Cancer du rein à cellules chromophobes, une entité à part entière. A

publicité
ARTICLE
ORIGINAL
Progrès en Urologie (2001), 11, 209-216
Cancer du rein à cellules chromophobes, une entité à part entière.
A propos d’une série de 35 cas
Michaël PEYROMAURE
(1) Service
(1), Nicolas THIOUNN (1), Annick VIEILLEFOND (2), Gonzagues de PINIEUX
Marc ZERBIB (1), Thierry FLAM (1), Bernard DEBRÉ (1)
d’Urologie,
(2) Service
(2),
d’Anatomo-Pathologie, Hôpital Cochin, Paris, France
RESUME
Objectif: Décrire les caractéristiques cliniques, histologiques et évolutives du cancer
du rein à cellules chromophobes.
Patients et Méthodes: Les dossiers de 35 patients opérés d'un cancer du rein à cellules
chromophobes ont été revus. Il s'agissait de 22 hommes et 13 femmes, d'un âge
moyen de 58±13,8 ans. Les circonstances diagnostiques et l'aspect histologique de
cette tumeur ont été analysés. L'évolution des patients a été étudiée avec un suivi
moyen de 70±20,2 mois.
Résultats: Le diagnostic était fortuit dans 66% des cas. L'aspect macroscopique des
tumeurs était caractéristique : homogène et de couleur blanche ou beige . En microscopie optique, les tumeurs se composaient de cellules chromophobes (claires) et de
cellules éosinophiles en proportions variables. Elles se répartissaient en 15 tumeurs à
prédominance éosinophile (43%), 9 tumeurs à prédominance claire (26%) et 11
tumeurs à nombre égal de cellules claires et éosinophiles (31%). Les noyaux étaient
irréguliers et incisurés. La coloration de Hale était positive dans tous les cas. La
majorité des tumeurs étaient limitées au rein ( T1: 65% et T2: 29%) et de bas grade
nucléaire (91% de grades 1 et 2). Aucun patient n'a eu de récidive locale ou de métastase lors du suivi. Le taux global de survie à 5 ans était de 92%. Aucun décès lié à la
maladie n'a été rapporté.
Conclusion: Le diagnostic histologique du cancer chromophobe est devenu facile et
peut être évoqué dés l'examen macroscopique de la pièce opératoire. Cette tumeur
semble être de bon pronostic parce qu'elle est le plus souvent limitée au rein et de bas
grade nucléaire.
Mots clés : Cancer du rein, chromophobe, stade TNM, grade de Führman, pronostic.
Le cancer du rein a une incidence croissante qui s'élève
en France à environ 5000 nouveaux cas par an [6, 16].
Son type histologique le plus fréquent est le carcinome
à cellules claires, ou carcinome à cellules conventionnelles, qui représente 65 à 80% des tumeurs rénales de
l'adulte [16, 25]. Le pronostic du cancer du rein est lié
au stade tumoral et au grade nucléaire [9, 10]. Depuis
1985, un nouveau type de tumeur rénale a été individualisé : le carcinome à cellules chromophobes, ou cancer chromophobe du rein. Ce type histologique n'est pas
rare puisqu'il est retrouvé sur 3,6 à 10,4% des pièces de
néphrectomie pour cancer [2, 23]. Une malignité réduite a été attribuée à cette tumeur [7]. Nous avons revu 35
cas consécutifs de cancer chromophobe du rein dans le
but d'étudier ses caractéristiques cliniques, radiologiques, anatomo-pathologiques et évolutives.
MATERIEL ET METHODES
Les dossiers de 35 patients opérés consécutivement d'un
cancer du rein à cellules chromophobes entre janvier
1989 et novembre 1998 ont été revus. Ces dossiers
appartenaient à une série consécutive de 440 néphrectomies pour tumeur réalisées durant la même période. Les
patients se répartissaient en 22 hommes et 13 femmes.
Leur âge au moment du diagnostic était de 58 ± 13,8
ans (extrêmes: 33-82). Le traitement a consisté en une
Manuscrit reçu : août 2000, accepté : décembre 2000.
Adresse pour correspondance : Pr. N. Thiounn, Service d’Urologie, Hôpital
Cochin, 27, rue du Faubourg Saint Jacques, 75014 Paris.
e-mail : nicolas.thiounn@cch-ap-hop-paris-fr
209
M. Peyromaure et coll., Progrès en Urologie (2001), 11, 209-216
néphrectomie élargie dans 33 cas (dont 7 avec surrénalectomie) et une néphrectomie partielle dans 2 cas. Les
2 néphrectomies partielles ont été réalisées pour des
tumeurs polaires : une de 5 cm classée oncocytome en
examen extemporané et l'autre de 4 cm classée cancer
chromophobe en extemporané.
