La lettre du l’hépato-gastroentérologue - n° 1 - vol. VI - janvier-février 2003 33
CONGRÈS
lymphome intra-épithélial associée à la MC. Dans la série fran-
çaise portant sur 60 patients (Cellier et al.), une population lym-
phocytaire intra-épithéliale clonale de phénotype aberrant
(absence d’expression en surface de CD8 et présence de CD3
intracellulaire) a été observée dans plus de 80% des cas. Cette
population lymphocytaire peut disséminer dans le sang, à l’en-
semble du tractus digestif (côlon et estomac) et à d’autres sites
(peau, poumon, sinus) et évoluer vers une jéjuno-iléite ulcéreuse
et/ou un lymphome T invasif dans plus de 40% des cas. Cette
forme de lymphome intra-épithélial récemment décrite pourrait
être plus fréquente que le classique lymphome invasif compli-
quant la MC.
Un risque de lymphome malin non hodgkinien (LMNH) est pré-
sent au cours de la MC, surtout pour le lymphome T associé aux
entéropathies (EATL). Cependant, l’étude multicentrique euro-
péenne (Mearin et al., BIOMED) a montré qu’en dehors des
EATL, le risque de lymphome restait faible et ne justifiait pas la
recherche de MC chez les patients atteints de lymphome malin
extra-intestinal. Holmes (Royaume-Uni) a montré cependant
qu’au Royaume-Uni, le risque de lymphome du grêle était dix
fois plus fréquent chez les patients atteints de MC que dans la
population générale, et que ce risque diminuait considérable-
ment après deux ans de RSG.
DIAGNOSTIC
Plusieurs stratégies diagnostiques cherchent à remplacer les
biopsies intestinales par les tests sérologiques couplés avec le
typage HLA DQ2 ou DQ8. Actuellement, le diagnostic de MC
ne peut reposer uniquement sur les tests sérologiques. La pré-
sence d’AC sériques antigliadine et antitransglutaminase tissu-
laire (tTG) est retrouvée au cours d’autres pathologies, comme
l’hépatite C (dans 10et 3% des cas d’après Zitouni et al.), et la
présence d’AC antiendomysium et anti-tTG peut être retrouvée
de façon transitoire chez des enfants sains (von Blomberg et
Mary). D’après Picarelli et al., seuls des taux sériques élevés
d’AC anti-tTG sont spécifiques de la MC, car de faibles taux
d’AC anti-tTG peuvent être observés au cours de la maladie de
Crohn, de la rectocolite hémorragique ou de la polyarthrite rhu-
matoïde.
Feighery (Irlande) préconise cependant, pour le dépistage de la
MC, la recherche sérologique par ELISA des AC anti-tTG, puis
des AC (IgA) antiendomysium en test de seconde ligne. La posi-
tivité des IgA antiendomysium au moment du diagnostic est de
99% dans leur série. Du fait d’un faible pourcentage de patients
avec une authentique MC et des AC antiendomysium négatifs,
le recours systématique à la biopsie endoscopique du grêle reste
à ce jour l’examen de référence pour le diagnostic de MC.
La vidéo-capsule permet une excellente visualisation du grêle et
avoir un intérêt dans le diagnostic et le suivi des patients
cœliaques, en particulier pour les formes compliquées résis-
tantes au régime sans gluten (Petroniene et al., Toronto,
Canada). L’aspect endoscopique n’est pas cependant spécifique
(Green et al., Columbia, États-Unis), car les signes endosco-
piques de la MC peuvent être observés au cours d’autres patho-
logies, comme l’entéropathie HIV, la mastocytose systémique,
la maladie de Crohn, la sprue tropicale, etc.
D’autres stratégies diagnostiques s’appuient sur la forte asso-
ciation HLA DR3, HLA DQ2, HLA DQ8 et MC.
La plupart des patients avec MC ont un phénotype HLA
DQA1*0501 DQB1*0201 (DQ2) ou DQA1*0301 DQB1*0302
(DQ8). L’étude de Moodie, réalisée sur 283 patients anglais avec
MC, montre que les patients non DQ2 ou DQ8 ont un typage
HLA comprenant une partie de l’hétérodimère DQ2. Devant
cette forte association HLA DQ2/DQ8 et MC, Hadithi et al. pro-
posent une stratégie diagnostique consistant à coupler le typage
HLA DQ aux tests sérologiques (AC antigliadine,AC anti-endo-
mysium et AC anti-tTG). Les résultats de l’étude suggèrent
qu’un patient avec tests sérologiques négatifs et absence du phé-
notype HLA DQ2/DQ8 aurait un risque quasi nul d’être atteint
de MC.
AVANCÉES EN RECHERCHE FONDAMENTALE
Les études génétiques recherchent principalement de nouveaux
gènes de susceptibilité de la MC. Une méta-analyse d’études
européennes présentée par Babron montre qu’en plus des gènes
HLA de susceptibilité, les régions chromosomiques 2q, 5q et
11q sont significativement associées à la MC. Adamovic et al.
rapportent que la région 5q abrite des loci de susceptibilité en
particulier proches du gène de l’IL-9. Un déséquilibre de liaison
significatif entre MC et le gène ICOS en 2q33 a été retrouvé par
Haimila et al. au cours de l’étude de 107 familles finlandaises
atteintes de MC. ICOS est une molécule inductible intervenant
dans la costimulation de l’interaction lymphocyte T (LT)-cellule
présentatrice d’antigène (CPA).
L’avancée des recherches génétiques sur les gènes de susceptibili-
té HLA a permis de mieux étudier la présentation antigénique au
cours de la MC. Ainsi, les peptides de gliadine modifiés par l’en-
zyme transglutaminase se lient avec une haute affinité aux molé-
cules du complexe majeur d’histocompatibilité correspondant aux
gènes HLA-DQ2/8 et stimulent de façon spécifique les clones
lymphocytaires T. L’activité enzymatique de la tTG est condition-
née par différents facteurs locaux tissulaires et l’affinité pour le
peptide. Schuppan (Allemagne) a montré, in vitro, que les AC anti-
tTG pouvaient modifier l’activité enzymatique de la tTG. En
dehors des peptides “immunodominants” qui activent la réponse
lymphocytaire T, Auricchio (Italie) a montré que des peptides
toxiques (31-43) pouvaient être responsables, in vitro, de lésions
entérocytaires sans activer les LT CD4+.
Dans la lamina, la présentation des peptides de gliadine aux
molécules HLA-DQ2 est à l’origine d’une réponse lymphocy-
taire T de type TH1 avec production importante d’IFN-γ.
MacDonald (Royaume-Uni) a insisté sur l’augmentation de la
concentration d’IFN-αdans la muqueuse duodénale des
patients atteints de MC ainsi que sur l’augmentation de liaison
à l’ADN de STAT1 responsable de l’induction des molécules
ICAM-1 et B7-2.