n 1 Fiche technique L’

publicité
EFRN
Fiche technique n° 1
Sous la responsabilité de son auteur
Les explorations fonctionnelles
respiratoires nasales (EFRN)
J.F. Papon*
L’
Fiche à découper et à donner au patient
évaluation et la prise en charge
de l’obstruction nasale reposent
sur la corrélation entre la sensation du patient et les résultats de
l’examen clinique ainsi que des examens complémentaires. Toute modification pathologique, d’origine muqueuse ou architecturale, du calibre
des fosses nasales peut retentir sur
l’écoulement aérien. Les EFRN ont
pour but d’évaluer objectivement la
fonction respiratoire nasale. Les différentes techniques mesurent les paramètres physiques de l’écoulement
aérien dans les fosses nasales et permettent ainsi de quantifier objectivement une plainte et/ou une anomalie
clinique. Les EFRN comportent des
tests complémentaires permettant
d’évaluer le contenu, c’est-à-dire
l’écoulement aérien, et de mesurer le
contenant, c’est-à-dire l’architecture
des fosses nasales.
LES MESURES DU CONTENU
La mesure du débit nasal inspiratoire et
expiratoire de pointe (respectivement
DNIP et DNEP) est réalisable par des
systèmes portatifs reposant sur le
modèle du “peak flow”, utilisé par les
pneumologues. Le patient réalise une
inspiration ou une expiration forcée,
brutale, dans un masque facial relié à
un système de mesure sur lequel un curseur se déplace le long d’une échelle
graduée qui donne la valeur du DNIP
ou du DNEP. Les valeurs normales se
situent entre 100 et 300 l/mn (1). En
dessous de 50 l/mn, l’obstruction nasale
est considérée comme sévère. Le principal intérêt du DNIP-DNEP réside dans
l’autosurveillance (obstruction nasale
intermittente, traitement médical, etc.),
mais il paraît également sensible et aisément reproductible dans l’évaluation de
l’obstruction nasale chez un même
✂
* Service ORL, CHU Henri-Mondor, Créteil.
patient (2). En revanche, la comparaison de valeurs de DNIP ou de DNEP
entre les sujets est très délicate, car ce
test fait appel à des régimes de ventilation forcée, modifiant profondément le
régime d’écoulement des fluides (tendance à l’écoulement turbulent).
La rhinomanométrie est une technique codifiée (3), réalisée en ventilation de repos, qui permet de calculer
automatiquement la résistance nasale
à l'écoulement de l’air. Ce calcul est
fondé sur la relation physique liant le
débit à la différence de pression (arbitrairement définie à 1 cm d’eau) entre
l’entrée (c’est-à-dire le vestibule narinaire) et la sortie (c’est-à-dire la
choane). Selon le type d’appareillage,
il faut distinguer la rhinomanométrie
antérieure (RA), la plus utilisée, et la
rhinomanométrie postérieure (RP)
(figure 1). Pour certains, la RP, bien
que plus délicate, serait une méthode
plus précise que la RA pour mesurer
les résistances nasales (4). De plus, la
résistance de chaque fosse nasale
(résistance uninasale) peut être déterminée par RA ou RP, alors que la résistance globale des deux fosses nasales
(résistance binasale) ne peut être
mesurée que par RP. La RA est simple
à utiliser chez l’enfant de plus de cinq
ans et l’adulte, alors que la RP
demande une bonne coopération du
patient, ce qui complique son utilisation avant l’âge de sept ans. Chaque
mesure est généralement faite avant
et après pulvérisation endonasale de
vasoconstricteur, afin d’évaluer la
réversibilité d’une augmentation de la
résistance qui serait le reflet d’une
pathologie muqueuse. Les valeurs normales sont les suivantes : résistance uninasale < 4 cmH2O/l/s (< 3 cmH2O/l/s
après vasoconstricteurs) ; résistance binasale < 2 cmH2O/l/s (< 1,5 cmH2O/l/s
après vasoconstricteurs). La rhinomanométrie est une méthode d’évaluation sensible et spécifique de l’obstruction nasale (5), car les résistances
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 300 - septembre-octobre 2005
Figure 1.
