Notes de cours sur les ensembles

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Les ensembles
D. Daigle
1. Notions de base
La notation x ∈ A signifie que x est un élément de l’ensemble A (elle se lit “x est
élément de A” ou encore “x appartient à A”). Remarquez que le symbole d’appartenance
∈ est différent de la lettre grecque ε. La théorie des ensembles commence par la
définition de l’égalité des ensembles :
Deux ensembles sont égaux si et seulement si ils ont les mêmes éléments.
Ceci signifie que :
• si deux ensembles ont les mêmes éléments, alors ces ensembles sont égaux
• si deux ensembles sont égaux, alors ils ont les mêmes éléments (forcément,
puisqu’il s’agit en fait du même ensemble).
1.1. Exemple. Supposons que A et B sont des ensembles satisfaisant :
• 2 ∈ A, 3 ∈ A, 4 ∈ A, et 2, 3, 4 sont les seuls éléments de A
• 2 ∈ B, 3 ∈ B, 4 ∈ B, et 2, 3, 4 sont les seuls éléments de B.
Alors la définition d’égalité implique que A = B. Donc il ne peut pas exister plusieurs
ensembles différents dont les éléments seraient 2, 3, 4 et rien d’autre.
1.2. Supposons que a1 , a2 , . . . , an sont des objets quelconques (un objet peut être un
nombre, un ensemble, une fonction, une matrice, etc, donc n’importe quel objet mathématique). La définition d’égalité implique qu’il ne peut pas exister plusieurs ensembles
différents dont les éléments seraient a1 , a2 , . . . , an . Le symbole {a1 , a2 , . . . , an } désigne
l’unique ensemble dont les éléments sont a1 , a2 , . . . , an .
Par exemple si on écrit A = {3, 41} alors 3 ∈ A, 41 ∈ A et A n’a pas d’autres
éléments que 3 et 41.
Prenez note du cas “n = 1” de la notation 1.2 : si a est un objet quelconque, alors
{a} désigne l’ensemble dont l’unique élément est a. Un ensemble qui a exactement 1
élément est appelé un singleton. Par exemple, on a l’ensemble {5}. Remarquons que
l’ensemble {5} et le nombre 5 sont deux objets différents : 5 6= {5}.
Observons que la définition d’égalité implique que {2, 3, 4} = {4, 2, 3} = {2, 3, 2, 4},
puisque ces ensembles ont les mêmes éléments.
Il est possible qu’un ensemble soit un élément d’un autre ensemble. Par exemple,
on a les deux ensembles A = {2, 3} et B = {3, 4, 5, 6}. Puisqu’on a les objets A et
B, on peut ensuite former l’ensemble C = {A, B} = {{2, 3}, {3, 4, 5, 6}}. On a alors :
{2, 3} ∈ {{2, 3}, {3, 4, 5, 6}}.
1.3. Exercice. Soient A = {2, 3} et B = {A}. Alors A a combien d’éléments, et B a
combien d’éléments ? A est-il égal à B ?
1
2
Une autre manière de définir un ensemble
On a vu qu’on peut définir un ensemble en énumérant ses éléments, comme dans les
exemples suivants : A = {3, 7, 342}, B = {2, 3, 4, . . . , 10}, N = {0, 1, 2, 3, . . . }.
L’exemple suivant définit un ensemble C sans énumérer ses éléments :
C = x | x est un nombre entier et x2 − 7x + 10 = 0 .
Cette notation signifie que C est l’ensemble de tous les objets x qui satisfont la condition
“x est un nombre entier et x2 − 7x + 10 = 0”.
Cette méthode pour définir un ensemble peut être formulée comme ceci :
Étant donnée une condition P , la notation
E = x | x satisfait la condition P
dit que E est l’ensemble de tous les objets qui satisfont la condition P .
