L É G I S L A T I O N Essais cliniques et publicité comparative J.P. Demarez*, J.P. Pin** RÉSUMÉ. Les publications utilisant ou rapportant des essais cliniques de médicaments deviennent publicité dès lors qu’elles sont diffusées par une firme pharmaceutique concernée. Cette publicité nécessairement comparative s’est naturellement incluse dans le champ d’application de la loi Neiertz, ouvrant ainsi matière à contentieux entre laboratoires. De récentes décisions de justice ayant relativisé l’application du Code de la concurrence à la publicité phar maceutique dès lors qu’elle s’adresse à des professionnels de santé, on peut à l’extrême évoquer l’impossibilité d’utiliser les résultats d’es sais cliniques en matière de publicité pharmaceutique. La transposition en droit interne de la directive sur la publicité comparative de 1997 pourrait mettre un terme à ces interrogations, à condition que le sens de certains de ses termes soit précisé lorsqu’il est question de spéciali tés pharmaceutiques. Mots-clés : Publicité - Médicament. L a mise en évidence de l’efficacité pharmacologique et de l’intérêt thérapeutique d’un médicament passe classiquement par la méthode de l’essai comparatif. Le texte de l’arrêté du 16 septembre 1975 précisait déjà : “Il est nécessaire que les essais cliniques (entrepris en vue de l’autorisation de mise sur le marché d’une spécialité pharmaceutique [AMM]) s’effectuent sous forme d’essais contrôlés. La manière dont ils sont réalisés varie dans chaque cas et dépend également de considérations d’ordre éthique. Ainsi, il peut parfois être plus intéressant de comparer l’effet théra peutique d’une nouvelle spécialité à celui d’un médicament déjà appliqué dont la valeur thérapeutique est communément connue plutôt qu’à l’effet d’un placebo”. Postérieurement à l’AMM, la démarche comparative se poursuit, par exemple pour obtenir le remboursement de la spécialité pharmaceutique par la Sécurité sociale. L’article R163-3 du Code de la Sécurité sociale dispose en effet que seuls seront remboursés les médicaments dont il est démontré qu’ils apportent : – “soit une amélioration du service médical rendu en termes d’efficacité thérapeutique, ou le cas échéant d’effet secondaire, – soit une économie dans le coût du traitement médicamen teux”, constats imposant la comparaison. Indépendamment de ces procédures administratives, la réalisation d’essais comparant une spécialité pharmaceutique donnée à d’autres modalités thérapeutiques ou à d’autres spécialités concurrentes présente un intérêt scientifique évident, tant pour développer la connaissance et le bon usage de ce médicament, que pour préciser sa place dans le traitement de * Pharmacologue, Unité de pharmacologie clinique, CHU Saint-Antoine, 27, rue de Chaligny, 75012 Paris. ** Avocat, Cabinet Houdart, 25, rue Jean-Jacques-Rousseau, 75001 Paris. La Lettre du Pharmacologue - Volume 12 - n° 6 - juin 1998 telle pathologie. Ces essais procèdent, le plus souvent, de l’initiative du titulaire de l’AMM, mais le Code de santé publique ne met aucune restriction à la qualification de “promoteur de recherches biomédicales” (art. L 209-1 CSP). Les résultats de ces différentes évaluations ont vocation à être publiés dans les revues spécialisées ou présentés lors de manifestations scientifiques. Ils sont également, depuis l’origine, utilisés par les firmes pharmaceutiques dans leurs activités promotionnelles, publicité comparative largement antérieure à la loi (dite loi Neiertz) définissant les conditions de ce mode de communication (1), et dans le champ de laquelle ils se sont naturellement inclus. De récentes décisions de justice ayant nuancé l’application du Code de la concurrence à la publicité pharmaceutique, il peut être utile de replacer l’essai clinique dans le contexte juridique de la démarche promotionnelle. Nous aborderons successivement les textes à prendre en considération, leur application en matière de publicité de spécialités pharmaceutiques et l’intérêt présenté par une récente directive européenne. LES TEXTES À PRENDRE EN CONSIDÉRATION EN MATIÈRE DE PUBLICITÉ RELATIVE AUX SPÉCIALITÉS PHARMACEUTIQUES Loi sur la publicité comparative : loi 92-60 du 18 janvier 1992 (JO 21 janvier 1992) Cette loi, dite loi Neiertz, a pour but de renforcer la protection des consommateurs en matière de démarchage et de vente à domicile. Son article 10 (art. L 121.8 du Code de la consommation) dispose que la publicité comparative de biens ou de services “n’est autorisée que si elle est loyale, véridique et qu’elle n’est pas de nature à induire en erreur le consomma teur. Elle doit être limitée à une comparaison objective qui ne 111 L É G I S L A T I O N peut porter que sur des caractéristiques essentielles, signifi catives, pertinentes et vérifiables. Lorsque la comparaison porte sur les prix, elle doit concerner des produits identiques vendus dans les mêmes conditions... La publicité comparative ne peut pas s’appuyer sur des opi nions ou des appréciations individuelles ou collectives... L’annonceur pour le compte duquel la publicité est diffusée doit être en mesure de prouver l’exactitude de ses allégations, indications ou présentations. Avant toute diffusion, il communique l’annonce comparative aux professionnels visés, dans un délai au moins égal à celui exigé selon le type de support retenu, pour l’annulation d’un ordre de publicité”. Le Conseil des communautés européennes entend par “publi cité pour des médicaments” : “toute forme de démarchage, d’information, de prospection ou d’incitation qui vise à pro mouvoir la prescription, la délivrance, la vente ou la consom mation de médicaments.” La directive considère que “la publicité des médicaments auprès des personnes habilitées à les prescrire ou à les délivrer contribue à l’information de ces personnes” mais “qu’il convient