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Act. Méd. Int. - Psychiatrie (17) n° 5, mai 2000
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patients présentant un premier épisode
psychotique (n = 38) ; et le troisième de
sujets sains contrôles (n = 32). Deux
années après cette imagerie, une autre était
effectuée chez les sujets à risque (n = 66)
et les témoins sains (n = 20). Si les
atteintes des lobes temporaux sont classi-
quement décrites chez le schizophrène, on
sait peu de chose concernant la chronolo-
gie de cette atteinte volumétrique. Les
hypothèses proposées par l’équipe à
laquelle un des volets de l’étude était pré-
senté, consistaient à rechercher l’existence
d’anomalies prémorbides, à déterminer si
elles permettaient de prédire l’apparition
des troubles au cours d’un premier épisode
et si les modifications étaient plus rapides
que chez les sujets normaux.
Lors du premier examen, des différences
significatives purent être mises en évi-
dence, par rapport aux témoins, chez les
sujets à risque. Il s’agissait d’une diminu-
tion, chez ces derniers, du volume moyen
de l’amygdale, de l’hippocampe et du tha-
lamus gauche. Ces éléments anatomiques
constitueraient ainsi des marqueurs de
traits pour la schizophrénie. En revanche,
au sein du groupe à risque, on ne notait
aucune différence volumétrique entre ceux
qui présentaient des signes psychotiques a
minima et ceux qui n’en présentaient pas.
Lors du suivi sur deux ans des sujets à
risque, on retrouvait une tendance à la
poursuite de la diminution du volume de
ces structures (et du lobe temporal), plus
rapide chez les sujets à risque présentant
des signes psychotiques (n = 19) que chez
les autres (n = 47). Les auteurs concluent
à l’existence de marqueurs de traits visibles
en imagerie cérébrale et à l’existence d’un
processus actif de réduction du volume
cérébral de certaines zones au fil du temps,
même chez les sujets à risque, dans la
mesure où ils présentent des signes psy-
chotiques. Ces résultats, issus de l’analyse
IRM cérébrale de sujets ayant deux pro-
posants proches atteints de schizophrénie,
doivent être accueillis avec circonspection.
Certains n’ont pas été retrouvés par
d’autres équipes ; on notera qu’ils sont
étonnamment sensibles sur une période
aussi courte (deux ans). Ils indiquent tou-
tefois l’intérêt d’analyser, possiblement
comme deux processus différents, les cas
sporadiques de schizophrénie (environ
80 % des premiers épisodes), des cas fami-
liaux et pour lesquels il existerait davan-
tage d’atteintes précoces du SNC. Certains
auteurs signalent le fait que ces modifica-
tions cérébrales de volume seraient
peut-être liées à des processus en partie
aspécifiques, comme un trouble contem-
porain de l’accès aigu du métabolisme
lipidique cérébral.
La schizophrénie :
une pathologie de la
connexion interhémisphérique ?
Un certain nombre de présentations et de
posters se sont intéressés au problème de
disconnexion interhémisphérique chez le
schizophrène ; certains processus de laté-
ralisation en seraient une des expressions.
Tim Crow, enfant terrible de la psychia-
trie anglaise, propose l’idée que “le prix
que l’espèce humaine doit payer pour dis-
poser du langage est sa vulnérabilité à la
schizophrénie”. Il fournit, pour preuve à
cette hypothèse, des données phylogéné-
tiques. L’apparition du langage articulé
(dans son aspect moteur) chez l’espèce
humaine aurait correspondu à un chan-
gement fonctionnel cérébral faisant bas-
culer les fonctions initialement dédiées à
la pensée du cortex préfrontal dorsal droit
vers le gauche. Cela expliquerait, pour
lui, la vulnérabilité à la symptomatologie
positive et participerait notamment aux
troubles du cours de la pensée, au retrait
et à la pauvreté affective exprimée par la
parole. De même une transition senso-
rielle aurait-elle eu lieu, déplaçant les
fonctions du cortex occipito-pariéto-tem-
poral gauche vers le droit. Cela partici-
perait à la possibilité d’accéder au délire
et aux hallucinations. Une “fragilité”
apparaîtrait ainsi sous-tendue, en outre,
par le rôle critique des connexions dans
la coopération interhémisphérique. Les
jumeaux monozygotes, discordants pour
la schizophrénie, seraient différents en
raison d’une atteinte dans leur processus
de coopération interhémisphérique.
Inutile de préciser le scepticisme de l’au-
ditoire qui, toutefois, à demi blasé par
habitude, à demi séduit par le charisme
et la qualité de l’auteur, reste attentif à ce
qu’il apporte de moderne au débat.
Concernant encore la question des
jumeaux monozygotes discordants pour
la schizophrénie, un travail d’imagerie
cérébrale de l’équipe de R. Murray (T.
Sharma, Londres) met en évidence, chez
le jumeau malade, l’existence d’un
volume préfrontal et hippocampique
(droit et gauche) inférieur par rapport aux
contrôles, ainsi qu’un élargissement du
troisième ventricule et des ventricules
latéraux par rapport au jumeau non
malade.
En revanche, les jumeaux discordants
étudiés (malades et non malades) pré-
sentent une diminution du volume céré-
bral, de la substance grise corticale et de
l’amygdale par rapport aux jumeaux
témoins non malades. Pour poursuivre le
questionnement sur la latéralité chez le
schizophrène, d’autres équipes (Morh B.,
à Constance) ont tenté d’explorer le pro-
cessus de coopération interhémisphé-
rique lors de procédures au cours des-
quelles des mots (ou des pseudo-mots
ressemblant à des mots existants) sont
présentés dans le champ visuel, droit ou
gauche, ou dans les deux champs à la
fois. Les sujets témoins et les schizo-
phrènes présentent à cette tâche un avan-
tage droit net (confirmant l’avantage de
l’hémisphère gauche pour le langage).
En revanche, les schizophrènes ont des
performances moins bonnes que les
témoins sains en ce qui concerne la
reconnaissance, lors d’une présentation
bilatérale, du même mot dans les deux
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