LA MALADIE CŒLIAQUE CHEZ L’ENFANT FMC Pédiatrie – Tours Espace Malraux Jeudi 30 Mai 2013 Dr Stéphanie Willot Introduction Ø Maladie digestive fréquente Ø Physiopathologie bien connue Ø Maladie dysimmunitaire systémique - déclenchée et entretenue par la gliadine et certaines prolamines - Chez des individus géntiquement prédisposés : HLA DQ2 et/ou DQ8 Ø Caractérisée par - Des symptomes variés - Des Ac spécifiques - Une entéropathie Ø Nouvelles recommandations de l’ESPGHAN en 2012 pour le diagnostic Physiopathologie Gluten : fraction protéique insoluble de certaines céréales Glutélines Gluténines du blé Prolamines : épitopes toxiques Gliadines du blé Sécalines du seigle Hordéines de l’orge (Avénines de l’avoine) : rôle infirmé Prédisposition génétique Complexe majeur d’histo compatibilité: HLA de classe II Haplotype DQ2 (90%) : DQB1*02 / DQA1*05 Haplotype DQ8 (5 à 10%) : DQB1*0302 / DQA1*03 DQ2 : 30 à 40% de la population générale • Risque apparentés: – 75% jumeaux homozyg. – 30% fratrie HLA identique – 3 à 10% apparentés 1er degré • Bonne valeur prédictive négative PATHOGÉNIE DE LA MALADIE Constitution de l’atrophie villositaire Peptides de la gliadine Sélective déamidation Transglutaminase Liaison Peptides toxiques Hétérodimères DQ2 DQ8 Activation des lymphocytes TCD4, TCR α/ß Lamina propria Production interféron γ Sécrétion TNFα (macrophages) Effet cytotoxique sur les entérocytes PHYSIOPATHOLOGIE GÈNES HLA DQ2 / DQ8 (95%) Susceptibilité intolérance au gluten GÈNES HORS HLA ? - Contrôle réponse immunitaire - Modulation expression de la maladie et phénomènes inflammatoire MALADIE CŒLIAQUE ANTIGÈNE GLIADINE FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX - Allaitement maternel - Date d’introduction du gluten - Quantité de gluten - Perméabilité intestinale augmentée - Infections virales (adénovirus) Epidémiologie Incidence = partie visible de l’iceberg… q En Europe : 1/400 (en Suède) à 1/4000 (au Portugal) q Au Maroc (Afrique Nord) : 1/700 q En France : 1/2500 (GFHGNP) réalisée chez les enfants symptomatiques diagnostiqués avant l’âge de 15 ans) Incidence globale : 0,1 à 1% de la population CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES Ø Forme classique du nourrisson et du jeune enfant q Diarrhée chronique : selles « bouse de vache » q Anorexie précédent parfois la diarrhée, vomissements q Altération de l’état général : enfant pâle, apathique, grognon q Retard du développement psycho-moteur q Tristesse, renfermement q Abdomen ballonné, membres grêles, perte du pannicule adipeux, fesses « tristes » q Ralentissement de la croissance CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES Ø Forme moins typique de l'entant plus âgé q Symptomatologie digestive au second plan : anorexie, inconfort abdominal, diarrhée plus rare, constipation q Symptomatologie limitée à une petite taille isolée q Pâleur, asthénie (anémie) q Anomalies de l'émail dentaire aspect crénelé de la dent et sillons longitudinaux creusant l’émail. CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES Ø Forme moins typique de l'entant plus âgé Manifestations moins typiques • Aphtose buccale récidivante, dysplasie unguéale • Troubles du comportement • Aménorrhée • Douleurs osseuses, arthralgies • Ostéoporose • Cytolyse inexpliquée Associations connues • Autres maladies auto-immunes Risque ↑ avec âge, ATCD familiaux et si cœliaque avant 30 ans Diabète insulinodépendant (3-12%) Thyroïdite auto-immune (7%) Alopécie Cirrhose biliaire primitive et HAI (12-13%) • • • • Déficit en IgA (2-8%) Arthrite chronique juvénile Trisomie 21 (5-12%) Sd de Turner (2-5%) BIOLOGIE Ø Syndrome de malabsorption q Anémie ferriprive dans plus de 50% des cas q Hypocalcémie, hypocalciurie q Hypomagnésémie q Hypoalbuminémie q Hypocholestérolémie q Déficit en vitamines liposolubles (A, D, E, K), en folates Ø Parfois cytolyse hépatique: «hépatite cœliaque» Diagnostic Qui ? Comment ? Grande hétérogénéité clinique de la maladie MC symptomatique MC silencieuse MC latente ou potentielle Patients sains prédisposés ESPGHAN 2012 ; Qui tester? Enfants avec signes cliniques: Enfants à risque: - Digestifs: doul abdo chroniques, ballonnement, diarrhée chronique ou intermittente, nausées ou vomissements -Apparentés 1er degré d’une MC - Diabète de type I - Trisomie 21 - Thyroïdite auto-immune - Syndrome de Turner - Syndrome de Williams-Beuren (cardio, dysmorphie, retard, psycho) - Déficit en IgA - Maladie auto-immune du foie - Extradigestifs: mauvaise prise de poids, anémie et/ou carence martiale, asthénie, retard pubertaire, infléchissement statural, aménorrhée, stomatite aphteuse, dermatite herpétiforme, fractures, ostéoporose, cytolyse inexpliquée Toujours et seulement tester les enfants et les nourrissons qui consomment du gluten Débuter un régime sans gluten avant la confirmation de la maladie est délétère pour