Tous les patients ont eu un examen tomodensitométrique abdominal sans puis avec injection de produit de
contraste. Les tumeurs étaient hétérogènes et de densité proche de celle du reste du parenchyme rénal. Elles
prenaient le contraste, à l'exception d'un cas où le rein
était entièrement envahi. Le rein droit était touché dans
19 cas et le rein gauche dans 16 cas. Quinze tumeurs
étaient de siège médio-rénal. Les autres tumeurs étaient
situées aux pôles (3 polaires supérieures et 6 polaires
inférieures), dans la convexité (1 cas) ou dans le hile
rénal (9 cas). Une tumeur volumineuse occupait la totalité du parenchyme rénal.
Toutes les pièces histologiques ont été relues secondairement par le même anatomo-pathologiste. Chaque
pièce a été ét udiée en colorati on standard
(Hématoxyline-éosine-safran) et au fer colloïdal marqué (coloration de Hale). Le diagnostic de cancer chromophobe a été retenu sur les critères morphologiques
des cellules claires et des cellules éosinophiles et
confirmé par la coloration de Hale [11, 22].
Trois cancers avaient l'aspect radiaire d'un oncocytome.
Le stade tumoral était attribué selon la dernière classification TNM proposée en 1997 par l'Union
Internationale Contre le Cancer. Le grade nucléaire
était attribué selon la méthode de Führman. Les
tumeurs ont été classées en 3 types cellulaires : le type
clair (contenant plus de 75% de cellules claires), le type
éosinophile (contenant plus de 75% de cellules éosinophiles) et le type à cellularité mixte.
La taille moyenne des tumeurs était de 6±2,3 cm.
Douze cancers avaient une taille inférieure à 4 cm, 12
cancers avaient une taille comprise entre 4 et 7 cm, et
11 cancers avaient une taille supérieure ou égale à 7
cm.
Huit patients ont eu une Imagerie par Résonance
Magnétique. Celle-ci révélait un hypersignal en T2
dans tous les cas et concluait à une lésion maligne, sans
pouvoir orienter le diagnostic histologique.
Tous les patients ont été revus régulièrement avec une
échographie ou tomodensitométrie abdominale et une
radiographie pulmonaire. Cinq patients ont été perdus
de vue. Parmi eux, 1 patient n'a jamais été revu et les 4
autres ont été perdus de vue après une surveillance
moyenne de 9 mois. La durée moyenne du suivi était de
70±20,2 mois (extrêmes: 13-121). Le taux de survie a
été calculé par la méthode statistique de Kaplan-Meier.
Bilan d'extension
Une radiographie pulmonaire a été réalisée dans tous
les cas, une échographie hépatique dans 26 cas, et
une scinti graphie osseuse dans 1 cas. Le bilan d'extension était négatif dans tous les cas. Aucun patient
n'avait de métastase synchrone, ganglionnaire ou à
distance.
RESULTATS
Au terme du bilan, les tumeurs se répartissaient en :
Fréquence
- 12 pT1a N0M0
Le cancer chromophobe représentait 8% des 440
tumeurs rénales opérées durant la période de l'étude.
- 11 pT1b N0M0
Circonstances diagnostiques
-2
La découverte du cancer était fortuite (échographie ou
examen tomodensitométrique) dans 66% des cas. Chez
les patients symptomatiques, les signes révélateurs
étaient : une hématurie dans 6 cas, une lombalgie dans
4 cas et une masse du flanc dans 4 cas (dont une qui
s'accompagnait d'une varicocèle). Aucun cas d'altération de l'état général ni de fièvre paranéoplasique n'était
rapporté. Aucun patient n'avait d'anémie, d'hypercalcémie ni de polyglobulie.
Etude macroscopique
Aspects radiologiques
Toutes les tumeurs étaient bien circonscrites, constituées de travées et/ou de massifs cellulaires séparés
par un stroma fin. Une capsule péri-tumorale était présente dans 25 cas (dont 5 cas où la capsule était partielle).
- 10 pT2 N0M0
pT3a N0M0 (Figure 1)
La couleur était blanc-nacré ("ivoire") dans 19 cas,
beige claire ("chamois") dans 15 cas et brune foncée
dans 1 cas (Figure 2). Seize tumeurs contenaient des
zones nécrotiques et 9 contenaient des zones hémorragiques.
Architecture générale
En échographie, les tumeurs correspondaient à une
masse unique et hyperéchogène. Aucune étude
Doppler n'a été réalisée.
210
M. Peyromaure et coll., Progrès en Urologie (2001), 11, 209-216
Figure 1. Répartition des stades tumoraux dans notre série (en
%).
Figure 2. Cancer chromophobe du rein : limité, homogène, de
couleur blanc ivoire (aspect macroscopique).
