DOSSIER THÉMATIQUE Compte-rendu et analyse de l’ESMO 2012 Les cancers urologiques à l’ESMO 2012 Urological cancers at the ESMO Congress 2012 P. Beuzeboc* Cancers de la prostate Comment réinventer le traitement médical du cancer de la prostate métastatique résistant à la castration ? ◆ P.W. Kantoff a fait le point sur les immunothérapies. Il a notamment rappelé... ➤ Les données de l’essai de phase III IMPACT 3 (1) montrant un bénéfice en survie globale (SG) de 4,1 mois (HR = 0,579) mais également un délai jusqu’à apparition des douleurs en faveur du sipuleucel T. Mais qui pourra en bénéficier ? Il n’existe ni facteurs prédictifs ni critères d’efficacité. Les patients pour lesquels ce traitement est le plus approprié sont-ils ceux qui sont traités très précocement au stade métastatique asymptomatique, et qui sont lentement évolutifs ? ➤ Le développement de PROSTVAC ® -VF/ TRICOM™, avec une étude de phase III (étude GLOBAL, 1 200 patients prévus) en cours d’activation après les données de l’étude de phase II randomisée (2) retrouvant un bénéfice en SG mais pas en survie sans progression (SSP). Cette étude devrait commencer en France en 2013. ➤ Les données concernant l’ipilimumab avec 2 études de phase III en cours qui ont la SG comme critère de jugement. La prochaine étape pourrait être l’utilisation des anticorps immunoconjugués (ciblant PMSA et SLC44A4) ou de combinaisons thérapeutiques. ◆ O. Sartor a essayé de montrer la place de la chimiothérapie, dans une situation où tout change très vite. Actuellement, les décisions sont prises en fonction du docétaxel (avant ou après docétaxel), mais elles pourraient l’être après l’acétate d’abiratérone ou après l’enzalutamide (MDV3100) demain L’acétate d’abiratérone devant rapidement se positionner en traitement prédocétaxel, de nouvelles questions se posent : ➤ Quels sont les mécanismes potentiels de résistance ? ➤ Existe-t-il un degré élevé de résistance croisée pour les traitements ciblant l’axe du récepteur aux androgènes (RA) ? ➤ Quelles sont les activités de la chimiothérapie, et en particulier des taxanes, après un traitement par acétate d’abiratérone ? Les premières données sont assez contradictoires. Récemment, l’équipe du Royal Marsden (RoyaumeUni) [3] a rapporté des taux de réponse biologique plus faibles qu’attendu avec le docétaxel après acétate d’abiratérone (26 %, avec une médiane de délai avant progression de 4,6 mois) dans une série limitée. En revanche, une expérience multicentrique française (Albiges L et al., abstr. 951) a retrouvé un taux de réponse de 56 % (18 patients sur 32) avec le cabazitaxel après docétaxel et acétate d’abiratérone. Lors de la résistance à l’inhibition de CYP17, plusieurs mécanismes peuvent s’intriquer : induction de la stéroïdogenèse et variants d’épissage du RA avec une activation du RA ligand-indépendante (Mostagher EA et Montgomery B, Clin Cancer Res 2011) ? Il a été montré que l’expression de ces variants d’épissage dans les cancers de la prostate résistant à la castration (CPRCm) était associée à une courte survie (Hörnberg E, PloS One 2011). * Institut Curie, Paris. La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 9 - novembre 2012 | 461 Résumé Mots-clés Cancer de la prostate Cancer du rein métastatique Cancer papillaire Cancer de la vessie Cancer du testicule Summary In the field of urological tumors, the ESMO 2012 meeting has been marked by welldone “states of the art” and actualizations but also by the results of phase III trials such as GETUG15 and the docetaxel plus lenalidomide study in metastatic prostate cancer. For kidney cancer, the results of the randomized COMPARZ, I N TO R A C T, R E C O R D - 2 , INTORSECT and AXIS (overall survival) studies have been reported. French oral presentations have concerned the data of phase II trials evaluating the potential benefit of sunitinib and everolimus in papillary kidney cancer (SUPAP and RAPTOR studies) as well as those of a randomized phase II trial evaluating the interest of