Remarquez que, d’après la définition d’égalité, il ne peut pas exister plusieurs ensembles
différents dont les éléments seraient “tous les objets qui satisfont P ”. Voici d’autres
exemples d’ensembles définis de cette façon :
1.4. Exemples.
• A = x | x est un nombre premier
(A est l’ensemble de tous les nombres premiers)
• B = x | x est une fonction de N vers N
(B est l’ensemble de toutes les fonctions de N vers N)
• E = x ∈ R | x2 > 3
(E est l’ensemble de tous les nombres réels x satisfaisant x2 > 3)
• E 0 = x | x ∈ R et x2 > 3
(E 0 est l’ensemble de tous les objets x satisfaisant “x ∈ R et x2 > 3”)
Remarquez que E et E 0 ont les mêmes éléments, donc E = E 0 . Remarquez aussi
qu’au lieu de “x”, on peut utiliser d’autres lettres:
E = x ∈ R | x2 > 3 = s ∈ R | s 2 > 3 .
Par exemple, comme B est un ensemble de fonctions, c’est une bonne idée d’utiliser la
lettre “f ”:
B = f | f est une fonction de N vers N .
Les ensembles de nombres
Nous utiliserons les notations suivantes :
• Un nombre entier plus grand ou égal à zéro est appelé un nombre naturel. Le
symbole N désigne l’ensemble des nombres naturels, donc N = {0, 1, 2, 3, 4, . . . }.
Notez bien que 0 ∈ N.
3
• Le symbole Z désigne l’ensemble des entiers (positifs, négatifs, ou nuls), donc
Z = {. . . , −3, −2, −1, 0, 1, 2, 3, . . . }.
• Un nombre rationnel est une fraction a/b où a, b ∈ Z et b 6= 0. L’ensemble de
tous les nombres rationnels est noté Q.
• L’ensemble de tous les nombres réels est noté R.
Rappelons la notation des intervalles.
Si a < b sont des nombres réels alors
• (a, b) = x | x ∈ R ∧ a < x < b • [a, b) = x | x ∈ R ∧ a ≤ x < b • (a, b] = x | x ∈ R ∧ a < x ≤ b • [a, b] = x | x ∈ R ∧ a ≤ x ≤ b .
Si a ∈ R alors
• [a, ∞) = x | x ∈ R ∧ x ≥ a • (a, ∞) = x | x∈R ∧ x>a • (−∞, a] = x | x ∈ R ∧ x ≤ a • (−∞, a) = x | x ∈ R ∧ x < a .
Finalement,
• (−∞, ∞) = R.
L’égalité des ensembles
Regardons encore une fois la définition d’égalité des ensembles. La phrase “A et B
ont les mêmes éléments” peut se traduire par “quel que soit l’objet x, si x appartient
à l’un des ensembles A, B alors il appartient aussi à l’autre”; autrement dit,
“A et B ont les mêmes éléments” ≡ ∀x x ∈ A ⇔ x ∈ B .
On calcule la négation de la formule “A et B ont les mêmes éléments”:
¬ ∀x x ∈ A ⇔ x ∈ B ≡ ∃x ¬ x ∈ A ⇔ x ∈ B
≡ ∃x ¬ (x ∈ A ⇒ x ∈ B) ∧ (x ∈ B ⇒ x ∈ A)
≡ ∃x ¬(x ∈ A ⇒ x ∈ B) ∨ ¬(x ∈ B ⇒ x ∈ A)
≡ ∃x (x ∈ A ∧ x ∈
/ B) ∨ (x ∈ B ∧ x ∈
/ A) ,
donc la phrase “A et B n’ont pas les mêmes éléments” se traduit par
∃x (x ∈ A ∧ x ∈
/ B) ∨ (x ∈
/ A ∧ x ∈ B)
qui se lit en français : “il existe un objet qui est élément d’un des ensembles mais pas
de l’autre”. On prend note de ce qu’on vient de trouver :
1.5. Étant donnés des ensembles A, B, on a :
(a) A = B ⇔ ∀x x ∈ A ⇔ x ∈ B
(b) A 6= B ⇔ ∃x (x ∈ A ∧ x ∈
/ B) ∨ (x ∈
/ A ∧ x ∈ B)
4
L’ensemble vide
1.6. Un ensemble qui
Par exemple,
n’a aucun 2élément est appelé un
ensemble 3vide. les ensembles V = x ∈ R | x = −1 et W = x ∈ Z | x = 4 sont vides.
