M A L A D I E C O R O N A I R E Insuffisance coronaire - Cardiologie interventionnelle ● J. Puel*, L. Maillard** P O I N T S P O I N T S F O R T S F O R T S ■ Les stents posés à la phase aiguë de l’IDM contribuent à diminuer le risque de récidives ischémiques à six mois mais souffrent de la lourdeur logistique de la méthode. ■ Les antioxydants, les agents antiplaquettaires et les statines sont-ils, sans que nous le sachions, les premières armes de la chimiothérapie curative et préventive de la lésion athérothrombotique ? ■ Les résultats de la brachythérapie sont prometteurs et demandent une confirmation par de larges essais. ■ La validation de la méthode interventionnelle est enfin en cours. ■ La thérapie génique entre dans l’arsenal thérapeutique des cardiologues. Plusieurs études de phase I chez l’homme sont en cours. Le transfert de gène peut être effectué directement par voie intramyocardique ou intracoronaire mais également par voie intrapéricardique. ■ Les stratégies d’implantation d’endoprothèses guidées par les résultats du doppler permettent de réduire de pratiquement 50 % le taux d’implantation de prothèses intracoronaires. ■ D’importants progrès techniques ont été réalisés dans toutes les situations complexes de la cardiologie interventionnelle. L’INFARCTUS DU MYOCARDE Dans la suite logique de l’évolution de l’angioplastie, les stents ont pénétré l’espace fonctionnel de l’infarctus du myocarde (IDM) aigu (figures 1 et 2). L’efficacité de l’angioplastie, par rapport à la fibrinolyse hospitalière, et la faisabilité du “stenting” ont déjà été démontrées dans cette situation clinique. * Service de cardiologie, CHU Purpan, Bordeaux. ** Hôpital Trousseau, Tours. La Lettre du Cardiologue - n° 305 - janvier 1999 Figures 1 et 2. Occlusion de l’artère interventriculaire antérieure Angioplastie directe et mise en place d’une endoprothèse PS 154. 7 M A L A D I E C O R O N A I R E Il reste à prouver, ici, l’efficacité du stent pour en justifier l’implantation à large échelle et mettre en place la lourde logistique qui la soutient. C’est le but des études STENTIM II et PAMIStent. STENTIM II est une étude multicentrique française (17 centres), coordonnée par le CHU de Tours. Sur une période de 12 mois, 211 patients ont été traités dans les 12 premières heures d’évolution de l’IDM soit par la pose systématique d’un stent Wiktor, soit par une dilatation, éventuellement complétée par une contention prothétique chaque fois que nécessaire (tableau I). Dans ce travail randomisé, 3 % (n = 3) des patients du groupe stent ont été traités par une seule dilatation, en raison d’un échec de pose de l’endoprothèse, alors que 36,4 % (n = 40) des sujets du groupe ballon ont bénéficié de l’implantation d’un stent compte tenu du résultat médiocre de la dilatation. Tableau I. Résultats de STENTIM II. Succès primaire (TIMI 2-3) MLD** post-procédure Mortalité intrahospitalière Récidive ischémique intrahospitalière Resténose à 6 mois Réocclusion à 6 mois Mortalité à 6 mois Récidives ischémiques à 6 mois Groupe dilatation (n = 110)* Groupe stent (n = 101) 97,3 % 2,11 mm 0% 97 % 2,38 mm 1% 5,4 % 39 % 6,3 % 1% 5% 25 % 7,2 % 2% 18 % 12 % * 40 patients (36,4 %) ont reçu un stent. ** MLD = diamètre luminal minimum. PAMI-Stent (stent Cordis hépariné) est un essai international (62 centres), dont le but est voisin (dilatation versus stent à la phase aiguë), dont les critères d’inclusion sont proches, de même que les critères de jugement : mortalité, récidive ischémique, revascularisation ultérieure et resténose (tableau II). Ici, 15,1 % des patients du bras dilatation ont bénéficié d’un stent complémentaire. Tableau II. Résultats de PAMI-Stent. Succès primaire (TIMI 2-3) TIMI 3 MLD post-procédure Mortalité intrahospitalière Resténose à 6 mois Réocclusion à 6 mois Mortalité à 6 mois Récidives IDM à 6 mois Revascularisation du vaisseau recanalisé La représentativité des études prospectives Moins ambitieuses et moins démonstratives, certaines expériences rapportent une pratique plus proche de la réalité de l’IDM aigu. Ainsi, l’équipe de Boston (Dauerman, Baim) a comparé, à partir d’une série de 148 patients consécutifs, les