trastuzumab combined with chemotherapy in HER2 positive advanced bladdder tumors. Keywords Prostate cancer Metastatic kidney cancer Papillary cancer Bladder cancer Testicular cancer Cette année, le congrès de l’ESMO (European Society for Medical Oncology) a été marqué, en ce qui concerne l’urologie, non seulement par de très bonnes mises au point et actualisations mais aussi par les résultats de l’étude de phase III GETUG 15 dans les formes métastatiques hormonosensibles ainsi que par ceux du docétaxel associé au lénalidomide dans les cancers de la prostate métastatiques et résistants. Les données des études contrôlées COMPARZ, INTORACT, RECORD-2, INTORSECT et AXIS (survie globale) ont été rapportées dans les cancers du rein métastatiques. Celles des études de phase II concernant le sunitinib (SUPAP) et l’évérolimus (RAPTOR) en première ligne des cancers papillaires métastatiques ont fait l’objet de présentations françaises, de même que l’étude de phase II randomisée évaluant la place du trastuzumab en association avec une chimiothérapie dans les tumeurs urothéliales métastatiques avancées ou métastatiques. Deux autres questions importantes se posent : ➤ Le cabazitaxel est-il plus efficace que le docétaxel ? ➤ La dose optimale est-elle de 25 ou de 20 mg/m2 ? Deux études de phase III (FIRSTANA et PROSELICA), en cours, permettront d’y répondre. ◆ J.S. de Bono, dans un exercice de style difficile, a essayé de voir comment intégrer les nouvelles molécules : traitements séquentiels ou concomitants ? ➤ Toutes ont été développées essentiellement en monothérapie. J.S. de Bono a insisté sur l’importance de comprendre les mécanismes de résistance entre docétaxel, acétate d’abiratérone et enzalutamide ainsi que de développer des biomarqueurs pour guider les thérapeutiques et des stratégies et des combinaisons de traitement pour essayer de prévenir ou reverser l’émergence d’une résistance. Il faudra maximaliser la durée du contrôle tumoral en minimisant l’exposition à des traitements inefficaces et onéreux. ➤ L’association enzalutamide-acétate d’abiratérone présente-t-elle un intérêt ? Dans un proche avenir vont débuter des essais de ciblage concomitant du RA et de l’axe PI3K/AKT/ mTOR par l’acétate d’abiratérone et des inhibiteurs spécifiques. ➤ De nombreuses molécules sont en développement (figure 1). Les études précliniques devraient jouer un rôle important pour définir les meilleures combinaisons en association ou en traitements séquentiels à évaluer en clinique. ◆ C. Parker s’est concentré sur le ciblage de l’os : comment allons-nous utiliser les bisphosphonates, le dénosumab, le radium 223 ? Dans quel but ? Est-ce pour améliorer la SG, augmenter la qualité de vie, retarder les symptômes et les complications osseuses (Skeletal Related Events [SRE]), retarder les métastases osseuses ? L’acide zolédronique et le dénosumab améliorent la qualité de vie, diminuent et retardent les événements indésirables sévères mais n’améliorent pas la SG, au contraire du radium 223. 462 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 9 - novembre 2012 ◆ Impact des nouvelles hormonothérapies sur les douleurs et la qualité de vie : 2 présentations en session orale ➤ L’acétate d’abiratérone a un réel impact sur la douleur et l’état fonctionnel des patients présentant un CPRCm en préchimiothérapie (Basch E et al., abstr. 8950). ➤ De même, l’enzalutamide retarde le temps jusqu’au premier événement osseux (SRE) et la survenue des douleurs dans l’essai AFFIRM, comme l’ont bien montré K. Fizazi et al. (abstr. 