184 | La Lettre du Cancérologue Vol. XVII - n° 5 - mai 2008
ONCOLOGIE
TRANSLATIONNELLE
Coordonné par S. Faivre
(hôpital Beaujon, Clichy)
C. Tournigand
(hôpital Saint-Antoine, Paris)
// American Journal of Human Genetics
// Blood
// Cancer Reseach
// Clinical Cancer Reseach
// Nature
// Proceedings of the National
Academy of Sciences of the USA
Les polymorphismes de type SNP
des gènes du NER XPA, XPD,
XPG et ERCC1 :
facteurs prédictifs
de la réponse des patients
atteints de cancer colorectal
avancé recevant
de l’oxaliplatine en première
ligne
> Monzo M, Moreno I, Navarro A, Ibeas R, Artells R, Gel B,
Martinez F, Moreno J, Hernandez R, Navarro-Vigo M. Single
nucleotide polymorphisms in nucleotide excision repair genes
XPA, XPD, XPG and ERCC1 in advanced colorectal cancer patients
treated with first-line oxaliplatin/fluoropyrimidine. Oncology
2007;72(5-6):364-70.
L
association de l’oxaliplatine à d’autres
agents peut améliorer les résultats dans le
traitement des cancers colorectaux (CRC) métas-
tatiques. De nombreuses études portant sur des
patients atteints de CRC métastatiques montrent
que l’addition d’oxaliplatine aux chimiothéra-
pies à base de fluoro-uracile ou de leucovorine
améliore le taux de réponse et prolonge la
survie sans progression. L’activité cytotoxique
de l’oxaliplatine est initiée par la formation
d’adduits sur l’ADN
en position N-7 des
guanines et des
adénines. Après la
formation de ces
adduits, les cellules
tumorales activent
leurs mécanismes
de réparation de
l’ADN. Le méca-
nisme de répara-
tion de l’ADN par
excision de nucléo-
tide (nucleotide excision repair [NER]) semble
être le mécanisme principal par lequel les cellules
éliminent les lésions de l’ADN induites par des
agents chimiques. Ce système NER est le plus
polyvalent en termes de diversité des lésions
reconnues. Il est le système majeur de répara-
tion des adduits covalents provoqués par des
toxines environnementales ou xénobiotiques.
Le mécanisme se déroule en quatre étapes :
reconnaissance des dommages, ouverture de
l’ADN de part et d’autre de la lésion, incision
du brin d’ADN endommagé, puis resynthèse
du fragment éliminé suivie d’une religation de
l’oligonucléotide nouvellement synthétisé. Diffé-
rents gènes de réparation interviennent, dont
XPA, impliqué dans le complexe de reconnais-
sance des dommages sur l’ADN, XPD, qui code
une hélicase ATP-dépendante, et XPG et ERCC1,
responsables du clivage de l’ADN endommagé
en 3’ et 5’ du site de la lésion. Les SNP relevant
des gènes du NER peuvent moduler la capacité
de réparation du NER et contribuer ainsi aux
réponses individuelles des patients au même
traitement thérapeutique. Les dommages de
l’ADN induits par l’oxaliplatine peuvent entraîner
l’apoptose. Les gènes XPA, XPD, XPG et ERCC1
sont impliqués dans la réparation de l’ADN de
type NER, et les polymorphismes de type SNP de
ces gènes peuvent conditionner l’efficacité de
l’oxaliplatine. Dans cette étude, les auteurs ont
recherché la valeur pronostique de différents
SNP dans la réponse à l’oxaliplatine. À cette fin,
ils ont étudié les SNP de ces gènes et corrélé les
résultats avec le temps jusqu’à progression (TTP),
la survie globale et la réponse à l’oxaliplatine
chez 42 patients atteints de CRC avancé et rece-
vant en première ligne une chimiothérapie par
oxaliplatine/fluoropyrimidine.
Pour élucider le rôle discriminant de ces poly-
morphismes dans la sensibilité à la combinaison
oxaliplatine/fluoropyrimidine, on a extrait l’ADN
des cellules du sang périphérique des 42 patients.
La technique de discrimination allélique a permis
d’analyser les SNP suivants : XPA 5’UTR T/C,
XPD Lys751Gln, ERCC1 Lys259Thr et XPG C/T.
Il s’avère que les patients de génotype XPG C/C
présentent une survie (p = 0,001) et un TTP plus
longs que ceux des patients avec les génotypes
XPG T/T et C/T.