Figure 3. Cancer chromophobe du rein - variante mixte :
coexistence de cellules claires et éosinophiles (HES x 40).
Figure 4. Cancer chromophobe du rein : coloration de Hale :
positivité cytoplasmique diffuse (Hale x 40).
Figure 5. Cancer chromophobe du rein : Microvésicules intra cytoplasmiques (ME).
211
M. Peyromaure et coll., Progrès en Urologie (2001), 11, 209-216
Extension tumorale
Suivi
Deux tumeurs s'accompagnaient de micro-emboles
vasculaires dans le hile, sans extension aux gros vaisseaux. Il n'existait aucun cas de thrombus de la veine
rénale ou de la veine cave. La graisse péri-rénale était
envahie dans 2 cas (tumeurs pT3a).
Cinq patients ont été perdus de vue. Deux patients sont
décédés d'une cause non liée au cancer (cardio-vasculaire) plus de 2 ans après l'intervention.
Aucun patient n'a eu de récidive dans la loge de
néphrectomie. Aucun patient n'a eu de métastase au
cours de la surveillance.
Etude des cytoplasmes
Le taux global de survie à 5 ans était de 92%. Le taux
de décès liés à la maladie était de 0%.
Une coexistence de cellules claires et éosinophiles était
rapportée dans 30 cas (86%). Les cellules claires
étaient de grande taille, à cytoplasme transparent souvent réticulé. Les cellules éosinophiles étaient plus
petites et parfois granuleuses (Figure 3). Les types cellulaires se répartissaient en 15 tumeurs éosinophiles
(43%), 9 tumeurs claires (26%) et 11 tumeurs mixtes
(31%). Une microvacuolisation des cytoplasmes était
présente dans 30 cas. Une hypervisibilité membranaire
était notée dans 25 cas. Il existait de nombreuses mitochondries, en particulier dans les cellules éosinophiles.
En raison du faible nombre de décès, la survie n'a pu
être corrélée ni au stade tumoral, ni au grade nucléaire,
ni au type cellulaire.
DISCUSSION
Décrit en microscopie optique couplée à la microscopie
électronique par l'équipe de T HOENES en 1985 [20], le
cancer rénal à cellules chromophobes est aujourd'hui
bien connu et considéré comme une entité à part au
sein des tumeurs du rein [25].
Etude des noyaux
Les noyaux étaient irréguliers et incisurés dans la majorité des cas. Concernant le grade nucléaire de Fürhman,
il y avait 2 tumeurs de grade 1, trente tumeurs de grade
2 et 3 tumeurs de grade 3.
Caractérisé par la coexistence de cellules claires et
éosinophiles en proportions variables, il se présente
sous différentes formes et peut poser un problème de
diagnostic différentiel avec le carcinome à cellules
conventionnelles ou l'oncocytome. L'aspect macroscopique homogène et limité, et la couleur "ivoire" ou
"chamois" sont très évocateurs. En cas de doute, la
coloration de Hale permet d'affirmer le diagnostic puisqu'elle marque de manière caractéristique le cytoplasme des cellules, qu'elles soient claires ou éosinophiles
[21, 22]. Elle est positive dans 100% des cas dans
toutes les séries étudiées. Elle marque en bleu tous les
cytoplasmes de façon diffuse. Elle permet de différencier le cancer chromophobe de l'oncocytome dont les
cellules ne sont que très faiblement marquées et uniquement par endroits [5], et du carcinome à cellules
conventionnelles qui n'est pas marqué. En microscopie
électronique, les cellules possèdent de nombreuses
microvésicules intracytoplasmiques spécifiques [5, 11,
19] dont l'origine, discutée, est probablement mitochondriale [4, 20]. L'étude en microscopie électronique
n'est plus systématique dans la mesure où elle est plus
longue et plus coûteuse que la coloration de Hale.
Le grade nucléaire n'était corrélé ni au stade tumoral
(test de Chi-deux : p=0,20), ni au type cellulaire
(p=0,92).
L'étude de la ploïdie révélait 23 tumeurs aneuploïdes et
12 tumeurs diploïdes.
Coloration de Hale
La coloration de Hale était toujours positive, avec marquage diffus et microvacuolaire du cytoplasme. Les
pourtours cellulaires étaient rehaussés (Figure 4).
Microscopie électronique
Une étude ulrastructurale en microscopie électronique
a été réalisée pour 2 tumeurs de type éosinophile. Dans
les 2 cas, elle a mis en évidence une richesse cytoplasmique en microvésicules et en mitochondries. Les
microvésicules étaient constituées d'une membrane
simple et leur contenu était vide aux électrons (Figure
5).
La fréquence du cancer chromophobe au sein des
tumeurs rénales varie de 3,6% [23] à 10,4% [2] selon
les séries.