8960). ◆ Autres présentations orales ➤ Le lénalidomide combiné à l’association docétaxel/prednisone classique n’apporte pas de bénéfice par rapport au docétaxel/prednisone selon une large étude de phase III (Petrylak D et al., abstr. LBA24) • Nouveaux antagonistes du récepteur aux androgènes : LBD* versus aminoterminal • Agents régulant négativement les récepteurs aux androgènes : anti-sens RA (shRNA) • SARD (dégradant les récepteurs aux androgènes) : ciblant LBD* • Inhibiteurs sélectifs non stéroïdiens de la 17,20-lyase • Inhibiteurs des Hsp (Heat shock protein) : Hsp90, Hsp27, clustérine • Inhibiteurs de HDAC : HDAC6/Hsp90 sélectivement • Inhibiteurs de PI3K/AKT/mTOR : GDC 0941, etc. • Inhibiteurs de RAF/MEK • Inhibiteurs multikinases : cabozantinib • Inhibiteur de SARC : dasatinib • Immunoconjugués • Inhibiteurs de PARP • Inhibiteurs d’IGF-1R • Antagonistes des gènes ETS * LBD : ligand binding domain. Figure 1. Nombreux agents en cours de développement. DOSSIER THÉMATIQUE ➤ Les résultats négatifs de l’essai GETUG/AFU 15 (Gravis G et al., abstr. 893O) [figure 2] Il s’agit de la première étude de phase III comparant une privation androgénique (ADT) avec ou sans docétaxel chez des patients métastatiques hormonosensibles. ➤ Il faut également relever les données concernant les facteurs prédictifs – Association entre la progression selon les critères du PCWG2 (Prostate Cancer Working Group 2) et la SG dans les CPRCm (Sonvpade G et al., abstr. 901PD) et, plus particulièrement, avec la rPFS (radiographic progression-free survival) selon ces critères dans l’étude COU-AA-302 évaluant l’acétate d’abiratérone avant traitement par docétaxel (Ryan C et al., abstr. 894O). – Association entre l’utilisation d’un corticostéroïde à l’inclusion dans l’étude AFFIRM et la survie. Les traitements prolongés par corticoïdes sont-ils délétères ? C’est ce que laisse penser l’analyse multivariée des données de l’étude de phase III AFFIRM (Scher H et al., abstr. 899PD) comparant enzalutamide et placebo après docétaxel. Pour les 30 % des patients qui étaient sous corticostéroïde à l’entrée, la médiane de SG était de 11 mois (IC95 : 10-13) ; elle n’était pas atteinte pour les autres. Cela doit faire réfléchir sur l’utilisation d’une corticothérapie à long terme dans les CPRCm. ➤ Parmi les nouvelles molécules en développement... – J.S. de Bono et al. (abstr. 897O) ont présenté les résultats déjà rapportés au congrès américain en oncologie clinique du cabozantinib (ciblant à la fois MET et VEGFR2 [Vascular Endothelial Growth Factor Receptor 2]) à la dose de 40 mg/j (au lieu de 100 mg/j). Dans les 2 études de phase III COMET-1 et COMET-2 qui vont être activées l’année prochaine, la dose choisie sera de 60 mg/j, avec des possibilités de diminution à 40 mg/j. – Concernant les nouvelles hormonothérapies, les premiers résultats de l’ODM-201 sont encourageants, dans l’essai de phase I/II ARADES (Massard C et al., LBA25_PR). – Les données de l’étude de phase II randomisée (Chi K et al., abstr. 900PD) évaluant l’OGX-427 avaient également été rapportées au congrès américain en oncologie clinique. L’OGX-427 est un antisens phosphorothioate de seconde génération qui inhibe l’expression d’Hsp27 (Heat shock protein 27). Les résultats très préliminaires de cette étude randomisée (1:1) testant l’OGX-427 (600 mg × 3 en dose de charge i.v. puis 1 000 mg/sem. i.v. × 36 semaines + prednisone 5 mg × 2/j versus prednisone aux mêmes doses avec possibilité de crossover à la progression) montrent des réponses biologiques (13 patients sur 22, soit 59 %) et cliniques prometteuses. À suivre. Cancers du rein métastatiques Traitement de première ligne ◆ Étude COMPARZ, randomisée (1:1), de phase III et de non-infériorité comparant pazopanib (800 mg/j ; n = 557) et sunitinib (50 mg/j ; n = 553) [Motzer R et al., LBA8_PR] Cette étude présentée en session orale plénière permet de conclure à une efficacité comparable des 100 80 Survie globale (%) Il s’agit de la huitième étude de phase III négative avec le docétaxel (après l’oblimersen, le GVAX, l’atrasentan, le zibotentan, le bévacizumab, le VEGF trap, le calcitriol à fortes doses). Décidément, le principe des associations avec la chimiothérapie est très décevant. Attendons encore les résultats avec le dasatinib, l’ipilimumab et l’OGX-010. 