Montrons qu’il ne peut pas exister plusieurs ensembles vides (donc V = W ci-dessus).
Par contradiction : supposons que A et B sont deux ensembles vides tels que A 6= B.
Alors 1.5(b) implique qu’il existe un objet x qui est élément d’un des ensembles A, B
mais qui n’est pas élément de l’autre. Or, un tel objet ne peut pas exister puisque les
ensembles sont vides.
1.7. En vertu de 1.6, il n’existe qu’un seul ensemble qui n’a aucun élément. On l’appelle
l’ensemble vide et on le désigne par le symbole ∅. Autrement dit, ∅ est l’unique
ensemble qui satisfait ∀x (x ∈
/ ∅).
Remarque. “ { } ” n’est pas une bonne notation pour l’ensemble vide—évitez de
l’employer.
Rappelons que, étant donné un objet a, on peut former le singleton {a}.
1.8. Lemme. Si a et b sont des objets tels que {a} = {b}, alors a = b.
Démonstration. Puisque a ∈ {a}, et puisque {a} et {b} on les mêmes éléments, il
s’ensuit que a ∈ {b}. Puisque a ∈ {b} et puisque le seul élément de {b} est b, on
conclut que a = b.
1.9. Puisqu’on a l’objet ∅, on peut former le singleton {∅}. Notez bien que ∅ 6= {∅},
puisque {∅} n’est pas vide (on a ∅ ∈ {∅}).
Puisqu’on a l’objet {∅}, on peut former le singleton {{∅}}. Montrons que
{∅} =
6 {{∅}}.
Par contradiction : Supposons que {∅} = {{∅}}. Alors le Lemme 1.8 implique que
∅ = {∅}, qui est faux.
1.10. Si E est un ensemble qui possède un nombre fini d’éléments, on dit que E est un
ensemble fini. Si E est un ensemble fini qui possède exactement n éléments, on écrit
|E| = n et on dit que la cardinalité de E est égale à n.
Par exemple, si A = x ∈ R | x2 = 9 alors |A| = 2 (car A = {−3, 3} possède deux
éléments).
Si E possède un nombre infini d’éléments, on dit que E est un ensemble infini. Par
exemple, N, Z, Q, R sont des ensembles infinis.
2. Les sous-ensembles d’un ensemble
2.1. Définition. Soient A et B des ensembles. Si la condition
chaque élément de A est élément de B
est satisfaite, alors on dit que A est un sous-ensemble de B, et on écrit A ⊆ B.
5
Par exemple, les affirmations suivantes sont vraies :
{2, 3, 4} ⊆ {1, 2, 3, 4, 5, 6},
{1, 2, 3, 4, 5, 6} ⊇ {2, 3, 4},
{2, 3, 4} ⊆ {2, 3, 4},
et on a aussi {2, 3, 4} 6⊆ {3, 4}.
Remarque. Les expressions suivantes sont des synonymes : A est un sous-ensemble
de B, A est une partie de B, A est inclus dans B.
2.2. Exercice. Montrez que, quel que soit l’ensemble A, on a ∅ ⊆ A et A ⊆ A.
2.3. Notation. Étant donné un ensemble E quelconque, on définit
℘E = A | A ⊆ E .
On dit que ℘ E est l’ensemble des sous-ensembles de E, ou encore l’ensemble des parties
de E. Notez que l’usage des parenthèses est facultatif : on peut écrire ℘(E) ou ℘ E,
au choix.
2.4. Exemple. Soit E = {1, 2}, alors E a quatre sous-ensembles :
∅, {1}, {2}, {1, 2}
donc ℘ E = ∅, {1}, {2}, {1, 2} . Notez que l’ensemble ℘ E a exactement quatre
éléments : ∅ ∈ ℘ E, {1} ∈ ℘ E, {2} ∈ ℘ E, {1, 2} ∈ ℘ E.