résultats de l’angioplastie selon les critères de sélection de l’étude PAMI. Les patients “éligibles” tirent un meilleur bénéfice de l’angioplastie que les patients “inéligibles” avec, notamment, des possibilités angiographiques de recours au stent plus élevées (81,6 % versus 61,1 %) et une mortalité hospitalière cinq fois plus faible (3,9 % versus 20,8 %). Les études pilotes montrent des voies mais ne sauraient imposer des règles. Le phénomène du no-reflow Dans PAMI-Stent, le flux TIMI 3, obtenu par la dilatation, est dégradé en flot TIMI 2 à 0 dans 2,6 % des cas par l’implantation du stent. Giri (Hartford), à partir d’une série rétrospective de 507 patients, précise les caractéristiques de cette “momification” momentanée de l’artère recanalisée. Dans cette expérience, le no-reflow est grave, avec une mortalité à 30 jours de 21,7 %. Observée dans 9,1 % des cas, quel que soit le procédé mécanique de recanalisation, cette complication est relativement fréquente et son incidence, variable selon le geste et l’aspect de la lésion, semble être favorablement influencée par l’administration complémentaire d’abciximab (tableau III). Groupe dilatation (n = 448)* Groupe stent (n = 452) 99,1 % 92,7 % 2,1 mm 3,5 % 37,4 %*** 8,6 %** 4,2 % 2,4 % 99,8 % 88,9 % 2,55 mm 1,8 % 23,3 % 4,5 % 2,7 % 2,2 % Tableau III. No-reflow. 12,8 % La logistique Dans cette situation commandée par l’urgence, la faible disponibilité de la méthode interventionnelle n’autorise son application 21,4 %*** * 68 patients (15,1 %) ont reçu un stent. ** Patients traités par ballon seul. *** Différence significative. 8 Les résultats de ces deux études sont convergents. Les taux de revascularisation TIMI 3, voisins de 90 %, témoignent de l’efficacité des deux méthodes. On note toutefois, pendant la période hospitalière, une supériorité du stent systématique sur la dilatation, éventuellement complétée par la pose d’une endoprothèse. En effet, la première option assure un résultat quantitativement meilleur, avec une lumière coronaire plus large. Cet avantage initial rend compte probablement, à six mois, d’un taux significativement moins élevé de resténose et de revascularisation secondaire de l’artère. Enfin, PAMI-Stent montre que le risque de resténose sur stent est significativement plus faible chez les patients présentant initialement un thrombus angiovisible (9,7 % versus 32,4 %). La pose d’un stent, au moins “provisionnel”, complétant le résultat d’une dilatation médiocre, doit être retenue aujourd’hui comme une solution thérapeutique efficace à la phase de constitution de l’IDM. Les résultats de ces essais ne sauraient toutefois occulter certaines limites cliniques et logistiques soulignées par quelques études ouvertes. Incidence no-reflow (%) Total Thrombus angiovisible Post-dilatation Post-stent Post-dilatation + abciximab Post-stent + abciximab 9,1 15,7 12,8 9,9 5,1 4,2 La Lettre du Cardiologue - n° 305 - janvier 1999 M A L A D I E que dans un nombre restreint de cas. Le traitement chimique poursuit donc son développement à la recherche de l’association médicamenteuse la plus efficace et la plus sûre. Avec des taux de recanalisation TIMI 3 voisins de 70 %, l’association de t-PA (TIMI 14) ou de r-PA (GUSTO 4 pilot) à l’abciximab semble offrir des perspectives médicamenteuses prometteuses. C O R O N A I R E significativement plus fréquents dans le groupe stent (tableau IV). Deux autres études (Boonstra, Groningue et Schüler, Leipzig), voisines par leur but et la population sélectionnée, rapportent des résultats superposables. Tableau IV. SIMA Trial. Groupe stent (n = 68) LE REGAIN DES MÉDICAMENTS Les antioxydants L’efficacité du probucol, déjà suggérée par les observations de l’équipe de l’Institut de Cardiologie de Montréal, est confirmée par l’étude globalisée de Kuwabara (Chiba). Cette méta-analyse, portant sur dix études incluant 1 022 malades, révèle une réduction significative de 30 % du risque relatif de resténose post-angioplastie et souligne toutefois les contraintes (posologie et prise anticipée) d’une telle prescription. L’amélioration de la vasomotricité endothélium-dépendante, la diminution de la prolifération