Les patients de génotype XPG C/C et XPA T/C
ou C/C ont une survie (p = 0,0001) et un TTP
plus longs que les patients possédant les autres
génotypes.
Le polymorphisme du gène XPG combiné à
celui du gène XPA peut être un facteur prédictif
important à prendre en compte dans le choix
d’une chimiothérapie oxaliplatine/fluoropyri-
midine. Toutefois, des études supplémentaires
sur des cohortes de patients plus importantes
doivent être entreprises pour confirmer le rôle
important de la recherche de ces SNP chez des
patients atteints de CRC avancés devant recevoir
de l’oxaliplatine.
V. Le Morvan,
institut Bergonié, Bordeaux
La pharmaco-
génomique
du système NER :
vers une optimisation
de la chimiothérapie
par oxaliplatine
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La Lettre du Cancérologue Vol. XVII - n° 5 - mai 2008 | 185
Le niveau d’hypométhylation
de LINE-1, un facteur
pronostique potentiel
des cancers épithéliaux
de l’ovaire
> Pattamadilok J, Huapai N, Rattanatanyong P, Vasurattana A,
Triratanachat S, Tresukosol D, Mutirangura A. LINE-1 hypo-
methylation level as a potential prognostic factor for epithelial
ovarian cancer. Int J Gynecol Cancer 2007; epub ahead of print.
L
e cancer épithélial de l’ovaire (CEO) est un
cancer gynécologique résultant de la trans-
formation maligne de l’épithélium ovarien ; 80 %
des cancers ovariens sont d’origine épithéliale.
Environ 3 000 nouveaux
cas sont diagnostiqués
chaque année en France.
Ce cancer touche 1,8 %
des femmes et repré-
sente 5,8 % des causes
de mortalité féminine.
Il constitue la troisième
cause de mortalité par
cancer génital féminin,
après le cancer du sein et le cancer de l’endo-
mètre. La majorité des CEO sont diagnostiqués
à un stade avancé et entraînent la mort à cause
de la persistance de la maladie ou d’une rapide
reprise évolutive. Le taux de survie à 5 ans est
inférieur à 20 %. Plusieurs facteurs, tels que
l’âge, le stade FIGO, le grade tumoral ou le résidu
tumoral, jouent un rôle dans le pronostic du CEO.
Plus récemment, des équipes se sont focalisées sur
l’étude les altérations moléculaires du CEO.
La diminution globale du niveau de méthylation
du génome est l’un des événements moléculaires
communs à tous les cancers. Elle pourrait expli-
quer une partie de la cancérogenèse et peut
faciliter l’instabilité chromosomique. Le niveau
de l’hypométhylation génomique est souvent
corrélé à la progression tumorale et à l’invasi-
vité dans plusieurs types de cancers, dont le CEO.
Sont particulièrement atteintes par cette perte de
méthylation les séquences répétées
Long Inters-
persed Element-1
(LINE-1), qui constituent 17 %
du génome humain et sont retrouvées à plus de
600 000 copies. Les auteurs ont réalisé une étude
rétrospective du statut d’hypométhylation des
séquences LINE-1 aux différents stades évolutifs
des CEO, et ont recherché l’existence de corré-
lations entre le degré d’hypométhylation et les
caractéristiques clinico-pathologiques des CEO.
Pour cela, 59 échantillons appariés de tissu sain
et de tissu tumoral ont été obtenus par microdis-
section à partir de pièces opératoires de patientes
atteintes d’un CEO, et ils ont été étudiés quant
au niveau de méthylation des séquences répétées
LINE-1 par un protocole de
polymerase chain reac-
tion
(PCR) quantitative
(1)
. Le degré de méthy-
lation des séquences LINE-1 de ces 59 cancers
ovariens est de 35 ± 7 %, significativement plus
faible que dans le tissu ovarien normal (47 ± 8 % ;
IC95 : 9,42-14,62 ; p < 0,001). Les patientes présen-
tant un degré d’hypométhylation 35 % ont une
survie globale et une survie sans progression plus
courtes (p = 0,003 et p < 0,001, respectivement).
La diminution
progressive du niveau
de méthylation des
séquences répétées
LINE-1 est un processus
épigénétique fréquent
dans les CEO et pour-
rait être utilisée comme
marqueur de l’évolu-
tion de ces cancers.
