Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume IV, n° 5, octobre 2000
tant, lorsqu’un sujet vient consulter pour
un type de paraphilie, de rechercher
d’autres comportements paraphiliques par-
fois plus graves avant d’opter pour une
stratégie thérapeutique.
Le nombre moyen d’incidents rapportés
par un individu au cours de son existence
varie de 30 à 75, ce qui est probablement
encore sous-estimé. Ce chiffre correspond
au nombre de victimes pour les pédo-
philes, les exhibitionnistes et les auteurs de
viols (cité dans 2). Les paraphilies sont
essentiellement l’apanage des hommes
(99 % des cas en France). Les femmes
auteurs de délits sexuels ont une incidence
plus importante de maladie mentale,
d’alcoolisme ou de retard mental.
Le nombre de signalements d’abus sexuels,
au sens large du terme, ne cesse d’augmen-
ter (+ 50 % en France en dix ans environ, la
hausse la plus importante concernant les
viols d’enfants). Cela traduit probablement
un accès facilité aux plaintes. Il y aurait
chaque année, selon F. Bredin,
10 000 mineurs victimes d’atteintes
sexuelles (rapport établi pour la Commis-
sion des Lois de l’Assemblée nationale en
1997). Pithers et al. (3),dans leur revue sur
les abus sexuels aux États-Unis, rapportent
qu’environ 30 % des femmes et 15 % des
hommes dans la population générale signa-
lent avoir été victimes d’abus sexuels avant
l’âge de 18 ans. Seulement 3 % des vic-
times ont déposé plainte.
En France, selon une étude réalisée en
1996 sur la population carcérale, environ
14,5 % des prisonniers avaient commis des
délits ou des crimes sexuels. La majeure
partie d’entre eux avait plus de 18 ans.
Cependant, Pithers et al. (3) observent
qu’environ un adulte sur deux ayant
commis un délit sexuel considère que son
comportement déviant a débuté avant l’âge
de 18 ans. Aux États-Unis, environ 20 %
des viols et 30 à 50 % des attentats à la
pudeur perpétrés sur des enfants sont com-
mis par des adolescents.
L’évolution à l’âge adulte de ces adoles-
cents et préadolescents délinquants
sexuels n’est pas très favorable ; on
observe souvent la poursuite de leurs com-
portements violents (sexuels ou non), et la
probabilité de commettre à nouveau des
délits sexuels est d’autant plus importante
qu’ils ont eux-mêmes été victimes d’abus
sexuels dans l’enfance (4). Les délits et
crimes sexuels commis par ces jeunes
s’inscrivent en général dans le cadre d’un
comportement antisocial (échec scolaire,
isolement social...).
Évaluation clinique
et paraclinique
L’examen clinique d’un patient présentant
des conduites paraphiliques débute par une
recherche des antécédents criminels,
médicaux, psychiatriques, de la notion
d’abus sexuel dans l’enfance et d’une
éventuelle consommation abusive de
toxiques. Le praticien tentera de faire pré-
ciser le délit ainsi que l’activité sexuelle
habituelle du patient. On recherchera un
trouble de la personnalité ou une patholo-
gie psychiatrique sous-jacente et on éva-
luera les capacités intellectuelles et le
degré d’insertion socioprofessionnelle du
sujet.
À l’issue de ce bilan, les orientations théra-
peutiques pourront être décidées. Si un
traitement antiandrogène est prévu chez un
sujet pubère, on achèvera alors le bilan par
un examen clinique complet avec bilan
hormonal et hépatique.
La seule réponse physiologique qui soit
spécifique de l’excitation sexuelle chez
l’homme est la réponse pénienne qui peut
être mesurée par pléthysmographie. De plus,
celle-ci varie selon le contenu des stimuli
érotiques présentés, ce qui permet d’identi-
fier ceux que le sujet préfère. À la différence
de ce qui est observé chez les violeurs, la
présence de préférences sexuelles déviantes
chez les pédophiles semble établie (cité
dans 2). Cependant cette méthode n’a pas de
valeur diagnostique.
Hypothèses hormonales
Sur le plan hormonal, les relations entre la
testostérone et les comportements sexuels
déviants demeurent mal connues. Deux
aspects peuvent être identifiés : le rôle de la
testostérone dans le comportement sexuel
et son rôle dans l’agressivité.
Chacun des acteurs principaux de la régu-
lation gonadotrope (stéroïdes sexuels,
neuropeptides, amines biogènes) paraît
jouer un rôle dans le comportement sexuel.
La production et la sécrétion de testo-
stérone sont sous le contrôle de l’hormone
hypophysaire LH dont la sécrétion est elle-
même sous l’influence de la gonadotrophin
releasing hormone (GnRH) d’origine
hypothalamique. La LH et très probable-
ment la GnRH sont soumises à un rétro-
contrôle négatif par la testostérone.
En ce qui concerne le rôle de la testostéro-
ne dans l’activité sexuelle, plusieurs
aspects ont été précisés. Des études portant
sur des sujets hypogonadiques ont démon-
tré que la testostérone est indispensable à
l’obtention d’érections nocturnes mais
qu’elle n’est pas nécessaire à l’obtention
d’érections lors de présentations de stimuli
érotiques visuels (5,6). Les androgènes
interviennent dans la production de liquide
séminal et, par conséquent, dans l’éjacula-
tion. Le rôle de la testostérone dans la
libido n’est pas clairement établi. Une
imprégnation adéquate en androgènes
paraît indispensable à l’obtention d’une
activité sexuelle optimale chez l’homme
(7). Toutefois, lorsque les taux de testosté-
rone sont situés dans les valeurs normales,
il n’existe pas de corrélation entre ces taux
et les fantasmes, ni avec la fréquence ou la
qualité des érections (8). De plus, la GnRH
exercerait chez l’animal des effets centraux
sur le comportement sexuel par le biais
d’une facilitation des performances
sexuelles (9).
Les relations entre testostérone et agressi-
vité sont controversées (2). Chez les
primates, la testostérone joue un rôle extrê-
mement important dans le comportement
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Mise au point