des cellules musculaires lisses semblent résulter de ce type de médication, comme l’attestent les travaux fondamentaux présentés lors de cette session. Les agents antiplaquettaires Les Japonais ont étudié les effets du cilostazol, nouvel agent antiagrégant plaquettaire inhibiteur de la phosphodiestérase et frénateur de la prolifération des cellules musculaires lisses. Les résultats de leurs études comparatives témoignent de l’efficacité de cette molécule dans la prévention de la resténose. Dans les suites de l’IDM revascularisé par la pose d’un stent, Ochiai (Tokyo) ne relève aucune resténose chez 23 patients placés sous cilostazol et en observe cinq chez 21 malades traités par la ticlopidine. Après dilatation réalisée sur des coronaires d’un diamètre inférieur à 2,75 mm, Tsuchikane (Osaka) note un taux de resténose significativement plus faible sous cilostazol que sous aspirine, respectivement 18,7 % (17/91 patients) et 43,3 % (39/90). De la même façon, après implantation d’un stent sur un groupe randomisé de 110 patients, Hayashi relève un pourcentage de resténose de 16 % sous cilostazol contre 27,6 % sous ticlopidine. Les hypolipidémiants Dans une étude non randomisée, Walter (Francfort) observe un taux de resténose intrastent significativement plus bas chez 219 patients traités par statine (23,7 %) que chez 246 autres ne recevant pas ce type d’hypolipidémiants (34,2 %). LA VALIDATION DE L’ANGIOPLASTIE Atteinte monotronculaire de l’IVA - stent contre mammaire interne Le SIMA Trial (Goy, Lausanne), étude multicentrique randomisée, compare les deux méthodes auprès d’une population de 123 patients dont la moitié accuse un angor sévère, instable ou classe III-IV. Au cours de la période hospitalière, les résultats des deux méthodes sont cliniquement comparables, avec cependant une morbidité (transfusion et troubles du rythme) plus élevée dans les suites de la chirurgie. En revanche, à six mois, les récidives ischémiques et le recours à une deuxième revascularisation sont La Lettre du Cardiologue - n° 305 - janvier 1999 Suivi intrahospitalier Mortalité IDM (Q et non Q) Suivi à 6 mois Mortalité IDM (Q et non Q) Deuxième revascularisation 1 3 (4,4 %) 1 5 13 (19,4 %) Groupe mammaire interne (n = 55) 0 2 (3,6 %) 1 2 0 Atteinte pluritronculaire. Stent contre chirurgie L’essai international et randomisé ARTS recrute plus de 1 200 malades. Les résultats intrahospitaliers, présentés par P.W. Serruys, présentent à ce jour les deux méthodes. Ce travail ne manquera pas, à l’avenir, de tenir la cardiologie en haleine par ses résultats à moyen et long terme. LA BRACHYTHÉRAPIE Le recours aux radiations ionisantes est l’une des voies explorées dans le traitement, préventif ou curatif, de la resténose. Essai BERT (Beta Restenosis Trial) Cette étude coopérative, coordonnée par S. King III, évaluant l’efficacité d’un rayonnement bêta (strontium) appliqué sur des lésions de novo soumises à une dilatation, révèle, chez 64 patients traités et contrôlés à six mois, un taux moyen de resténose de 14 %. L’intensité du rayonnement (supérieure à 14 Gy) et la qualité initiale du geste (sténose résiduelle inférieure à 30 %) participent à la minimisation de l’incidence de la resténose qui, dans ces conditions, peut atteindre le faible niveau de 10 %. L’efficacité de la brachythérapie, approchée par l’étude échographique endoluminale, semble reposer sur l’inhibition partielle de la cicatrisation néo-intimale et sur celle du phénomène de remodelage constrictif. Étude WRIST (Washington Radiation for In Stent restenosis Trial, Waksman) Ce travail randomisé, incluant 130 patients, apprécie l’efficacité d’un rayonnement gamma (iridium 192) sur la resténose intrastent. L’irradiation, d’une durée moyenne de 22 minutes, est globalement bien tolérée. À six mois, les résultats plaident en faveur de la méthode, avec un taux de resténose, évalué par deux centres indépendants, de 16 et 19 % chez les patients irradiés contre 48 et 58 % chez les autres. Étude PREVENT (Raizner) Dans cette étude ouverte portant sur 72 patients, l’émission d’une source bêta (phosphore 32), émise sur une sténose ou une resté9 M A L A D I E C O R O N A I R