Des études prospectives devront préciser sa place
dans le suivi de routine de ces cancers et dans
l’évaluation de leur pronostic.
V. Le Morvan,
institut Bergonié, Bordeaux
Référence bibliographique
1. Xiong Z, Laird PW. COBRA: a sensitive and
quantitative DNA methylation assay. Nucleic Acids
Res 1997;25:2532-4.
TWIST est directement régulé
par HIF-1α et promeut
la formation de métastases
> Yang MH, Wu MZ, Chiou SH, Chen PM, Chang SY, Liu CJ, Teng SC,
Wu KJ. Direct regulation of TWIST by HIF-1α promotes metastasis.
Nat Cell Biol 2008;10:295-305.
Lhypoxie intratumorale se caractérise par la
stabilisation et l’activation du facteur de
transcription HIF-1α. De nombreux facteurs, de
type Snail ou LOX, impliqués dans le processus
de transition épithélio-mésenchymateuse
(TEM), sont contrôlés par HIF-1α. Cette transi-
tion favorise l’invasion et la progression tumo-
rale en dédifférenciant les cellules épithéliales
vers un phénotype de type mésenchymateux,
accroissant ainsi leur mobilité. Dans cet article,
les auteurs détaillent le rôle de HIF-1α dans l’in-
duction de la TEM et caractérisent son implication
dans le contrôle de l’expression du facteur de
transcription TWIST.
Dans une première série d’expériences, les auteurs
montrent que l’exposition des lignées cellulaires
FaDu (cancer hypopharyngique) et MCF-7 (cancer
du sein) à des conditions hypoxiques entraîne
l’induction de la TEM, caractérisée par la dispa-
rition des marqueurs épithéliaux (E-cadhérine
et plakoglobine) et l’apparition de marqueurs
mésenchymateux (vimentine et N-cadhérine). Ces
changements s’accompagnent d’un accroissement
de la capacité migratoire et invasive des cellules.
Pour confirmer le rôle central de HIF-1α dans ce
processus, les auteurs ont produit des cellules
FaDu, dans lesquelles est exprimée une forme
de HIF-1α, rendue constitutivement active par
délétion de son domaine de dégradation dépen-
dant de l’oxygène. L’expression de cette forme
de HIF-1α entraîne, dans des conditions normoxi-
ques, l’induction de la TEM et l’accroissement de
la capacité migratoire des cellules. La présence
de HIF-1α constitutivement active augmente le
nombre de métastases pulmonaires formées par
les cellules FaDu lorsque celles-ci sont injectées
au niveau de la veine de la queue de souris NOD-
SCID. De même, leur injection orthotopique se
traduit par un accroissement de l’invasion locale,
du nombre de métastases distantes et de la taille
des tumeurs. À l’inverse, l’inhibition de l’expres-
sion de HIF-1α, par interférence ARN, dans les
cellules de cancer du poumon H1299 en condition
normoxique ou dans les cellules FaDu et MCF-7
en condition hypoxique se traduit par une perte
d’expression des marqueurs mésenchymateux au
profit des marqueurs épithéliaux, diminuant ainsi
les propriétés migratoires, invasives et métastati-
ques des cellules étudiées, identifiant l’hypoxie
et HIF-1α comme déterminants majeurs de l’in-
duction de la TEM. En raison de la similitude des
phénotypes des souris
knockout
HIF-1α/et
TWIST –/– et de l’importance de ces deux protéines
dans les processus métastatiques, les auteurs
se sont intéressés à la gulation de TWIST en
réponse à l’hypoxie ou à l’expression constitutive
de HIF-1α. Des expériences de
polymerase chain
reaction
(PCR) quantitative et de
Western blot
ont révélé que TWIST est exprimé en réponse à
l’expression de HIF-1α. À l’inverse, son inhibition,
par interférence ARN, bloque toute activation
de TWIST. Les auteurs ont identifié un élément
L’hypométhylation :
un facteur
pronostique dans
le cancer de l’ovaire ?