2.5. Exercice. Si E a n éléments, alors ℘ E a 2n éléments. (Ceci est valable quel que
soit n ∈ N.)
2.6. Exemple. ∅ a un seul sous-ensemble (c’est ∅), donc℘ ∅ = {∅}.
{∅} a deux sous-ensembles : ∅ et {∅}. Donc ℘{∅} = ∅, {∅} .
Prenez note de la définition formelle de l’inclusion (ou de sous-ensemble):
2.7. Étant donnés des ensembles A, B, on a :
(a) A ⊆ B ⇔ ∀x x ∈ A ⇒ x ∈ B ⇔ ∀x∈A x ∈ B
(b) A * B ⇔ ∃x x ∈ A ∧ x ∈
/ B ⇔ ∃x∈A x ∈
/B
Pour prouver que A ⊆ B, on doit prouver l’affirmation ∀x∈A (x ∈ B). La technique
pour démontrer une affirmation du type “ ∀x∈A (x satisfait la condition P ) ” a été vue
dans le chapitre sur la logique avec quantificateurs. Voici un exemple.
2
2.8. Exemple.
Soit
A
=
n
|
n
∈
N
√ √
= {0, 1, 4,9, 16, 25, . . . }
et soit B = x ∈ [0, ∞) |
x, x + 1 ∩ Z 6= ∅ .
Voici une preuve que A ⊆ B :
Soit x ∈ A.
Alors il existe n ∈ N tel que x = n2 . On a donc x ∈ [0, ∞) et
√ √
√
√ √
x, x + 1 ∩ Z =
n2 , n2 + 1 ∩ Z = n, n2 + 1 ∩ Z 3 n.
√ √
On a montré que x ∈ [0, ∞) et
x, x + 1 ∩ Z 6= ∅.
Donc x ∈ B.
6
Remarquez que B * A. Pour prouver ceci, il suffit de trouver un élément de B qui
n’est pas élément de A. Par exemple, on a 3 ∈ B et 3 ∈
/ A, donc B * A.
2.9. Proposition. Quels que soient les ensembles A, B, C,
(a) si A ⊆ B et B ⊆ C, alors A ⊆ C
(b) si A ⊆ B et B ⊆ A, alors A = B.
La démonstration de (a) est un exercice. Voici la démonstration de (b) :
Démonstration. Puisque A ⊆ B et B ⊆ A, chaque élément de A est élément de B et
chaque élément de B est élément de A ; donc A et B ont les mêmes éléments, donc
A = B en vertu de la définition de l’égalité des ensembles.
Notez que la réciproque de 2.9(b) est vraie : si A = B alors A ⊆ B et B ⊆ A. Donc
on a
A = B ⇐⇒ (A ⊆ B ∧ B ⊆ A)
Ceci a la conséquence suivante : pour prouver que des ensembles A et B sont égaux,
il suffit de prouver que A ⊆ B et que B ⊆ A.
2.10. Exemple. Soit A = 2z | z ∈ Z (l’ensemble de tous les entiers pairs) et soit
B = 12x + 22y | x, y ∈ Z (l’ensemble des nombres 12x + 22y où x, y ∈ Z prennent
toutes les valeurs possibles). Montrons que A = B.
Montrons d’abord que A ⊆ B :
Soit a ∈ A.
Alors il existe z ∈ Z tel que a = 2z.
Soient x = 2z et y = −z; alors x, y ∈ Z et
12x + 22y = 12(2z) + 22(−z) = 2z = a.
Donc a ∈ B.
Montrons ensuite que B ⊆ A :
Soit b ∈ B.
Alors il existe x, y ∈ Z tels que b = 12x + 22y, donc b est pair.
Donc b ∈ A.
Ainsi, A = B.
3. Réunion, intersection et différence
Si A et B sont des ensembles alors on définit les ensembles :
A∪B = x | x∈A ∨ x∈B
“A union B”
A∩B = x | x∈A ∧ x∈B
“A intersection B”
A\B = x | x∈A ∧ x∈
/B
“A moins B.”