60 40 Médiane de suivi : 50 mois ; IC95 : 49-54 ADT + docétaxel : médiane 58,87 mois ; IC95 : 50,79-69,09 ADT : médiane 54,24 mois ; IC95 : 42,22-NR HR = 1,01 ; IC95 : 0,75-1,36 ; p = 0,9549 20 0 0 12 24 36 48 60 72 Mois après randomisation Patients à risque (n) 193 171 192 175 148 145 102 97 60 64 25 31 Alors que l’association de docétaxel à la privation hormonale (ADT + T) montre une amélioration de la SSP biologique, avec une médiane de 22,93 mois (19,55-28,39) versus 12,91 mois (11,93-17,71) pour l’hormonothérapie seule (HR = 0,72 ; IC95 : 0,57-0,91 ; p = 0,0052), il n’y a pas de différence significative en SG. Figure 2. GETUG/AFU 15 : survie globale. La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 9 - novembre 2012 | 463 DOSSIER THÉMATIQUE Compte-rendu et analyse de l’ESMO 2012 Probabilité d’événement (%) 100 Les cancers urologiques à l’ESMO 2012 Médianes selon Kaplan-Meier Évérolimus + bévacizumab : NA Interféron α + bévacizumab : 25,86 mois 80 60 40 Évérolimus + bévacizumab (n/N = 74/182) Interféron α + bévacizumab (n/N = 83/183) 20 ➤ La deuxième, RECORD-2, de phase II (n = 365), compare évérolimus + bévacizumab à interféron α + bévacizumab (Ravaud A et al., abstr. 783O) [figure 3]. Après ces essais négatifs, auxquels il faut ajouter l’essai français TORAVA (4), on peut conclure que le traitement séquentiel reste la référence et que les combinaisons demeurent au stade des investigations. Sont à suivre, néanmoins, les associations avec les inhibiteurs de PD-1 (Programmed cell Death protein 1). 0 0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 57 67 40 43 19 23 7 11 1 4 0 0 Mois Patients à risque (n) 182 173 158 149 128 108 183 170 161 149 135 119 82 92 Figure 3. RECORD-2 : survie globale. Tableau I. Comparatif des essais avec sorafénib comme comparateur en deuxième ligne. Essai/agent Survie sans progression (mois) Survie globale (mois) INTORSECT Temsirolimus versus sorafénib 4,8 versus 3,91 12,27 versus 16,64 AXIS Axitinib versus sorafénib 4,8 versus 3,4 15,27 versus 16,5 2 molécules, avec des taux de réponse (31 versus 25 %) et des médianes de SSP (10,5 versus 10,2 mois) et de SG (28,4 versus 29,3 mois à l’analyse intermédiaire) comparables. Les pourcentages de SSP à 48 semaines évaluée par une revue indépendante sont respectivement de 39,6 et 43,3 % (HR = 1,047 ; IC95 : 0,898-1,220). Il a été constaté moins de cas de fatigue, de mucites et de syndromes mains-pieds et une meilleure qualité de vie avec le pazopanib, mais plus de perturbations hépatiques. Des réductions de doses ont été nécessaires dans 44 % des cas avec le pazopanib, et dans 51 % avec le sunitinib. Traitement de deuxième ligne (tableau I) ◆ Présentée en session orale, l’étude INTORSECT, de phase III, est positive : elle montre un avantage en SG en faveur du sorafénib (400 mg × 2/j ; n = 253) comparé au temsirolimus (25 mg/sem. i.v. ; n = 256) [Hutson T et al., LBA22_PR] Alors que le temsirolimus avait montré son efficacité en première ligne dans les formes à mauvais pronostic, son intérêt en deuxième ligne restait à évaluer. Le sorafénib, au moment du développement de l’étude, était un comparateur acceptable. Le but était une amélioration de la SSP de 33 % : le résultat a été contraire, une amélioration significative de la SG avec le sorafénib étant constatée (médiane : 12,27 versus 16,64 mois ; HR = 1,31 ; IC95 : 1,05-1,63 ; p = 0,014). ◆ Données en SG de l’étude de phase III AXIS comparant axitinib et sorafénib (Motzer R et al., abstr. 793PD) L’axitinib avait montré un avantage en termes de SSP. Les résultats de SG ne montrent pas de différences avec, respectivement, des médianes à 20,1 mois (IC95 :16,7-23,4) pour l’axitinib et à 19,2 mois (IC95 : 17,5-22,3) pour le sorafénib. Ces résultats posent clairement la question de savoir si la SSP est un bon “surrogate marker” de la SG en deuxième ligne. Lignes ultérieures ◆ Deux études randomisées négatives évaluant des combinaisons antiangiogénique + anti-mTOR ont été présentées en session orale ➤ La première étude, INTORACT, de phase IIIb (791 patients inclus) compare temsirolimus + bévacizumab à interféron α + bévacizumab (Rini B et al., LBA21_PR). 