Angiologie et cancer (III) Angiogenèse et cancer M.A. Coulon, J.F. Morère, S. PipernoNeumann, A. Ladouani, V. Andriambolona, B. Driss, J.L. Breau* tumeurs solides se sont Lcasesrévélées dans la plupart des incurables au stade de diffusion métastatique par les traitements cytotoxiques habituels. Les principales causes d’échec sont liées à l’instabilité et l’hétérogénéité du phénotype tumoral, entraînant une adaptation facile des cellules malignes à des conditions environnementales très hostiles et le développement de mécanismes de résistance aux agents anticancéreux (1). Les interactions majeures entre les cellules tumorales et le micro-environnement de l’hôte composé des cellules endothéliales et conjonctives du stroma influencent la croissance tumorale et le processus métastatique (1). L’angiogenèse regroupe un ensemble de mécanismes aboutissant à la formation de nouveaux capillaires sanguins (néovaisseaux) par l’excroissance ou le bourgeonnement de vaisseaux préexistants. Hôpital Avicenne, 93009 Bobigny. Act. Méd. Int. - Angiologie (15) n° 7, septembre 1999 Historique et intérêt de l’étude de l’angiogenèse L’angiogenèse semble un phénomène essentiel intervenant dans le processus de croissance tumorale à la phase invasive et de diffusion métastatique, alors que presque inexistante dans les carcinomes in situ comme l’a évoqué Folkman dans ses premiers travaux en 1971 (2). La néovascularisation intervient physiologiquement dans de nombreuses situations comme l’embryogenèse, le cycle utérin, la réparation tissulaire. Plusieurs pathologies non tumorales comme les maladies systémiques inflammatoires ou le psoriasis font également intervenir des phénomènes d’angiogenèse au cours de leur processus anatomopathologique. Hormis de rares exceptions, les tumeurs bénignes tendent à croître très lentement et sont très peu vascularisées, sans disséminer dans l’organisme. Il est démontré une corrélation directe entre l’importance du réseau vasculaire contenu dans les différentes tumeurs malignes et leur potentiel métastatique (3). Les mécanismes intervenant dans l’angiogenèse sont constitués d’étapes séquentielles et interdépendantes les unes des autres, au cours desquelles entrent en compte des phénomènes activateurs et inhibiteurs médiés par de multiples facteurs. Ils débutent par la dégradation de la matrice extracellulaire entourant les capillaires, suivi par la migration des cellules endothéliales selon le signal angiogénique reçu accompagnée de leur prolifération. Ces modifications aboutissent à la formation de nouvelles structures capillaires, augmentant ainsi progressivement le réseau vasculaire intratumoral par expansion de tubules et prolifération des cellules endothéliales (4). L’angiogenèse, hautement régulée à l’état physiologique, est le résultat d’un 122 équilibre entre l’action de facteurs activateurs et inhibiteurs. Celui-ci paraît rompu au sein des tumeurs malignes avec sécrétion prédominante d’un ou plusieurs facteurs, mécanisme fondamental de stimulation de la prolifération des tumeurs malignes. Les néovaisseaux ont pour fonction essentielle l’apport d’oxygène et de nutriments aux cellules malignes. Les carcinomes in situ ne franchissant pas la membrane basale ne sont pas vascularisés. Cette donnée a été largement étudiée dans les carcinomes in situ cervicaux, vésicaux, mammaires, et cet état peut persister durant plusieurs années, étant habituellement associé à des tailles tumorales réduites sans dissémination métastatique. Pour devenir des cancers invasifs, il est démontré qu’une néo-angiogenèse est nécessaire et fondamentale : c’est ce qui a été appelé le “switch angiogénique”. Un diamètre tumoral évalué à 2 mm (environ 106 cellules) semble constituer une limite au-dessus de laquelle les proliférations cellulaires requièrent le développement d’une néovascularisation pour poursuivre leur développement (1). Sans la genèse de néovaisseaux, une tumeur ne peut dépasser un volume de quelques millimètres cubes. La diffusion passive des nutriments n’est pas suffisante pour assurer la croissance tumorale continue (4). L’angiogenèse contribue également à la dissémination hématogène des cellules cancéreuses, fournissant une voie de passage hors de la tumeur primitive. Le mélanome est la première tumeur où la présence d’une grande quantité de vaisseaux a été corrélée à un haut potentiel métastatique. Une distinction claire entre la phase précoce peu vascularisée et la période plus tardive de prolifération tumorale à forte incidence de métastases a été établie. Une étude de corrélation a également