Imagerie irm des flux cérébraux dans les hémorragies intra-ventriculaires du nourrisson Balédent O 1, Capel C 1, Schauvliege J 2, Fichten A3, Krepjowicz B 1,4 , Courtois V 1,4, Kongolo G 5, Gondry-Jouet C 2 (1) Service de médecine nucléaire et de traitement d’images (2) Service de radiologie (3) Service de neurochirurgie (4) Ecole supérieue d'ostéopathie et de biomécanique appliquée Paris (5) Service de Pédiatrie Contexte : physiologie de l’hydrodynamique intra crânienne L’hémohydrodynamique cérébrale correspond à l’étude des interactions des écoulements du sang et du liquide cérébro-spinal (LCS). La boîte crânienne de l’adulte est rigide, à la différence du nouveau-né présentant deux fontanelles (antérieures et postérieures). A chaque cycle cardiaque, du sang artériel afflue dans la boîte crânienne et du sang veineux en sort. Ces mouvements étant associés à un flux du LCS. Fontanelle Pic : pression intracrânienne Parenchyme du nouveauné pic Sang artériel LCS LCS Sang veineux y q représentent p l’un des facteurs étiopathogéniques p g q dominants Les troubles hémodynamiques dans les atteintes neurologiques acquises de la période néonatale. Les hémorragies intra-ventriculaires (HIV) sont la 1ère cause de troubles de l’hydrodynamique cérébrale. Il s’agit d’une des principales étiologies d’hydrocéphalies chez le nouveau-né. Or, la physiologie de l’hydrodynamique cérébrale du nouveau-né reste inconnue. Les flux sanguins et du LCS ont une physiologie bien connue chez l’adulte. Qu’en est-il chez le nouveau-né ? Quelle est l’impact de hémorragie intra ventriculaire ? Contexte : données de l’IRM de flux chez l’adulte La séquence IRM par contraste de phase, utilisée pour la mesure des vitesses de déplacement des tissus et des liquides biologiques est apparue à la fin des années 1980 [1-3]. Cette technique non invasive est la seule apportant, dans des conditions physiologiques normales, une quantification de l’écoulement du LCS. A partir des observations effectuées sur des populations de sujets témoins adultes [4 - 9], l’IRM de flux a permis de quantifier les volumes de LCS et de sang déplacés au cours du cycle cardiaque dans le cerveau humain de l’adulte. Flux veineux cérébral Les données IRM permettent d’obtenir des courbes de débit pour chacune de ces régions après traitement par un logiciel adapté [6]. [6] Les derniers progrès de l’IRM 3 tesla ont permis d’accroître le rapport signal sur bruit permettant l’étude de l’hémohydrodynamique chez les nouveau-nés, comme cela est déjà le cas chez l’adulte. Flux cérébral artériel Flux du LCS Flux artérioveineux Les objectifs de cette étude sont : Définir les relations existant entre les flux cérébraux du LCS et du sang chez les nouveau-nés. Définir les répercutions d’une hémorragie intra-ventriculaire dans une population de nouveau-nés ayant présenté une hydrocéphalie. Population étudiée Groupe contrôle : Onze nouveau-nés (5 jours – 10 mois) ayant bénéficié d’une IRM, sur indication neurologique clinique mais sans signes radiologiques en faveur d’une atteinte cérébrale macroscopique susceptible d’altérer les flux cérébraux. age indications 1 1s HIV + hydrocéphalie 2 2s HIV + hydrocéphalie 3 1m HIV + hydrocéphalie 4 1m HIV + hydrocéphalie 5 1m HIV + hydrocéphalie 6 1m HIV + hydrocéphalie age indications 1 4m Nystagmus congénital 2 2s Petit méningocoele frontal isolé 3 4m Augmentation du périmètre crânien 4 3m Nystagmus congenital 5 10 m Epilepsie 6 9m Asphyxie périnatal 7 1m Asphyxie périnatal 8 4m Epilepsie 9 1s Epilepsie 10 5m Epilepsie 11 8m Epilepsie Groupe « HIV » : Cinq prématurés et un nouveau-né à terme (9 jours – 6 semaines) présentant une dilatation ventriculaire associée à une hémorragie intraventriculaire. Matériels & Méthodes Signa HDx 3T GE Healthcare Imagerie morphologique adaptée au bilan radiologique Séquence de flux rapide en contraste de phase (IRM CP) Antenne : dépend de l’âge et du poids du nouveau-né (SAR !!!) Matrice (mm2): 384 * 256 (aqueduc) et 256 * 256 (autres niveaux) FOV x : 140mm y : 98mm Nex : 2 Vues par segment : 2 Phases cardiaques : 32 (capteur périphérique