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ONCOLOGIE
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de réponse à l’hypoxie (HRE) dans le promoteur
du gène codant pour TWIST et ont montré, par
des expériences de transfections transitoires, que
l’intégrité de cet HRE, couplé à l’expression d’un
HIF-1α fonctionnel, était nécessaire à l’activité du
promoteur. Des expériences de retard sur gel,
combinées à des expériences d’immunoprécipi-
tation de chromatine, ont confirmé que HIF-1α lie
cet HRE, contrôlant ainsi directement l’expression
de TWIST. L’inhibition de l’expression de TWIST,
par interférence ARN, dans les cellules FaDu, expri-
mant pourtant la forme constitutivement active
de HIF-1α, se traduit par la perte des marqueurs
de la TEM et la disparition de leur phénotype
métastatique, soulignant l’importance de TWIST
dans la réponse cellulaire à l’hypoxie ou la surex-
pression de HIF-1α. Néanmoins, la seule expression
de TWIST ne peut être entièrement tenue respon-
sable de l’apparition de
la TEM. En effet, lorsque
TWIST est surexprimé
dans des cellules FaDu
où Snail est inhibé par
interférence ARN, il est
impossible d’observer
une capacité migratoire
égale à celle observée
lorsque Snail n’est pas inhibé. De même, lorsque
l’expression de TWIST est elle-même inhibée, la
répression de Snail ou de LOX diminue encore plus
la capacité migratoire des cellules. Ces résultats
sugrent que seule une partie de la capacité
invasive des cellules est contrôlée par TWIST et
qu’il existe une complémentarité de fonction
entre TWIST, Snail et LOX. En accord avec ce
modèle, les auteurs montrent que l’expression
conjointe de HIF-1α, TWIST et Snail dans des
tumeurs primaires de patients atteints de cancers
“tête-cou” (HNSCC) constitue un facteur de très
mauvais pronostic au regard du risque métasta-
tique et de la survie des patients, pronostic bien
pire que lorsque ces trois marqueurs ne sont pas
exprimés simultanément.
Dans cet article, les auteurs identifient TWIST
comme un déterminant majeur de la réponse
cellulaire à l’hypoxie. Ce travail souligne surtout
l’importance de développer des stratégies théra-
peutiques innovantes pour inhiber les effets
transcriptionnels de HIF-1α et, ainsi, pvenir
les métastases des tumeurs hypoxiques.
A. Escargueil,
hôpital Saint-Antoine, Paris
Rôle des microARN endogènes
humains dans la suppression
des métastases du cancer
du sein
> Tavazoie SF, Alarcón C, Oskarsson T, Padua D, Wang Q, Bos PD,
Gerald WL, Massagué J. Endogenous human microRNAs that
suppress breast cancer metastasis. Nature 2008;451:147-52.
L
es microARN (miARN) sont des molécules d’ARN
non codantes, d’environ 22 nucléotides, qui
fonctionnent comme régulateurs de l’expression
génique. Ils sont codés par lenome et générale-
ment transcrits par l’ARN polymérase II. Les miARN
ciblent les ARN messagers, bloquant leur traduction
ou induisant leur dégradation. De récents travaux
ont montré que ces miARN jouent divers rôles dans
les processus de différenciation et de prolifération
cellulaire et qu’ils sont impliqués dans les méca-
nismes d’initiation et de progression tumorale
(1,
2)
. L’analyse de l’expression génique de diverses
tumeurs humaines a permis de finir un ensemble
de gènes, ou signature, dont l’expression est asso-
ciée à un risque important de rechute, en raison,
notamment, du développement de métastases.
anmoins, les événements qui régulent, en amont,
l’activation de ces gènes restent méconnus. Les
miARN, de par leur capacité à contrôler tout un
ensemble de gènes, constituent donc des éléments
précoces de régulation dont la simple dérégulation
peut entraîner l’apparition de telles signatures,
favorisant ainsi la formation de métastases.
Dans cet article, les auteurs s’emploient à caracté-
riser, dans un premier temps, un profil d’expres-
sion de ces miARN dans les cellules de cancer du
sein MDA-MB-231 et de ses dérivés métastatiques
LM2 (métastases pulmonaires) et BoM1 (métastases
osseuses). Cette étude a permis non seulement de
mettre en évidence l’existence d’un profil d’ex-
pression spécifique à chaque type cellulaire, mais
aussi d’identifier six miARN dont l’expression est
fortement diminuée dans les cellules métastatiques.