cependant de la soumettre à des conditions strictes et à un contrôle effectif.” Les personnes habilitées à prescrire des médicaments “doivent être à même d’exercer ces tâches en toute objectivité, sans être influencées par des incitations financières directes ou indi rectes”. Antérieurement à 1992, aucun texte ne régissant la publicité comparative, celle-ci n’était pas expressément prohibée. Toutefois, la publicité comparative émanant d’une société commerciale ayant pour but de faire valoir le produit de cette société au détriment de celui retenu en comparaison, le juge voyait généralement là matière à sanction ; sanction pénale punissant comme acte de contrefaçon de marque la citation du produit concurrent sans autorisation de son propriétaire (art. 422 du Code pénal abrogé par la loi n° 92-597 du 1er juillet 1992), sanction civile de la concurrence déloyale causée par le dénigrement du produit concurrent, conduisant l’émetteur de la publicité comparative à réparer un dommage résultant de sa faute sur la base de l’article 1382 du Code civil. La publicité comparative pouvait cependant, dans de rares circonstances, ne pas être estimée illicite, notamment lors de la reproduction par un commerçant de tests faits par un organisme indépendant[1]. La directive retient que “la publicité auprès du public faite à l’égard des médicaments qui peuvent être délivrés sans pres criptions pourrait affecter la santé publique si elle était exces sive ou inconsidérée ; que cette publicité, lorsqu’elle est auto risée, doit satisfaire à certains critères essentiels”. Elle était, cependant, jugée fautive si l’organisme s’avérait insuffisamment indépendant (Cour d’appel Paris 3 juillet 1984 FNAC), ou si la présentation des résultats s’avérait tronquée, insuffisamment exhaustive, ou revendiquant une portée plus large que la réalité (Cour de cassation Chambre commerciale 19 janvier 1988). Il était de toute façon interdit de publier des “tableaux de concordance” entre son produit et un produit concurrent (Cour de cassation Chambre commerciale 2 février 1988). Les dictionnaires juridiques (2) définissent aujourd’hui l’éventuelle utilisation d’une “publicité comparative” comme une manière pour une entreprise commerciale de se faire valoir auprès de la clientèle par référence à la concurrence. Cette “affirmation publique de supériorité est”, est-il dit, “admise sous certaines conditions par la loi française”. Normes relatives à la publicité de médicaments Directive 92/28 CEE du 31 mars 1992 (JOCE L.113 du 3 avril 1992) concernant la publicité faite à l’égard des médicaments à usage humain. [1] À ce propos, rappelons l’avis du Conseil national de la consommation relatif aux essais comparatifs (BO Conc Consom Rep Fr 15.12.1995 : 482), plaçant comme principe fondamental “l’indépendance des centres d’essais face aux parties intéressées à la production et à la diffusion des produits faisant l’objet des essais. Ce principe a d’abord des implications sur le mode de financement des essais, qui doit être assuré sans que l’indépendance des décisions prises par les centres d’essais soit mise en cause”. 112 La publicité faite auprès des professionnels de santé “doit comporter : les informations essentielles compatibles avec le résumé des caractéristiques du produit ; la classification du médicament en matière de délivrance”. Les États membres peuvent ajouter d’autres exigences, prix de vente, tarif indicatif des différentes présentations, conditions de remboursement par les organismes de Sécurité sociale. Les informations contenues dans la documentation (délivrée aux professionnels), doivent être “exactes, actuelles, véri fiables et suffisamment complètes pour permettre au destina taire de se faire une idée personnelle sur la valeur thérapeu tique du médicament”. Les citations, tableaux, illustrations empruntés à des revues médicales ou des ouvrages scientifiques utilisés dans la documentation “doivent être reproduits fidèlement et leur source exacte précisée”. Loi 94-43 du 18 janvier 1994 relative à la publicité des médicaments à usage humain. Transposition en droit interne de la directive citée ci-dessus, ce texte reprend quasiment à l’identique sa définition de la publicité pharmaceutique sous l’article L.551 du Code de santé publique. La publicité ainsi définie “ne doit pas être trompeuse, ni por ter atteinte à la protection de la santé publique. Elle doit pré senter le médicament ou produit de façon objective et favori ser son bon usage. Elle doit respecter les dispositions de l’AMM” (art. 551-1 CSP). “La publicité pour un médicament auprès des professionnels de santé habilités à prescrire ou à dispenser des médicaments ou à les utiliser dans l’exercice de leur art doit faire l’objet dans les huit jours suivant sa diffu sion d’un dépôt auprès de l’Agence du Médicament”, (art. 551-6 CSP) dont le directeur général peut, le cas échéant, suspendre, interdire ou exiger la modification d’une publicité méconnaissant les règles légales, voire exiger la diffusion d’un rectificatif. “La publicité auprès du public pour un médicament n’est admise qu’à la condition que ce médicament ne soit pas sou mis à prescription médicale et ne soit pas remboursable par La Lettre du Pharmacologue - Volume 12 - n° 6 - juin 1998 un régime obligatoire des assurances maladies... Elle est nécessairement accompagnée d’un message de prudence et de renvoi à la consultation d’un médecin en cas de persistan ce des symptômes” (art. 551-3 CSP). Décret 95-531 du 14 juin 1996 relatif à la publicité pour les médicaments et certains produits à usage humain. Pris en application du texte précédent, dont il détaille les principes, le décret dispose : – Que “tous les éléments contenus dans la publicité pour un médicament, lorsque celle-ci est admise, doivent être conformes aux renseignements figurant