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La Lettre du Cancérologue - volume VII - n° 4 - août 1998
traitements, risque de récidives...). La
chimiothérapie est en général annon-
cée dans un deuxième temps, après
l’acte chirurgical, afin de ne pas ajou-
ter un stress supplémentaire. Elle est
alors présentée comme un traitement
adjuvant permettant de limiter les réci-
dives. Dans ce cas, le chirurgien
explique qu’un recours auprès d’un
spécialiste des traitements adjuvants
(en l’occurrence, le cancérologue, qui
n’est que rarement appelé par ce nom
afin de ne pas ajouter une angoisse
supplémentaire) est nécessaire, ce der-
nier étant le plus apte à expliquer les
modalités thérapeutiques.
Dans tous les cas, le pronostic n’est
qu’exceptionnellement abordé, car ce
sont les modalités thérapeutiques qui
font l’objet de questions. D’une manière
générale, plus le pronostic est bon,
plus il est facile d’annoncer la vérité au
patient ; plus il est mauvais, plus l’on
reste volontairement flou.
Pour le patient, la gravité
est proportionnelle aux
moyens thérapeutiques mis
en œuvre
La gravité du cancer a bien entendu
des conséquences sur le vécu psycho-
logique du patient.
Pendant la période de traitement ini-
tial, ce sont les modalités des diffé-
rentes étapes thérapeutiques qui susci-
tent le plus d’angoisse. Si le traitement
chirurgical ne se solde pas par la pose
d’un anus artificiel, n’altère pas la
fonction intestinale et si la chimiothéra-
pie éventuelle n’a pour objectif que de
diminuer le risque de récidives, le vécu
psychologique est bon.
Toutefois, la perception de la gravité
est plutôt proportionnelle aux moyens
thérapeutiques mis en œuvre.
Paradoxalement, un cancer au stade
terminal, ne relevant plus de la chirur-
gie, pourra paraître moins grave et
sera mieux vécu.
Lorsque les patients sont adressés au
cancérologue, ils savent le plus sou-
vent qu’il existe une tumeur maligne.
Le cancérologue, qui ne peut se réfu-
gier derrière l’attente du résultat d’un
examen complémentaire, aura un tra-
vail d’annonce et de présentation des
modalités de traitements à mettre en
œuvre.
Il est du devoir du cancérologue de ne
pas laisser croire au patient que ce
traitement médical complémentaire le
met totalement à l’abri des récidives et
d’annoncer qu’une surveillance régulière
devra être effectuée au moins pendant
les trois à quatre premières années.
Au vu des réactions observées lors de
l’annonce d’une chimiothérapie, il
s’avère que celle-ci fait de moins en
moins peur. Il est vrai que les chimio-
thérapies proposées sont moins
toxiques qu’auparavant et qu’elles
n’entraînent pas les principaux effets
indésirables redoutés, tels que l’alopé-
cie ou des troubles digestifs impor-
tants. Le cancérologue doit présenter
la chimiothérapie comme un traitement
préventif des récidives associant effica-
cité et bonne tolérance. En effet, il est
étonnant de constater qu’une absence
de toxicité peut être parfois associée,
aux yeux des patients, à une absence
d’efficacité.
Traitement palliatif : un
contexte plus difficile
Dans ce cas, le chirurgien, qui se sent
une obligation de résultat (ce qui n’est
pas le cas dans les pays anglo-
saxons), est assez démuni puisqu’en
général, il ne se limitera qu’à un geste
palliatif.
Les patients ont alors la notion que le
geste chirurgical devra être complété
par un traitement de chimiothérapie.
L’attitude du cancérologue doit être
adaptée à la psychologie du patient,
d’où une grande variabilité dans la
manière d’annoncer le diagnostic.
L’accent est mis sur les effets béné-
fiques potentiels des chimiothérapies
en termes de contrôle de la maladie et
des éventuels symptômes.
On peut retarder la réponse aux ques-
tions difficiles en s’abritant sous des
données techniques et en essayant plu-
sieurs alternatives thérapeutiques.
Cependant, lorsqu’aucun traitement
n’est efficace, plusieurs situations sont
possibles : certains patients vont antici-
per, alors que d’autres vont occulter la
situation et compenser en niant totale-
ment leur pathologie.
Pour ceux qui se rendent compte de la
situation, il est important de fixer un
objectif (un mariage, un anniver-
saire...). En effet, lorsque ces patients
n’ont pas d’objectif, la situation
devient difficile ; aussi, dès que les
mécanismes de défense psycholo-
giques deviennent insuffisants, l’aide
de psychologues est proposée.
Quoi qu’il en soit, il faut s’attacher à
ne pas mentir au malade tout en lui
présentant la vérité de manière à ce
qu’il puisse la supporter ; en d’autres
termes, omettre mais ne pas mentir.
Propos recueillis par
le Dr Chantal Despierre.
avec le soutien de :
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