La restauration de l’expression de ces six miARN
dans les cellules LM2 et BoM1, par transduction
rétrovirale, a permis de montrer que trois d’entre
eux (miR-335, miR-126 et miR-206) réduisaient
de manière importante et prolongée la colonisa-
tion des poumons ou la formation de métastases
osseuses. De même, lorsque des cellules tumorales
(CN34) issues d’une patiente atteinte de cancer du
sein étaient injectées dans des souris, la formation
de tastases pulmonaires (CN34-LM1) et osseuses
(CN34-BoM1) était corrélée avec la perte d’expres-
sion de ces trois miARN. À l’inverse, la restauration
Vers un décryptage
de la progression
tumorale induite
par l’hypoxie
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188 | La Lettre du Cancérologue Vol. XVII - n° 5 - mai 2008
ONCOLOGIE
TRANSLATIONNELLE
de leur expression dans les cellules CN34-LM1 ou
CN34-BoM1 induisait une forte réduction de leur
pouvoir métastatique. L’étude mécanistique des
processus de suppression métastatique de ces
trois miARN a révélé que miR-126 agit principa-
lement en réduisant la prolifération des cellules
tumorales tandis que miR-335 et miR-206 agissent
en réduisant la capacité migratoire
(Transwell
®
migration assay)
et invasive
(Matrigel™ invasion
assay)
des lignées cellulaires métastatiques dérivées
des cellules MDA-MB-231 et CN34. Afin de voir si
la perte d’expression de ces miARN était associée
à la formation de métastases chez les patientes
atteintes de cancer du sein, les auteurs ont mesu
leurs niveaux d’expression, par qRT-PCR, chez
20 patientes dont 11 présentant ou ayant présenté
des métastases. La perte d’expression de ces trois
miARN dans les tumeurs
primaires, et en particulier de
miR-335 et miR-126, bien que
non corrélée au statut ER ou
HER-2, était fortement asso-
ciée à l’apparition de métas-
tases. Pour confirmer in vitro
cette observation, les auteurs
ont inhibé l’expression de
miR-335 avec un antimiARN (antagomir) dans les
cellules MDA-MB-231, au faible pouvoir métasta-
tique, et ont montré que cette inhibition entraî-
nait un accroissement important de la colonisation
pulmonaire. Afin de déterminer les gènes dont
l’expression pend de celle de miR-335, les auteurs
ont procédé à une large analyse bio-informatique.
Celle-ci a permis d’identifier six gènes dont l’ex-
pression est accrue dans les cellules métastatiques
et inhibée par miR-335. Quatre d’entre eux (SOX4,
PTPRN2, TNC et MERTK) sont directement régulés,
via leur région 3’-UTR, par miR-335. Pour confirmer
l’importance de ces six gènes, considérés comme
une signature de miR-335, dans la formation de
métastases, les auteurs ont analysé une cohorte
de 368 patientes atteintes de cancers du sein et
mesuré l’apparition ou non de cette signature. Ils
ont ainsi montré que les patientes dont les tumeurs
primaires étaient positives pour la signature miR-
335 présentaient un moins bon pronostic, en termes
de survie sans métastases, que les patientes dont
les tumeurs primaires étaient négatives pour cette
même signature.
En résumé, les auteurs ont mis en évidence, pour
la première fois, une importante corrélation entre
la perte d’expression des miARN et la capacides
cellules de cancer du sein à former des métas-
tases. En relation avec les précédents travaux
montrant un rôle oncogénique des miARN
(1, 2)
,
cette étude souligne l’importance de ces molécules
dans l’ensemble des processus liés à la progression
tumorale.
A. Escargueil,
hôpital Saint-Antoine, Paris
Références bibliographiques
1. Cho WC. OncomiRs: the discovery and progress
of microRNAs in cancers. Mol Cancer 2007;
6:60.
2. Ma L, Teruya-Feldstein J, Weinberg RA. Tumour
invasion and metastasis initiated by microRNA-10b
in breast cancer. Nature 2007;449:682-8.
L’expression de l’isoforme M2
de la pyruvate kinase
est importante
pour la croissance tumorale
> Christofk HR, Vander Heiden MG, Harris MH, Ramanathan A,
Gerszten RE, Wei R, Fleming MD, Schreiber SL, Cantley LC. The
M2 splice isoform of pyruvate kinase is important for cancer
metabolism and tumour growth. Nature 2008;452:230-3.