dans le résumé des caractéristiques du produit (annexe 1 de l’AMM)”, (art. R 5045 CSP). – Que la publicité pour les médicaments auprès du public est assortie de nombreuses restrictions destinées à en empêcher le caractère, sinon mensonger, du moins spectaculaire, excessif, tapageur ou charlatanesque, à l’encontre de personnes normalement ignorantes des choses de la médecine et de la pharmacie (art. R 5046-1 CSP). – Qu’en revanche, en ce qui concerne la publicité vers les professionnels de santé habilités à prescrire ou dispenser, une liste détermine les informations techniques que cette publicité doit a minima comporter (art. R 5047 CSP), celles-ci et celles qui pourraient être ajoutées devant “être exactes, à jour, vérifiables et suffisamment complètes pour permettre au des tinataire de se faire une idée personnelle de la valeur théra peutique du médicament”. Reprenant les termes de la directive européenne, le décret dispose que “les citations, tableaux, et autres illustrations empruntés à des revues médicales ou à des ouvrages scienti fiques, qui sont utilisés dans la publicité, doivent être reproduits fidèlement et la source exacte doit être précisée” (art. R 5047-1 CSP). De même doit être reproduit l’avis le plus récent de la Commission de la transparence, lorsqu’il s’agit d’un nouveau principe actif, d’une spécialité faisant l’objet d’une nouvelle appréciation du service médical qu’elle rend, de l’apport thérapeutique qu’elle représente, ou d’une nouvelle spécialité essentiellement similaire à une autre (art. R 5047-3 CSP). Une commission chargée du contrôle de la publicité émet des avis spécifiquement (mais non exclusivement) sur les publicités réservées aux professionnels de santé, avis éclairant le directeur général de l’Agence du Médicament pour l’exercice de son pouvoir de police sur les publicités pharmaceutiques. Cette commission peut également émettre des recommandations de caractère général sur les différents moyens utilisables, en matière de campagne de promotion de médicament. Recommandations de la Commission en matière de publicité comparative. Elles ont été successivement publiées dans deux fascicules (juin 1995-avril 1997) intitulés “Publicité et bon usage”, édités par l’Agence du Médicament. Bien que des considérations paraissant concerner la publicité comparative figurent dans le chapitre “publicité grand public”, par exemple “la publicité ne peut comporter des élé La Lettre du Pharmacologue - Volume 12 - n° 6 - juin 1998 ments qui suggéreraient que l’effet est... supérieur ou égal à celui d’un autre médicament ou d’un autre traitement” ou “l’emploi de certains termes pouvant comporter une conno tation dénigrante n’est pas admis... notamment les expres sions «le Numéro 1, le premier»”, le chapitre consacré à la publicité comparative est explicitement intégré dans la partie visant “la publicité à destination des professionnels de santé”. Ces recommandations concernent “la présentation dans un but publicitaire d’une comparaison de médicaments ou d’autres méthodes thérapeutiques”, en référence à la loi Neiertz. Sont successivement considérés les critères de comparaison (caractéristiques essentielles, significatives, pertinentes et vérifiables, présentées de façon exhaustive, ne privilégiant pas les éléments favorables), les comparaisons de coût (portant sur le coût de traitement et non le prix de vente), les sources de données (dossiers d’AMM et de transparence, études post-AMM à condition d’être conformes “aux indica tions valides” et d’avoir été publiées dans une revue scientifiquement référencée), les types d’études utilisables, la commission allant, “si les éléments constitutifs de la publicité comparative ne peuvent théoriquement émaner que d’une étude ayant permis la comparaison directe des deux produits en question”, jusqu’à admettre “l’utilisation de résultats de méta-analyses rigoureuses” (sic). Le chapitre sur la présentation des résultats des comparaisons prohibe quelques-uns des subterfuges connus pour valoriser artificiellement l’un des produits au détriment de l’autre. Reprenant une disposition de la loi Neiertz, les recommandations rappellent, dans le cadre de l’utilisation d’études non publiées, “l’obligation (faite à la firme émettrice) de trans mettre ces études aux firmes adverses concernées...” étendant l’obligation au bénéfice de “tout praticien qui en ferait la demande”. Ceci pour permettre aux concurrents d’effectuer les vérifications nécessaires à la défense de leurs droits et au praticien “de se faire une idée personnelle de la valeur théra peutique du médicament”. Les différentes formes que peut revêtir la présentation d’une “étude” conduisent à s’interroger : comment s’acquitter, sans risque de contestation, de l’obligation de transmission d’une “étude” souvent partie intégrante d’un gros dossier d’AMM ? Peut-on se contenter d’un résumé, d’une synthèse, ou est-il nécessaire, en la circonstance, d’adresser au concurrent (voire au prescripteur qui en ferait la demande) l’intégralité d’un rapport clinique intégré et des nombreuses annexes qu’il comporte, ensemble d’un volume généralement conséquent, afin que les possibilités de vérification soient réelles et complètes ? L’APPLICATION DES DISPOSITIONS EN MATIÈRE DE PUBLICITÉ RELATIVE AUX SPÉCIALITES PHARMACEUTIQUES L’essai clinique, matériel publicitaire Devant la présentation des résultats d’un essai clinique, trois remarques possibles en fonction de l’espèce : il s’agit d’une publicité ; il ne s’agit pas d’une publicité ; peut-être s’agit-il d’une publicité s’avançant masquée ? 