Multifocalité
Les circonstances de découverte de cette tumeur et ses
aspects radiologiques sont dénués de spécificité [7, 17,
21]. Les formes asymptomatiques de découverte fortuite sont fréquentes, représentant 66% des cas de notre
étude.
Deux patients avaient une seconde tumeur sur le rein
retiré. Le premier avait un 2ème cancer chromophobe
de 0,3 cm situé à plusieurs centimètres du principal (qui
mesurait 4 cm). Le second avait un carcinome à cellules conventionnelles de 0,6 cm à distance du cancer
chromophobe (qui mesurait 5 cm).
Les formes bilatérales sont exceptionnelles et nous
212
M. Peyromaure et coll., Progrès en Urologie (2001), 11, 209-216
avons rapporté, à notre connaissance, le premier cas de
cancer chromophobe bifocal. Les cancers chromophobes diffèrent sur ce point des carcinomes à cellules
conventionnelles qui sont multifocaux dans 14% des
cas [6] et bilatéraux dans 1,4 à 5% des cas [16].
respond toujours à des tumeurs qui dépassaient la capsule au moment du diagnostic.
Il semblerait donc licite, dans les cas où un examen
extemporané mettrait en évidence une tumeur chromophobe, et en l'absence d'impossibilité technique, de
limiter l'intervention à une néphrectomie partielle.
Cependant, l'existence de formes tumorales mixtes
associant cancer chromophobe et carcinome à cellules
claires [3, 23] doit inciter à la prudence. En effet, la
méconnaissance d'un contingent de cancer à cellules
conventionnelles lors de l'examen extemporané exposerait au risque de récidive locale ou de métastase. De
plus, plusieurs cas de formes sarcomatoïdes ayant un
fort potentiel évolutif ont été décrits [1, 12 ,13, 14]. Ces
formes de cancer chromophobe, volontiers métastatiques [1] et sources de récidives précoces [1, 13], ont
un pronostic très péjoratif.
La particularité majeure du cancer chromophobe est
la rareté des formes métastatiques. Seul s 2 cas d'atteinte ganglionnaire synchrone ont été rapportés dans
la littérature [3, 21]. De même, un seul cas de métastase synchrone a été décrit : il s'agissait d'un volumineux cancer chromophobe à contingent sarcomateux associé à une localisation pulmonaire [1]. Il
sembl e donc que le cancer chromophobe soit moins
souvent diagnostiqué à un st ade métastatique que les
autres types de cancer du rein, qui s'accompagnent,
tous types confondus, de métastase(s) synchrone(s)
dans 11 à 28% des cas [8].
Le cancer chromophobe est le plus souvent limité au
rein (stades pT1 et pT2) et de bas grade nucléaire. Le
taux de cancers limités au rein est, tous types histologiques confondus, d'environ 60% [6, 9]. Or, la majorité
des auteurs rapportent pour les cancers chromophobes
un taux supérieur à 80% [2, 5, 7, 17]. Seul T HOENES a
rapporté un taux plus faible, égal à 53% [21]. Aucun
cas de thrombus cave n'a été décrit pour cette tumeur,
bien que 2 cancers dépassant le fascia de Gerota aient
été rapportées [21, 23]. Le taux de tumeurs de bas grade
nucléaire (grades 1 et 2) varie, dans les différentes
séries publiées, de 64% (18) à 100% [7].
CONCLUSION
Nos résultats sont comparables à ceux des séries déjà
publiées. Le carcinome rénal à cellules chromophobes
se caractérise par un taux élevé de tumeurs de stade
limité et de bas grade nucléaire. Les formes métastatiques ou récidivantes sont exceptionnelles. Cette
tumeur semble avoir un un taux de survie à 5 ans supérieur aux autres cancers du rein, sauf lorsqu'elle possède un contingent sarcomatoïde. Une étude prospective
comparant cancers chromophobes et carcinomes à cellules conventionnelles de stades et de grades identiques
permettrait de savoir si le type histologique "chromophobe" constitue un facteur pronostique indépendant.
Le stade tumoral et le grade nucléaire étant les deux principaux facteurs pronostiques indépendants du cancer du
rein [8, 9, 10], ces constatations pourraient expliquer le
faible taux de récidives locales et de métastases lors de
l'évolution. Seuls 4 cas de récidive locale de cancer chromophobe ont été rapportés dans la littérature [1, 7, 13].
Deux d'entre eux concernaient des tumeurs initiales sarcomatoïdes. De même, peu de métastases de cancer chromophobes ont été décrites. CROTTY a rapporté 2 cas de
métastases osseuses survenant sur un cancer limité au
rein et un cancer T3 [7]. K IKUCHI a rapporté 1 cas de
métastases hépatiques multiples traitées par chimioembolisation puis chirurgie [15]. Enfin, RENSHAW a rapporté 7 cas de métastases, dont 5 hépatiques et 2 pulmonaires [18]. Les 2 métastases pulmonaires étaient d'origine discutable car elles correspondaient à des tumeurs
mixtes associant un cancer papillaire.