E nose après une angioplastie avec ou sans pose de stent, est bien tolérée dans l’immédiat et semble efficace, avec un taux de resténose voisin de 10 %. Les résultats des ces études sont encourageants. Ils ouvrent la voie à la recherche de nouvelles sources ionisantes d’utilisation plus sûre et plus largement accessibles. J. Puel LES NOUVEAUX OUTILS La présence de thrombus intracoronaire est un facteur majeur de complication en cours de procédure interventionnelle. La succion simple est une technique proposée par Papadakos (New York). Après avoir traversé la lésion cible à l’aide de petits cathéters, le guide est retiré et l’aspiration est réalisée manuellement à l’aide d’une seringue. Cette technique simple, peu onéreuse, a permis dans la majorité des cas d’aspirer le matériel thrombotique et d’améliorer le score de perfusion (grade TIMI). La principale limite de l’étude est l’absence de groupe contrôle. Beaucoup plus séduisants sont les résultats de l’étude randomisée VeGAS, rapportés par Ramee (La Nouvelle-Orléans). L’Angiojet est comparé à une perfusion intracoronaire d’urokinase. C’est un cathéter de petit calibre, à double lumière, qui présente une ouverture à l’extrémité distale. L’injection par l’une des lumières permet l’aspiration de sang et de matériel thrombotique grâce à l’effet Venturi. L’objectif principal de l’étude était angiographique, le but étant d’obtenir une lésion résiduelle à moins de 50 % et une perfusion TIMI 3. L’urokinase était administrée sous forme de 250 000 unités sur 30 minutes avec une perfusion d’au moins six heures (minimum 200 000 unités par heure). En termes d’objectif principal, il n’y a pas de différence dans les deux groupes (180 patients Angiojet et 170 patients urokinase), avec un taux de succès de 70 % de part et d’autre. Le bénéfice de la technique mécanique apparaît en termes de durée d’hospitalisation, de réduction d’hémorragies (5 versus 12 %) et surtout des complications au point d’accès artériel (5 versus 18 %), et ce de façon significative. La technique est intéressante par sa simplicité d’utilisation et la réduction de la durée d’hospitalisation ; son efficacité est comparable à celle d’une technique conventionnelle de thrombolyse intracoronaire, notamment pour les pontages. L’utilisation des ultrasons intracoronaires comme technique de thrombolyse dans les syndromes coronariens aigus est beaucoup plus performante. Les résultats ont été présentés par Fajadet (Toulouse). Les 100 premiers patients présentant des lésions avec un aspect de thrombus intraluminal ont montré le bénéfice de cette technique de sonication. L’outil peut être manipulé dans un cathéter guide de 7 French (7F). L’ancienneté moyenne du thrombus était de trois jours, et on notait 23 % d’infarctus aigu et 37 % d’angor post-infarctus. Quinze pour cent des lésions étaient des pontages veineux. Dans ces lésions particulièrement complexes, le taux de succès de la procédure était de 95 %, dont 90 % de TIMI 3, au prix de 2 % d’embolisation. Il n’a pas été noté de perforation, de dissection, de décès ou d’occlusion aiguë. Les résultats sont très probants et très encourageants, associant un taux de succès élevé et une réduction des complications hémorragiques au point de ponction. 10 RÉDUCTION DES COMPLICATIONS HÉMORRAGIQUES P. Aubry (Paris) a rapporté les résultats de l’ablation immédiate du désilet fémoral après une procédure d’angioplastie en 6F. Les patients ont reçu une dose unique adaptée au poids d’héparine non fractionnée (70 UI/kg). Cette série ouverte prospective de 150 patients atteste la faisabilité de l’ablation immédiate du désilet dans 95 % des cas. Celle-ci devient plus difficile lorsque le patient est traité par abciximab. La dose moyenne d’héparine était de 5 350 UI et la mesure de l’ACT au moment de l’ablation du désilet est de 243 secondes. Soixante-treize pour cent des patients ont reçu une prothèse. La durée moyenne de la compression manuelle pour obtenir une hémostase est de 11 minutes, et il n’a été noté qu’un seul hématome. Il n’y a pas eu de chirurgie, ni de transfusion. Une autre alternative était présentée par une équipe française (Aoun), qui a