113 L É G I S L A La première situation ne fait aucun doute quant à sa nature publicitaire, face à un document émanant du service promotionnel de la firme ou d’une agence spécialisée intervenant pour son compte. Le document peut reprendre in extenso la forme d’un article scientifique distribué en “tiré à part”, constituer la synthèse commentée de plusieurs essais rassemblée en une brochure de présentation de la spécialité commercialisée, s’introduire sous forme d’encart dans un journal ou une revue, s’afficher en aide de visite ou emprunter des truchements plus novateurs, support vidéo, CD-Rom, Internet, etc. Rappelons que l’expression des résultats d’un essai clinique est soumise aux dispositions de l’article R 5120 CSP : “Les essais ne peuvent faire l’objet d’aucun commentaire écrit ou oral sans l’accord conjoint de l’investigateur”, ce qui, pas plus que la qualification de publicité qui pourrait lui être apposée, ne préjuge en rien du degré d’objectivité d’une publication. La difficulté réside dans le fait d’avoir à traiter d’une publicité déguisée. Le terme “publicité” désigne à la fois une chose (le message exprimé sur un support) et une intention (“le fait de viser à promouvoir la prescription, la délivrance, la vente ou la consommation de médicament”). Le même document, un article de revue scientifique rapportant les résultats d’un essai clinique, peut donc être, selon l’intention de celui qui en fait la distribution, une information scientifique ou une publicité. Reste ici à rapporter des faits à des intentions. Si l’intention publicitaire est présumée à juste titre lorsque le distributeur est le responsable de la commercialisation, elle attend sa preuve dans les autres hypothèses, qu’il s’agisse du discours de la communauté scientifique en tant qu’acteur de la diffusion de l’innovation thérapeutique ou des propos des médias répondant à la demande d’information sur les pathologies et les thérapeutiques (3). Mais il a été estimé que constituait une publicité, sous réserve de l’appréciation des juridictions compétentes, toute publication de nature à inciter à l’achat d’un médicament dont les mérites sont vantés, même si cette publication n’émanait pas du fabricant et n’était pas payée par lui [CE 15 mars 1979 (4), section sociale], de même que les articles présentant de façon préférentielle un produit dont le caractère publicitaire latent était renforcé par la présence, dans la revue, d’une annonce émanant du titulaire de l’AMM du produit (CE 19 décembre 1985, 13 septembre 1990 - Avis de la Commission paritaire des publications et agences de presse 1994) (5). Cette définition particulièrement extensive de la publicité, encore élargie par le législateur (toute forme d’information à l’exception de celle dispensée dans le cadre de leur fonction par les pharmaciens hospitaliers), peut conduire l’autorité compétente à donner la qualification de publicité, au moins potentielle, à une gamme très étendue de modalités de communication des résultats d’un essai clinique, ce qui n’est pas sans conséquence au regard des missions de la Commission de la publicité. 114 T I O N Bien que ne s’exprimant que par recommandations (mais tenu compte du fait que les juridictions peuvent être sensibles à ces recommandations dans leurs appréciations), la Commission de la publicité considère : Que ne peuvent être utilisés dans une publicité “les études (simplement) soumises ou acceptées pour publication, les abstracts, posters, les suppléments et numéros spéciaux réali sés dans le cadre d’une relation contractuelle entre la revue éditrice et la firme concernée, et les études issues d’un prêt de titre”. Que les publications utilisables à titre publicitaire, outre qu’elles doivent concorder avec les indications validées, doivent avoir été publiées dans une revue à comité de lecture ou référencées dans une base de données internationales. Il n’est pas essentiel que la comparaison démontre une supériorité, l’essai clinique pouvant être matériel publicitaire en ne mettant en évidence qu’une “absence de différence”, ce que les profanes (à la différence des biostatisticiens) considèrent volontiers abusivement être synonyme d’“identité”. Ainsi la diffusion, même restreinte, dès lors que systématisée, de tel ou tel document par les personnels d’une firme pharmaceutique peut-elle être très facilement qualifiée de publicité, susceptible de relever d’un avis négatif de la Commission, voire de censure de la part du directeur général de l’Agence, le document pouvant être estimé en infraction vis-à-vis de la formalité du dépôt légal, quand bien même la firme prétendrait, elle, n’avoir fait que présenter à titre informatif les résultats des travaux d’auteurs indépendants, n’ayant aucun caractère publicitaire. Tel Midas changeant en or tout ce qu’il touchait, la firme pharmaceutique transforme en publicité toute information scientifique relative à ses spécialités, lorsqu’elle la diffuse ou contribue à sa diffusion. N’est en revanche sûrement pas une publicité une publication rapportant un essai clinique relatif à une spécialité adressée sur sa demande à tel ou tel professionnel de santé par la firme dans le cadre d’un échange épistolaire personnel et individuel. Publicité comparative de médicaments et loi Neiertz Lors des travaux préparatoires (6) de la loi sur la publicité comparative, il a été envisagé d’exclure certains secteurs commerciaux, dont celui du médicament, de l’accès à cette forme de communication. La proposition n’a pas été retenue au motif que si le médicament faisait l’objet de réglementations spécifiques, la loi sur la publicité comparative n’interférait pas avec ces textes particuliers. Le médicament serait, par conséquent, soumis parallèlement à deux dispositifs, l’un figurant dans le Code de la santé publique, l’autre dans le Code de la concurrence. On constate des concordances entre ces deux cadres juridiques. Mais, discordance notable, le Code de la santé publique ne fait jamais directement usage de la notion de comparaison, ni pour la publicité “grand public”, ni pour La Lettre