que rapportées dans l’étude RALES
(63).
Sécurité et effets
indésirables de la spironolactone
Un des risques potentiels du blocage
du MR est d’induire une hyperkaliémie. Toutefois, ce risque est
significativement réduit si la dose
de spironolactone associée aux
IEC ne dépasse pas 25 mg/j. Dans
l’étude RALES, la survenue d’une
hyperkaliémie cliniquement significative a été rare, puisqu’elle n’a été
observée que chez 1 % des patients
sous placebo, et chez 2 % des
patients traités par spironolactone.
Il faut cependant souligner qu’une
créatininémie > 250 mg/l et qu’une
kaliémie > 5 mmol/l constituaient
des critères d’exclusion à l’entrée
dans l’étude. Il est évident que les
mesures de la créatinine plasmatique et de la kaliémie doivent faire
partie de la surveillance d’un traitement associant IEC et spironolactone, et ce d’autant plus que le
risque d’hyperkaliémie en pratique
courante n’est pas négligeable (68).
Comme la spironolactone se lie non
seulement aux MR mais également
aux récepteurs des androgènes, une
gynécomastie et une impuissance
peuvent survenir sous ce traitement. Dans l’étude RALES, une
gynécomastie et/ou des douleurs
au niveau des seins ont été rappor-
150
tées chez 10 % des hommes sous
spironolactone, contre 1 % dans le
groupe placebo. Au vu des importants effets bénéfiques de ce traitement sur la morbidité et la mortalité
cardiovasculaires, le risque de gynécomastie ne devrait cependant pas
détourner de l’emploi de la spironolactone chez les hommes souffrant d’une insuffisance cardiaque
sévère. L’arrivée sur le marché de
l’éplérénone, nouvel antagoniste
plus sélectif du MR, devrait significativement diminuer la fréquence
de cet effet indésirable. L’éplérénone bloque sélectivement le MR et
n’a pas d’effet sur les récepteurs des
glucocorticoïdes, des androgènes
et de la progestérone (69). Ainsi,
dans l’étude EPHESUS (65), qui a
démontré que l’éplérénone adjointe
au traitement conventionnel diminuait la morbidité et la mortalité de
patients en insuffisance cardiaque et
en dysfonction ventriculaire gauche
après un infarctus du myocarde,
l’incidence de la gynécomastie et
de l’impuissance chez les hommes
du groupe éplérénone n’était pas
supérieure à celle observée dans
le groupe placebo. Ces résultats,
très différents de ceux de l’étude
RALES, sont liés à la plus grande
sélectivité de l’éplérénone pour le
MR, comparativement à la spironolactone, qui se lie aussi aux récepteurs des androgènes.
Conclusion
Le cœur est non seulement un
organe cible pour les hormones,
mais il constitue également un véritable organe endocrine, produisant
des facteurs hormonaux qui exercent des rôles autocrines, paracrines et endocrines. Il est non
seulement soumis à l’influence du
SRAA systémique, mais il possède
également son propre SRAA. Ce
dernier produit de l’angiotensine II
par l’intermédiaire de la voie classique, ECA-dépendante, et par la
voie alterne de la chymase masto-
Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 6, novembre-décembre 2006
cytaire, ECA indépendante. Parmi
les constituants du SRAA, l’aldostérone systémique et intracardiaque
ainsi que l’angiotensine II exercent
des effets importants sur la structure et la fonction cardiaques. En
plus de ses effets sur la rétention
hydrosodée et l’excrétion potassique, l’aldostérone est à l’origine
d’une fibrose cardiaque et vasculaire, d’une diminution de la capture
de la norépinéphrine au niveau du
myocarde, et d’une dysfonction
endothéliale. Tous ces effets délétères au niveau du cœur et des vaisseaux sont certainement impliqués
dans la morbidité et la mortalité
cardiovasculaires, notamment en
cas d’insuffisance cardiaque. Des
études récentes ont clairement
démontré que, associé au traitement
conventionnel, le blocage des MR
par la spironolactone ou l’éplérénone réduit de manière significative la morbidité et la mortalité
cardiovasculaires des patients en
insuffisance cardiaque sévère et/ou
avec dysfonction ventriculaire après
infarctus du myocarde. Ainsi, 50 ans
après sa découverte, l’aldostérone
continue à étonner (70).
