La Lettre du Psychiatre • Vol. VI - n° 6 - novembre-décembre 2010 | 187
Une étude comparative de
la fonction sexuelle des patients
schizophrènes institutionnalisés
Séville et Cáceres (Espagne)
Les perturbations sexuelles sont fréquentes
dans la population générale : les études multi-
centriques internationales et les revues de la
littérature font état de plaintes émanant de 40 %
de femmes et de 30 % d’hommes. Concernant
la schizophrénie, l’âge de déclenchement de la
maladie est généralement proche de celui du
début de la période reproductive, et des dysfonc-
tions sexuelles sont fréquemment décrites chez
les patients schizophrènes. Selon les études,
30 à 80 % de ces patients présenteraient des
problèmes de dysfonctionnement sexuel. Deux
études récentes se sont intéressées à cette
question. Dans la première, des chercheurs
espagnols ont évalué la fonction sexuelle de
patients institutionnalisés atteints de schizo-
phrénie et l’ont comparée à celle de patients
schizophrènes non institutionnalisés, ainsi qu’à
celle de patients ne présentant pas de maladie
mentale. Leur analyse consistait à comparer
trois groupes de patients : le premier groupe
était constitué de 75 sujets atteints de schizo-
phrénie et/ou de trouble schizo-affectif, admis en
établissement psychiatrique public résidentiel ;
les 41 patients du deuxième groupe présentaient
le même diagnostic mais vivaient indépendam-
ment (hors institution) ; le troisième groupe
(groupe témoin) comptait 152 patients qui ne
présentaient pas de maladie mentale mais qui
avaient consulté dans un centre de soins médi-
caux primaire. Le diagnostic était confirmé par
un entretien neuropsychiatrique, le
Mini-Inter-
national Neuropsychiatric Interview
. Le profil
psychopathologique des patients schizophrènes
était précisé à l’aide des échelles positive et
négative de la
Positive And Negative Syndrome
Scale
(PANSS). La fonction sexuelle était établie
par l’utilisation d’un questionnaire de fonctions
sexuelles (
Change in Sexual Functioning Ques-
tionnaire
[CSFQ]), qui évalue 5 domaines des
fonctions sexuelles : le plaisir, le désir, l’exci-
tation, la capacité de ressentir un orgasme et
une sous-échelle d’activité sexuelle globale.
Les résultats révèlent que l’âge de la première
expérience sexuelle est plus précoce chez les
patients psychiatriques, institutionnalisés ou
non. En outre, par rapport au groupe témoin,
les patients institutionnalisés présentent des
perturbations dans presque tous les domaines
explorés. L’excitation chez les femmes et, pour
les deux sexes, le désir et l’intérêt étaient les
seules variables qui ne différaient pas entre ces
patients et les patients témoins. Toujours par
rapport au groupe témoin, les patients schizo-
phrènes non institutionnalisés ont un déficit
de plaisir et d’orgasme pour les hommes, et un
déficit de plaisir et de désir de fréquence pour
les femmes. La sous-échelle globale indiquait
que 71 % des hommes et 57 % des femmes du
groupe des patients institutionnalisés avaient
expérimenté des dysfonctions sexuelles, versus
10 % des hommes et 50 % des femmes dans
le groupe des patients non institutionnalisés,
alors que ce chiffre n’était que de 13 % pour
les femmes du groupe témoin. La plupart des
aspects de la fonction sexuelle semblent donc
altérés chez les patients schizophrènes, en
particulier chez les patients institutionnalisés.
Toutefois, les dysfonctions sexuelles associées
à des pensées ou à des fantasmes sexuels des
patients psychotiques étaient similaires à celles
des patients sans maladie mentale.
> Acuña MJ, Martín JC, Graciani M, Cruces A, Gotor F. A compa-
rative study of the sexual function of institutionalized patients
with schizophrenia. J Sex Med 2010;7:3414-23.
Perturbations sexuelles
chez des patients schizophrènes
traités par antipsychotiques
Salamanque, Grenade, Burgos, Zamora,
Pampelune (Espagne)
Les perturbations de la fonction sexuelle induites
par les antipsychotiques constituent un effet
indésirable gênant, susceptible d’entraîner
une détresse physiologique et psychique et
d’influencer négativement la compliance au
traitement. Une équipe espagnole a réalisé
une étude multicentrique visant à évaluer la
fréquence des dysfonctionnements sexuels et
leur impact sur l’observance du traitement chez
des patients psychotiques traités avec divers
antipsychotiques. Les 243 hommes et femmes
inclus dans l’étude étaient des sujets de 18 ans
ou plus, sexuellement actifs, pour lesquels avait
été établi un diagnostic de schizophrénie, de
trouble schizophréniforme, de trouble schizo-
affectif ou autre trouble psychotique. La plupart
des patients étaient des hommes (71 %), et le
diagnostic le plus fréquent était la schizophrénie
(71 %). Cette étude multicentrique a été réalisée
dans plusieurs villes espagnoles. Les chercheurs
ont enregistré les données démographiques, le
diagnostic psychiatrique et le type de traitement.
La fonction sexuelle a été évaluée à l’aide d’un
questionnaire spécifique de dysfonction sexuelle
liée aux psychotropes (PRSexDQ-SalSex). Les
résultats montrent que 46 % des patients
présentent une dysfonction sexuelle (50 % des
hommes et 37 % des femmes). Seuls 37 % des
patients souffrant d’une dysfonction sexuelle
l’ont signalée spontanément. Trente-deux pour
cent des patients présentant une dysfonction
sexuelle ont déclaré mal supporter cette pertur-
bation. La gravité de la dysfonction sexuelle et
la difficulté à la supporter étaient plus sévères
chez les hommes que chez les femmes, quel
que soit l’antipsychotique utilisé. Une analyse
plus approfondie, prenant l’olanzapine comme
référence, a révélé que la rispéridone et les
neuroleptiques classiques retard entraînaient
une augmentation significative du risque de
dysfonction sexuelle. En conclusion, les dysfonc-
tionnements sexuels sont très fréquents chez les
patients recevant un traitement à long terme
par antipsychotiques, bien que les personnes ne
rapportent pas spontanément cet effet indési-
rable. Il semble également que les psychiatres
n’interrogent pas souvent les patients sur leur
vie sexuelle et sous-estiment la fréquence de ces
problèmes, qui ont pourtant un impact impor-
tant sur la vie des malades et leur adhérence
au traitement.
>
Montejo AL, Majadas S, Rico-Villademoros F et al. Frequency of
sexual dysfunction in patients with a psychotic disorder receiving
antipsychotics. J Sex Med 2010;7:3404-13.
La douleur chez les pensionnaires
de maison de retraite médicalisée
et ses relations avec les troubles
neuropsychiatriques
Krasnodar (Russie)
La douleur est présente dans de nombreuses
pathologies neuropsychiatriques. La douleur
chronique est également fréquente aux âges
avancés et est ressentie différemment de la
douleur chez les sujets jeunes. L’incidence des
pathologies psychiatriques et neurodégéné-