du Pharmacologue - Volume 12 - n° 6 - juin 1998 celle destinée aux professionnels dans ce qu’il organise. On peut, de façon allusive, retrouver l’idée de comparaison dans le fait que “les informations contenues dans la publicité (en direction des professionnels) doivent être suffisamment com plètes pour permettre au destinataire de se faire une idée per sonnelle de la valeur thérapeutique du médicament” (art. R 5047-1 CSP), ce qui, pour un praticien, conduit naturellement à la connaissance d’essais cliniques nécessairement comparatifs. Mais il n’y a là rien d’explicite. L’activité des tribunaux, et tout particulièrement celle du tribunal de commerce de Nanterre (la plupart des firmes pharmaceutiques ayant leur siège social dans le département des Hauts-de-Seine), a permis de préciser certaines des modalités d’application de la loi sur la publicité comparative au médicament. Le défaut de communication préalable de l’essai clinique utilisé en publicité comparative au(x) concurrent(s) a fait l’objet de deux types d’interprétation. Les juges ont pu estimer la publicité illicite du seul fait du défaut de communication, ouvrant ainsi droit à dommages et intérêts (tribunal de commerce Nanterre 18 juin 1997 SmithKline Beecham / Janssen Cilag), ou plus souvent se limiter, après avoir constaté l’absence de communication préalable, à rechercher l’existence d’un préjudice spécifique lié à ce défaut : “le fait de ne pas avoir communiqué la publicité litigieuse aux laboratoires Ciba-Geigy a privé ces derniers de la possibilité de répliquer immédiatement à ces argument imprévus, ce qui d’une part aurait pu entraîner une chute de leur chiffre d’affaires et, d’autre part, les a obligés à engager des frais supplémen taires pour faire connaître d’urgence au corps médical leurs contre-arguments”. (Tribunal de commerce Créteil Ménarini/Ciba- Geigy 15 mai 1996). L’interprétation de la procédure de la communication préalable dépasse ainsi l’intention manifestée par le législateur, puisqu’elle ne se limite pas à protéger l’annonceur des conséquences d’une annulation d’un ordre de publicité, mais évolue vers la protection du concurrent à qui on doit ainsi ménager droit de réponse (la formulation du droit de réponse ayant vraisemblablement, elle aussi, un caractère publicitaire au regard du Code de la santé publique). Les frais engagés pour répliquer à une publicité comparative prennent ici le caractère d’un préjudice dont il est dû réparation (7). Les spécialités pharmaceutiques peuvent être désignées soit par leur nom de marque, soit par une dénomination commune internationale (DCI), cette dernière appellation n’ayant aucun caractère commercial. Il est, par conséquent, possible de présenter un essai clinique ou la comparaison s’effectue sans citation de la marque du produit concurrent ou de la raison sociale de l’entreprise qui le commercialise. Toutefois, la dénomination commune est indissolublement liée au nom commercial, tant pour la publicité grand public (lorsque le médicament ne contient qu’un seul principe actif art. R 5046 CSP) que pour celle auprès des professionnels de santé (composition qualitative et quantitative en principes actifs avec la dénomination commune - art. R 5047 CSP). La Lettre du Pharmacologue - Volume 12 - n° 6 - juin 1998 L’usage de la DCI en lieu et place du nom de marque du concurrent dans la présentation des résultats d’un essai clinique ne constitue pas un élément permettant de différencier, en soi, une publication scientifique d’une publicité comparative et de s’exonérer des règles prévues par le Code de santé publique comme par celui de la concurrence. Selon la Commission de la publicité, “la publicité compara tive peut concerner deux produits ou plus sous leur nom de marque, sous leur DCI lorsque la marque est inidentifiable.” Le Tribunal de commerce de Créteil a, à cet égard, retenu qu’un laboratoire ne pouvait valablement pas soutenir être hors du champ d’application de la loi sur la publicité comparative dès lors qu’utilisant la DCI du comparateur, il ne citait ni le nom de spécialité, ni la raison sociale de son concurrent (décision 15 mai 1996, citée ci-dessus). Les comparaisons portant sur des aspects économiques de chacun des traitements considérés semblent devoir se limiter à ce qui est effectivement comparable, c’est-à-dire à des produits identiques vendus dans les mêmes conditions, cela excluant qu’on puisse faire état, pour une indication thérapeutique donnée, du plus faible coût de traitement d’un produit grand public face à un produit de prescription (tribunal de commerce de Nanterre, 18 juin 1997, SmithKline Beecham/Janssen-Cilag). Si la loi Neiertz limite les comparaisons sur les prix à “des produits identiques vendus dans les mêmes conditions”, la Commission de publicité retient pour sa part, en lieu et place du prix, la possibilité d’une comparaison des coûts de traitements, “caractéristique essentielle, pertinente, vérifiable du médicament” en matière de publicité professionnelle, et conditionne l’utilisation publicitaire d’une étude médico-économique à la validation préalable de la Commission de transparence. La présentation sous forme de publication ou de rapport d’un essai clinique n’engage, selon l’expression consacrée, “que la responsabilité de ses auteurs” (8). Les juges, même avec le secours des experts, sont normalement réticents à s’engager dans les aspects techniques d’un contentieux, ce d’autant plus que sa matière est complexe et fait parfois l’objet d’opinions contraires de la part des spécialistes. Ils pourront toutefois relever que la Commission de contrôle de la publicité n’a pas, devant telle étude contestée, émis la moindre remarque défavorable touchant à la méthode de l’essai ou à l’analyse de ses résultats. La partie adverse ne manquera pas de mettre en évidence les