rapporté l’expérience toulousaine comparant, de 1994 à 1998, les résultats de l’angioplastie par voie radiale (4 195 patients) à ceux de la voie fémorale (3 292 patients). Les caractéristiques des deux populations ne sont pas différentes, à l’exception du nombre de patients aux antécédents de pontages, qui est plus important dans le groupe voie fémorale. Soixante pour cent de prothèses ont été implantées en moyenne par les deux voies. Le taux de succès des deux voies d’abord est de 98 %. La voie radiale, si elle est parfois plus difficile d’un point de vue technique, (courbure des sondes et courbe d’apprentissage), s’accompagne d’une réduction des complications vasculaires locales (1,5 %), d’une réduction de la survenue d’hématomes (1 %), du besoin de transfusion (1 %) ou de la nécessité d’un geste de chirurgie (1 %), et ce de façon significative en comparaison avec la voie fémorale. IMPLANTATION D’ENDOPROTHÈSES GUIDÉES PAR ULTRASONS Les résultats de l’étude FROST ont été rapportés par A. Lafont (Paris). Le but de ce travail était de comparer les résultats d’une angioplastie guidée par mesure doppler, avec mise en place d’une endoprothèse de nécessité, à ceux d’une angioplastie, avec mise en place directe d’une prothèse. Cent vingt-cinq malades ont été randomisés dans chaque groupe, sans différence en termes de population. Dans cette stratégie guidée et dans le groupe angioplastie au ballonnet, 48 % des patients ont eu besoin de la prothèse pour obtenir un résultat satisfaisant (réserve coronaire supérieure à 2,2 et/ou existence d’une lésion résiduelle inférieure à 35 %). Il y a eu très peu d’événements hospitaliers dans les deux groupes. À six mois, dans le groupe angioplastie, le taux de resténose est de 27,1 %, versus 21,4 % dans le groupe stent, sans différence significative. La revascularisation est de 15 % dans le groupe ballon et de 14 % dans le groupe stent. Les résultats de ce travail démontrent que les deux stratégies donnent des résultats similaires et tout à fait satisfaisants, notamment en termes de résultat angiographique. Une stratégie guidée par doppler est une alternative à l’implantation directe d’une endoprothèse et permet de réduire le taux d’implantation de 50 %. Ces excellents résultats ont été confirmés par les deux études d’envergure que sont l’étude DESTINI, rapportée par Carlo di Mario (Milan), et l’étude DEBATE 2, rapportée par Debruyne (Belgique). DEBATE 2 apporte des informations complémentaires La Lettre du Cardiologue - n° 305 - janvier 1999 M A L A D I E concernant cette stratégie. On retrouve, dans cette étude, une branche randomisée supplémentaire évaluant le résultat de la mise en place de la prothèse malgré un bon résultat au ballon selon les critères doppler suscités. À six mois, le taux d’événements cardiaques est de 10 % dans le groupe ballon ; il tombe à 1 % lors de l’implantation complémentaire de la prothèse dans cette branche. Sur de bons résultats au ballonnet, l’implantation d’une endoprothèse conduit à un taux d’événements très faible... THÉRAPIE GÉNIQUE : DU RÊVE À LA RÉALITÉ De très nombreuses communications ont porté sur le résultat du transfert de gène au myocarde. Encore du domaine du rêve il y a quelques mois, les études de faisabilité chez l’homme sont en cours. L’injection intramyocardique d’un vecteur adénoviral du sérotype 5, rendu défectif pour la réplication et porteur du gène codant pour le VEGF 121 (vascular endothelial growth factor), a été réalisée chez une dizaine de patients. Le geste a été couplé à une intervention chirurgicale de pontage aortocoronaire et concernait des zones ischémiques non accessibles à un pontage ou à un geste d’angioplastie. Le transfert de gène a été effectué sous forme de dix injections intramyocardiques directes. Les résultats préliminaires montrent une bonne tolérance de l’administration du gène, sans réaction inflammatoire ni épanchement péricardique ou myocardite. Il n’y a pas eu d’élévation enzymatique significative, ni d’argument en faveur d’un infarctus ; il n’y a pas eu de chute tensionnelle. Les résultats seront évalués à distance par un score angiographique et la recherche d’une ischémie