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DÉNOMINATION : TAHOR® 10 mg, 20 mg, 40 mg ou 80 mg comprimés pelliculés.COMPOSITION : Comprimé pelliculé dosé à 10, 20, 40 mg ou 80 mg d'atorvastatine (sous forme calcique trihydratée) : boîte de 28 comprimés ou boîte de 50 comprimés sous plaquette thermoformée.DONNÉES CLINIQUES :
• Indications thérapeutiques : Indications biologiques : Réduction des hypercholestérolémies pures (type IIa) ou mixtes (type IIb et III) en complément d'un régime adapté et assidu. Hypercholestérolémie familiale homozygote, en addition à d'autres traitements hypolipémiants (notamment LDL aphérèse)
ou lorsque de tels traitements ne sont pas disponibles. Les comprimés à 80 mg sont réservés aux formes sévères d’hypercholestérolémie notamment aux formes familiales homozygotes. Indications basées sur des études cliniques d’intervention : Réduction des événements coronaires chez des patients
hypertendus traités avec 3 facteurs de risque en prévention primaire, avec ou sans hyperlipidémie associée. Prévention des évènements coronaires et cérébrovasculaires chez des patients diabétiques de type 2 avec un autre facteur de risque, avec ou sans hyperlipidémie associée • Posologie et mode
d’administration : Prescription en association avec le régime, en prise unique à tout moment de la journée, indépendamment des repas. Posologie initiale : 10 mg/jour. La réponse thérapeutique s'observe en 2 semaines et est habituellement maximale après 4 semaines. Cette dose permet un contrôle
satisfaisant chez la majorité des patients. Si nécessaire, adaptation posologique à intervalle d'au moins 4 semaines, en fonction de l'évolution de la cholestérolémie. Posologie usuelle : 10 voire 20 mg/j dans les hypercholestérolémies modérées. Formes sévères (notamment dans les formes familiales
homozygotes) : des posologies plus élevées peuvent être nécessaires. Dose maximale recommandée : 80 mg. Insuffisant rénal, sujet âgé : il n’est pas nécessaire d’ajuster les doses. Traitements associés : l'atorvastatine peut être associée aux chélateurs des acides biliaires. • Contre-indications : Ce
médicament ne doit jamais être prescrit dans les cas suivants : hypersensibilité à l’un des constituants du médicament ; affection hépatique évolutive ; élévation prolongée des transaminases sériques ; en association avec l’itraconazole, le kétoconazole, la télithromycine, le stiripentol et la delavirdine ;
chez la femme qui allaite. Ce médicament est généralement déconseillé en cas d’association aux fibrates. • Mises en garde spéciales et précautions particulières d’emploi : Interrompre le traitement en cas de découverte d’une grossesse.Tenir compte de la présence de lactose. Surveillance hépatique :
avant puis régulièrement après l’instauration du traitement ainsi qu’en cas de signes ou de symptômes évocateurs d’une altération hépatique. Surveillance des transaminases plus fréquente en cas de prescription des doses les plus élevées. Interrompre le traitement en cas d’augmentation persistante
des transaminases ALAT ou ASAT au-delà de 3 fois la limite supérieure de la normale. Effets musculaires : Comme les autres inhibiteurs de l'HMG-CoA réductase, l'atorvastatine peut affecter les muscles squelettiques et entraîner des myalgies, myosites et myopathies, pouvant rarement évoluer vers
une rhabdomyolyse, caractérisée par des taux élevés de CPK (plus de 10 fois la LSN), une myoglobinémie et une myoglobinurie et pouvant entraîner une insuffisance rénale, et être fatale dans certains cas. Chez les patients asymptomatiques traités par statine, pas de recommandation de dosage régulier
des taux de CPK ou d'autres enzymes musculaires. Chez les patients présentant des facteurs prédisposant à une rhabdomyolyse et chez ceux présentant des symptômes musculaires pendant un traitement par une statine, recommandation de dosage des CPK avant toute initiation d'un traitement par
statine. Avant initiation du traitement : Contrôler le taux de CPK dans les situations suivantes : insuffisance rénale, antécédent personnel ou familial de maladies musculaires génétiques, antécédent personnel de toxicité musculaire lors d'un traitement par une statine ou un fibrate, abus d'alcool, hypothyroïdie,
