Nociception et douleurs neuropathiques chroniques

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POUEDRAS Marie
PRADO Guillaume
15/03/11
Physio-Pharmaco, Pr Sauleau
Poly sur le réseau péda
Nociception et douleurs neuropathiques
chroniques
I- Définitions
A-La somesthésie :



Du grec « soma », le corps et « aisthêsis » la sensibilité
Regroupe les mécanismes nerveux chargés de recueillir l’information sensorielle du corps
Fournit les sensations somatiques = sensations du corps
La somesthésie nous informe de ce qui se passe dans notre :


Environnement externe par l’intermédiaire de récepteurs situés à la surface du corps
Environnement interne par l’intermédiaire de récepteurs situés en profondeur du corps
Il existe quatre modalités sensorielles de la somesthésie :
Tact épicritique : toucher, pression, vibration, chatouillement. Il nous renseigne sur la taille, la forme et
la texture des objets, ainsi que leur mouvement sur la peau.
Proprioception : position statique et la vitesse du mouvement des membres et du corps.
Nociception
Sensibilité thermoréceptive
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B- Distinction entre Nociception et Douleur
Nociception (ou nociperception) :


Du latin « nocere », nuire et « percipere », recueillir (percevoir)
Processus sensorielle à l’origine du message nerveux qui provoque la douleur
Douleur

« La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire
existante ou potentielle ou décrite en termes d’une telle lésion» (Association internationale de
l’étude de la douleur, 1979)
C-La Douleur
Expérience subjective et comportementale en réponse à un stimulus nociceptif physique ou
psychologique
3 composantes :



Composante sensori-discriminative
Composante affectivo-émotionnelle et comportementale
Composante cognitive
Douleur aigue et chronique :


Aigue = signal d’alarme, transitoire qui implique l’angoisse
Chronique = douleur maladie, persistante qui implique la dépression
II- Représentation
somesthésique
générale
du
système
Il s’établit sur cinq niveaux :





Récepteurs
Fibres afférentes périphériques
Voies de projections ascendantes
Etage thalamique
Etage cortical
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A- Les récepteurs cutanés
Il en existe différents types : récepteurs de Merkel, corpuscules de Meissner, de Pacini, de Ruffini,
récepteurs folliculaires des poils et les terminaisons nerveuses libres. Seules les terminaisons nerveuses
libres concernent la douleur. Celles-ci sont aussi les seules à ne pas être encapsulées.
B- Récepteurs nociceptifs
Ils sont retrouvés dans tous les organes (notion d’alarme) sauf le cerveau.


Nombreux au niveau de la peau >> discrimination de la douleur
Moins nombreux au niveau des tendons, des articulations et des viscères >> source de douleur
bien moins identifiée
Ce sont des terminaisons libres de fibres nerveuses capables d’identifier une stimulation nociceptive
(transduction) et de coder le niveau d’intensité du stimulus.


Fibres lentes peu myélinisées de moyen calibre Aδ
Fibres amyéliniques de petit calibre C
C- Classification des fibres nerveuses sensorielles
-
Proprioception, muscles squelettiques : fibres myélinisées de gros diamètre et de conduction très
rapide. Fibres Ia (fuseau musculaire) et fibres Ib (récepteur de Golgi).
Mécanorécepteurs cutanés (tact, pression, vibrations) : Fibres myélinisées de diamètre moyen et
conduction rapide.
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-
Douleur, température : Fibres Aδ myélinisées de petit diamètre et conduction moyenne.
Douleur, température : Fibres C non myéliniques à petit diamètre et conduction lente.
D- Processus à l’origine du signal nociceptif
Il en existe quatre principaux :
-
La lésion tissulaire directe
La « Soupe inflammatoire
Le réflexe d’axone
L’hyperexcitabilité centrale
Premièrement, l’action mécanique provoquant la lésion va sensibiliser directement les nocirécepteurs
concernés. Ensuite, s’ajoute à cela une action chimique indirecte via de nombreuses substances
inflammatoires relarguées par les cellules alentours : prostaglandines, histamine, bradykinine, sérotonine,
ATP…C’est la « soupe inflammatoire ». La douleur survient alors par excès de stimulus nociceptifs
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La sensibilisation de ces fibres va provoquer un retour d’influx douloureux vers la périphérie. Ceci va
élargir le champ douloureux au niveau de la lésion. C’est le réflexe d’axone.
.
L’hyperexcitabilité centrale est un phénomène se produisant au niveau des cornes postérieures de la
moelle spinale. Il y a en fait un relargage de glutamate et de substance P qui vont amplifier le signal
douloureux.
Ceci a pour effet que :


un signal peu ou pas douloureux va le devenir par diminution du seul d’excitabilité : on parle
d’allodynie.
un signal douloureux le devient encore plus : on parle d’hyperalgésie.
L’hyperexcitabilité centrale est impliquée dans les douleurs chroniques ou douleurs sans lésions
persistantes.
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III- Rappel
A- Organisation de la voie cordonale postérieure
La voie cordonale postérieure est responsable du tact épicritique et de la sensibilité proprioceptive
consciente via les noyaux gracile et cunéiforme.
Voir schéma sur poly
B- Organisation de la voie spino-thalamique
C’est une chaîne constituée de trois neurones dont le deuxième est médullaire :