été réalisée dans les cancers du sein. Un nombre de micro- vaisseaux, pour 200 champs de vue dans les régions les plus vascularisées des tumeurs, a été identifié comme étant un facteur prédictif indépendant du risque métastatique axillaire ganglionnaire ou à distance de la tumeur primitive (3, 5). Facteurs contribuant à l’angiogenèse L’angiogenèse tumorale est régulée par des facteurs inhibiteurs et activateurs de la formation et la croissance de ces néovaisseaux sécrétés, par les cellules tumorales, endothéliales, épithéliales, mésothéliales et les leucocytes. La balance de régulation de la sécrétion des facteurs intervenant dans l’angiogenèse est déterminante pour la vitesse de croissance tumorale. Facteurs activateurs Une douzaine de molécules, capables de provoquer l’angiogenèse dans différents systèmes in vitro ou in vivo, ont été purifiées. Elles incluent les membres de la famille des Fibroblast Growth Factors (FGF), le Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF), le Fibroblast Homology Growth Factor, la fibrine, le nicotinamide, le Platelet Derived Growth Factor (PDGF), le Transforming Growth Factor-alpha (TGF-α) et les membres de la famille des Matrix Metalloprotéinase (6). FGF et VEGF représentent deux des molécules les plus étudiées. Fibroblast Growth Factors (FGF) C’est la première famille de molécule établie contenant une dizaine de membres et dont les deux prototypes sont le FGF-a (acid-FGF) et le FGF-b (basic-FGF). Ils ont tous deux un PM de 18kDa et une homologie d’environ 50 %. Quatre types de récepteurs à activité tyrosine kinase de forte affinité ont été clonés, incluant FGFR-1, FGFR-2, FGFR-3 et FGFR-4. Leur action prédominante est la stimulation de la prolifération et la migration des cellules endothéliales et des fibroblastes stimulant l’angiogenèse in vitro et in vivo (6). L’implication clinique du FGF-b a été étudiée dans l’angiogenèse tumorale chez des patients atteints de tumeurs du système nerveux central. Une corrélation a été démontrée entre le grade tumoral et le dosage de FGF-b dans les urines, le liquide céphalo-rachidien et le sérum de patients atteints de tumeurs cérébrales. Un rapport de concentration de 1/8 a été retrouvé pour les gliomes de bas et de haut grade. D’autre part, ceci est strictement corrélé au degré de vascularisation intratumorale et les taux sériques de FGF-b redeviennent normaux après exérèse chirurgicale. In vitro, l’importance de FGF-b a été démontrée sur des lignées cellulaires de cancers de la vessie. Un modèle de cancer de vessie humain chez des souris nude a été établi avec diffusion métastatique et ces cellules disséminées ont été réinjectées dans la vessie d’un autre groupe de souris nude afin d’isoler des lignées à haut potentiel métastatique. Une surexpression de FGF-b a ainsi été retrouvée pour ces tumeurs très vascularisées (6). Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF) Il stimule la prolifération des cellules endothéliales et augmente la perméabilité vasculaire in vivo et in vitro. Le VEGF n’est pas spécifique de l’endothélium, mais est un facteur mitogène ou de différenciation de nombreuses cellules in vitro (6). Plusieurs études ont démontré sa surexpression dans des conditions d’hypoxie, au voisinage des néovascularisations pathologiques ou non. Ainsi, par des techniques d’hybridation in situ, sur des pièces d’exérèse 123 chirurgicale de glioblastomes, une expression spécifique de l’ARN messager (ARNm) du VEGF a pu être détectée à la périphérie des zones nécrotiques, donc au niveau des cellules probablement les plus hypoxiques. In vitro, en cultivant des cellules de glioblastomes en conditions hypoxiques, une augmentation d’un facteur 13 du taux de base du VEGF a été constatée, celui-ci redevenant rapidement normal si l’on supprime le déficit en oxygène (7). Deux types de récepteurs pour VEGF ont été clonés : flk1/KDR qui est le principal médiateur de l’activité de VEGF dont l’activité tyrosine kinase est fortement stimulée par le facteur angiogénique et flt1 d’action différente moins prédominante. La transcription du gène codant pour VEGF est activée dans les cellules tumorales et non dans les cellules endothéliales. En revanche, ses deux récepteurs sont présents à la surface des cellules endothéliales et non à la surface des cellules tumorales, suggérant un effet paracrine des facteurs de la famille des VEGF (6, 8). Des études in vivo portant sur le développement d’anticorps anti-flk1 et antiKDR ont démontré que ceux-ci inhibait la croissance tumorale sur des cellules de glioblastomes humains implantées