Éditorial La peau du genre Pr Vincent Descamps (Service de dermatologie, hôpital Bichat, Paris) L es débats récents sur la “théorie du genre” ont permis de bien faire comprendre les différences entre les notions de genre et de sexe. L’identité du genre n’est pas toujours superposable à l’identité sexuelle, comme nous le rappelle Laurent Misery. L’identité sexuelle est de nature biologique. L’identité du genre renvoie à un processus complexe, psychologique, culturel, social et historique. Et la peau dans tout cela ? Elle est assurément le témoin de l’identité sexuelle. Ainsi, elle affiche les caractéristiques définies par la génétique et les hormones. Nous verrons que le poids de l’identité sexuelle influence l’apparition et le développement de certaines maladies dermatologiques. Cela de façon évidente quand ces maladies concernent les attributs sexuels, comme le présentera Sandra Ly pour le lichen scléreux, ou lorsqu’il s’agit de maladies génétiques dont la transmission est liée aux chromosomes sexuels, comme Nadem Soufir nous en fera l’illustration dans un cas clinique. Toutefois, le poids de cette identité sexuelle est parfois moins bien compris, comme pour certaines maladies inflammatoires telles que l’hidradénite suppurée et la folliculite disséquante, qui chacune ont choisi leur camp. Elles pourraient témoigner d’interactions de facteurs génétiques et épigénétiques, dont l’environnement. La peau est aussi l’instrument de l’identité du genre. Rémi Maghia nous en commentera plusieurs représentations artistiques. Elle permet une affirmation du soi, ou de souligner son appartenance à un groupe. Les possibilités de “soins”, de modifications, voire de transformations cutanés sont nombreuses : coiffure, maquillage, épilation, tatouage, piercing, produits de comblement, chirurgie, etc. Celles-ci sont parfois poussées à l’extrême, comme chez les personnes transgenres, comme nous le démontreront Florence Michard et Fabrice Bouscarat, avec parfois des complications majeures, en particulier dermatologiques. D’un simple témoin passif de l’identité sexuelle, la peau devient de plus en plus un acteur au service du genre. II 196 0196_IDE 196 Images en Dermatologie • Vol. VIII • no 6 • novembre-décembre 2015 24/11/2015 15:21:26