Remerciements : au Dr. Sharon Deslignères sans qui
ce travail n'aurait pu être réalisé.
REFERENCES
1. AKHTAR M., KFOURY H., KARDAR A., LINJAWI T., KOVACS
G. Sarcomatoïd chromophobe cell carcinoma of the kidney. J. Urol.
Pathol., 1996, 4, 155-166.
2. AKHTAR M., LINJAWI T., MAC CLINTOCK J., ASHRAF ALI M.
Chromophobe cell carcinoma of the kidney : a clinicopathologic
study of 21 cases. Am. Surg. Pathol., 1995, 19, 1245-1256.
3. BILLIS A., CARVALHO R.B., MAGRINI E., MATTOS A.C.,
NEGRETTI F., NIERO V.R. & coll. Chromophobe renal cell carcinoma : clinicopathological study of 7 cases. Ultrastruct. Pathol.,
1998, 22, 19-26.
Le taux de survie à 5 ans des cancers rénaux, tous types
histologiques confondus, est d'environ 60% [8]. Celui
du cancer chromophobe paraît meilleur, comme en
témoigne notre série. Les taux de survie à 5 ans rapportés par ONISHI et THOENES sont respectivement de
82% [17] et 92% [21].
4. BONSIB S.M., LAGER D.J. Chromophobe cell carcinoma : analysis
of five cases. Am. J. Surg. Pathol., 1990, 14, 260-267.
5. COCHAND-PRIOLLET B., MOLINIE V., BOUGARAN J., BOUVIER R., DAUGE-GEFFROY M.C., DESLIGNIERES S & coll.
Renal chromophobe cell carcinoma and oncocytoma. A comparative morphologic, histochemical, and immunohistochemical study of
124 cases. Arch. Pathol. Lab. Med., 1997, 121, 1081-1086.
Le taux de décès lié au cancer chromophobe est nul
dans la majorité des séries publiées. Dans les autres, il
est toujours faible, variant de 2% [7] à 4% [21], et cor213
M. Peyromaure et coll., Progrès en Urologie (2001), 11, 209-216
6. COULANGE C., BRETEAU D. Enquête épidémiologique nationale
annuelle sur les tumeurs du rein (avril 1993-mars 1994 : 970
patients). Prog. Urol., 1995, 5, 529-539.
23. USUBUTUN A., UYGUR M.C., AYHAN A., OZEN H., REMZI D.
Six chromophobe cell carcinomas and one mixed renal cell carcinoma with chromophobe cell features : clinical and pathological implications. Brit. J. Urol., 1996, 78, 183-186.
7. CROTTY T.B., FARROW G.M., LIEBER M.M. Chromophobe cell
carcinoma : clinicopathological features of 50 cases. J. Urol., 1995,
154, 964-967.
24. VIEILLEFOND A., PARADIS V., GROS P., BOUVIER R., CROUE
A., SAINT-ANDRE J.P. Est-il utile d'isoler parmi les carcinomes du
rein une variante à cellules chromophobes? Arch. Anat. Cytol. Path.,
1992, 40, 250-254.
8. FATH C., JACQMIN D. Cancer du rein de l'adulte. Anatomie pathologique, diagnostic, évolution, principes de traitement. Rev. Prat.,
1996, 46, 2025-2031.
25. WEISS L.M., GELB A.B., JEFFREY-MEDEIROS L. Adult renal
epithelial neoplasms. Am. Clin. Pathol., 1995, 103, 624-635.
9. FUHRMAN S.A., LASKY L.C., LIMAS C. Pronostic significance
of morphologic parameters in renal cell carcinoma. Am. J. Surg.
Pathol., 1982, 6, 655-662.
Commentaire d’E ric Lech evallier, S ervic e d’Urologie,
Hôpital Salvator, Marseille.
10. GELB A.B. Renal cell carcinoma. Current pronostic factors. Cancer,
1997, 80, 981-986.
Il s’agit d’une série relativement conséquente qui permet de
faire le point actuel sur le cancer à cellules chromophobes du
rein.
11. GERHARZ C.D., MOLL R., STORKEL S., RAMP U., THOENES
W., GABBERT H.E. Ultrastructural appearance and cytoskeletal
architecture of the clear, chromophilic, and chromophobe types of
human renal cell carcinoma in vitro. Am. J. Pathol., 1993, 142, 851859.
La première publication concernant le cancer du rein à cellules
chromophobes a été celle de W. Thoenes, de Mayence, en 1985,
à partir d’une série de 12 cas parmi 500 cancers du rein [13].
