La Lettre du Pneumologue • Vol. XIV - n° 3 - mai-juin 2011 | 83
Points forts
»
L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est une maladie rare dont les stratégies de prise en charge sont
définies dans un nombre restreint de centres de référence ou de compétence. Toutefois, un certain nombre
d’événements médicaux peuvent nécessiter une prise en charge rapide, en dehors d’un centre référent.
»
Il est important de reconnaître et, si possible, d’identifier la cause d’une poussée d’insuffisance cardiaque
chez un patient atteint d’HTAP et d’en instaurer le traitement au plus tôt.
»Un traitement “spécifique” de l’HTAP ne doit pas, en règle générale, être interrompu.
»L’infection d’un cathéter veineux “tunnelisé” peut prendre le masque d’une aggravation de l’HTAP.
Mots-clés
Hypertension
artérielle pulmonaire
Traitement d’urgence
Insuffisance cardiaque
Anesthésie
Hémoptysie
Highlights
»
Management of pulmonary
arterial hypertension (PAH)
is most often restricted to a
limited number of specialised
centres. However, some emer-
gency cares have to be dele-
gated to first line centres.
»
Acute episodes of heart
failure, sometimes called
“PAH exacerbations”, have to
be recognized, and a treatment
must be initiated rapidly.
»
In most cases, it is not
recommended to interrupt so
called “specific” PAH therapies,
even in case of heart failure.
»
Bloodstream infections of
central venous catheter can
mimic an deterioration of PAH
in patients with prostanoid
therapy .
Keywords
Pulmonary arterial
hypertension
Emergency treatment
Heart failure
Anaesthesia
Haemoptysis
charge devient trop importante pour la contractilité
myocardique. À terme, il existe une rétention hydro-
sodée liée à une réduction du flux sanguin rénal.
Des épisodes aigus d’insuffisance cardiaque, parfois
appelés “crises d’HTAP”, peuvent émailler l’évolu-
tion de la maladie. Les paramètres associés à une
mortalité élevée en cas d’épisode aigu sont une
concentration plasmatique élevée du brain natriu-
retic peptide (BNP), une protéine C réactive (CRP) et
une créatininémie élevées, une natrémie basse, une
pression artérielle systémique basse et une dose de
dobutamine nécessaire élevée. La mortalité intra-
hospitalière de tels patients est de 32 à 41 % selon
les séries (9, 10).
Prise en charge thérapeutique
La prise en charge de l’insuffisance cardiaque aiguë
de l’HTAP ne peut se concevoir que dans un service
de réanimation ou de soins intensifs. Elle poursuit
plusieurs objectifs que sont l’optimisation de la
volémie, le maintien d’une contractilité myocar-
dique suffisante, celui d’un rythme sinusal et la
résistance vasculaire pulmonaire la plus basse
possible.
◆Moyen de surveillance et d’évaluation
Classiquement, on réalise une mesure “sanglante”
de la pression artérielle grâce à la mise en place
d’un cathéter artériel, ainsi qu’une mesure de la
pression veineuse centrale via une voie veineuse
centrale. Une surveillance des pressions pulmo-
naires est exceptionnellement nécessaire. De plus
en plus d’équipes utilisent l’échocardiographie-
doppler pour mesurer les paramètres de remplis-
sage (taille et compliance de la veine cave) et
de fonction cardiaque droite (aspect du septum
interventriculaire, excursion systolo-diastolique
de l’anneau tricuspidien, indice de Tei) [7].
◆Traitement de la rétention hydrosodée
La lutte contre la rétention hydrosodée est fonda-
mentale et le rôle des diurétiques majeur, même
s’il existe une insuffisance rénale (11). Il peut être
nécessaire d’associer plusieurs classes de diuré-
tiques. Dans la mesure où il existe fréquemment
chez les patients en insuffisance cardiaque une
diminution de l’absorption digestive des médi-
caments, il est souvent nécessaire de recourir à
une voie d’administration intraveineuse. Lorsque
l’objectif n’est pas atteint malgré un traitement
optimal par diurétiques, il peut être nécessaire
d’avoir recours à une hémofiltration veino-veineuse
continue.
◆Traitements inotropes positifs
➤Le traitement inotrope positif le plus employé
est la dobutamine (agoniste des récepteurs
β1-adrénergiques). Utilisée à de relativement faibles
doses (5 à 10 μg/kg/mn), la dobutamine permet
d’améliorer le couplage ventriculo-artériel à la fois
en augmentant la contractilité myocardique et en
entraînant une vasodilatation artérielle pulmo-
naire (12).
La dopamine (agoniste des récepteurs α- et
β-adrénergiques) a des effets hémodynamiques
semblables à ceux de la dobutamine, mais avec
moins d’effets vasodilatateurs systémiques.
La noradrénaline (agoniste des récepteurs α1- et
β1-adrénergiques) permet d’augmenter la pression
artérielle systémique (et par conséquent la post-
charge du ventricule gauche). Ce médicament offre
également la possibilité, à des doses comprises
entre 0,1 et 0,5 μg/kg/mn, d’améliorer le couplage
ventriculo-artériel (13).
La milrinone (inhibiteur des phosphodiestérases de
type 3) est un médicament améliorant la contracti-
lité myocardique, au prix toutefois d’une vasodila-
tation périphérique parfois intense. Son utilisation
peut nécessiter l’ajout d’un traitement vasocons-
tricteur (noradrénaline, par exemple).
Le levosimendan est un agent inotrope positif qui
agit en augmentant la sensibilité au calcium des
fibres myocardiques, sans augmenter la concen-
tration intracellulaire de calcium. L’action inotrope
positive ne s’accompagne donc pas d’un risque
accru de trouble du rythme et ne provoque pas
une augmentation significative de la consomma-
tion d’oxygène par le myocarde. Ce médicament
possède également une action vasodilatatrice due à
l’ouverture de canaux potassiques ATP-dépendants,
ce qui pourrait contribuer à diminuer la résistance
vasculaire pulmonaire (14). La posologie est de