Autre notation : on écrit parfois A − B au lieu de A \ B.
7
3.1. Exemple.
• {1, 2, 3} ∪ {3, 4, 5} = {1, 2, 3, 4, 5}
• {1, 2, 3} ∩ {3, 4, 5} = {3}
• {1, 2, 3} \ {3, 4, 5} = {1, 2}
Propriétés élémentaires des opérations sur les ensembles
Soit U un ensemble quelconque (qu’on appellera l’ensemble universel).
Pour chaque sous-ensemble A de U , on définit le complément de A dans U par :
Ac = U \ A = x ∈ U | x ∈
/A .
La table ci-dessous donne les propriétés principales des opérations ∪, ∩ et c . Tous
les ensembles considérés dans cette table sont des sous-ensembles de U .
Remarquez la similarité avec les propriétés de ∨, ∧ et ¬.
¬V
¬F
P ∨ ¬P
P ∧ ¬P
P ∨F
P ∧V
P ∨V
P ∧F
P ∨P
P ∧P
¬¬P
P ∨Q
P ∧Q
(P ∨ Q) ∨ R
(P ∧ Q) ∧ R
P ∨ (Q ∧ R)
P ∧ (Q ∨ R)
¬(P ∧ Q)
¬(P ∨ Q)
Logique
Nom ou commentaire
≡ F
≡ V
≡ V
≡ F
≡ P
∅ est neutre pour ∪
≡ P
U est neutre pour ∩
≡ V
U est “absorbant” pour ∪
≡ F
∅ est “absorbant” pour ∩
≡ P
Idempotence
≡ P
Idempotence
≡ P
Double complément
≡ Q∨P
Commutativité de ∪
≡ Q∧P
Commutativité de ∩
≡ P ∨ (Q ∨ R)
Associativité de ∪
≡ P ∧ (Q ∧ R)
Associativité de ∩
≡ (P ∨ Q) ∧ (P ∨ R) Distributivité de ∪ sur ∩
≡ (P ∧ Q) ∨ (P ∧ R) Distributivité de ∩ sur ∪
≡ ¬P ∨ ¬Q
Loi de De Morgan
≡ ¬P ∧ ¬Q
Loi de De Morgan
Uc
∅c
A ∪ Ac
A ∩ Ac
A∪∅
A∩U
A∪U
A∩∅
A∪A
A∩A
(Ac )c
A∪B
A∩B
(A ∪ B) ∪ C
(A ∩ B) ∩ C
A ∪ (B ∩ C)
A ∩ (B ∪ C)
(A ∩ B)c
(A ∪ B)c
Ensembles
= ∅
= U
= U
= ∅
= A
= A
= U
= ∅
= A
= A
= A
= B∪A
= B∩A
= A ∪ (B ∪ C)
= A ∩ (B ∩ C)
= (A ∪ B) ∩ (A ∪ C)
= (A ∩ B) ∪ (A ∩ C)
= Ac ∪ B c
= Ac ∩ B c
c
Pour le complément de A dans U , on peut
aussi écrire A (au lieu de A ). Avec cette
notation, on a A = U \ A = x ∈ U | x ∈
/ A et :
A ∪ B = A ∩ B,
A ∩ B = A ∪ B,
etc.
8
Familles d’ensembles
Si Ai est un ensemble pour chaque i ∈ I, on dit que (Ai )i∈I est une famille d’ensembles
indexée par I.
3.2. Exemples.
(1) Soit I = {1, 2, 3}, et soient A1 = {4, 5, 6}, A2 = N, A3 = ∅. Alors Ai est un ensemble
pour chaque i ∈ I, donc (Ai )i∈I est une famille d’ensembles indexée par I = {1, 2, 3}.
On peut aussi écrire
(Ai )i∈I = (A1 , A2 , A3 ) = ({4, 5, 6}, N, ∅).