Puis en 1998, il rapportait une série de 32 cas parmi 697 cancers
du rein de l’adulte (4%) [14]. Thoenes donnait dans ces publications les particularités pathologiques de ce type de cancer, par
rapport au cancer à cellules claires, et encore valides actuellement (tableau). Le terme de chromophobe a été utilisé par opposition au cancer classique de l’époque dit chromophile [14]. En
microscopie optique à l’hématoxylline éosine, les cellules chromophobes sont peu opaques avec un cytoplasme finement réticulaire. Mais la caractéristique principale est la forte coloration
du cytoplasme par le fer colloïdal ou coloration de Hale, par
opposition au cancer à cellules claires [1, 11, 14]. Il existe 2
sous-types de cancer à cellules chromophobes, le type clair
(70%) et le type éosinophile, en fonction de l’aspect des cellules
en microscopie optique [14]. Par ailleurs, certains auteurs ont
identifié 2 types de cancers chromophobes éosinophiles : une
forme trabéculo-vésiculaire e t une forme oncocytique [5].
L’intérê t pronostique de cette sous-classification n’est pas
connue. Depuis les premières publications de Thoenes, il faut
reconnaître que peu de progrès dans la connaissance du cancer
du rein à cellules chromophobes a été réalisé. Déjà pour
Thoenes, cette forme de cancer paraissait de meilleur pronostic
que le cancer classique. Ce meilleur pronostic a été confirmé par
la suite [9], avec une meilleure survie que le cancer à cellules
12. GOMEZ-ROMAN J.J., MAYORGA-FERNANDEZ F., FERNANDEZ F., VAL-BERNAL J.F. Sarcomatoïd chromophobe cell carcinoma : immunohistochemical and lectin study in one case. Gen.
Diagn. Pathol., 1997, 143, 63-69.
13. HES O., MICHAL M., KINKOR Z., TOMES P., ZUCHOVA M.,
NAPRAVNIK I. Sarcomatous chromophobe cell renal carcinoma. 2
case reports. Cesk. Pathol., 1999, 35, 15-19 (abstract).
14. JOUBERT M., CASSAGNAU E., BOULLANGER P., LABOISSE
C., BUZELIN F. Variante sarcomatoïde du carcinome renal à cellules chromophobes. Ann. Pathol., 1997, 17, 392-395.
15. KIKUCHI E., TANOMOGI H., HASEGAWA S., SHIMIZU K.,
YAMATAKA K., MIYAKITA M. A case of surgical resection for
metachronous multiple liver metastases of chromophobe cell renal
carcinoma. Hinyokika Kiyo (Acta Urologica Japonica), 1998, 44,
715-717 (abstract).
16. MOLINIE V., COCHAND-PRIOLLET B., STAROZ F., VIEILLEFOND A. Classification des tumeurs primitives du rein de l'adulte.
Ann. Pathol., 1998, 18, 29-47.
17. ONISHI T., OHISHI Y., IIZUKA N., SUZUKI Y., SUZUKI H.,
HOSOBE T. & coll. Clinicopathological study on patients with
chromophobe cell renal carcinoma. JPN J. Urol., 1996, 87, 11671174 (abstract).
18. RENSHAW A.A., HENSKE E.P., LOUGHLIN K.R., SHAPIRO C.,
WEINBERG D.S. Aggressive variants of chromophobe renal cell
carcinoma. Cancer, 1996, 78, 1756-1761.
Tableau. Caractéristiques des cancers rénaux à cellules chro mophobes et conventionnelles.
19. THOENES W., BAUM H.P., STORKEL S., M ULLER M .
Cytoplasmic microvesicles in chromophobe cell renal carcinoma
demonstrated by freeze fracture. Virchows Arch. B Cell Pathol.,
1987, 54, 127-130.
20. THOENES W., STORKEL S., RUMPELT H.J. Human chromophobe cell renal carcinoma. Virchows Arch. B Cell. Pathol., 1985, 48,
207-217.
21. THOENES W., STORKEL S., RUMPELT H. J., MOLL R. ,
BAUM H.P. , WERNER S. Chromophobe cell ren al carcino ma
and its variants. A rep ort on 32 cases. J. Path ol., 1988, 155, 2 77287.
22. TICKOO S.K., AMIN M.B., ZARBO R.J. Colloidal iron staining in
renal epithelial neoplasms, including chromophobe renal cell carcinoma : emphasis on technique and patterns of staining. Am. J. Surg.