myocardique résiduelle. Ces premiers résultats, très encourageants d’après T. Rosengart (New York), constituent une étape de faisabilité importante. J. Isner (Boston) a fait part d’une méthodologie similaire pour des patients non accessibles à un geste de revascularisation (angioplastie ou chirurgie), présentant une ischémie documentée. Le VEGF 165 a été administré par injection intramyocardique directe après une petite ouverture thoracique. Seize patients âgés en moyenne de 65 ans ont reçu une dose totale de 125 µg d’ADN nu codant pour le VEGF. La durée de la procédure était de 75 minutes, et une élévation non significative des CPK a été notée. À la phase hospitalière, une expression du gène a pu être documentée par une augmentation du taux circulant de VEGF (test Elisa). Tous les patients ont présenté une réduction de la symptomatologie angineuse à 30 jours (60 % en classe II, 40 % en classe I). Une augmentation du nombre de vaisseaux a été documentée par l’angiographie, et 55 % des patients étaient indemnes de symptomatologie à 90 jours. Ces nouvelles techniques, sous réserve de confirmation et de bonne tolérance à distance, constituent une solution séduisante pour les patients actuellement non accessibles à un geste de revascularisation. Tout aussi passionnants sont les résultats de l’étude KAT, présentés par Latinen (Finlande). L’administration de VEGF, sous forme de plasmide nu, a été effectuée à l’aide d’un cathéter Dispatch directement en intracoronaire (figure 3). Le cathéter Dispatch est un système hélicoïdal permettant d’isoler une chambre de transfection et assurant une perfusion passive afin de limiter l’ischémie coronaire. Un milligramme d’ADN de VEGF a été La Lettre du Cardiologue - n° 305 - janvier 1999 C O R O N A I R E ainsi délivré sur une durée totale de 10 minutes à une pression de 6 atmosphères chez 10 patients, avec une excellente tolérance. Deux groupes contrôles de patients ayant reçu simplement un gène rapporteur ou du Ringer lactate ont été constitués. La tolérance immédiate a été excellente : pas de modification des paramètres biologiques en cours d’hospitalisation ainsi qu’à 30 et 90 jours ; pas d’effet adverse. Cependant, il n’a pas été détecté d’augmentation sérique du VEGF (test Elisa). Les conclusions actuelles sont que l’administration locale d’ADN de VEGF après une angioplastie réussie (50 % de stents) est faisable à l’aide du cathéter Dispatch. L’évaluation de l’efficacité dans la prévention de la resténose reste à démontrer. Figure 3. Le cathéter Dispatch utilisé pour le transfert intracoronaire d’ADN chez l’homme. NOUVELLES BRÈVES Il est possible, selon Schulen, de réduire la durée du traitement par ticlopidine, après implantation de prothèses, de quatre semaines à deux semaines, et ceci afin d’éviter les complications hématologiques. Cette analyse porte sur une large série de près de 3 000 patients, et valide cette attitude si le patient présente de faibles risques : âge de moins de 55 ans, traitement d’une lésion courte, implantation d’une prothèse unique de moins de 15 mm, absence de lésions pluritronculaires, existence d’un bon ventricule gauche et absence de diabète. Les stents couverts : du bon et du moins bon ! Le Jostent couvert comprend une membrane de PTFE, prise en sandwich dans deux stents Jostent. Cet outil a été développé pour le traitement spécifique des ruptures coronaires et des anévrismes. D’excellents résultats ont été présentés par Lopez (Phoenix) concernant les quarante premières implantations de ce matériel. Le taux de succès a été de 98 % et l’utilisation d’un cathéter guide de 6F a été possible dans un tiers des cas. On note une seule occlusion aiguë, et le taux de resténose est encore inconnu. Les résultats en phase hospitalière sont comparables dans la série française (Morice, Paris) avec cependant 10 % d’occlusion tardive étagée dans le temps. Le mécanisme exact des occlusions n’est pas encore analysé ; elles pourraient être dues à un défaut de dilatation des prothèses (recoil) majoré par le sandwich, ou à un défaut d’endothélialisation nécessitant un traitement prolongé par ticlopidine. Le taux de resténose est également inconnu pour cette série de 50 patients. 