Rhinomanométrie
postérieure.
uninasales sont corrélées à la sensation d’obstruction nasale homolatérale (6), d’une part, et à l’examen clinique des 2,5 premiers centimètres de
la fosse nasale d’autre part (7). En
revanche, il n’existe pas de corrélation entre les mesures binasales et la
sensation d’obstruction nasale bilatérale (5), et la rhinomanométrie est
beaucoup moins sensible pour évaluer les déviations septales moyennes
et surtout postérieures (7). Enfin, la
rhinomanométrie n’est pas réalisable
en cas d’obstruction nasale totale
(absence de débit) ou de perforation
septale.
Le monoxyde d’azote (NO) gazeux est
majoritairement produit par les cellules
épithéliales de la muqueuse des fosses
nasales et des sinus. L’étude du débit de
NO nasal est réalisée en pratique courante dans certains centres et pourrait
avoir des applications futures dans l’évaluation de l’inflammation allergique, où
ce débit s’élève (8), et dans le dépistage
des dyskinésies ciliaires primitives, où il
s’effondre (9).
LES MESURES DU CONTENANT
La rhinométrie acoustique est un test statique permettant d’évaluer la géométrie
des fosses nasales (figure 2). Fondée sur
l’analyse de la réflexion d’une onde
acoustique sur des variations de calibre,
cette méthode donne une courbe de
surface de la cavité nasale en fonction
de la distance par rapport à l’orifice narinaire. À partir de cette courbe, plusieurs
volumes reflétant différents compartiments de la fosse nasale sont calculés.
Cependant, cette technique n’est fiable
que pour étudier les cinq premiers centimètres de la fosse nasale, en arrière
19
EFRN
R
É F É R E N C E S
B I B L I O G R A P H I Q U E S
1. Hooper RG. Forced inspiratory nasal flow-volume
curves: a simple test of nasal airflow. Mayo Clin Proc
2001;76:990-4.
A
mm2
3,0
3,0
2,5
2,5
2,0
2,0
1,5
1,5
1,0
1,0
0,5
0,5
0,0
5
7
9
11
13
15
Fosse nasale gauche
20
B
mm2
0,0
Figure 2.
Rhinométrie
acoustique.
2. Wilson A, Dempsey OJ, Sims EJ, Coutie WJ, Paterson MC, Lipworth BJ. Evaluation of treatment response
in patients with seasonal allergic rhinitis using domiciliary nasal peak inspiratory flow. Clin Exp Allergy
2000;30:833-8.
3. Clement PA. Committee report on standardization
of rhinomanometry. Rhinology 1984;22:151-5.
4. Dvoracek JE, Hillis A, Rossing RG. Comparison of
sequential anterior and posterior rhinomanometry.
J Allergy Clin Immunol 1985;76:577-82.
5. Cole P. Acoustic rhinometry and rhinomanometry.
Rhinol Suppl 2000;16:29-34.
6. Kim CS, Moon BK, Jung DH, Min YG. Correlation
between nasal obstruction symptoms and objective
parameters of acoustic rhinometry and rhinomanometry. Auris Nasus Larynx 1998;25:45-8.
7. Szucs E, Clement PA. Acoustic rhinometry and rhinomanometry in the evaluation of nasal patency of
patients with nasal septal deviation. Am J Rhinol
1998;12:345-52.
8. Howarth PH, Persson CG, Meltzer EO, Jacobson MR,
Durham SR, Silkoff PE. Objective monitoring of nasal
airway inflammation in rhinitis. J Allergy Clin Immunol
2005;115:S414-S441.
9. Corbelli R, Bringolf-Isler B, Amacher A, Sasse B, Spycher M, Hammer J. Nasal nitric oxide measurements to
screen children for primary ciliary dyskinesia. Chest
2004;126:1054-9.