Il y a plus de soixante-quinze ans, Otto Warburg
remarquait que les cellules tumorales métaboli-
sent le glucose en utilisant préférentiellement
le processus de glycolyse aérobie, changement
métabolique induisant notamment une production
accrue de lactate. Un récent article a montré que,
contrairement aux idées généralement admises, ce
changement n’est pas forcément lié à un défaut
de la chaîne de phosphorylation oxydative mito-
chondriale
(1)
. D’une manière intéressante, les
gènes codant pour les protéines de la glycolyse
sont parmi les plus surexprimés dans les cancers.
Parmi ces gènes, on retrouve celui codant pour
la pyruvate kinase (PK), une enzyme régulant la
dernière étape de la glycolyse. Quatre isoformes
de cette enzyme existent : L et R, exprimées dans le
foie et les globules rouges ; M1, exprimée dans la
plupart des tissus adultes ; et M2, exprimée au cours
de l’embryogenèse. Récemment, il a été rapporté
que les tissus tumoraux exprimaient exclusivement
l’isoforme M2 de l’enzyme (PK M2). Pour essayer
de comprendre cet apparent paradoxe, les auteurs
ont donc cherché à caractériser ce changement
d’expression et à comprendre ses effets à la fois sur
le métabolisme du glucose et sur la prolifération
des cellules tumorales.
Les miARN :
un facteur c
de la dissémination
métastatique
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tats obtenus démontrent sans
ambiguïté que l’expression de
l’isoforme M2, et non celle de
l’isoforme M1, est indispen-
sable à l’établissement des tumeurs.
Dans cet article, les auteurs mettent en évidence
un rôle majeur de la PK M2 dans les processus de
tumorogenèse et les changements métaboliques
qui les accompagnent. Bien que les mécanismes
sous-jacents restent à déterminer, il est vraisem-
blable que ce changement d’isoforme, tout en
n’étant pas par lui-même transformant, crée un
environnement tabolique favorable à la progres-
sion tumorale.
A. Escargueil,
hôpital Saint-Antoine, Paris
Références bibliographiques
1. Fantin VR, St-Pierre J, Leder P. Attenuation
of LDH-A expression uncovers a link between
glycolysis, mitochondrial physiology, and tumor
maintenance. Cancer Cell 2006;9:425-34.
Le polymorphisme
de la bléomycine hydrolase
est associé à l’efficacité
de la chimiothérapie
des cancers testiculaires
> De Haas EC, Zwart N, Meijer C, Nuver J, Boezen HM, Suurmeijer AJ,
Hoekstra HJ, van der Steege G, Sleijfer DT, Gietema JA. Variation
in bleomycin hydrolase gene is associated with reduced survival
after chemotherapy for testicular germ cell cancer. J Clin Oncol
2008;26(11):18-23.
Q
ui se souvient de la bomycine ? Une des
rares indications de ce composé original est
le cancer du testicule ; dans les protocoles associant
cette molécule au cisplatine et à l’étoposide, on
atteint maintenant une survie à long terme de plus
de 80 % des patients, et il paraît difficile de faire
mieux, malgré le fait que le groupe de patients de
mauvais pronostic n’ait une survie à long terme
que de 48 %. La bléomycine reste indispensable
au traitementdical des tumeurs germinales
(1)
,
ce qui n’est pas sans poser problème, puisque ce
médicament présente une toxicité pulmonaire non
négligeable, et parfois fatale
(2)
. La bléomycine
est inactivée par une bléomycine hydrolase, qui
présente un polymorphisme (A1450G, ile443val)
souvent considéré comme fonctionnel parce qu’il
est associé à une différence dans l’endommage-
ment de l’ADN induit par la bléomycine
(3)
.
Les auteurs ont étudié rétrospectivement ce poly-
morphisme dans une cohorte de 372 patients trais
pour une tumeur non séminomateuse du testicule
dans un seul centre, de 1977 à 2003. Ils ont pu
obtenir de l’ADN dans 304 cas et relier la présence
de la variation polymorphique à la survie globale,
à la survie liée au cancer et à la survie sans progres-
sion. La variation était présente à l’état homozygote
chez 31 patients et à l’état hétérozygote chez
133 patients ; 140 patients présentaient le géno-
type commun homozygote. La survie des patients
homozygotes variants était réduite de fon signifi-
cative par rapport aux homozygotes communs, celle
des hétérozygotes
étant intermédiaire ;
et cela a été observé
pour les trois para-
mètres étudiés (survie
globale : p = 0,006 ;
survie liée au cancer :
p = 0,001 ; survie sans
progression : p = 0,013). Un modèle de Cox multivarié
a été établi : seuls apparaissent significativement
prédictifs de la survie le grade pronostique classique
et le polymorphisme de la bléomycine hydrolase ;
le risque de décès lié au cancer est multiplié par 5
chez les patients homozygotes variants (intervalle
de confiance à 5 % : 2,2-11,4).