Pathol., 1998, 22, 419-424.
chromophobe
conventionnel
macroscopie
gris-beige
chamois
fer colloïdal
+
-
microscopie
électronique
micro-vésicules
glycogène
peu
abondant
vimentine
-
+
Führman
Führman
perte 1, 2, 6, 10, 13, 17, 21
-p
grade
cytogénétique
214
M. Peyromaure et coll., Progrès en Urologie (2001), 11, 209-216
3. IQBAL M.A., AKHTAR M., ULMER C., AL-DAYEL F., PATERSON M.C. FISH analysis in chromophobe renal-cell carcinoma.
Diagn. Cytopathol., 2000, 22, 3-6.
conventionnelles et un faible risque métastatique [8, 10]. Les
méthodes diagnostiques se sont complétées par la positivité des
immunomarquages, cytokératine 18, 7, 19 et plus récemment 7
[7]. Comme les autres types de cancers à cellules rénales, il peut
avoir une différenciation sarcomatoïde, qui pourrait expliquer
l’agressivité de certains cancers chromophobes publiés dans la
littérature [12].
4. KOVACS G., AKHTAR M., BECKWITH B.J ., BUGERT P.,
COOPER C.S., DELAHUNT B., EBLE J. N. , FLEMING S. ,
LJUNGBERG B., MEDEIROS L.J., MOCH H., REUTER V.E.,
RITZ E., ROOS G., SCHMIDT D., SRIGLEY J.R., STORKEL S.,
VAN DEN BERG E., ZBAR B. The Heidelberg classification of
renal cell tumours. J. Pathol., 1997, 183, 131-133.
Les pr oblè mes posés actuellement par les cancers du re in à
cellule s chromophobe s sont : le diagnostic pré-opératoire, le
diagnostic différentiel, le s aspects génétiques, la f ilia tion adé nom e oncocytaire- cance r chrom ophobe et le tra ite ment
conservateur.
5. LATHAM B., DICKERSIN G.R., OLIVA E. Subtypes of chromophobe cell renal carcinoma : an ultrastructural and histochemical
study of 13 cases. Am. J. Surg. Pathol., 1999, 23, 530-535.
6. LECHEVALLIER E., ANDRE M., BARRIOL D., DANIEL L.,
EGHAZARIAN C., DE GROMONT M., ROSSI D., COULANGE
C. Fine-needle percutaneous biopsy of renal masses with helical-CT
guidance. Radiology, 2000, 216, 506-510.
La moindre agressivité tumor ale de ces tumeur s pour rait justifie r leur diagnostic pré -opératoire afin d’ adapter le traitement.
Il ne se mble pas exister de signe r adiologique spécifique de c e
type tumoral. La cyto-aspira tion ou la ponction biopsie pour rait être utilisée avec fiabilité [6, 15], mê me pour différencier
cancer chromophobe et adénome oncocytaire. Le s diagnostics
différentiels à évoquer sont le ca ncer à cellules conventionnelles pour le type chr omophobe à cellules cla ires mais surtout
l’a dénome oncocytaire pour la forme é osinophile. Dans ce c as,
l’intensité et le type de coloration de s ce llules pa r le fer colloïdal [11] e t les immunomarqua ges [1] permettent de faire la
différence même sur des biopsies per cutanées [6]. L’analyse
extemporanée de la tumeur, lors d’une chir urgie conservatric e
ne paraît pas suffisamm ent spécifique pour pouvoir être utilisée dans le diagnostic différentiel. En cytogénétique, la carac tér istique du cancer à cellule s chromophobes est la perte des
chr omosome s 1, 2, 6, 10, 13, 17 et 21 [4, 6]. C es monosomies
existe nt dans 50-98% de s c ancer s c hr omophobes [2].
Certaines de ce s anomalies peuvent s’observer dans les adé nomes oncocyta ires [16] . Ce tte similitude c ytogénétique peut
faire évoquer une filiation entre l’adénome oncocyta ire et le
cancer chrom ophobe. Par ailleurs, ces 2 tum eur s semblent
impliquer la pa rticipation des m itoc hondries. Du fait de cette
proximité histo-génétique, la bé nignité de l’ adénome oncocytaire nécessite d’être confirm ée par des études de suivi et de
survie à long te rme.
7. LEROY X., MOUKASSA D., COPIN M;C., SAINT F., MAZEMAN
E., GOSSELIN B. Utility of cytokeratin 7 for distinguishing chromophobe renal cell carcinoma from renal oncocytome. Eur. Urol.,
2000, 37, 484-487.
8. LJUNGBERG B., ALAMDARI F.I., STENLING R., ROOS G.
Pronostic significance of the Heidelberg classification of renal cell
carcinoma. Eur. Urol., 1999, 36, 565-569.
9. MOCH H., GASSER T., AMIN M.B., TORHORST J., SAUTER G.,
MIHATSCH M.J. Prognostic utility of the recently recommended
histologic classification and revised TNM staging system of renal
cell carcinoma : a Swiss experience with 588 tumors. Cancer, 2000,
89, 604-614.