éléments d’une publicité comparative qui contreviendraient, que ce soit en matière d’efficacité, de tolérance ou de modalités d’utilisation, aux définitions ci-après : présentation loyale, véridique, exhaustive, objective, portant sur des caractéristiques essentielles, significatives, pertinentes et vérifiables, contribuant au “bon usage” du médicament. À la lecture de différentes décisions, il apparaît que les tribunaux relèvent avec sagacité les affirmations inexactes, partielles, dépourvues d’objectivité ou d’exhaustivité, trom115 L É G I S L A peuses ou accessoires, avec l’aide éventuelle du guide “Publicité et bon usage” de l’Agence du Médicament, et le résumé des caractéristiques des produits comparés. Ainsi, il a été estimé (tribunal de commerce Nanterre, 18 juin 1997) que si les résultats d’une étude clinique comparative pouvaient être utilisés en publicité, ce ne pouvait être que dans la mesure où leur présentation était objective, c’est-àdire non limitée à celle des seuls paramètres jugés intéressants pour la firme concernée. Publicité comparative de médicaments hors de la loi Neiertz Complétant un considérant de la Cour d’appel de Paris (9) selon laquelle il conviendrait de différencier les informations destinées aux médecins (libres de leur prescription selon l’article 9, alinéa 1 CSP) de celles qui, portées à la connaissance du public, “ne peuvent avoir pour effet de l’inciter à acheter un médicament dès lors que celui-ci fait l’objet d’une déli vrance sur prescription médicale”, la Cour d’appel de Versailles (10) estime “qu’il n’est pas possible de tenir sans plus ample examen au fond les médecins prescripteurs, per sonnes forcément éclairées, pour de simples consommateurs appelant contre les risques d’erreurs, une protection telle que doivent être adoptées les règles spécifiques” de la loi Neiertz. Cette distinction est retenue comme motivation de différentes décisions prises postérieurement par certains tribunaux de commerce, concluant que “les médecins n’étant pas considé rés comme faisant partie du public, les dispositions du Code de la consommation (relatives à la publicité comparative) ne sont pas applicables en l’espèce”. Là ou la loi distingue, il convient de distinguer. Il y aurait donc, d’une part, la publicité faite sur les spécialités pharmaceutiques en direction du public, soumise aux dispositions de la loi Neiertz et du Code de la santé publique, et celle en direction des professionnels de santé qui, la loi Neiertz ne s’appliquant pas, ne relève que du seul Code de santé publique au motif de la compétence spécifique de cette catégorie de personnes. La non-applicabilité de la loi Neiertz ne signifie pas qu’en matière de publicité vers les professionnels de santé régnerait maintenant l’absence de contraintes. Toutes ces dispositions étant prises, d’une part pour la protection des consommateurs, de l’autre pour celle des patients comme de la santé publique, la définition de la publicité licite est similaire d’un dispositif à l’autre et les qualificatifs utilisés (loyale, véridique, objective, vérifiable, exhaustive, exacte, non trompeuse) sont identiques. La non-applicabilité de la loi Neiertz n’affecte par conséquent pas les critères de qualité de la communication. D’un côté comme de l’autre existent des mesures restrictives. Si le commerçant doit pouvoir prouver l’exactitude de ses allégations et communiquer préalablement à son concurrent le contenu de son message, la firme pharmaceutique est tenue d’être en conformité avec les renseignements figurant dans le résumé des caractéristiques de son produit, annexé à l’autorisation de mise sur le marché, et de déposer sa publicité à l’Agence du Médicament au moment de l’utilisation, publicité dont il n’est pas prévu qu’elle puis116 T I O N se être comparative. Certes, nous l’avons vu plus haut, la Commission de contrôle de la publicité du médicament expose les critères devant présider à la publicité comparative convenable en direction des professionnels. Mais il ne s’agit que de recommandations, émises, au demeurant, en référence à la loi Neiertz. Il n’est pas indifférent de relever que la Cour d’appel utilise la différenciation public/professionnels de santé, l’ignorance de l’un et les connaissances particulières des autres, non dans le cadre d’une action engagée par des représentants de consommateurs ou des professionnels, mais pour résoudre un litige entre deux firmes pharmaceutiques concurrentes, l’une contestant la publicité de l’autre comme contraire à ses intérêts commerciaux, au motif notamment de l’absence de communication préalable. Car la loi Neiertz, tout en protégeant le consommateur, a également la vertu parallèle de permettre la protection d’autres acteurs de la chaîne commerciale, les annonceurs, les diffuseurs, les firmes concurrentes, ce qui n’est pas en contradiction avec ses finalités : améliorer l’information des consommateurs et stimuler la concurrence entre les commerçants. La législateur a cependant voulu que l’accès à ce mode (jusqu’alors sinon interdit, du moins très contesté) de publicité ne soit envisageable qu’à la condition de mettre, parallèlement à l’autorisation, les moyens d’empêcher que la publicité comparative soit mensongère vis-à-vis du public, préjudiciable aux diffuseurs et parasitaire vis-à-vis de la concurrence. Ainsi, “avant toute diffusion, (le commerçant) communique l’an nonce comparative aux professionnels visés, dans un délai au moins égal à celui exigé pour l’annulation d’un ordre de publicité”, la non-communication ouvrant droit à réparation pour le concurrent. À l’opposé de la situation antérieure à 1992 où aucun texte de droit ne traitant de la publicité comparative, celle-ci pouvait être prétendue possible, sauf à ce qu’elle soit jugée dénigrante, déloyale ou attentatoire au droit des marques, elle