10. Hilberg O, Pedersen OF. Acoustic rhinometry:
influence of paranasal sinuses. J Appl Physiol 1996;
80:1589-94.
11. Gilain L, Coste A, Ricolfi F et al. Nasal cavity geometry measured by acoustic rhinometry and computed
tomography. Arch Otolaryngol Head Neck Surg
1997;123:401-5.
12. Hilberg O, Pedersen OF. Acoustic rhinometry:
recommendations for technical specifications and standard operating procedures. Rhinol Suppl 2000;16:3-17.
13. Brugel-Ribere L, Fodil R, Coste A et al. Segmental
analysis of nasal cavity compliance by acoustic rhinometry. J Appl Physiol 2002;93:304-10.
14. Fodil R, Brugel-Ribere L, Croce Cet al. Inspiratory
flow in the nose: a model coupling flow and vasoerectile tissue distensibility. J Appl Physiol 2005;98:288-95.
Fiche à découper et à donner au patient
Une nouvelle utilisation de cette technique permet une approche dynamique
en appliquant, au moment de la
mesure, des pression négatives à
l’entrée de la fosse nasale, simulant la
dépression créée lors d’une inspiration
(13). Des mesures de la variation d’aire
en fonction de l’intensité de la dépression permettent de calculer la compliance de la paroi externe de la fosse
nasale. Cette méthode semble particulièrement intéressante pour mettre en
évidence les collapsus de valve narinaire
et pourrait permettre de mieux étudier
les structures érectiles de la fosse nasale,
particulièrement “distensibles” et sensibles aux variations de pressions (13).
Ces variations de compliance ont été
récemment corrélées aux phénomènes
de limitation de débit inspiratoire (14).
Les indications des EFRN sont à la fois
diagnostiques, car elles permettent de
quantifier le retentissement d’une
anomalie architecturale et d’évaluer la
part muqueuse dans la plainte du
patient, et thérapeutiques, puisqu’elles
permettent de guider et de surveiller
les traitements. La place des EFRN
dans la pratique courante devrait donc
se développer dans l’avenir. Par
ailleurs, elles permettront probablement aussi d’apporter une forme de
réponse dans le cadre d’une problé■
matique de médecine factuelle.
17
19 cm
5
Fosse nasale droite
7
9
11 13
15
17
19 cm
Effet des vasoconstricteurs
Figure 3. Résultats d’une rhinométrie acoustique chez un patient normal (A) et chez un patient
ayant une déviation antérieure de la cloison vers la gauche (B).
La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 300 - septembre-octobre 2005
✂
desquels la présence des méats sinusiens perturbe la mesure (10). Cette
méthode, rapide et non invasive, peut
être utilisée en pratique courante chez
tous les patients, y compris en cas
d’obstruction nasale sévère. Les
mesures sont faites dans la fosse nasale
droite, puis gauche, avant et après pulvérisation endonasale de vasoconstricteurs, afin d’évaluer la modification de
la géométrie des fosses nasales après
rétraction muqueuse. La présence
d’une perforation septale rend impossible la réalisation de l’examen. Les
valeurs normales reconnues chez les
sujets caucasiens adultes sont les suivantes : aires de la région de la valve
(première déflexion de la courbe)
> 0,5 cm2 et aires de la région du méat
moyen (seconde déflexion de la courbe)
> 1,5 cm2 (figure 3). Plusieurs études
ont montré une bonne corrélation entre
les données de la rhinométrie acoustique, les données de l’examen clinique
(7) et l’imagerie des fosses nasales (11).
Cependant, il n’existe pas de corrélation entre la sensation d’obstruction
nasale bilatérale et les données de la rhinométrie acoustique (5). Jusqu’en 2000,
un des principaux obstacles à la diffusion
de la technique était l’absence de standardisation des méthodes d’examen et
d’interprétation des résultats. Le comité
de la Société européenne de rhinologie
a publié récemment des recommandations qui devraient permettre une utilisation plus large de cette technique et,
surtout, offrir la possibilité de comparer
les travaux de différentes équipes (12).
Téléchargement