Remarque : la famille (Ai )i∈I = (A1 , A2 , A3 ) et l’ensemble {A1 , A2 , A3 } sont deux
objets différents. On a A1 ∈ {A1 , A2 , A3 } mais A1 ∈
/ (Ai )i∈I .
(2) Pour chaque i ∈ N, on définit l’ensemble Ei = [i, i2 + 1). Alors (Ei )i∈N est une famille
d’ensembles indexée par N. On peut écrire
(Ei )i∈N = E0 , E1 , E2 , E3 , . . . = [0, 1), [1, 2), [2, 5), [3, 10), . . . .
p
(3) Pour chaque s ∈ R, on définit l’ensemble Gs = [ |s|, s4 + 1). Alors (Gs )s∈R est une
famille d’ensembles indexée par R.
3.3. Définition. Soit (Ai )i∈I une famille d’ensembles.
S
(1) On définit i∈I Ai = x | ∃i∈I(x ∈ Ai ) .
T
(2) Si I 6= ∅, on définit i∈I Ai = x | ∀i∈I (x ∈ Ai ) .
On a donc:
x∈
[
Ai ⇔ ∃i∈I (x ∈ Ai )
i∈I
x∈
\
Ai ⇔ ∀i∈I (x ∈ Ai ).
i∈I
Remarquez aussi que si I = {1, . . . , n} alors
[
i∈I
Ai =
n
[
Ai = A1 ∪ A2 ∪ · · · ∪ An
i=1
et
\
i∈I
Ai =
n
\
Ai = A1 ∪ A2 ∩ · · · ∩ An .
i=1
3.4. Exemple. On considère la famille des intervalles (− n1 , n1 ) avec n ∈ N+ = {1, 2, 3, . . . }.
D’abord l’union:
[
(− n1 , n1 ) = (−1, 1) ∪ (− 21 , 12 ) ∪ (− 13 , 13 ) ∪ . . . = (−1, 1).
n∈N+
L’intersection est plus difficile:
\
(− n1 , n1 ) = (−1, 1) ∩ (− 21 , 12 ) ∩ (− 31 , 13 ) ∩ . . . = ?
n∈N+
x∈
Donc
T
\
n∈N+
1 1
n∈N+ (− n , n )
(− n1 , n1 ) ⇔ ∀n∈N+ x ∈ (− n1 , n1 ) ⇔ ∀n∈N+ −
1
n
<x<
est l’ensemble de tous les nombres réels x qui satisfont
∀n∈N+ − n1 < x < n1 .
1
n
9
Le seul nombre réel x qui satisfait cette condition est x = 0. Donc:
\
(− n1 , n1 ) = {0}.
n∈N+
Remarque. Considérons une famille d’ensembles (Ai )i∈I telle que I = ∅. (On dit alors que
(Ai )i∈I est une famille vide.)
S
(1) La définition d’union implique que i∈I Ai = ∅.
S
En effet, supposons (par contradiction) que i∈I Ai possède au moins un élément x.
Alors ∃i∈I (x ∈ Ai ), mais ceci est impossible puisqu’il n’existe aucun élément i de
I = ∅.
T
(2) L’intersection i∈I Ai n’est pas définie (relisez la définition 3.3(2)). La raison est
T
que tout objet
x satisfait ∀i∈I(x ∈ Ai ). Donc, si on voulait définir i∈I Ai par
T
x | ∀i∈I (x ∈ Ai ) , on serait forcés de conclure que tous les objets de
i∈I Ai =
T
l’univers sont des éléments de l’ensemble i∈I Ai . C’est pour éviter cette situation
T
qu’on s’abstient de définir i∈I Ai quand I = ∅.
3.5. Exercice. Soit (Bi )i∈I une famille d’ensembles, où I 6= ∅.
S
T
(a) Montrez que i∈I Bi ⊆ i∈I Bi .
T
S
Montrez aussi que si j ∈ I alors i∈I Bi ⊆ Bj ⊆ i∈I Bi .
T
(b) Montrez que si A est un ensemble tel que ∀i∈I (A ⊆ Bi ), alors A ⊆ i∈I Bi .
