MI S E A U P O I N T
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La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - n° 2 - mars-avril 2004
PHARMACOLOGIE ET TOXICOLOGIE
Le fulvestrant est un inhibiteur compétitif de la liaison des estro-
gènes à leur récepteur. Son affinité pour le RE est comparable à
celle de l’estradiol. Les études in vitro sur des lignées humaines
de cancer du sein ont montré une diminution des récepteurs estro-
géniques après une incubation de 48 heures. Le fulvestrant a été
identifié comme un inhibiteur réversible de la croissance des
lignées cellulaires tumorales mammaires MCF7 sensibles aux
estrogènes, mais aussi des modèles de lignées résistantes au
tamoxifène. Il est important de noter que, in vitro, les lignées cel-
lulaires résistantes au fulvestrant (MCF7/LCC9FVT) le sont aussi
au tamoxifène. Dans les études in vivo de xénogreffes chez la
souris nude, le fulvestrant retarde la prise des xénogreffes de cel-
lules MCF7 et inhibe la croissance des xénogreffes estrogènes-
sensibles établies ainsi que celle des tumeurs mammaires résis-
tantes au tamoxifène (13). Les tumeurs résistantes au fulvestrant
transplantées chez la souris démontrent une résistance croisée avec
le tamoxifène, ce qui n’est pas le cas dans la séquence inverse.
Les études toxicologiques chez la souris, chez le rat et chez le
chien ont démontré une faible toxicité, à l’exception des effets
anti-estrogéniques.
Une étude randomisée multicentrique évaluant la recherche de
dose optimale a analysé les effets antitumoraux du fulvestrant par
rapport à ceux du tamoxifène chez 201 patientes ménopausées
n’ayant jamais été traitées par hormonothérapie. Les récepteurs
hormonaux étaient positifs ou inconnus (16). Les objectifs étaient
représentés par l’expression des récepteurs hormonaux évaluée
par immunohistochimie, l’index de prolifération Ki67 et l’index
d’apoptose. Les patientes ont été randomisées en trois groupes :
trois doses de fulvestrant (50 mg, 125 mg ou 250 mg administrés
en une seule fois, 14 ou 21 jours avant l’exérèse chirurgicale), le
tamoxifène ou un placebo administrés une fois par jour pendant
14 à 21 jours avant l’intervention chirurgicale. Le traitement par
fulvestrant a induit de façon dose-dépendante une diminution des
récepteurs hormonaux (RE et RP), ainsi qu’une diminution conco-
mitante de l’index de prolifération Ki67. Toutes les doses de ful-
vestrant ont été plus efficaces que le placebo pour la diminution
du RE, et la dose de 250 mg était plus efficace que le tamoxifène.
De plus, le taux de RP était augmenté de façon significative par le
tamoxifène comparativement au placebo, mais significativement
réduit par le fulvestrant 125 mg ou 250 mg. Les deux agents, ful-
vestrant et tamoxifène, entraînent une diminution similaire de
l’index de prolifération Ki67 dans les tumeurs, compatible avec la
suppression de l’activité du RE. Cette étude suggère une d o w n -
r e g u l a t i o n du RE induite par le fulvestrant, et propose un schéma
d’administration de 250 mg en intramusculaire une fois par mois.
Un essai randomisé précoce ( 1 7 ) a évalué la pharmacocinétique,
la tolérance et les effets biologiques d’une formulation de durée
d’action courte du fulvestrant. Cinquante-six patientes ménopau-
sées présentant une tumeur RO+ ont été randomisées en trois
g r o u p e s : absence de traitement, et fulvestrant 6 mg ou 18 m g ,
administré une fois par jour pendant 7 jours avant la chirurgie. Bien
qu’il y ait eu une accumulation sur la période de 7 jours, le plateau
de concentrations plasmatiques n’a pas été atteint. Le fulvestrant
était bien toléré dans cette étude effectuée sur une courte période.
En utilisation clinique, la demi-vie est d’environ 40 jours après
une injection intramusculaire de 250 mg. Le fulvestrant est très
lié aux protéines plasmatiques (99 %) et présente un large volume
de distribution. Il n’existe pas de relation claire entre les para-
mètres d’efficacité (réponse objective, temps jusqu’à progression)
et les paramètres pharmacocinétiques (C
max
, ASC, clairance). Le
fulvestrant est très largement métabolisé et ne semble pas affecté
par les inducteurs du cytochrome P450 (18).
ÉTUDES DE PHASE II DANS LES CANCERS DU SEIN AVANCÉS
L’activité et la tolérance du fulvestrant ont été évaluées dans une
étude de phase II (18, 19). Dix-neuf patientes ménopausées pré-
sentant un cancer du sein résistant au tamoxifène ont été traitées
par fulvestrant 250 mg en intramusculaire une fois par mois
jusqu’à progression. Toutes les patientes avaient reçu plus de
2ans de tamoxifène en situation adjuvante, ou avaient présenté
une progression après une réponse ou une stabilité de plus de
6 mois sous tamoxifène en situation métastatique. Pendant le
traitement par fulvestrant, 7 patientes (37 %) ont présenté une
réponse partielle, et 6 (32 %) une stabilité supérieure à 24 s e m a i n e s
,
ce qui représente un taux de bénéfice clinique de 69 %. Les
réponses ont été observées chez 67 % (6/9) des patientes ayant
progressé pendant le traitement par tamoxifène, aussi bien que
chez celles qui avaient progressé sous traitement adjuvant (7/10).
Il n’y avait pas de corrélation entre la durée de traitement par le
tamoxifène et la réponse au fulvestrant. À la fin de l’étude,
5patientes présentaient toujours une réponse après 30 à 33 mois
de fulvestrant. Le fulvestrant était bien toléré, avec une faible inci-
dence d’effets indésirables et de réactions aux points d’injection.
ÉTUDES DE PHASE III DANS LES CANCERS DU SEIN AVANCÉS
Étude fulvestrant versus tamoxifène
En première ligne métastatique, il n’y a pas de différence en
termes de temps jusqu’à progression ou en termes de réponse
objective entre le fulvestrant (250 mg/mois) et le tamoxifène
(20 mg/j) (20).
Deux études pivotales de phase III ont été réalisées
Il s’agissait d’une étude nord-américaine (0021) et d’une étude
internationale (0020) comparant le fulvestrant à l’anastrozole chez
des patientes ménopausées atteintes d’un cancer du sein localement
avancé ou métastatique (21, 22). Toutes les patientes présentaient
une progression de la maladie après un traitement par tamoxifène
en situation adjuvante ou avancée. La majorité des patientes de ces
essais présentaient des taux de récepteurs hormonaux positifs (RE+
et/ou RP+). Les patientes dont la tumeur ne possédait pas de récep-
teurs hormonaux, ou si ceux-ci étaient inconnus, devaient avoir
présenté une réponse à une hormonothérapie antérieure. Les cri-
tères d’éligibilité requéraient au moins une lésion mesurable ou
évaluable. Dans les deux essais, les patientes ont été randomisées
entre fulvestrant une fois par mois en intramusculaire et anastro-
zole 1 mg/j. L’essai nord-américain a été réalisé en double aveugle,
et l’essai européen en ouvert. Initialement, ces études comportaient
un bras fulvestrant à la dose de 125 mg. Cependant, après une ana-
lyse intermédiaire, ce bras a été abandonné pour manque d’activité.