patients âgés (> 70 ans). Dans ces situations, réévaluer régulièrement le bénéfice/risque du traitement et assurer une surveillance clinique régulière. Ne pas débuter le traitement si le taux basal de CPK est significativement élevé (plus de 5 fois la LSN). Mesure de la CPK : Ne pas mesurer la CPK après
un exercice physique important ni en présence d'une autre cause possible d'augmentation. En cas d'élévation significative de la CPK (plus de 5 fois la LSN) avant traitement, recontrôler systématiquement dans les 5 à 7 jours pour confirmer les résultats. Si le taux initial de CPK > 5 fois la normale est
confirmé, ne pas initier le traitement. Pendant le traitement : demander aux patients de signaler rapidement toute douleur musculaire inexpliquée, crampe ou faiblesse musculaire, en particulier si elles s'accompagnent de malaise ou de fièvre ; en cas d’apparition de symptômes sous traitement effectuer
un dosage de CPK ; interrompre le traitement si le taux CPK est significativement élevé (plus de 5 fois la LSN) ; si les symptômes musculaires sont sévères et provoquent une gêne quotidienne envisager l’arrêt du traitement, même si le taux de CPK ne dépasse pas 5 fois la LSN ; si les symptômes disparaissent
et que le taux de CPK redevient normal envisager la réintroduction de l’atorvastatine ou d’une autre statine à la dose la plus faible sous étroite surveillance ; interrompre le traitement en cas d’élévation cliniquement significative du taux de CPK (plus de 10 fois la LNS) ou de diagnostic ou de suspicion de
rhabdomyolyse. Dans le traitement des hypercholestérolémies familiales homozygotes, il n’existe à l’heure actuelle que peu de données chez l’enfant.• Interactions avec d’autres médicaments et autres formes d’interaction : Associations contre-indiquées : itraconazole, kétoconazole, stiripentol,
delavirdine, télithromycine. Association déconseillée : fibrates, gemfibrozil. Associations nécessitant des précautions d’emploi : anticoagulants oraux, vérapamil, diltiazem, erythromycine, clarithromycine, ciclosporine, inhibiteurs de protéases. Association à prendre en compte : jus de pamplemousse.
• Effets indésirables : Les évènements indésirables ci-dessous sont listés selon la classification MedDRA par système-organe et par ordre de fréquences:Très fréquents (≥ 1/10), fréquents (≥ 1/100 et < 1/10), peu fréquents (≥ 1/1 000 et < 1/100), rares (≥ 1/10 000 et < 1/1 000), très rares (< 1/10 000).
Les effets indésirables sont généralement discrets et transitoires. Affections hématologiques et du système lymphatique : Peu fréquent :Thrombocytopénie. Affections du système immunitaire : Peu fréquent : Réaction d’hypersensibilité (urticaire). Troubles du métabolisme et de la nutrition : Peu fréquents :
Hypoglycémie, hyperglycémie, anorexie, prise de poids. Affections psychiatriques : Fréquent : insomnie. Affections du système nerveux : Fréquents : Hypoesthésie, paresthésie, vertiges, céphalées. Peu fréquents : Neuropathie périphérique, amnésie. Affections de l’oreille et du labyrinthe : Peu fréquents :
Acouphènes. Affections gastro-intestinales : Fréquents : Nausées, diarrhées, douleurs abdominales, dyspepsie, constipation, flatulences : Peu fréquents :Vomissements Rare : Pancréatite. Affections hépatobiliaires : Rares : Hépatite, ictère cholestatique. Affections de la peau et des tissus sous-cutanés :
Fréquents : Prurit, éruption. Peu fréquents :Alopécie. Rare : Eruption bulleuse.Très rares : Oedème de Quincke, syndrome de Stevens-Johnson, syndrome de Lyell. Affections musculo-squelettiques et systémiques : Fréquents : Myalgie, arthralgie, douleur dorsale (cf. rubrique Mises en garde et précautions
particulières d’emploi). Rares : Myosite, crampes musculaires (cf. Mises en garde et précautions particulières d’emploi).Très rares : Rhabdomyolyse, myopathie, tendinopathies parfois compliquées de rupture (cf. Mises en garde et précautions particulières d’emploi). Affections des organes de reproduction
et du sein : Peu fréquent : Impuissance. Troubles généraux et anomalies au site d’administration : Fréquents :Asthénie, douleurs thoraciques. Peu fréquent : Malaise. Rares : Oedème, œdème périphérique. Investigations : Fréquents : Élévation des enzymes hépatiques :ASAT,ALAT (principalement en relation