est maintenant strictement contingentée aux conditions de l’article L. 128-8 du Code de la consommation. Dès lors que la loi Neiertz autorise, sous condition de protection, la publicité comparative, il n’est pas excessif de penser que la non-applicabilité de cette loi à un secteur commercial donné conduit, a contrario, à y prohiber ce mode de communication, à moins qu’une réglementation spécifique ait, dans ce secteur, les mêmes propriétés permissives que la loi Neiertz pour l’activité commerciale en général. Ce n’est pas le cas du Code de santé publique. Ses dispositions relatives à la publicité n’ont d’ailleurs notoirement pas pour objet de stimuler la concurrence entre les laboratoires pharmaceutiques afin d’augmenter ainsi le volume des prescriptions médicales de médicament. Elles se caractérisent au contraire par un éventail de restrictions visant des pratiques promotionnelles licites dans d’autres activités, telles que ristournes, primes, cadeaux, avantages. L’impossibilité de pratiquer la publicité comparative ne serait qu’ici une restriction de plus et non une mesure anticoncurrentielle exceptionnelle. La Lettre du Pharmacologue - Volume 12 - n° 6 - juin 1998 La réglementation de la publicité du médicament organise, avec plus d’exigences que de latitudes, la communication sur sa spécialité d’un titulaire de l’AMM de cette spécialité, dont il est dit qu’il doit “respecter les dispositions de l’AMM” (art. 551-1 CSP), les messages commerciaux qu’il délivre devant “être conformes aux renseignements figurant dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP)” (art. 5045 CSP), et la publicité publique admise à la seule condition que le produit ne soit pas remboursable par l’assurance maladie. Il est d’usage de considérer ce RCP comme constituant l’information que la Commission d’AMM, après examen critique par ses experts du dossier déposé par le fabricant, a validé en même temps qu’elle émettait un avis favorable à la commercialisation du produit. Le RCP représente par conséquent l’aboutissement, en matière d’information scientifique, des essais comparatifs entrepris par le laboratoire pour justifier de l’absence de nocivité et de la présence de l’effet thérapeutique de la spécialité qu’il souhaite promouvoir (art. L. 601 CSP). L’amélioration du service médical rendu, en termes d’efficacité thérapeutique ou de tolérance, représentée par cette spécialité au regard de l’état de la thérapeutique au moment de son inscription sur les listes de remboursement (art. L 163-3 CSP), est appréciée par la Commission de la transparence au regard des essais comparatifs fournis par le titulaire de l’AMM demandeur, et l’avis de la Commission figure dans les éléments que la firme pharmaceutique fera figurer dans les présentations faites aux professionnels par les agents de la firme (art. 5047-3 CSP). On pourrait prétendre, à l’extrême, que les textes du RCP et la transparence étant ainsi disponibles, point n’est besoin de répandre, par surcroît, tel ou tel des essais considérés par les Commissions d’experts, diffusion ne donnant qu’une vue partielle et non objective du dossier. Ce d’autant que la tentation est grande de publier préférentiellement les essais les plus favorables. L’impossibilité d’utiliser les essais comparatifs en publicité aurait par conséquent l’avantage de limiter les messages au nécessaire et suffisant. Ceci n’empêche nullement des scientifiques et/ou les institutions d’effectuer, postérieurement à la mise sur le marché de la spécialité, des essais cliniques comparatifs dans les indications figurant aux RCP du produit comme dans toute autre susceptible d’être pertinente, et de les publier pour l’information des prescripteurs et des pharmaciens dans les revues spécialisées, l’information relative au médicament n’étant nullement un monopole des firmes ou des autorités administratives compétentes. Tout cela étant précisé, on peut tenter d’avancer que si la réglementation du Code de santé publique en matière de publicité ne prévoit pas explicitement la publicité comparative, c’est assurément parce qu’au moment de la rédaction de ces textes “la chose allait sans dire”, tellement la pratique est commune et manifeste entre les laboratoires pharmaceutiques et les professionnels de santé. Cela explique l’origine de la La Lettre du Pharmacologue - Volume 12 - n° 6 - juin 1998 lacune, mais n’en atténue aucunement les éventuelles conséquences. L’utilisation d’un essai clinique en publicité comparative deviendrait un acte de dénigrement ouvrant droit à réparation pour la firme concurrente. LA DIRECTIVE SUR LA PUBLICITÉ COMPARATIVE DE 1997 L’application du Code de la concurrence à cette publicité comparative de médicaments que sont les essais cliniques a conduit à un équilibre certain dans les rapports entre les laboratoires pharmaceutiques et la Commission de la publicité. Mais on a pu constater parallèlement une augmentation notable des contentieux entre firmes, motivés par des écarts allégués entre la publicité pour telle spécialité et les conditions par lesquelles la loi Neiertz autorise la publicité comparative. L’arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 19 septembre 1997 est-il de nature à “calmer le jeu” ? L’imprécision juridique qu’il entraîne a été ressentie défavorablement par certains professionnels du médicament. Ils reportent l’espoir d’une solution claire à une situation devenue compliquée vers la transposition en droit interne de la directive européenne 97/55 CEE du 6 octobre 1997 “modi fiant la directive sur la publicité trompeuse afin d’y inclure la publicité comparative” (11). Ce dispositif comporte quelques différences notables avec la loi Neiertz. Il ne se borne plus, dans sa finalité explicite, à protéger les seuls consommateurs, mais se préoccupe également de protéger les commerçants, les