11 M A L A D I E C O R O N A I R E SUIVI À LONG TERME DES ENDOPROTHÈSES Pour J. Puel, dix ans après l’implantation initiale des premiers patients à Toulouse, le bénéfice de ces implantations est maintenu et les événements sont en rapport avec la diffusion de la maladie coronaire. Les contrôles angiographiques réalisés chez les patients vivants ont montré l’absence de déformation des prothèses qui sont toujours radio-opaques (wall stent), sans argument en faveur d’une fracture ou d’une calcification. Aucune mobilisation n’a été notée. Il en est de même pour Karam (Toulouse) ou Masotti (Barcelone). Le résultat initial de l’implantation des prothèses se maintient dans le temps. Les événements cardiaques après la période initiale des six premiers mois sont liés à la diffusion de la maladie coronaire. LE TRAITEMENT DES LÉSIONS COMPLEXES Les lésions de bifurcation (figures 4 et 5) Elles constituent un véritable challenge technique pour les hémodynamiciens. L’utilisation des endoprothèses dans les lésions de Figures 4 et 5. Reconstruction d’une lésion de bifurcation. 12 bifurcation montre une nette amélioration des résultats. Pour Brunel (Nantes) ou Pane (Las Palmas), la réalisation d’une technique simple à l’aide d’une prothèse dans la branche principale et d’une dilatation au ballonnet dans la branche latérale procure de meilleurs résultats qu’un montage complexe utilisant deux prothèses en T ou en Y. Les résultats semblent encore améliorés pour Lefèvre (Paris), avec le recours à la mise en place d’un stent tubulaire dans la branche principale et la réalisation d’une inflation simultanée de deux ballons par la technique du kissing. Les taux d’interventions tombent alors dans des plages identiques à celles du traitement de monolésion courte. Pour Dauerman (Boston), ces résultats pourraient encore être améliorés par adjonction d’un geste d’athérectomie systématique. Les troncs communs (figures 6 et 7) Des résultats très impressionnants ont été présentés par l’équipe marseillaise (Silvestri), concernant la reconstruction des troncs communs de la coronaire gauche, qu’il s’agisse de lésions ostiales Figures 6 et 7. Angioplastie du tronc commun distal. La Lettre du Cardiologue - n° 305 - janvier 1999 M A L A D I E de la partie moyenne ou distales du tronc commun. Les auteurs utilisent une technique d’inflation courte de 15 secondes, un stenting systématique qui peut être direct pour 15 % des patients ; le recours à une contrepulsion aortique est devenu rare. La technique du kissing est utilisée de façon systématique pour la reconstruction des lésions distales. L’abord du tronc commun ne pose pas de problème technique particulier. Les bons candidats à la chirurgie avec un bon VG et un bon lit d’aval ont des résultats excellents, avec un taux de réintervention de 21 % sans décès. En revanche, les mauvais candidats à la chirurgie ont un pronostic plus réservé, avec une mortalité de 9 %. C O R O N A I R E longues. L’ensemble des orateurs (Albiero, Milan ; Elezi, Munich ; Carrié, Toulouse ; Le Breton, Rennes ; Rankin, Vancouver) s’accordent pour conclure que l’implantation de prothèses longues avec le matériel disponible est un geste technique qui conduit à un taux de succès élevé. L’analyse des différentes séries montre que, plus que la longueur de la prothèse, c’est la longueur du segment initialement sténosé qui prédispose le plus à la resténose. Un stent unique long est préférable aux stents multiples, qui se chevauchent et qui peuvent laisser du matériel prolabé. Le taux d’occlusion est comparable à celui des prothèses plus courtes ; le taux de réintervention semble compris entre 15 et 20 %. Les lésions longues De nombreuses communications ont porté sur les résultats d’implantations de stents multiples ou longs pour traiter les lésions L. Maillard Les articles publiés dans “La Lettre du Cardiologue” le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction par tous procédés réservés pour tous pays. © mai1983 - EDIMARK S.A. Imprimé en France - Differdange S.A. - 95110 Sannois Dépôt légal 1er trimestre 1999 La Lettre du Cardiologue - n° 305 - janvier 1999 13