avec une cholestase), augmentation des CPK (cf. rubrique Mises en garde et précautions particulières d’emploi). PROPRIÉTÉS PHARMACOLOGIQUES : • Propriétés pharmacodynamiques : HYPOCHOLESTÉROLÉMIANT ET HYPOTRIGLYCÉRIDÉMIANT/INHIBITEUR DE L'HMG-CoA RÉDUCTASE. Code
ATC : C10 AA05. Prévention des complications cardiovasculaires : Dans l’étude Collaborative Atorvastatin Diabetes Study (CARDS), l’effet de l’atorvastatine sur les évènements coronaires et cérébrovasculaires mortels et non mortels a été évalué chez 2838 patients atteints de diabète de type 2 âgés de
40 à 75 ans, sans antécédent de maladies cardiovasculaires et avec un taux de LDL ≤ 4,14 mmol/l (160 mg/dl) et de TG ≤ 6,78 mmol/l (600 mg/dl). Par ailleurs, tous les patients avaient au moins un des facteurs de risque cardiovasculaire suivants : hypertension, tabagisme, rétinopathie, microalbuminurie
ou macroalbuminurie. Dans cette étude randomisée, en double aveugle, multicentrique, contrôlée versus placebo, les patients recevaient soit de l’atorvastatine à la dose de 10 mg/jour (n = 1 428) soit un placebo (n = 1 410) durant une période moyenne de 3,9 ans. L’effet du traitement par atorvastatine
sur le critère primaire ayant atteint le seuil d’arrêt de l'étude prédéfini pour l’efficacité, CARDS a été arrêtée 2 ans avant la date prévue. L’atorvastatine a réduit significativement : la fréquence des évènements cardiovasculaires majeurs (critère composite associant l’infarctus du myocarde sévère mortel
et non mortel, l’infarctus du myocarde asymptomatique, la mort d’origine coronaire aiguë, l’angor instable, le pontage coronarien par greffe, l’angioplastie transluminale percutanée, la revascularisation, l’AVC) de 37 % (p = 0,0010), (placebo 9,0 %, atorvastatine 5,8 %) ; la fréquence des infarctus du
myocarde sévères mortels et non-mortels et des infarctus du myocarde asymptomatiques de 42 % (p = 0,0070), (placebo 4,5 %, atorvastatine 2,7 %) ; la fréquence des AVC mortels et non mortels de 48 % (p = 0,0163), (placebo 2,8 %, atorvastatine 1,5 %). L’incidence globale des effets indésirables
ou des effets indésirables sévères était similaire dans les deux groupes. PRÉSENTATION ET NUMÉRO D’IDENTIFICATION ADMINISTRATIVE : Modèle ville : TAHOR® 10 mg, comprimé pelliculé, boîte de 28 comprimés : AMM n° 343 067.5 ; boîte de 90 comprimés : AMM n° 371 992.1.
TAHOR® 20 mg, comprimé pelliculé, boîte de 28 comprimés : AMM n° 343 068.1 ; boîte de 90 comprimés : AMM n° 371 993.8. TAHOR® 40 mg, comprimé pelliculé, boîte de 28 comprimés : AMM n° 343 069.8 ; boîte de 90 comprimés : AMM n° 371 994.4. TAHOR® 80 mg, comprimé pelliculé,
boîte de 28 comprimés : AMM n° 355 575.0 ; boîte de 90 comprimés : AMM n° 371 995.0. Modèle hôpital : TAHOR® 10 mg, comprimé pelliculé, boîte de 50 comprimés : AMM n° 560 302.2. TAHOR® 20 mg, comprimé pelliculé, boîte de 50 comprimés : AMM n° 560 304.5. TAHOR® 40 mg,
comprimé pelliculé, boîte de 50 comprimés : AMM n° 560 306.8. TAHOR® 80 mg, comprimé pelliculé, boîte de 50 comprimés : AMM n° 355 576.7. PRIX : TAHOR® 10 mg : 22,88 € (28 cp) ; 66,39 € (90 cp). TAHOR® 20 mg : 40,23 € (28 cp) ; 117,55 € (90 cp). TAHOR® 40 mg : 43,16 € (28 cp) ;
126,97 € (90 cp). TAHOR® 80 mg : 43,16 € (28 cp) ; 126,97 € (90 cp). CTJ : 0,82 € (cp 10 mg, bte de 28), 0,74 € (cp 10 mg, bte de 90) ; 1,44 € (cp 20 mg, bte de 28), 1,31 € (cp 20 mg, bte de 90) ; 1,54 € (cp 40 mg, cp 80 mg, bte de 28), 1,41 € (cp 40 mg, cp 80 mg, bte de 90).
CONDITIONS DE PRESCRIPTION ET DÉLIVRANCE : Liste I. Remb. Séc. Soc. à 65 % - Collect. - Seul TAHOR ® 10 mg est remboursé dans les indications basées sur des études cliniques d’intervention. EXPLOITANT : Pfizer – 23-25, avenue du Docteur Lannelongue
– 75014 Paris – Tél. (information médicale) : 01 58 07 34 40. ® : Marque déposée. Date de révision d’AMM : 22/03/2006. Pour plus d’informations, se référer au Résumé des Caractéristiques du Produit. Version n° 006-08/06.
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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 6, novembre-décembre 2006
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