Organisation de la prise
en charge des schizo-
phrènes au Maroc
(Pr K. Raddaoui)
Au Maroc, les personnes
de catégorie sociale élevée
consultent leur médecin
en libéral tandis que les
autres vont à l’hôpital.
Malgré l’apparition de
structures légères, beaucoup de schizo-
phrènes sont hospitalisés. Cela se fait sou-
vent par recours à l’autorité, ce qui génère
une relation particulière entre soignant(s)
et soigné(s). En ce qui concerne l’activité
ambulatoire, les centres de santé se déve-
loppent. Les hôpitaux recevant des schizo-
phrènes fonctionnent de plus en plus selon
le mode de l’hôpital de jour. Les neurolep-
tiques constituent la base du traitement de la
schizophrénie ; cependant, l’emploi des thé-
rapies familiales se généralise. En dépit des
efforts considérables accomplis dans la prise
en charge des psychoses, il reste encore
beaucoup à faire, les croyances et la concep-
tion négative de la folie chez les Marocains
(comme ailleurs !) allant à l’encontre de tout
changement.
Annonce de la maladie
aux patients et à leur famille
(Dr A. Carre)
Faut-il dire la vérité au malade ? Cette ques-
tion suscite un grand nombre de réticences
chez les médecins qui doivent rester prudents
afin de ne pas “coller une étiquette psychia-
trique”. Le fait d’annoncer une mauvaise
nouvelle et de savoir que souvent le patient
a une représentation négative de la maladie
mentale va entraîner un retard d’annonce du
diagnostic. La famille et les patients sont
également réticents. Ces derniers devront
faire un travail d’acceptation de la maladie,
ce qui est loin d’être facile.
Connaître les capacités d’introspection du
sujet, l’étendue de ses troubles cognitifs, l’ef-
fet du traitement reçu est nécessaire avant de
décider d’informer ou non le malade.
L’information sera présentée différemment
selon que le patient traverse une phase aiguë
ou se trouve en phase de stabilisation de la
maladie. Informer le patient, c’est permettre
l’établissement d’une relation de collabora-
tion, de confiance et améliorer la compliance
au traitement. C’est aussi lui permettre de
mieux appréhender les mesures thérapeu-
tiques qui lui sont proposées. L’objectif est
avant tout de veiller à son confort, de ne pas
aggraver sa souffrance, en améliorant son
insertion sociale globale et en incluant la
famille qui déplore souvent le manque de
renseignements fournis par les médecins sur
la maladie.
Schizophrénie :
faut-il traiter les prodromes ?
(Dr B. Astruc)
La schizophrénie et ses conséquences sont
à l’origine d’un coût médico-économique
important pour la société.
C’est probablement le
trouble psychiatrique le
plus sévère, qui débute
tôt et a des conséquences
durant la vie entière.
Faut-il dépister et traiter
les syndromes précur-
seurs ? L’hypothèse envi-
sagée est celle d’un dia-
gnostic plus précoce conditionnant un
meilleur pronostic.
Dépister tôt permettrait d’infléchir l’évo-
lution défavorable de la maladie, d’en
retarder la phase d’état. Traiter les pro-
dromes permettrait de retarder son inci-
dence et de diminuer sa morbidité après
l’installation des troubles. Mais est-il bon
de traiter tôt ? Intervenir dès les prodromes
pourrait exposer les individus aux effets
secondaires des traitements ; de plus, on
pourrait traiter les “faux positifs”. Cepen-
dant, l’absence d’intervention précoce
pourrait conduire à ne pas traiter les “vrais
positifs” et à laisser évoluer la maladie et
ses risques.
Aspects pharmacologiques
différentiels des antipsychotiques
au niveau des récepteurs : implication
clinique et thérapeutique
(Dr J.P. Chabanne)
Deux zones cérébrales sont impliquées dans
la schizophrénie : les régions mésolimbique
et préfrontale. La transmission dopaminer-
gique est plus importante dans le système
limbique que dans la zone préfrontale où il
y a moins de récepteurs D2 mais davantage
de récepteurs sérotoninergiques. La dopa-
mine est le neurotransmetteur impliqué
directement dans la schizophrénie, la séro-
tonine joue un rôle de neurorégulateur.
congrès congrès
Écho des congrès
Abords de la schizophrénie
Compte rendu du congrès franco-marocain
Marrakech, 26-29 octobre 2000
S. Harrois*
Ce congrès, organisé par l’association de formation
médico-psychologique de la clinique de Quissac, a
permis de rassembler des intervenants d’horizons diffé-
rents : des psychiatres cliniciens, des universitaires, une
neuropsychologue. Plusieurs exposés ont été présentés sur
la schizophrénie.
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Act. Méd. Int. - Psychiatrie (18) n° 1, janvier 2001
* Neuropsychologue, service
de psychiatrie adultes du Pr. C.S. Peretti,
CHU Robert-Debré, Reims.
Pour lutter contre la psychose, il serait sou-
haitable de jouer sur la balance dopamine-
sérotonine. Le traitement à envisager serait
le blocage des récepteurs D2 ; ainsi, les
symptômes positifs de la schizophrénie
seraient réduits. Les neuroleptiques agis-
sent bien sur les récepteurs D2 mais favo-
risent l’apparition d’un syndrome extra-
pyramidal et le dysfonctionnement
tubéro-infundibulaire.