chez la souris nude. La conséquence en a été la décroissance du nombre de vaisseaux intratumoraux et la réduction de la taille tumorale. A la suite, une dizaine de lignées tumorales humaines injectées en sous-cutané chez la souris nude ont vu leur croissance inhibée jusqu’à 95 % lorsqu’elles sont soumises à un traitement par ces anticorps. L’activité angiogénique de FGF-b et VEGF est supposée synergique. L’angiogenèse in vivo a en conséquence été examinée en utilisant une association de FGF-b et VEGF sur des lignées cellulaires tumorales de souris nude et humaines. A la suite, un traitement par anti-flk1 a été administré et au bout de Angiologie et cancer (III) 7 à 10 jours, une nécrose tumorale et une diminution de la prolifération endothéliale et de la densité des microvaisseaux ont été constatées dans tous les cas. Ces résultats, confirmant des études antérieures semblables, ont démontré le potentiel thérapeutique énorme des traitements inhibiteurs de l’angiogenèse (9, 10). Récemment, VEGF a été identifié comme un inhibiteur de l’apoptose tumorale sur des lignées cellulaires de microvaisseaux tumoraux. La néo-angiogenèse et la présence de la protéine p53 ont été étudiées in vivo chez des patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules. Une corrélation positive importante entre la dissémination métastatique des cellules et la quantité de microvaisseaux est constatée, alors que la présence de la protéine p53 n’était pas un facteur prédominant. En revanche, la quantité de VEGF étudiée était prédominante sur les lignées hautement vascularisées et positives pour l’expression de p53, suggérant une régulation de l’angiogenèse par le gène suppresseur de tumeur en présence de VEGF. En revanche, une étude de la corrélation entre la sécrétion de VEGF et la présence de p53 sur des cellules de sarcomes des tissus mous (léiomyosarcomes et synovialosarcomes) transfectés avec le gène suppresseur mutant a retrouvé une inhibition de l’angiogenèse par diminution de la production de VEGF (7). Facteurs inhibiteurs La quasi-absence de vascularisation dans les tissus normaux suggère l’existence de substances inhibitrices de l’angiogenèse, présentes de façon constitutive dans l’organisme. Les principes majeurs incitant à la recherche des facteurs inhibant l’angiogenèse dans les études cliniques sont les suivants : les cellules endothéliales intratumorales et les néovaisseaux ainsi formés sont suf- Act. Méd. Int. - Angiologie (15) n° 7, septembre 1999 fisamment différents de ceux contenus dans les tissus physiologiquement normaux pour imaginer la découverte d’antiangiogènes spécifiquement actifs contre les proliférations vasculaires intratumorales. D’autre part, l’utilisation de drogues inhibitrices de l’angiogenèse induirait spécifiquement la régression du volume des tumeurs malignes ou l’induction de cellules cancéreuses dormantes par un mécanisme de privation de l’apport d’oxygène ou de nutriments. Le première classe se compose d’inhibiteurs de la liaison des facteurs angiogéniques activateurs avec leurs récepteurs sur les cellules endothéliales (héparine, suramine, pentosan, técogalan). Thrombospondine-1 (TSP-1) C’est l’un des premiers inhibiteurs naturels identifiés, glycoprotéine fortement synthétisée dans les cellules tumorales et dont la sécrétion apparaît contrôlée par le gène suppresseur p53. Ceci suggère, comme pour le VEGF, une relation entre l’action des oncogènes et celui des substances intervenant dans la régulation de l’angiogenèse. En effet, il est montré que la perte d’un gène suppresseur de tumeur dans les fibroblastes de hamster induit une réponse angiogénique par diminution de la sécrétion de TSP-1. Ces fibroblastes possèdent un allèle sauvage et un autre muté pour le gène codant pour p53. La perte d’hétérozygotie inhibe la production de TSP-1 et la transfection de p53 sauvage inhibe l’angiogenèse par augmentation de la sécrétion de TSP-1 (6). Anticorps L’inhibition de l’angiogenèse peut être réalisée par neutralisation de la substance activatrice ou par blocage de ses récepteurs spécifiques. Des anticorps dirigés contre le VEGF sont capables d’inhiber leur fixation sur 124 le récepteur spécifique. Cette technique a permis d’annuler la formation de néovaisseaux in vivo sur des rétines de singe en provoquant une ischémie, ou in vitro sur un modèle d’angiogenèse chez la souris (11). Interférons De récentes observations cliniques ont démontré des propriétés antiangiogéniques des interférons. L’administration au long cours de l’interféron-α aux patients atteints de sarcomes de