Décussation du 2ème neurone en avant du canal de l’épendyme
Ascension dans le cordon antérolatéral controlatéral de la moelle = Faisceau spino-thalamique
Voir schéma sur poly
La présence d’une synapse au niveau de la moelle spinale va permettre une modulation soit
physiologique, soit pharmacologique (ex : morphine).
Une atteinte au niveau du SNC va pouvoir toucher la voie cordonale postérieure, la voie spino-thalamique
ou bien les deux.
Voie de projection ascendante :
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Il existe deux contingents spino-thalamiques :

La voie latérale rapide = Faisceau néo-spino-thalamique
 Fibres rapides
 Voie paucisynaptique
 Projection sur le cortex somesthésique
 Information sensori-discriminative de la douleur : localisation et caractérisation du
stimulus nociceptif

Voie médiane lente = Faisceau paléo-spino-réticulo-thalamique
 Fibres lentes (C)
 Voir plurisynaptique
 Absence d’organisation somatotopique
 Projection diffuse sur les structures encéphaliques
 Message d’alarme et d’éveil
 Composante affective et cognitive de la sensation douloureuse
C- Particularité des voies nociceptives
Faisceau paléo-spino-réticulo-thalamique



Se projette sur la substance réticulée du tronc cérébral et sur les noyaux intraliminaires du
thalamus (thalamus non spécifique) sans somatotopie et, directement ou non sur l’hypothalamus et
le striatum
Mise « en éveil » du SNC par le système réticulaire
 Signal d’alerte et des comportements de défense
Projections corticales diffuses sur le cortex préfrontal et les structures limbiques
 Aspects émotionnels, cognitifs et affectifs de la douleur
D- Aires corticales somesthésiques nociceptives
Informations issues des fibres Aδ

Perception de l’intensité et de la localisation de la douleur du fait de la représentation corporelle
corticale (homunculus sensitif). Somatotopie de la voie néo-spino-thalamique maintenue au
niveau cortical
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Informations nociceptives issues des fibres C


Non relayées vers le S1 mais transmises aux cortex associatifs
Permettent à l’organisme de faire « l’expérience de la douleur » et d’élaborer en conséquence les
comportements adaptés
 Cortex préfrontal : caractère désagréable de la sensation douloureuse
 Système limbique : apprentissage et mémorisation des sensations nociceptives +réaction
émotionnelle en contexte de douleur
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Douleur neuropathique chronique
Introduction
Recommandations pour la pratique clinique de la Société Française d'Etude et de Traitement de la
Douleur (SFETD):
 concernent les douleurs neuropathiques chroniques (plus de 3mois) de l'adulte et de l'enfant:
diagnostic, évaluation et traitement (en médecine ambulatoire)
 concernent l'ensempble des professionnels de santé
I- Douleur neuropathique
A- Définition:
« douleur initiée ou causée par une lésion primitive ou un dysfonctionnement du système nerveux »
B- Etat des lieux
 Ce sont des douleurs méconnues, sous estimées et sous traitées.
 Les douleurs neuropathiques chroniques affectent 7% de la population française adulte, soit 25%
des patients douloureux chroniques.
 Il existe suffisamment d'arguments pour considérer la douleur neuropathique comme une entité
spécifique qu'il est possible de diagnostiquer, d'évaluer et de traiter indépendamment de l'étiologie
en cause.
II- Diagnostic de douleur neuropathique
A- Interrogatoire
 Sémiologie douloureuse particulière à 2 composantes:
 Une composante spontanée (en l'absence de stimulation) continue ou paroxystique
 Ou douleur provoquée par des stimulations diverses (tactiles, thermiques)
 Vocabulaire évocateur du patient: brûlure, décharge électrique, froid douloureux.
 Fréquemment accompagné de sensations anormales non douloureuses mais désagréables (on parle
de paresthésie quand ces sensations sont spontanées et de dysesthésie quand elles sont
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provoquées) : fourmillements, picotements, démangeaisons, engourdissement.
 Contexte éventuel de lésion ou de maladie du SN.
B- Examen clinique
2 objectifs:
 Rechercher un déficit sensitif : déficit sensitif tactile, à la piqure, au chaud ou au froid.
 Vérifier que ces douleurs spontanées et/ou provoquées sont localisées dans un territoire
compatible avec une lésion neurologique périphérique ou centrale.
C- Principaux éléments cliniques orientant vers
diagnostic de douleur neuropathique
le
 Contexte de survenue : lésions ou maladie connue ou suspectée du SN.
 Contexte particulier pouvant s'accompagner d'une lésion nerveuse
 Décours temporel plausible entre la lésion et l'apparition de la douleur
 Description des douleurs : caractéristiques particulières des douleurs spontanées continues ou
paroxystiques.
 Association à des douleurs provoquées. L'allodynie au frottement et au froid étant plus
caractéristique de ces douleurs
NB: allodynie = douleur en réponse à une stimulation qui normalement ne provoque pas de douleur
Hyperalgésie = augmentation de la réponse à un stimulus normalement douloureux
D- Outils diagnostic
Le DN4 (Douleur Neuropathique en 4 questions)




