THEORIE ALGEBRIQUE DES FORMES QUADRATIQUES
Introduction
La th´eorie alg´ebrique des formes quadratiques est l’´etude des formes quadratiques sur
un corps quelconque (g´en´eralement suppos´e de caract´eristique 6= 2), plutˆot que sur des
corps particuliers comme les corps de nombres ou les corps finis. Ce sujet a ´et´e cr´e par
Witt en 1937. Dans un article fondateur, il a d´emontr´e plusieurs r´esultats tr`es importants
comme par exemple le th´eor`eme de simplification de Witt. Par la suite, le sujet s’est tr`es
peu d´evelopp´e jusqu’au milieu des ann´ees 60. Puis Pfister a apport´e de tr`es belles id´ees
nouvelles `a cette th´eorie. Ses m´ethodes lui ont par exemple permis de d´emontrer que le
produit de deux sommes de 2ncarr´es est encore une somme de 2ncarr´es.
Ce cours pr´esente ces travaux de Witt et de Pfister. Il contient aussi une introduction
aux alg`ebres de quaternions, ainsi que des r´esultats de Springer et de Scharlau relatifs au
comportement des formes quadratiques lors d’extensions du corps de base. Il constitue une
introduction `a la th´eorie alg´ebrique des formes quadratiques, un sujet qui est aujourd’hui
en plein essor.
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1. Notions fondamentales
Soit Kun corps de caract´eristique 6= 2, et soit Vun espace vectoriel de dimension
finie nsur K.
D´efinitions.
Une forme bilin´eaire sym´etrique est une application b:V×VKtelle que
b(αx +βy, z) = αb(x, z) + βb(y, z) et b(x, y) = b(y, x) pour tout x, y, z Vet tout
α, β K.
Une forme quadratique sur Kest une application q:VKtelle que
a) q(ax) = a2q(x) pour tout xVet tout aK;
b) l’application bq:V×VKdonn´ee par 1/over2[bq(x, y) = q(x+y)q(x)q(y)]
est bilin´eaire.
L’application bq:V×VKest alors une forme bilin´eaire sym´etrique. On l’appelle
la forme bilin´eaire sym´etrique associ´ee `a q.
Remarquons que bqd´etermine q: on a q(x) = bq(x, x) pour tout xV. Les formes
quadratiques sont donc en bijection avec les formes bilin´eaires sym´etriques. Dans la suite,
nous utiliserons indiff´eremment l’une ou l’autre de ces deux notions.
D´efinitions.
Soit (V, q) une forme quadratique, et soit (V, bq) la forme bilin´eaire sym´etrique as-
soci´ee.
Soit Wun sous–espace vectoriel de V. L’orthogonal de West par d´efinition le
sous–espace vectoriel
W={xV|bq(x, y) = 0 yW}.
Le radical de (V, q) est l’orthogonal de Vtout entier : rad(V, q) = V.
On dit que (V, q) est non d´eg´en´er´ee si rad(V, q) = 0.
On note V= HomK(V, K) le dual de V. La base duale d’une base (e1, ..., en) de V
est par d´efinition la base (e
1, ..., e
n), caract´eris´ee par e
i(ej) = 1 si i=j,e
i(ej) = 0 si
i6=j.
L’homomorphisme adjoint de (V, q) est
ˆ
bq:VV
2
(ˆ
bqx)(y) = bq(x, y).
Proposition 1.1. (V, q)est non–d´eg´en´er´ee ˆ
bq:VVest un isomorphisme.
D´emonstration. On a rad(V, q) = Ker(ˆ
bq). En effet,
xVbq(x, y) = 0 yV(ˆ
bqx)(y) = 0 yVxKer(ˆ
bq).
Donc rad(V, q)=0 ˆ
bqest injectif ˆ
bqest un isomorphisme (car dim(V) =
dim(V)).
Notation. Si M= (ai,j ) est une matrice, on note Mtsa transpos´ee : Mt= (aj,i).
D´efinitions.
Soit (V, b) une forme bilin´eaire, et soit e= (e1, ..., en) une base de V. La matrice de
(V, b) est la matrice Bdont le coefficient (i,j) est b(ei, ej). Remarquons que si best une
forme bilin´eaire sym´etrique, alors Bt=B.