sur le pied) Antenne genou(E/R) 6KW <1 mois Antenne tête (E/R) 6KW <10Kgg HDbrain PA/R 35KW >10Kg image parallèle Quatre acquisitions IRM-CP sont effectuées : 2 pour le LCS, 2 pour le vasculaire, après repérage sur une coupe morphologique sagittale et sur une séquence en temps de vol pour l’acquisition vasculaire cérébrale. Trois vitesses d’encodage (VENC) sont sélectionnées sur les plans de mesure: 100 mm/sec pour l’aqueduc (LCS) 50 mm/sec pour les espaces cervicaux (LCS) 800 mm/sec pour le vasculaire Temps d’acquisition entre 1 et 2 minutes en fonction du rythme cardiaque Ce protocole de IRM-CP a été effectué en plus du protocole clinique (accord du comité d’éthique). Segmentation des images : LCS Flux craniocaudal dans l’aqueduc de Sylvius La segmentation permet d’obtenir les courbes d’évolution des flux de LCS en fonction du cycle cardiaque dans l’aqueduc et dans les espaces sous arachnoïdiens de l’étage cervical. Volume déplacé Flux vitesses Flux caudocranial de la couronne de LCS Le Logiciel que nous utilisons pour la segmentation et le calcul des courbes de flux a été développé au CHU d’Amiens. Il utilise un algorithme dédié à la segmentation des oscillations du LCS et du sang qui assure une segmentation rapide, reproductible et précise des régions d’intérêts complexes comme les espaces sous arachnoïdiens. Segmentation des images : sang Jugulaire gauche Carotide interne gauche La segmentation des images vasculaires permet d’étudier l’évolution des flux dans les différents vaisseaux à visée cérébrale (carotides internes, vertébrales, jugulaires). Segmentation des images : sang Carotide interne gauche Carotide interne droite Tronc basilaire Sinus droit Sinus longitudinal supérieur Une séquence vasculaire intracrânienne, en temps de vol, permet un positionnement optimal rapide des repères artériels en évitant les boucles. Au niveau cérébral, le débit artériel est représenté par le débit de la carotide interne et celui du tronc basilaire. Le débit veineux est la sommation des débits du sinus longitudinal postérieur et du sinus droit. La sommation des débits artériels et veineux permet de reconstruire une courbe de débit artério-veineux cérébral en fonction du cycle cardiaque. mm3/sec 3000 Débit artério-veineux cérébral Drainage veineux 2000 1000 0 Phases d’un cycle cardiaque -1000 -2000 -3000 -4000 -5000 Remplissage artériel Résultats : groupe contrôle mm3/sec Représentation des flux cérébraux sur un cycle cardiaque veineux Carotide interne droite 0 Pic systolique Carotide interne gauche Tronc basilaire Sinus droit artériel Sinus longitudinal supérieur Diastole Systole L’ensemble des débits (artères et sinus) sont mesurables et présentent une phase systolique et une phase diastolique reconnaissable comme chez l’adulte. L’exemple ici d’un nouveau-né d’une semaine montre un flux au sens physiologique unidirectionnel et quantitativement variable en fonction du cycle cardiaque. Sur le graphique de droite sont représentées les courbes de débit des sinus droit et longitudinal supérieurs (en bleu) et des carotides internes et tronc basilaire (en rouge) en fonction du temps cardiaque. Résultats : groupe contrôle mm3/sec Représentation des flux cérébraux sur un cycle cardiaque Etude des flux vasculaires au niveau cervical Carotide interne gauche Jugulaire gauche Artère vertébrale gauche DSC=190 ml/min Diastole Systole L’ensemble des débits artério-veineux sont mesurables et présentent une phase systolique et une phase diastolique reconnaissable comme chez l’adulte. L’exemple ici d’un nouveau-né d’une semaine montre que les carotides internes, les artères vertébrales et les veines jugulaires présentent un flux unidirectionnel et au sens physiologique. Le schéma de droite nous montre le débit artério-veineux extra-crânien en fonction du temps cardiaque. Le débit sanguin cérébral (DSC) est mesuré à 190 ml/min. Résultats : groupe contrôle Aqueduc de Sylvius mm3/sec Représentation des flux cérébraux sur un cycle cardiaque Aq ed c de Sylvius Aqueduc S l i s Les oscillations au niveau de l’aqueduc de Sylvius sont mesurables sur