Kaposi, hémangiopéricytomes malins, hémangiomes infantiles a entraîné la régression de ces trois tumeurs hautement vascularisées. Une des hypothèses avancées est la suppression de la transcription et de la traduction protéique du gène de FGF-b dont la surexpression a été prouvée dans ces types de tumeurs. L’importance de la dose d’interféron et de sa voie d’administration a été démontrée au cours d’une étude préclinique et la voie sous-cutanée à 70 000 unités par semaine a été retenue comme antiangiogène et inhibitrice de la transcription de l’ARN et de la production de la protéine FGF-b, inhibant et ralentissant ainsi la croissance tumorale. Les gènes de souris et humains de l’interféron-β ont été clonés et leur transduction à l’aide de vecteurs viraux a permis de démontrer un effet inhibiteur de la production de collagénases de type IV et de FGF-b. Une autre conséquence de cette transfection a été l’activation dans les tumeurs de macrophages porteurs de propriétés tumoricides. Ces expériences ont été réalisées sur des lignées cellulaires de cancers colorectaux humains, prostatiques, ovariens et vésicaux implantés chez des souris nude (11). La seconde classe d’inhibiteurs comprend des substance capables d’agir sur la réponse des cellules endothéliales au stimuli angiogéniques. Angiostatine Des observations diverses ont conduit à la recherche d’un facteur inhibiteur de l’angiogenèse, présent dans le sérum et les urines chez la souris porteuse d’une tumeur primitive. Tout d’abord, il a été constaté que ces deux liquides physiologiques étaient capables de supprimer in vitro la prolifération des cellules endothéliales de façon dépendante de la dose. Nommée angiostatine et purifiée dans le sérum et les urines, une protéine de 38 kDa ayant une identité de 98 % avec un fragment interne de plasminogène de souris a été identifiée (11). Par ailleurs, il a été constaté que la notion d’exérèse de la tumeur primitive provoque, dans certains cas, l’éclosion de métastases assoupies et ceci a conduit Folkman à rechercher un facteur présent dans le sérum et les urines d’animaux porteurs de xénogreffes de tumeurs implantées sous la peau. Ainsi a été purifiée l’angiostatine, qui, à la différence des facteurs angiogéniques, est circulante, et donc capable d’inhiber à distance de son lieu de synthèse l’angiogenèse nécessaire au développement des métastases (2, 3). Endostatine Il s’agit d’un inhibiteur de l’angiogenèse identifié dans les cellules endothéliales hémangiomateuses, molécule de 20 kDa correspondant au fragment C-terminal du collagène de type XVIII. Des études in vitro et in vivo ont démontré son rôle anti-angiogénique avec régression de la croissance tumorale (6, 11, 12). Analogues de la fumagilline Les analogues de la fumagilline, un antibiotique naturel sécrété par les souches d’Aspergillus fumigatus, ont été synthétisés après identification des propriétés anti-angiogéniques de ce champignon. Ainsi in vitro, sur des cultures de cellules endothéliales et en présence du facteur activateur VEGF à de hautes concentrations, une inhibition totale de leur prolifération a été constatée après adjonction de fumagilline. In vitro, les analogues synthétiques de la fumagilline tels que AGM-1470 ont été testés par voie systémique chez des souris après implantation chez celles-ci de tumeurs malignes. Une inhibition de la croissance tumorale et de l’angiogenèse ont alors été constatées (13, 14). La troisième classe d’inhibiteurs de l’angiogenèse agit en provoquant des perturbations des interactions entre les cellules endothéliales et la matrice extracellulaire. Inhibiteurs des métalloprotéinases dégradant la matrice extracellulaire (MEC) La matrice extracellulaire est dégradée par des enzymes appelées métalloprotéinases (collagénases, stromélysines, gélatinases). Les inhibiteurs tissulaires de métalloprotéinases (tissue inhibitor of metalloproteinase : TIMP) de la matrice extracellulaire ont pour rôle d’empêcher cette dégradation. Naturels ou de synthèse, ils bloquent la migration des cellules endothéliales vers la source de stimulus angiogénique et donc l’angiogenèse. La matrilysine, métalloprotéinase fréquemment surexprimée dans les cellules malignes comme les adénocarcinomes coliques, gastriques, prostatiques et bronchiques, a particulièrement été étudiée et plusieurs fonctions lui ont été attribuées. Un rôle important d’induction de l’angiogenèse avec stimulation de la croissance tumorale primitive a ainsi été identifié (11, 14). Applications cliniques des inhibiteurs De nombreuses drogues sont en cours de développement préclinique et clinique afin d’identifier des thérapeutiques antiangiogènes. 