la suite des explorations. ESPGHAN 2012 Quelle sérologie? • 1ère étape du diagnostic Intérêt seulement si patient consomme du gluten Au diagnostic Les anticorps spécifiques et fiables dans le sang • Anti transglutaminase (tTG) • Anti endomysium (EMA) les + spécifiques • Anti gliadine déamidée (DGP) Anti gliadine Salive, SE MEFIER -Circonstances particulières • Enfant < 2 ans, peu de gluten, immunosup., IgG tTG positifs isolés Dosage pondéral des IgA IgA normales : Ac IgA IgA tTG ou IgA EMA Déficit en IgA Ac IgG IgG tTG ou IgG MA ou IgG DGP + - + MC probable MC très improbable MC probable ESPGHAN 2012 Et la biopsie? • • Nécessite gastroscopie / Biopsies bulbe et D2 multiples Continuum de lésions possibles d’infiltrat léger à atrophie totale • Peut être patchy AU DIAGNOSTIC Non indispensable si PENDANT LE SUIVI • Symptômes cliniques • IgA tTG > 10x N (confirmé par Ac EMA) • HLA compatible → Contrôle et suivi de la décroissance des IgA tTG sous régime Non nécessaire si Indispensable dans toutes les autres situations • • MC certaine Rémission sous RSG Nécessaire si • Non réponse au RSG • Challenge au gluten, en plus de la surveillance clinique et sérologique ESPGHAN 2012 chez qui faire le HLA? • Si absence de DQ2 et DQ8 : maladie cœliaque très improbable • Rôle principal du typage HLA est donc d’exclure le diagnostic Enfants avec MC quasi certaine : Enfants avec un diagnostic incertain de MC Ex : discordance clinique/sérologie Ou sérologie/biopsie HLA pas compatible MC improbable Poursuivre les explorations vers d’autres diagnostics clinique et sérologie en faveur HLA compatible conforte le diagnostic Pourrait éviter la biopsie Enfants à risque de MC Ex : maladie auto immune, T21… HLA pas compatible évite les sérologies - + ÉVOLUTION AUJOURD’HUI LE SEUL TRAITEMENT POUR LA MALADIE CŒLIAQUE EST LE RÉGIME SANS GLUTEN www.afdiag.org ÉVOLUTION Sous régime sans gluten - Amélioration du comportement 2-3 j - Normalisation du transit en quelques semaines - Rattrapage pondéral quelques semaines - Rattrapge statural 3 à 6 mois - Normalisation sérologies en 1 an - Réparation histologique 6 mois - 2 ans Enfant normal FAUT-IL FAIRE UN REGIME A VIE ? OUI, À CAUSE DE : COMPLICATIONS À LONG TERME Ø Ostéopénie Ø Maladie auto-immunes Ø Hypofertilité, stérilité Ø Cancers COMPLICATIONS À LONG TERME Ø Ostéopénie Comparaison de la densité minérale osseuse (DMO) et du contenu minéral osseux (CMO) chez des enfants avec maladie cœliaque et des enfants contrôles 34 enfants non traités 28 enfants traités Sujets contrôles Age 7.6 ± 4.7 7.9 ± 4.7 8.3 ± 3.5 DMO 0.447 ± 0.144 0.520 ± 0.112 0.537 ± 0.080 CMO 14.80 ± 9.69 18.89 ± 10.79 21.02 ± 4.14 Bone mineral density in children with untreated and treated Celiac disease. Kavak U S et al. J Pediatr Gastroenterol Nutr. 2003;37:434-6. Attention aux patients “asymptomatiques” aprés réintroduction ! COMPLICATIONS COMPLICATIONS ÀÀ LONG LONG TERME1 TERME Ø Ostéopénie q Intérêt d’un diagnostic précoce pour mise en place du traitement q Récupération en 1 an après régime q Argument important pour un régime chez les sujets asymptomatiques COMPLICATIONS À LONG TERME Ø Maladie auto-immunes • DID • Thyroïdite auto-immune • Hépatite auto-immune • CBP • Arthrite juvénile • Sjögren • Urticaire auto-immun • Ataxie sensible au gluten • Alopécie • Dermatite herpétiforme (sensible au RSG) • Macroamylasémie • Cardiomyopathie dilatée idiopathique q Prévention des maladie auto-immunes par le régime : incertain, études contradictoires COMPLICATIONS À LONG TERME Ø Cancers : risque surestimé tous types de cancer : x 1.3 LNH : x 3.1 lymphome intestinal : x 16.9 Après 5 ans de régime = risque de la population générale lymphome à cellules T: x 19.2 Cancer incidence in a population-based cohort of individuals hospitalized with celiac disease or dermatitis herpetiformis. Askling J, et al. Gastroenterology. 2002 Nov;123:1428-35 Malignancy in coeliac disease--effect of a gluten free diet. Holmes GK, et al. Gut. 1989;30(3):333-8. MAIS Ø Mauvaise observance surtout chez les patients asymptomatiques : 25 à 75 % des patients font des transgressions du régime ou des erreurs, même quand ils sont bien suivis Ø Qualité de vie: q régime compliqué, contrainte sociale, difficulté d’insertion q régime couteux Ø Acquisition de tolérance ? Rare mais pas nulle Ø Peu d’équipes proposent la réintroduction SEULE CERTITUDE TOUTE PERSONNE AYANT UNE MALADIE COELIAQUE DOIT AVOIR UN SUIVI MEDICAL RÉGULIER TOUT AU LONG DE SA VIE Que faire pour les patients asymptomatiques au diagnostic ? Ø Si maladie silencieuse (Ac et histo +) - Rechercher tout signe clinique de la maladie (asthénie, tb digestifs..) biologique ou déminéralisation osseuse Si Positifs : RSG Si négatif, RSG discutable Si refusé ou non proposé : SURVEILLANCE Ø Si maladie latente : (séro +, histo négative) Ø Pas de RSG mais surveillance