l’ensemble de la population. Dans l’exemple pris ici d’un nouveau-né d’une semaine, l’aqueduc de Sylvius présente un écoulement bidirectionnel. Le débit en fonction du cycle cardiaque est quantifié (schéma de droite) et présente des oscillations de petites amplitudes par rapport à l’adulte. Résultats : groupe contrôle Espaces sous-arachnoïdiens cervicaux Espaces sous-arachnoïdiens cervicaux mm3/sec Représentation des flux cérébraux sur un cycle cardiaque Flux du LCS cervical Débit artério veineux Diastole Systole La mesure des oscillations du LCS des espaces sous-arachnoïdiens cervicaux est possible. Dans l’exemple d’un nouveau-né d’une semaine, ceux-ci présentent un écoulement bidirectionnel et comme chez l’adulte en opposition de phase avec le flux artério veineux. Résultats : groupe contrôle 900 800 700 600 500 400 300 200 100 0 600 500 1000 CBF ml/min CBF ml/min DSC ml/min DSC ml/min 800 600 y = 53.X + 173 2 R = 0,56 400 y = 1,43.X + 118 200 mois months 0 2 4 6 Figure A 8 10 12 2 R = 0,71 0 0 100 200 Volume oscillatoire (µl) micro.litre/CC 300 Figure B Volume oscillatoire ill t i (µl) ( l) LCS cerv micro.L/CC 400 500 600 LCS cerv 400 300 200 y = 7,6.X + 92 R2 = 0,54 Volume oscillatoire (µl) 100 0 LCSmicro.L/CC aqu 0 10 20 30 40 Figure C La population étant hétérogène au niveau de l’âge les résultats ne sont pas présentés en terme de moyenne mais en fonction de l’âge. Figure A: courbe du débit sanguin cérébral (DSC) en fonction de l’âge. Figure B: courbe du débit sanguin cérébral en fonction du volume oscillatoire du LCS cervical. Figure C: courbe du débit du LCS cervical en fonction du volume oscillatoire du LCS dans l’aqueduc l aqueduc. Le DSC augmente avec l’âge. Il est en relation avec le volume oscillatoire du LCS cervical qui lui-même présente un corrélation avec les oscillations dans l’aqueduc. Néanmoins l’oscillation du LCS au niveau de l’aqueduc ne représente qu’environ 20% des oscillations cervicales. Résultats : groupe contrôle Evolution temporelle des pics de flux dans un cycle cardiaque % cycle cardiaque Systole et chasse du LCS Diastole et retour du LCS Ce schéma représente, sur une échelle logarithmique, l’évolution des différents pics de débits étudiée en fonction du cycle cardiaque. En rouge, le débit artériel; en bleu, le débit veineux; en vert, le débit dans l’aqueduc; en turquoise, le débit du LCS cervical. L’orientation des flèches montre l’orientation des flux. Seules les maxima et minima de ces débits sont présentés. Nous pouvons observer qu’au début de la systole, le sang artériel affluant dans les artères intracérébrales entraine une chasse du LCS cervical vers les espaces sous arachnoïdiens médullaires sous-jacents. Ceci est suivi d’une chasse du sang veineux. Puis la chasse du LCS intra ventriculaire est également notée mais à des amplitudes très inférieures comparées aux espaces sous arachnoïdiens rachidiens. La chronologie de ces flux durant le cycle cardiaque est comparable aux résultats de l’adulte[6] avec des amplitudes plus petites. Résultats : groupe HIV HIV et hydrocéphalie patient age 1 1s 2 DSC ml/min aqueduc µl/cc C2C3 µl/cc 80 17 13 2s _ 10 3 3 1m 160 0 14 4 1m 92 4 5 5 1m 150 14 0 6 1m 120 5 7 HIV et hydrocéphalie Tous les patients présentent un DSC inférieur à celui de la population contrôle (190 ml/min). L’un des DSC n’a pas été mesurable à cause d’un mauvais positionnement du plan de coupe. Au niveau de l’aqueduc, aucun écoulement n’a pu être mis en évidence pour le patient 3. Est-ce l’expression d’un blocage du LCS ou une limite de la technique ? Alors que pour les patients 1, 2 et 5 on note un hyperdynamisme de l’aqueduc (par rapport au groupe contrôle) comme dans l’hydrocéphalie chronique de l’adulte. Au niveau cervical, le patient (5) ne montre aucun écoulement. Les patients 2,4,6 présentent un écoulement en dessous des minimum observés chez le groupe contrôle. Ceci pouvant traduire un feutrage des espaces sousarachnoïdiens cervicaux qui se répercute par une baisse de la compliance du système crânio rachidien et peut être à l’origine de la dilatation ventriculaire, comme dans les