Voilà un travail “statistiquement satisfaisant: un
nombre suffisant de patients a été recruté, un seul
type de paramètre a été évalué (la survie) et un
seul polymorphisme a été recherché. À l’évidence,
les uro-oncologues devraient pouvoir utiliser ce
polymorphisme pour en tirer des conséquences
cliniques, qui pourraient être l’intensification de
la chimiothérapie chez les sujets homozygotes
variants (10 % de la population), même s’ils
appartiennent au groupe de bon pronostic. Mais
la conduite à tenir ne pourra être validée que par
un essai prospectif…
J. Robert,
institut Bergonié, Bordeaux
Références bibliographiques
1. Levi JA, Raghavan D, Harvey V et al. The
importance of bleomycin in combination
chemotherapy for good-prognosis germ-cell
carcinoma. Australasian Germ Cell Trial Group.
J Clin Oncol 1993; 11:1300-5.
2. Sleijfer S. Bleomycin-induced pneumonitis. Chest
2001;120:617-24.
3. Tuimala J, Szekely G, Gundy S, Hirvonen A,
Norppa H. Genetic polymorphisms of DNA repair and
xenobiotic-metabolizing enzymes: role in mutagen
sensitivity. Carcinogenesis 2002;23:1003-8.
Des enzymes
de la glycolyse
liées à la croissance
tumorale
Ils ont, dans un
premier temps, utilisé
un modèle murin de
cancer du sein (souris
MMTV-NeuNT) pour montrer que, lors de la tumo-
rogenèse, l’expression de l’isoforme M1 de la PK
(PK M1) est rapidement perdue au profit de celle de
son isoforme M2. Ils ont confirmé l’importance de ce
changement en montrant que l’ensemble de leurs
lignées de cellules tumorales exprimaient la PK M2
et non la PK M1. Enfin, par immunohistochimie, sur
des coupes de cancer colorectal, ils ont mont que,
bien que la PK M1 soit exprimée dans les cellules
stromales, elle est absente des cellules cancéreuses,
elle est remplae par la PK M2. Pour comprendre
le rôle de la PK M2 dans les cellules cancéreuses, les
auteurs ont inhibé de manière stable son expression
par interférence ARN dans les cellules humaines de
cancer du poumon H1299. Cette inhibition entrne
un ralentissement du tabolisme du glucose et de
la prolifération cellulaire. En condition normoxique,
cette inhibition peut anmoins être complétée par
l’expression des isoformes M1 ou M2 murines. En
condition hypoxique, en revanche, seule l’expres-
sion de la PK M2 murine peut complémenter les
effets de l’inhibition de l’expression de l’enzyme
endogène. De même, le traitement des cellules
avec de l’oligomycine, un inhibiteur spécifique
de l’ATP synthase mitochondriale, affecte unique-
ment la prolifération des cellules complémentées
par la PK M1, ce qui suggère que la prolifération
des cellules exprimant cette isoforme, et non la
PK M2, est fortement dépendante du processus
mitochondrial de phosphorylation oxydative. Pour
confirmer cette hypothèse, les auteurs ont mesuré la
consommation d’oxygène, la production de lactate
et autres métabolites dans les cellules complémen-
tées par la PK M1 ou la PK M2. En accord avec les
sultats précédents, les cellules compmentées par
la PK M1 consomment plus d’oxygène et produisent
moins de lactate que celles qui sont complémentés
par la PK M2, et ce bien que leur consommation
en glucose soit similaire. D’autres métabolites tels
que le pyruvate ou le fructose biphosphate voient
aussi leur concentration modifiée en fonction de
l’isoforme exprimée. Ces résultats démontrent que
le changement d’isoforme de la PK obser dans les
cellules tumorales entraîne un changement majeur
de leur métabolisme. Pour confirmer le rôle de ce
changement dans la prolifération tumorale in vivo,
les auteurs ont injecté, dans des souris, les cellules
complémentées avec la PK M1 ou la PK M2. Les résul-
Bléomycine :
en a-t-on vraiment
fait le tour ?
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