Recommandé en pratique clinique pour l'aide au diagnostic de douleur neuropathique
Comporte une partie « interrogatoire » + une partie « examen clinique »
Simple et rapide d'utilisation
Score > ou = à 4 : « dépister » douleur neuropathique avec sensibilité et spécificité excellentes
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E- Examens complémentaires
Aucun EC pour reconnaître la douleur neuropathique et débuter un traitement analgésique adapté.
EC uniquement utilisés pour l'enquête lésionnelle et étiologique.
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III- Principales étiologies chez l'adulte
A- Etiologies périphériques
 Radiculopathies
 Mononeuropathies / plexopathies (post chir ou trauma, syndromes canalaires, douleur postzostérienne)
 Polyneuropathies; neuropathies du diabète, alcoolique, induite par chimiothérapie,
polyneuropathies idiopathiqe à petites fibres
B- Etiologies centrales
 AVC
 Lésions médullaires traumatiques (affectant la voie spinothalamique et/ou cordonale post)
 SEP
IV- Outils d'évaluation
Objectifs :


Mesurer la sévérité et le retentissement des douleurs
Suivre l'évolution, évaluer les résultats d'un traitement
Il existe plusieurs échelles pour évaluer la douleur : toujours utiliser la même au cours du suivi.
Evaluation du retentissement des douleurs neuropathiques
Echelle de qualité de vie et de retentissement émotionne :
 Evaluation de l'impact des douleurs neuropathiques par le Questionnaire Concis sur les Douleur: 7
questions relatives au retentissement de la douleur (sur l'activité générale, le sommeil, les relations
sociales, l'humeur, le goût de vivre, la marche, le travail habituel)
 Evaluation des comorbidités anxio dépressives : echelle Hospital Anxiety Depression (HAD)
Suivi :
 Echelles catégorielles de soulagement (aggravation, pas de changement, soulagement faible,
modéré, fort, complet)
 Mesure du pourcentage de soulagement (de 0% : pas de soulagement, à 100%)
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V- Traitement des douleurs neuropathiques
Antalgiques de palier I (paracétamol, AINS) peu ou pas efficaces
Nécessité d'envisager d'autres classes thérapeutiques.
L'efficacité de ces traitements est modérée dans l'ensemble et semble globalement similaire pour la
plupart des étiologies.
Le choix d'un traitement médicamenteux des douleurs neuropathiques
 ne dépend pas de l'intensité des douleurs comme dans les douleurs nociceptives
 repose sur l'efficacité la mieux établie, sur le meilleur rapport bénéfice/sécurité d'emploi, sur une
éventuelle action conjointe sur les comorbidités (anxiété, dépression, troubles du sommeil...)
A- En 1ère intention
En monothérapie:
 antidépresseurs tricycliques pour douleur continue et paroxystique
 antiépileptiques gabapentinoïde (gabapentine ou prégabaline) pour douleur continue
Le choix entre ces classes thérapeutiques est fonction du contexte, des comorbidités associées, de leur
sécurité d'emploi.
On considère que les 2 classes présentent la même efficacité mais que les AD tricycliques ont une
sécurité d'emploi plus faible (plus d'effets indésirables)
B- Tramadol
Médicament utilisé pour les douleurs dites « mixtes » (associant une composante neuropathique et par
excès de nociception). C’est le plus utilisé aux urgences par exemple pour soulager une douleur de
fracture.
C- Opioïdes forts
Uniquement après échec des traitements de 1ère intention, en association ou non.
L'association des différents médicaments permet une potentialisation de l'effet sur la douleur car les
mécanismes d'action sont différents.
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D- Rivotril
Traitement dont l'efficacité n'a pas été établie par des études contrôlées.
E- Traitements médicaux non pharmacologiques
 Neurotransmission transcutanée : efficace sur douleurs neuropathiques périphériques focales
 Stimulation magnétique transcrânienne répétitive du cortex moteur
 Psychothérapie cognitivo-comportementale (peut être proposée en cas de comorbidité anxieuse et
de difficultés d'ajustement à la douleur)
 Acupuncture
F- Traitements invasifs
Dans les centres spécialisés
Après échec des traitements médicamenteux bien conduits:
 Neurostimulation médullaire (pour les lombo-radiculalgies chroniques post-op)
 Stimulation du cortex moteur (pour les douleurs neuropathiques centrales et plexiques, incluant les
douleurs de membre fantôme)
 Analgésie intrathécale
 DREZotomie (Dorsal Root Entry Zone)
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