hémorragies méningées de l’adulte. Flux de LCS cervical Aqueduc de sylvius LCS cervical Flux de LCS de l’aqueduc Débit sanguin cérébral Aqueduc hyperdynamique Dans cet exemple d’un patient de 1 semaine, les volumes oscillatoires du LCS calculés dans l’aqueduc et au niveau cervical sont équivalents. Les oscillations dans l’aqueduc sont hyperdynamiques et se présentent en opposition de phase avec les oscillations du LCS cervicales. Ceci pouvant être l’expression des fontanelles de la boîte crânienne qui chez le nouveau né procure une compliance complémentaire (au vase d’expansion rachidien) pour la prise en compte des variations du volume sanguin cérébral au cours du cycle cardiaque . mm3/sec sinus sagittal lcs cervical Coupe sagittale en T1 : HIV + hydrocéphalie h d é h li Coupe axiale en T2* : HIV + hydrocéphalie h d é h li L’imagerie en contraste de phase a mis en évidence chez ce prématuré de 31 semaines présentant une hémorragie intraventriculaire et intra parenchymateuse, l’absence d’écoulement du LCS dans l’aqueduc du mésencéphale. La figure ci-contre présente l’évolution des débits du sang cérébral et du LCS à la jonction crâniorachidienne. La représentation est faite sur 3 cycles cardiaques. Image d’amplitude d amplitude Image de phase carotides internes et tronc basilaire Absence de flux dans l’aqueduc Discussion (1) Les flux vasculaires en pédiatrie, et principalement aux premiers âges de la vie, ne sont appréhendés que par l’échographie doppler. L’hydrodynamique du LCS du nourrisson et du nouveau né est encore peu, voire « pas » étudiée et connue. pp d’un haut champ p magnétique g q de 3 Tesla couplé p à une séquence q d’imagerie g L’apport rapide des flux par contraste de phase nous a permis de mettre en place un protocole complet d’investigation des flux vasculaires et du LCS. L’augmentation du rapport signal sur bruit est ici exploitée en augmentant la résolution spatiale de nos acquisitions de flux sans avoir recours à une augmentation du nombre de répétitions qui majorerait le temps d’acquisition. La rapidité de la séquence s’explique par l’utilisation du fast CP mais également par la fréquence cardiaque élevée chez l’enfant. Le temps nécessaire à une acquisition complète permettant de quantifier l’ensemble des flux artériels, veineux et du LCS au niveau intra et extra-crâniens est donc de l’ordre de 5 minutes, ceci ne pénalisant pas la durée globale de l’examen. Par ailleurs ces séquences n’entraînent pas d’augmentation du SAR. Les oscillations du LCS dans l’aqueduc du mésencéphale et les espaces sousarachnoïdiens sont bien appréhendées, présentent des amplitudes variables en fonction de l’âge mais conservent un même décours temporel par rapport aux flux chez l’adulte. Discussion (2) Pour utiliser de manière significative l’hydrodynamique cérébrale en pédiatrie il est nécessaire d’augmenter la taille de la population contrôle. Ainsi la mise en place de normes permettrait dans les HIV du nouveau né de mieux définir l’impact du saignement sur l’hydrodynamique cérébrale et d’en préciser l’éventuel blocage. Comme chez l’adulte cette technique trouverait également sa place dans le suivi post opératoire des ventriculocisternostomies et dans l’optimisation des indications neurochirurgicales dans les hydrocéphalies du nouveau-né. Conclusion L’hémorragie intra ventriculaire des nourrissons altère les écoulements du LCS dans le système ventriculaire mais également dans les espaces sous arachnoïdiens rachidiens Bibliographie 1.Feinberg, D.A. and A.S. Mark, Human brain motion and cerebrospinal fluid circulation demonstrated with MR velocity imaging. Radiology, 1987. 163(3): p. 793-9. 2. Nitz WR, Bradley WGJ, Watanabe AS, Lee RR, Burgoyne B, O'Sullivan RM, et al. Flow dynamics of cerebrospinal fluid: assessment with phase-contrast velocity MR imaging performed with retrospective cardiac gating. Radiology 1992;183(2):395-405. 3.Enzmann, D.R. and N.J. Pelc, Normal flow patterns of intracranial and spinal cerebrospinal fluid defined with phase-contrast cine MR imaging. 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