125 Néanmoins, certains agissent probablement après stimulation par des oncogènes, gènes activant habituellement la croissance tumorale par promotion de la multiplication cellulaire. Le facteur VEGF et son niveau en présence de lignées cellulaires porteuses ou non de l’oncogène ras muté ont été particulièrement étudiés. Une corrélation nette entre le niveau d’expression de ras muté et la quantité de VEGF a été retrouvée par étude de l’ARNm et de la protéine angiogénique (16). Les anticorps anti-VEGF ont démontré leur pouvoir antiangiogénique et sont actuellement en cours d’études de phases I et II, basées sur des données expérimentales (17, 18). D’autres classes d’oncogènes, spécialement la famille des récepteurs tyrosine kinase ont montré des résultats similaires (9). Enfin, la contribution des antiangiogènes aux mécanismes d’action des traitements hormonaux à visée antitumorale dans les cancers hormonodépendants comme le cancer du sein et le cancer de la prostate a été recherchée. Une corrélation entre taux d’androgènes ou d’œstrogènes et stimulation de l’angiogenèse par le VEGF ainsi que le phénomène inverse d’inhibition de la néovascularisation par des traitements hormono-suppresseurs ont été identifiés (9). Deux composés sont retrouvés en essais cliniques, le marimastat et le néovastat. Le marimastat est un inhibiteur des métalloprotéinases de la matrice extracellulaire en cours d’essais dans les tumeurs pancréatiques, pulmonaires, gastriques et ovariennes. Le Néovastat est un extrait de la biomasse marine pourvu d’une activité angiostatique. Les études précliniques et cliniques en cours suggèrent plusieurs particularités des thérapeutiques anti-angiogéniques ; tout d’abord, ces composés ont une spé- Angiologie et cancer (III) cificité d’action et n’entraînent pas les effets secondaires habituels des traitements cytotoxiques. Ensuite, il apparaît que ces inhibiteurs nécessitent d’être délivrés durant de longues périodes de plusieurs mois pour démontrer leur efficacité et enfin, une association aux agents anticancéreux habituels est susceptible d’être plus efficace qu’une thérapeutique antiangiogène seule. Cette dernière combinaison s’est révélée curative dans des études précliniques sur des animaux. Conclusion L’ensemble de ces données suggère une corrélation essentielle entre agressivité tumorale, pouvoir métastatique et présence d’une néo-angiogenèse tumorale. De nombreuses étapes sont encore nécessaires pour développer cette classe d’agents anticancéreux. Les recherches s’orientent actuellement vers une utilisation couplée de traitements visant à inhiber l’angiogenèse et de traitements cytotoxiques (chimiothérapie ou radiothérapie). Une synergie est rapportée entre ces deux types de thérapeutiques dans plusieurs études expérimentales, notamment très récemment lors du congrès de l’ASCO 1999. L’association du Bay-129566, inhibiteur spécifique des métalloprotéinases 2 et 9 au paclitaxel et/ou au carboplatine a démontré sur vingt et un patients atteints de tumeurs avancées deux réponses partielles et neuf stabilisations au prix d’une toxicité acceptable (19). De même, dans les cancers colorectaux, la combinaison acide folinique et 5fluorouracile associée à un autre inhibiteur des métalloprotéinases a permis d’obtenir en deuxième ligne métastatique deux réponses partielles et dixhuit stabilisations sur dix-huit patients inclus (20). Les modalités exactes d’utilisation des Act. Méd. Int. - Angiologie (15) n° 7, septembre 1999 inhibiteurs de l’angiogenèse restent à définir pour chaque type de tumeur maligne, et la production à une échelle industrielle n’est pas encore mise au point pour de nombreuses molécules. Références bibliographiques 1. Folkman J. : Tumor angiogenesis. In : Mendelsohn J., Howley P.M., Israël M.A., Liotta L.A., eds. The molecular basis of cancer. Philapdelphia : W.B. Saunders. 1995 : 206-32. 2. Folkman J. : Tumor angiogenesis : therapeutic implications. N. Engl. J. Med., 1971, 285 : 1182-6. 3. Weidner N., Semple J., Welch W., Folkman J. : Tumor angiogenesis and metastasis-correlation in invasive breast carcinoma. N. Engl. J. Med., 1991, 3 : 1-8. 4. Folkman J. : Angiogenesis in cancer, vascular, rheumatoid, and other disease. Nat. Med., 1995, 1 : 27-31. 5. Folkman J. : Clinical applications of research on angiogenesis. N. Engl. J. Med., 1995, 26 : 1757-63. 6. Bifkalvi A., Javerzat S., Perollet C., Savona C. : Angiogenèse et cancer. Bull. 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