464 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 9 - novembre 2012 D. McDermott et al. (abstr. 784O) ont présenté les résultats préliminaires d’une cohorte de 34 cas de cancer du rein inclus dans une étude d’activité et de tolérance évaluant l’anti-PD-1 BMS-936558, avec quelques réponses durables aux 2 doses de 1 mg/kg et 10 mg/kg. DOSSIER THÉMATIQUE Qualité de vie et tolérance ◆ Dans l’étude PISCES, la qualité de vie, de préférence en double aveugle avec crossover, paraît meilleure avec le pazopanib qu’avec le sunitinib (Cella D et al., abstr. 792PD). ◆ Comparaison de la tolérance du tivozanib et du sorafénib dans une étude de phase III ayant inclus 517 patients (Eisen T et al., abstr. 795PD). Les arrêts de traitement dus à des événements indésirables liés au traitement ont été de 4,2 % pour le tivozanib et 5,4 % pour le sorafénib ; les réductions de dose ont été de 11,6 et 42,8 %, respectivement. Il convient de noter que des toxicités de bas grade de longue durée sont souvent pires qu’une toxicité de haut grade courte (tableau II). Cancers papillaires ◆ A. Ravaud et al. (abstr. 797PD) ont rapporté les résultats de l’étude de phase II SUPAP du GETUG (Groupe d'étude des tumeurs urogénitales) et du GEP (Group of Early Phase trials) évaluant le sunitinib en première ligne dans les tumeurs papillaires de type I et II. L’âge moyen était de 64 ans. Selon les critères du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center (États-Unis), le pronostic était favorable pour 22 % des patients, intermédiaire pour 61 % et mauvais pour 17 % (et indéterminé pour 7 patients). Le taux de réponse a été de 12 %, la SSP de 5,6 mois (5,1-7,4), la SG de 12,5 mois (8,2-17,8). Tableau II. Comparaison des tolérances du tivozanib et du sorafénib. Tivozanib (n = 259) Sorafénib (n = 257) Tout événement indésirable sévère lié au traitement 68 83 Hypertension (%) 42 31 Dysphonie (%) 18 4 Diarrhée (%) 18 28 Syndrome mains-pieds (%) 13 53 de la vessie constitue une cible attractive pour la découverte de biomarqueurs et la recherche translationnelle du fait de l’accès facile à du tissu de résection, il n’y a malheureusement pas de nouvelles cibles validées, ni de biomarqueurs prédictifs en situation métastatique. Aucune altération simple “druggable” ne caractérise la majorité des tumeurs, qui le sont, en revanche, par une fréquence faible d’altérations sur des gènes multiples. Il est donc difficile de conduire des essais pour démontrer une efficacité clinique et faire la preuve de concept de l’intérêt d’un ciblage spécifique. Néanmoins, parmi les cibles potentielles, il faut noter HER2, PIK3CA/ mTOR/PTEN/AKT, CDK4/CCND1, FGFR3 et BRAF. L’incidence de l’amplification de HER2 est de 6 à 11 %. ◆ L’essai de phase II randomisé ASPEN va comparer, en première ligne, dans les cancers papillaires, sunitinib et évérolimus ; le critère de jugement principal sera la SSP. ◆ S. Oudard (abstr. 786O) a présenté les résultats d’une étude française de phase II randomisée, interrompue prématurément pour des problèmes de recrutement, comparant en première ligne, dans les cancers urothéliaux avancés ou métastatiques HER2+, une chimiothérapie par gemcitabine/sel de platine avec ou sans trastuzumab. Il aura fallu tester 563 tumeurs pour en trouver 61 HER2+ (FISH+ ou IHC3+) et randomiser 61 patients. Les SSP ont été de 8,3 mois (4,7-10,6) avec le trastuzumab versus 10,5 mois (4,3-10,4) sans. Les médianes de SG ont été respectivement de 15,7 mois et 14,2 mois. Relevons que le sous-groupe traité par cisplatine + gemcitabine + trastuzumab présente une médiane de SG de 33,1 mois (tableau III). ◆ L’avenir se tourne aussi vers de nouvelles molécules comme le forétinib (anti-MET/VEGFR2). T.K. Choueiri, en 2011, avait rapporté 70 % de bénéfice clinique. ◆ En deuxième ligne, G. Sonpavde et al. (abstr. 787O) ont validé la SSP à 6 mois comme facteur prédictif de la SG à 12 mois. ◆ B. Escudier et al. (abstr. 