MISE AU POINT
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La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no4 - juillet-août 2003
laparoscopie. Pour certains auteurs, cela expliquerait les meilleurs
résultats postopératoires immédiats obtenus par la laparoscopie
dans la prise en charge des cancers du côlon (3).
LA PERTE DE LA PALPATION EN LAPAROSCOPIE
Un inconvénient de la laparoscopie est la perte de la palpation.
Cela rend difficile la localisation d’une tumeur n’envahissant pas
la séreuse. Il est donc très important de localiser la lésion à résé-
quer, en préopératoire (opacification colique, cliché au cours de
la coloscopie diagnostique, mise en place d’un clip radio-opaque
en coloscopie) ou en peropératoire (coloscopie ou rectoscopie).
L’endoscopie peropératoire est particulièrement utile en cas de
tumeur du rectum non accessible au toucher rectal pour s’assu-
rer que la marge de sécurité sous-tumorale est respectée. L’explo-
ration du foie reste tout à fait possible grâce à l’échographie per-
opératoire, mais la perte de la palpation peut faire méconnaître
des lésions infracentimétriques sous-capsulaires dans un foie
d’échostructure remaniée.
LAPAROSCOPIE ET CANCER DU CÔLON
Les règles de la chirurgie oncologique habituellement observées
en laparotomie, bien que de faible niveau de preuve, sont trans-
posables en laparoscopie : absence de manipulation tumorale,
ligature première des vaisseaux à l’origine, résection en bloc (4).
Une lymphadénectomie de qualité permettant de correctement
classer un opéré pN0 est techniquement réalisable.
Toutes les colectomies sont faisables ; les pertes sanguines per-
opératoires sont moins importantes qu’avec la laparotomie. Le
taux de conversion, certes variable avec l’expérience de l’opéra-
teur, est inférieur à 5 % dans les équipes expérimentées. La mor-
talité opératoire, nulle dans beaucoup de séries, n’est pas diffé-
rente de celle observée en laparotomie. Il en est de même pour la
morbidité, en particulier le taux de fistules anastomotiques. Toutes
les études sont concordantes pour indiquer une augmentation de
la durée opératoire, notamment au début de l’expérience.
La qualité oncologique de la résection, jugée sur le nombre de
ganglions trouvés dans la lymphadénectomie (cela dépendant
aussi du pathologiste) et la longueur de la marge de sécurité, est
identique, voire supérieure, en laparoscopie. Dans notre expé-
rience, le nombre moyen de ganglions examinés est de 25 après
laparotomie et de 22 après laparoscopie, et nous n’avons jamais
observé de recoupe envahie.
Mais le critère de jugement le plus important reste la survie. On
ne dispose actuellement que d’une seule étude prospective ran-
domisée comparant les résultats à long terme (41 mois en
moyenne) de la colectomie pour cancer par laparoscopie et lapa-
rotomie (1). Dans ce travail en analyse multivariée, la laparo-
scopie améliore significativement la survie actuarielle spéci-
fique, notamment pour les opérés de stade III. Cette étude a été
violemment critiquée, les critiques portant principalement sur la
méthodologie (choix d’une étude d’équivalence, insuffisance du
nombre d’opérés inclus), sur les résultats inhabituels du bras
laparotomie, avec un taux de récidives locorégionales de 14 %,
et sur la différence de traitement postopératoire entre les deux
bras (plus de chimiothérapie adjuvante après laparoscopie).
Au congrès du Collège américain des chirurgiens colorectaux,
en 2002, beaucoup de travaux présentés concluaient en faveur
de la laparoscopie (avantages postopératoires immédiats,
moindre morbidité, mêmes résultats carcinologiques à 5 ans,
moindre immunodépression). Sous réserve des résultats des
autres études prospectives randomisées actuellement en cours,
on peut conclure que la laparoscopie peut être utilisée pour l’exé-
rèse d’un cancer du côlon, mais à une condition majeure : le chi-
rurgien doit être formé à la laparoscopie et à la chirurgie colique
par laparoscopie. Beaucoup d’auteurs sont d’accord pour esti-
mer que le préalable est la réalisation d’une trentaine de colec-
tomies pour lésion bénigne.
LAPAROSCOPIE ET CANCER DU RECTUM
Sur le plan chirurgical, l’amélioration des résultats oncologiques
passe par la réalisation d’une exérèse extrafasciale du méso-
rectum, cette exérèse devant être totale pour les tumeurs de
l’ampoule rectale basse (5). Pour ces mêmes tumeurs, la marge
de sécurité sous-tumorale peut être réduite à 2 cm ; les indi-
cations d’amputation abdominopérinéale ont donc diminué. La
réalisation d’un réservoir colique en cas d’anastomose colo-sus-
anale ou colo-anale a permis d’améliorer les résultats fonction-
nels pour les opérés. Enfin, la dissection extrafasciale du méso-
rectum permet une meilleure préservation des nerfs pelviens et
donc une diminution des séquelles urinaires et sexuelles (6).
Tous ces acquis sont-ils transposables à la laparoscopie ?
Il est possible techniquement de faire, en laparoscopie, une dis-
section extrafasciale du mésorectum. En cas de tumeur de
l’ampoule rectale basse, la dissection est faite jusqu’au plancher
pelvien, avec une exérèse totale du mésorectum. Dans notre
expérience, la marge circonférentielle, élément pronostique
majeur, a toujours été respectée ; il en est de même de la marge
sous-tumorale. Il est probable que l’excellente vision du champ
opératoire procurée par la laparoscopie facilite la dissection pel-
vienne, notamment en cas de pelvis étroit, et le respect des nerfs
pelviens. La réalisation d’anastomoses colo-sus-anale ou colo-
anale avec réservoir est possible comme par laparotomie. Mais
la proctectomie par laparoscopie reste une intervention plus dif-
ficile que la colectomie, avec un taux de conversion de 15 à 20 %.
La radiothérapie préopératoire ne gêne pas la laparoscopie.
Peu de résultats à long terme sont disponibles. Il semble cependant
que la laparoscopie ne dégrade pas les résultats oncologiques. Dans
une étude comparative historique menée dans notre département,
la survie spécifique des opérés par laparoscopie est meilleure, en
analyse multivariée, que celle des opérés par laparotomie (7).
CONCLUSION
Au total, pour l’exérèse par laparoscopie d’un cancer colique ou
rectal :
– la qualité oncologique de l’exérèse est respectée ;
– les résultats carcinologiques à long terme devraient être iden-
tiques à ceux de la laparotomie ;
– une meilleure qualité des suites opératoires immédiates (non