Soit (V, q) une forme quadratique. On appelle matrice de (V, q) la matrice de la
forme bilin´eaire (V, bq).
Proposition 1.2. Soit (V, q)une forme quadratique. Soit e= (e1, ..., en)une base de V,
e= (e
1, ..., e
n)la base duale. Soit Bla matrice de bqpar rapport `a e. Alors la matrice
de ˆ
bqpar rapport aux bases e,eest aussi B.
D´emonstration. On a (ˆ
bqei)(ej) = bq(ei, ej). Donc
ˆ
bqei=X
j=1,...,n
b(ei, ej)e
j.
Proposition 1.3. (V, q)est non-d´eg´en´er´ee la matrice de b(par rapport `a n’importe
quelle base de V) est inversible.
D´emonstration. Ceci est une cons´equence imm´ediate des prop.1.1. et 1.2.
D´efinitions. Soit (V, q) une forme quadratique non d´eg´en´er´ee, et soit bq:V×VK
la forme bilin´eaire sym´etrique associ´ee. Soit e= (e1, ...en) une base de V, et soit Bla
matrice de bqpar rapport `a e. Le eterminant de (V, q) est par d´efinition det(q) = det(B)
K/K2, et le discriminant de (V, q) est par d´efinition d(q) = (1)n(n1)/2det(q).
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D´efinition.
On dit que deux formes quadratiques (V, q) et (V0, q0) sont isomorphes s’il existe
un isomorphisme f:VV0de K–espaces vectoriels tel que q0(f(x)) = q(x) pour tout
xV.
Deux formes bilin´eaires sym´etriques (V, b) et (V0, b0) sont isomorphes s’il existe un
isomorphisme f:VV0de K–espaces vectoriels tel que b0(f(x), f(y)) = b(x, y) pour
tout x, y V.
On utilise les notations (V, q)'(V0, q0), (V, b)'(V0, b0).
L’un des buts principaux de la th´eorie des formes quadratiques est de classer `a iso-
morphisme pr`es toutes les formes quadratiques sur K. On va commencer par ´etablir un
crit`ere matriciel pour l’isomorphisme des formes quadratiques.
D´efinition. On dit que deux matrices carr´ees Bet B0sont congruentes s’il existe une
matrice inversible Mtelle que B0=MtBM.
Proposition 1.4. Soient (V, q)et (V, q0)deux formes quadratiques, et soient Bet B0des
matrices de bq,bq0dans une base (e1, ..., en)de V. Alors (V, q)'(V, q0)les matrices
Bet B0sont congruentes.
D´emonstration. Soit (e0
1, ..., e0
n) une autre base de V, et soit Mla matrice de changement
de base, autrement dit
e0
j=X
i=1,...,n
ai,j ei, M = (ai,j ).
On a B0=MtBM . En effet,
bq(e0
i, e0
j) = bq(X
k=1,...,n
ak,iek,X
i=r,...,n
ar,j er) = X
k,r
ak,ibq(ek, er)ar,j ,
ce qui est le coefficient (i, j) de la matrice MtBM .
Corollaire 1.5. Le d´eterminant et le discriminant sont des invariants de la classe d’iso-
morphisme d’une forme quadratique.
D´emonstration. Il faut montrer que si (V, q) et (V0, q0) sont des formes quadratiques
isomorphes, alors det(q) = det(q0). Soit eune base de V, et soient Bet B0les matrices de bq
et bq0dans cette base. Comme (V, q)'(V, q0), par prop.1.4. il existe une matrice inversible
Mtelle que B0=MtBM . Alors det(B0) = det(Mt)det(B)det(M). Comme det(Mt) =
det(M), ceci implique que det(B0) = det(B)(det(M))2. Donc on a bien det(B0) = det(B)
dans K/K2, donc det(q0) = det(q) dans K/K2.
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Notation. Soit Bune matrice sym´etrique. On note < B > la forme quadratique de
matrice B.
Exemple. Soit V=K.e, espace vectoriel de dimension 1. Soit aK. La forme
quadratique sur Vdonn´ee par q(e) = aest not´ee < a >.
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