S
(c) Montrez que si C est un ensemble tel que ∀i∈I (Bi ⊆ C), alors i∈I Bi ⊆ C.
3.6. Exercice. Soient A un ensemble et (Bi )i∈I une famille d’ensembles, où I 6= ∅. Montrez:
[ [
\ \
Bi = (A ∩ Bi ) et A ∪
Bi = (A ∪ Bi ).
A∩
i∈I
i∈I
i∈I
i∈I
Les ensembles d’ensembles
3.7. Définition. Supposons que A est un ensemble dont les éléments sont des ensembles.
(1) On définit ∪A = x | ∃E∈A(x ∈ E) .
(2) Si A 6= ∅, on définit ∩A = x | ∀E∈A (x ∈ E) .
T
L’intersection ∩A n’est pas définie lorsque A = ∅, pour la même raison que i∈I Ai
n’est pas définie lorsque I = ∅.
On a donc:
x ∈ ∪A ⇔ ∃E∈A (x ∈ E)
x ∈ ∩A ⇔ ∀E∈A (x ∈ E).
Par exemple, si A = {1, 2, 3, 4}, {2, 3, 5, }, {3, 4, 5} alors
∪A = {1, 2, 3, 4} ∪ {2, 3, 5, } ∪ {3, 4, 5} = {1, 2, 3, 4, 5}
∩A = {1, 2, 3, 4} ∩ {2, 3, 5, } ∩ {3, 4, 5} = {3}.
3.8. Exercice. Soit B 6= ∅ un ensemble d’ensembles.
(a) Montrez que ∩B ⊆ ∪B.
Montrez aussi que si X est un élément quelconque de B, alors ∩B ⊆ X ⊆ ∪B.
10
(b) Montrez que si A est un ensemble tel que ∀E∈B (A ⊆ E), alors A ⊆ ∩B.
(c) Montrez que si C est un ensemble tel que ∀E∈B (E ⊆ C), alors ∪B ⊆ C.
3.9. Exercice. Soit A = [s, 1s ] | s ∈ (0, 1) . Montrez que ∪A = (0, ∞) et ∩A = {1}.
3.10. Exercice. On dit qu’une partie E de R est fermée sous l’addition si elle satisfait
∀x,y∈E x + y ∈ E.
Soit F = E ∈ ℘ R | E est fermée sous l’addition , l’ensemble de toutes les parties de R
fermées sous l’addition. Démontrez les affirmations suivantes.
(a) ∅, N et R sont trois éléments de F; F est un ensemble infini.
(i) Si E, F ∈ F alors E ∩ F ∈ F.
T
(ii) Si Ei ∈ F pour chaque i ∈ I (où I 6= ∅) alors i∈I Ei ∈ F.
(iii) Si A est une partie non vide de F, alors ∩A est un élément de F.
(c) Étant donnée une partie S 6= ∅ de R, on définit S = ∩A, où A = E ∈ F | S ⊆ E .
Montrez:
(i) A 6= ∅ (donc l’intersection ∩A est définie).
(ii) S ⊆ S et S ∈ F.
(iii) Si E est un élément de F tel que S ⊆ E, alors S ⊆ E.
(b)
(d) Étant donnée une partie S 6= ∅ de R, soit S ∗ l’ensemble des sommes finies d’éléments
de S. Autrement dit, un nombre réel x est élément de S ∗ si et seulement si il existe
s1 , . . . , sn ∈ S (où n ≥ 1) tels que x = s1 + · · · + sn . (Vérifiez que {3, 5}∗ =
{3, 5, 6, 8, 9, 10, 11, 12, 13, . . . }, pour voir si vous comprenez la définition de S ∗ .)
(i) Montrez que S ∗ ∈ F et S ⊆ S ∗ ; déduisez de (c-ii) que S ⊆ S ∗ .
(ii) Montrez que si E ∈ F satisfait S ⊆ E, alors S ∗ ⊆ E; déduisez que S ∗ ⊆ S.
(iii) Concluez que S = S ∗ .
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