Que faut-il prescrire ? Des neurolep-
tiques ? Des antipsychotiques ? Les deux
classes de médicaments ?
Prescrire des neuroleptiques ne met pas à
l’abri du syndrome malin. Des effets col-
latéraux, des syndromes déficitaires secon-
daires ou un recours plus important aux
correcteurs peuvent apparaître. L’intérêt
d’utiliser des antipsychotiques est qu’ils se
fixent sur les récepteurs D2 au niveau du
système limbique, l’inconvénient est qu’ils
bloquent ces récepteurs au niveau du noyau
nigrostrié et tubéro-infundibulaire. Mieux
vaudrait alors ne pas prescrire neurolep-
tiques et antipsychotiques ensemble.
Historique du développement
de la molécule de rispéridone
(Dr J.C. Levron)
L’histoire des neuroleptiques a commencé
dans les années 1950 avec la chlorproma-
zine dans le traitement des psychoses. L’im-
plication du système dopaminergique et de
sa régulation dans les phénomènes psy-
chotiques fut ensuite mise en évidence.
En 1958, l’halopéridol était découvert. Ce
neuroleptique capable d’inhiber la trans-
mission dopaminergique en bloquant les
récepteurs D2 postsynaptiques était effi-
cace sur les symptômes positifs de la schi-
zophrénie mais ne l’était pas sur les symp-
tômes négatifs. La découverte ultérieure de
l’implication du système sérotoninergique
dans la régulation dopaminergique condui-
sit à utiliser la ritansérine (antagoniste des
récepteurs sérotoninergiques) associée à
l’halopéridol. Dès lors, l’efficacité sur les
symptômes négatifs était observée. Il fal-
lait donc synthétiser des molécules pouvant
bloquer les récepteurs sérotoninergiques et
responsables d’une inhibition des récep-
teurs D2. Ainsi apparut la rispéridone.
La rispéridone au travers
d’études cliniques récentes
(Dr P. Bouhours)
Les neuroleptiques représentent un traite-
ment au long cours indispensable, efficace
sur l’ensemble des symptômes. Quel béné-
fice peut-on attendre des antipsychotiques?
Une étude a comparé l’efficacité et l’accep-
tabilité de la rispéridone et de l’halopéridol
chez des patients stabilisés souffrant de schi-
zophrénie. La rispéridone s’y est révélée plus
efficace, notamment sur les symptômes
positifs, et a réduit les symptômes psycho-
tiques et le risque de rechute. La tolérance à
long terme y était satisfaisante.
Une étude compara les effets de la rispéri-
done à ceux de l’olanzapine dans le traite-
ment de la schizophrénie. Leur efficacité
était comparable à court terme sur les symp-
tômes productifs et négatifs. En revanche,
dans une autre étude à long terme, la rispé-
ridone a fait preuve d’une efficacité supé-
rieure sur les symptômes psychotiques. La
tolérance des deux produits s’est révélée
comparable. Chez des patients présentant un
délire et des hallucinations intenses, la ris-
péridone constituerait une molécule de choix
dans le traitement de première intention.
Génétique et schizophrénie
(Dr P. Courtet)
Des études familiales ont montré que le
risque de voir apparaître une schizophrénie
augmentait en fonction de la proximité
génétique. L’interaction gènes-environne-
ment constitue une alternative à l’hypothèse
neurodéveloppementale de la maladie.
La schizophrénie est une maladie à hérédité
complexe. Les formes les plus sévères
seraient les plus “héritables”. Les apparen-
tés de sujets schizophrènes présenteraient un
risque accru de troubles psychotiques et de
la personnalité.
Des études (études d’adoption ou études de
jumeaux) ont été menées dans le but de
déterminer si des caractéristiques présentes
chez les schizophrènes et leurs apparentés
sains étaient en rapport avec la vulnérabi-
lité génétique. Des gènes délétères seraient
responsables de certains traits schizophré-
niques. Cette observation suggère l’impli-
cation de facteurs génétiques dans la vul-
nérabilité à la schizophrénie, l’importance
de l’environnement intra-utérin et ce, indé-
pendamment des conditions postnatales
socio-éducatives.
Troubles cognitifs
dans la schizophrénie
(Pr. C.S. Peretti)
Les schizophrènes présenteraient d’impor-
tants troubles de la mémoire. La mémoire
à court terme (mémoire de travail) serait
altérée. Concernant la mémoire à long
terme, une perturbation de la mémoire
explicite avec une perte de cohérence de la
remémoration consciente est constamment
observée. Une altération de la mémoire
contextuelle et une perte de la capacité de
représentation d’une situation, d’un acte ou
d’un événement complexe ont été décrites.
La mémoire implicite serait quant à elle
préservée. Des troubles attentionnels sont
également présents. Ces altérations cogni-
tives peuvent entraîner des troubles de
l’adaptation, une modification des compé-
tences sociales et un déficit des habiletés
cognitives. La rispéridone préserve la
mémoire de travail des patients traités.
Conclusion
Ces quatre jours ont été l’occasion pour les
participants d’aborder la schizophrénie sous
différents angles. Ils ont permis de confron-
ter des connaissances dans des domaines
différents et incité à jeter un regard nouveau
sur cette maladie. Des perspectives de
recherche et une modification de la prise en
charge sont apparues, porteuses d’espoir.
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congrès congrès
Écho des congrès
Compte rendu réalisé grâce au soutien
des laboratoires Janssen-Cilag.
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