10. SANZ PEREZ G., AROCENA GARCIA-TAPIA J., ZUDAIRE
BERGERA J.J., DIEZ-CABALLERO F., MARTIN-MARQUINA
A., RODRIGUEZ-RUBIO CORTADELLAS F., ROSELL-COSTA
D., ROBLES J.E., B ERIAN POLO J.M. Chromophobe carcinoma
of the kidney. Actas Urol. Estp., 1999, 23, 323-326.
11. SKINNIDER B.F., JONES E.C. Renal oncocytoma and chromophobe renal cell carcinoma. A comparison of colloidal iron staining and
electron microscopy. Am. J. Clin. Pathol., 1999, 111, 796-803.
12. TARDIO J.C. Chromophobe cell renal carcinomas with sarcomatoid
areas. Histopathology, 2000, 36, 184-185.
13. THOENES W., STORKEL S., RUMPELT H.J. Human chromophobe cell renal carcinoma Virchows. Arch. B Cell. Pathol. Incl. Mol.
Pathol., 1985, 48, 207-217.
Actuellement, le traitement standard reste la néphrectomie élargie mais le bon pronostic du cancer à cellules chromophobes
pourrait justifier une chirurgie rénale conservatrice, peut-être
même quelle que soit la taille [1 bis]. Cependant, peu ou pas de
données existent sur ce sujet concernant l’évolution après chirurgie conservatrice du cancer chromophobe ni même le taux de
multifocalité du cancer chromophobe. Dans ce travail, les
auteurs rapportent un taux de multifocalité de 2/35, dont un cas
est un cancer à cellules conventionnelles associé, soit un taux de
1/35 (3%).
14. THOENES W., STORKEL S., RUMPELT H.J., MOLL R., BAUM
H.P., WERNER S. Chromophobe cell renal carcinoma and its
variants - a report on 32 cases. J. Pathol., 1988, 155, 277-287.
15. WIATROWSKA B.A., ZAKOWSKI M.F. Fine-needle aspiration
biopsy of chromophobe renal cell carcinoma and oncocytoma : comparison of cytomorphologic features. Cancer, 1999, 87, 161-167.
16. ZAMBRANO N.R., LUBENSKY I.A., MERINO M.J., LINEHAN
W.M., WALTER M.M. Histopathology and molecular genetics of
renal tumors toward unification of a classification system. J. Urol.,
1999, 162, 1246-1258.
REFERENCES
1. COCHAND-PRIOLLET B., MOLINIE V., BOUGARAN J., BOUVIER R., DAUGE-GEFFROY M.C., DESLIGNIERES S., FOURNET J.C., GROS P., LESOURD A., SAINT-ANDRE J.P., TOUBLANC M., VIEILLEFOND A., WASSEF M., FONTAINE A.,
GROLEAU L. Cancer du rein chromophobe et oncocytome : étude
comparative morphologiq ue, histochimique et immunohis tochimique d’une série de 124 cas. Arch. Pathol. Lab. Med., 1997, 121,
1081-1086.
____________________
SUMMARY
Clear cell renal carcinoma: a distinct entity, based on a
series of 35 cases.
Objective:To describe the clinical and histological characteris tics and natural history of clear cell renal carcinoma.
1 bis. COULANGE C., RAMBEAUD J.J. Cancer du rein de l’adulte.
Prog. Urol., 1997, 5, 723-910.
215
M. Peyromaure et coll., Progrès en Urologie (2001), 11, 209-216
Patients and Methods: The case files of 35 patients (22 men and
13 women, with a mean age of 58 ± 13.8 years) operated for
clear cell renal carcinoma were reviewed. The circumstances of
diagnosis and the histological features of the tumour were ana lysed. The outcome of the patients was studied with a mean fol low-up of 70 ± 20.2 months.
ted. Hale stain was positive in every case. The majority of
tumours were confined to the kidney (T1: 65% and T2: 29%)
with a low nuclear grade (91% of grades 1 and 2). No patient
developed local recurrence or metastasis during follow-up. The
overall 5-year survival rate was 92%. No death related to the
disease was reported.
Results: The diagnosis was incidental in 66% of cases. The
Conclusion: The histological diagnosis of clear cell renal can macroscopic appearance of the tumour was characteristic:
cer is now easy and can be suggested even on macroscopic exa homogeneous and beige or white colour. On light microscopy,
mination of the operative specimen. This tumour appears to have
tumours were composed of variable proportions of clear cells
a good prognosis, as it is usually confined to the kidney with a
and eosinophilic cells. The were classified as 15 predominantly
low nuclear grade.
eosinophilic tumours (43%), 9 predominantly clear cell tumours
Key-Words: renal cancer, clear cell, TNM stage, Führman
(26%) and 11 tumours composed of equal number of clear cells
and eosinophilic cells (3 1%). Nuclei were irregular and inden - grade, prognosis
____________________
216
Téléchargement