798PD) ont présenté les résultats de l’étude de phase II RAPTOR évaluant l’évérolimus en première ligne, montrant une SSP de 7,3 mois (5-12). Cancers de la vessie ◆ Les nouvelles technologies génomiques ont transformé la recherche sur le cancer. Si le cancer ◆ C. Booth et al. (abstr. 788O) ont rapporté des données canadiennes à partir d’un registre du cancer de l’Ontario concernant les traitements adjuvants (ACT) et néo-adjuvants (NACT) réalisés entre 1994 et 2008 dans une cohorte de 2 738 cas La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 9 - novembre 2012 | 465 DOSSIER THÉMATIQUE Compte-rendu et analyse de l’ESMO 2012 Les cancers urologiques à l’ESMO 2012 Tableau III. Cancers urothéliaux HER2. Étude de phase II randomisée comparant gemcitabine + cisplatine ou carboplatine avec et sans trastuzumab : efficacité. Bras A (n = 29) Survie sans progression médiane, mois (IC95) Bras B (+ trastuzumab) [n = 32] p (bilatéral) 0,69 10,2 (5,3-13,4) 8,3 (5,9-10,6) Chimiothérapie à base de cisplatine 6,4 (2,3-12,8) 10,6 (5,8-22,1) Chimiothérapie à base de carboplatine 10,2 (3,9-24,4) 6,4 (1,5-8,6) Survie globale médiane, mois (IC95) 15,7 (12,3-22,8) 14,2 (9,5-28,1) Chimiothérapie à base de cisplatine 14,5 (6,7-30,9) 33,1 (12,4-50,0) Chimiothérapie à base de carboplatine 15,7 (10,4-23,7) 9,4 (1,5-14,6) 0,078 0,51 0,0078 0,39 Taux de réponse objective, n (%) Réponse complète 6 (20,7) 7 (21,9) Réponse partielle 13 (44,8) 10 (31,3) Stabilisation 6 (20,7) 7 (21,9) Progression 4 (13,8) 4 (12,5) de tumeurs envahissant le muscle. L’utilisation de traitements néo-adjuvants a été assez stable (4 %), alors que, au cours du temps, celle de traitements adjuvants augmentait de 16 % (1994-1998), 19 % (1999-2003) et 23 % (2004-08). Les traitements étaient à base de cisplatine et carboplatine dans 83 % et 13 % des cas, respectivement. Néanmoins, entre 2004 et 2008, seuls 28 % des patients ont eu un traitement périopératoire. Les facteurs associés à un plus grand recours à la chimiothérapie périopératoire étaient le plus jeune âge, les moindres comorbidités, la chirurgie dans des Comprehensive Cancer Centers ainsi que des paramètres pathologiques (T3/T4, atteinte ganglionnaire, présence d’emboles vasculaires). Globalement, la survie spécifique à 5 ans était seulement de 34 % (IC95 : 32-36), inférieure à celle rapportée dans les essais thérapeutiques. En dépit d’une gravité de présentation plus importante (83 versus 68 % de T3/T4 ; 61 versus 17 % de N+), les cas traités par traitement adjuvant avaient un pronostic comparable aux autres (SG à 5 ans de 30 % dans les 2 groupes). Les auteurs ont conclu que le traitement adjuvant apportait une amélioration substantielle en SG et survie spécifique. Cancer du testicule ◆ F. Selle (abstr. 789O) a présenté, en session orale, les résultats de l’étude de phase II multicentrique française TAXIF II. Celle-ci évaluait 2 cycles d’épirubicine + paclitaxel, suivis de 3 cycles de chimiothérapies à hautes doses (1 de paclitaxel/ thiotépa puis 2 d’ifosfamide + étoposide + carboplatine), avec support de cellules souches dans les formes non réfractaires en rechute (après 2 lignes pour les séminomes, 1 ou 2 lignes pour les tumeurs germinales non séminomateuses). Sur les 45 patients traités, seuls 29 ont reçu la totalité du traitement. Avec un recul médian de 26 mois, la SSP à 2 ans était stable à 50 % (IC95 : 32-67), et la SG à 2 ans était de 71 % (IC95 : 52-83). ◆ Dans les formes réfractaires, D.I. Quinn et al. (abstr. 790O) ont rapporté l’expérience californienne de l’association gemcitabine + oxaliplatine + paclitaxel toutes les 2 semaines chez 30 patients dont le cancer était réfractaire. Une réponse complète des marqueurs a été obtenue dans 29 % des cas ; 5 patients ont pu bénéficier d’une exérèse complète des lésions résiduelles. ■ La médiane de SG était de 16,7 mois. Références bibliographiques 1. Kantoff PW. N Engl J Med 2010. 2. Kantoff PW. J Clin Oncol 2010. 466 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 9 - novembre 2012 3. Mazynski J. Ann Oncol 2012. 4. Negrier S. Lancet Oncology 2012.