industriels, les artisans, les professions libérales contre la publicité trompeuse, notamment par l’établissement des conditions par lesquelles la publicité comparative est considérée comme licite. Le distinguo subtil de la Cour d’appel devient ici impossible. Le fait que le Code de santé publique sépare publicité vers le public de publicité vers les professionnels de santé ne mettrait aucune ambiguïté dans l’application à tous des dispositions de la directive transposée. La directive ne comporte aucune obligation pour l’annonceur de communiquer, préalablement à sa diffusion, l’annonce comparative aux concurrents. Ceci n’exclut nullement que cette disposition puisse demeurer dans le droit interne, puisque, lors de la transposition d’une directive européenne, un État membre a la possibilité d’y ajouter des mesures contribuant au renforcement de la protection envisagée. Mais tout en conservant les intérêts que présente cette communication préalable directement pour les diffuseurs et les concurrents, indirectement pour le public et les professionnels de santé à qui sont ainsi épargnées des publicités comparatives discutables, il conviendrait d’empêcher qu’elle puisse devenir prétexte à arguties incessantes. Les États membres sont invités à mettre en place des dispositions permettant à toute personne ou organisation ayant un intérêt légitime à l’interdiction d’une publicité comparative d’ester en justice, ce qui conduirait le concurrent à intervenir non plus au moment de l’expression d’intention de la publicité comparative, mais 117 L É G I S L A T lors de sa diffusion. Pour un résultat identique, préjudice et coûts supérieurs. I O N cette comparaison pose aujourd’hui problème. Pour les raisons développées dans un arrêt récent, la jurisprudence semble indiquer que la publicité comparative des médicaments n’est pas correctement définie par le Code de la concurrence ; le Code de la santé publique n’en définissant pas non plus les caractéristiques, force est de constater l’existence actuelle d’une insécurité juridique dans ce domaine. La transposition en droit français de la directive européenne d’octobre 1997 devrait permettre au législateur de clarifier la situation. Cette adaptation législative semble avoir un caractère d’urgence, tant sont fréquents aujourd’hui les litiges entre firmes pharmaceutiques portant sur la publicité comparant des médicaments à leurs concurrents. Il conviendrait également de préciser ce qu’on doit entendre, en matière de publicité pharmaceutique, par cette définition du comparateur, “bien répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif”, la loi Neiertz précisant quant à elle “bien de même nature” ou “produit identique”. Le médicament se laisse malaisément cerner par les contours flous ou trop généraux. La démarche intellectuelle du médecin prescripteur et la logique de la Commission de la publicité tendraient à comparer les produits grand public aux produits grand public, les produits de prescription aux produits de prescription. Ce, dès lors qu’ils ont en commun une indication thérapeutique (ceci permettant de comparer les génériques à la spécialité initiale) pour laquelle s’apprécieraient les rapports efficacité/sécurité, bénéfices/risques, et non telle ou telle(s) particularité(s) considérée(s) isolément. Mais nul doute que “mêmes besoins” et “mêmes objectifs” sont de nature à nourrir de multiples réflexions autorisées portant des critères pharmacologiques et s’étendant volontiers aux considérations économiques. L’actuel débat créé par le “guide des équivalents thérapeutiques” de la CNAM ne laisse aucun doute sur les difficultés de ce genre d’entreprise. R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S 1. Calvo J. Publicité comparative et médicament. In : Les petites affiches 1997 ; 57 : 4-10. 2. Cornu G. Vocabulaire juridique, 1987 PUF. 3. Auby J.M., Coustou F. Publicité, principes généraux Droit Pharma Litec 1995 ; II : 45.11. 4. Bulletin Ordre Pharma 1979 ; 222 : 604-6. 5. Cahiers de l’AFAR, n° 4, octobre 1997. 6. Fallet P. Le médecin peut-il faire l’objet de publicité comparative ? Bulletin Ordre Pharma 1992 ; 338 : 208-16. 7. Anonymous Droit et Pharmacie Actualité 1996 ; 40 : 21-4. 8. Tribunal de commerce Nanterre, 18 juin 1997. 9. Cour d’appel de Paris, 23 octobre 1996. Fournier/Féd. Nale de la Mutualité française. 10. Cour d’appel de Versailles, 19 septembre 1997. Innothéra/Doms-Adrian. 11. SNIP, Directive sur la publicité comparative. Circulaire 97-0868. CONCLUSION Si la comparaison des avantages et des inconvénients de différents traitements d’une même maladie constitue la base même de la réflexion pharmacologique et du choix thérapeutique, il convient d’observer que l’utilisation publicitaire de À découper ou à photocopier A A BB O O N N N N Merci d’écrire nom et adresse en lettres majuscules EE ZZ -- VV O O UU SS !! Tarif 1998 / L P / M e n s u e l ABONNEMENT FRANCE / DOM-TOM et CEE Dr, M., Mme, Mlle 1 an / 580 F 2 ans / 940 F 1 an / 290 F étudiants joindre la photocopie de la carte + 60 F par avion pour les DOM - TOM Prénom Adresse ABONNEMENT ETRANGER / autre que CEE 1 an / 720 F + 190 F par avion POUR RECEVOIR LA RELIURE gratuite avec un abonnement ou un réabonnement 140 F par reliure supplémentaire (franco de port et d’emballage) MODE DE PA I E M E N T Code postal Ville par carte Visa N° Signature : Date d’expiration Pays par chèque (à établir à l'ordre d'EDIMARK) Tél. Merci de joindre votre dernière étiquette-adresse en cas de réabonnement, changement d’adresse ou demande de renseignements. EDIMARK - 62-64, rue Jean-Jaurès - 92800 Puteaux Tél. : 01 41 45 80 00 - Fax : 01 41 45 80 25 - E-mail : [email protected] Votre abonnement prendra effet dans un délai de 3 à 6 semaines à réception de votre ordre. 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